CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 16 janvier 2019, n° 16-25655
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Lajoze (SARL)
Défendeur :
Sport 2000 France (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Luc
Conseillers :
Mmes Mouthon Vidilles, Comte
Avocats :
Mes Créhange, Lankry, Ohana, Singer
Faits et procédure
La société Lajoze, gérée par M. Arnaud X est spécialisée dans le commerce de détail d'articles de sport en magasin spécialisé.
La société Sport 2000 France (ci-après Sport 2000) exploite sous ce nom un réseau de franchise ayant pour activité la vente de chaussures de mode inspirées du domaine du sport. Elle était titulaire de la marque " S2 ".
Le 18 mai 2010, M. X a réservé un local commercial au à Montpellier, dans le but d'y vendre des chaussures de mode inspirées du domaine du sport et d'intégrer le réseau de franchise " S2 ".
Le 5 juin 2010, M. X s'est rapproché de la société Sport 2000 et a déposé un dossier de candidature en vue d'intégrer le réseau de franchise " S2 ".
Le 6 décembre 2010, M. X a créé et immatriculé à Montpellier la société Lajoze en tant qu'associé unique, dans le but d'exploiter son activité de vente sous l'enseigne " S2 ".
Les 7 et 16 janvier 2011, la société Lajoze a respectivement signé avec la société Sport 2000 France, un contrat de partenariat " S2 " et un contrat de facturation centralisée adhérent.
Grâce à ce contrat de facturation centralisée, alors que l'adhérent passe commande auprès de ses fournisseurs, une banque (en l'occurrence DZB Bank) se porte caution solidaire et paie directement les fournisseurs de l'adhérent, qui devra alors régler l'établissement financier à échéance (jusqu'à 120 jours). Cependant, la société Sport 2000 reste ducroire de ses adhérents à l'égard de la DZB Bank, en cas de défaillance de ces derniers auprès de cet établissement financier. En vertu de ce contrat de facturation centralisée, M. X s'est porté caution solidaire à hauteur de 33 000 euros.
Pour financer la création de ce magasin, la société Lajoze a souscrit un emprunt de 140 000 euros auprès du Crédit Coopératif et M. X aurait souscrit deux emprunts auprès de membres de sa famille, l'un de 140 000 euros et l'autre de 60 000 euros.
Le 10 mars 2011, la société Lajoze a signé l'acte définitif d'acquisition du droit au bail pour les locaux mentionnés ci-dessus.
Le 27 avril 2011, la société Lajoze a ouvert son magasin sous l'enseigne " S2 ".
Cependant, quelques mois après son ouverture, la société Lajoze a rencontré des difficultés.
Le 30 mai 2013, le président du tribunal de grande instance de Montpellier a prononcé la résiliation du bail commercial dont bénéficiait la société Lajoze pour défaut de paiement des loyers.
Le 31 mai 2013, la société DZB Bank, partie à la convention de facturation centralisée, non attraite à la présente cause, a mis en demeure M. X, en sa qualité de caution de la société Lajoze, de lui payer la somme de 33 000 euros.
En novembre 2013, la société Lajoze a cessé ses activités, la régularisation des formalités ayant eu lieu le 20 février 2014 auprès du tribunal de commerce de Montpellier.
La société Lajoze étant débitrice de la DZB Bank, au 31 décembre 2013, à hauteur de 80 044,33 euros, la société Sport 2000 a procédé, en sa qualité de ducroire, au paiement, entre les mains de cette banque, pour le compte de la société Lajoze, à ce montant.
Le 29 décembre 2014, le Crédit Coopératif, non attrait à la présente cause, a assigné la société Lajoze ainsi que M. X en qualité de caution, en vue de réclamer le paiement des sommes dues au titre de l'emprunt à hauteur de 140 000 euros, ainsi que le solde débiteur du compte courant.
Par jugement du tribunal de commerce de Monpellier du 23 février 2015 publié le 10 mars 2015, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l'encontre de la société Lajoze, Me Y étant nommé mandataire liquidateur.
Par courrier du 27 avril 2015, la société Sport 2000, s'estimant créancière directe de la société Lajoze au titre de cotisations impayées et créancière subrogée du contrat de facturation centralisé " DZB ", a déclaré sa créance au passif de la société Lajoze pour un montant de 85 152,97 euros.
Considérant que des manquements de la société Sport 2000 France étaient à l'origine de la détérioration de la situation de la société Lajoze, cette dernière ainsi que M. X ont, par exploit du 31 juillet 2014, assigné la société Sport 2000 France devant le tribunal de commerce d'Evry, afin de voir prononcer, à titre principal, la nullité du contrat de partenariat pour vice du consentement et obtenir réparation.
Me Y, ès qualités, s'est porté par la suite intervenant volontaire dans la présente cause.
Par jugement du 6 octobre 2016, le tribunal de commerce d'Evry a, sous le régime de l'exécution provisoire :
- débouté la société Lajoze, M. X, ainsi que Maître Y ès qualités de liquidateur de la société Lajoze de l'ensemble de leurs demandes,
- condamné conjointement et solidairement Maître Y ès qualités de liquidateur de la société Lajoze et M. X à payer à la société Sport 2000 France la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- débouté la société Sport 2000 France de l'ensemble de ses autres demandes,
- dit que les entiers dé'pens en ce compris les frais de greffe seront liquides à la somme de 104,52 euros TTC.
Par déclaration du 19 décembre 2016, M. X, la société Lajoze et Me Y ès qualitès de mandataire liquidateur de la société Lajoze ont interjeté appel du jugement du tribunal de commerce d'Evry du 6 octobre 2016.
Vu les dernières conclusions de M. X, de la société Lajoze et de Me Y ès qualitès de mandataire liquidateur de la société Lajoze, appelants, déposées et notifiées le 9 octobre 2018, par lesquelles il est demandé à la cour, au visa des articles L. 330-3 et R. 330-1 du Code de commerce et des articles 1108, 1109, 1110, 1116, 1134, 1382, 1147 anciens du Code civil de :
I- dire que le document d'informations précontractuel fourni par la société Sport 2000 France ne comprend pas les informations requises par les articles L. 330-3 et R. 330-1 du Code de commerce,
* disant que ce document ne concerne pas le marché pertinent,
* disant que ce document ne communique aucune donnée actuelle ni les perspectives de développement dudit marché,
* disant que ce document ne donne aucune information sur le marché local,
- dire que le document intitulé " Présentation S2 " ne peut être considéré comme un DIP, faute de contenir les informations requises par les dispositions des articles L. 330-3 et R. 330-1 du Code de commerce,
- dire que les prévisionnels d'activités communiqués par le Franchiseur sont dénués de sincérité,
- dire que le franchisé ne pouvait, en l'état de l'absence d'informations sur le marché local effectuer une étude de marché,
- dire que le Franchiseur dispensait d'ailleurs le franchisé de toutes recherches et de toute expérience préalable,
- dire que le franchiseur a validé l'un des emplacements retenus pour implanter le commerce,
- dire que la société Lajoze et M. X étaient parfaitement néophytes en matière de commerce et plus précisément en matière de vente de chaussures,
- dire en conséquence que le consentement de la société Lajoze à la conclusion du contrat de partenariat a été vicié par le dol et par l'erreur sur les qualités substantielles du contrat,
par voie de conséquence :
- prononcer l'annulation du contrat de partenariat conclu entre la société Lajoze et la société Sport 2000 France,
- prononcer l'annulation de l'engagement de mise au concept et de fourniture d'agencement,
- condamner la société Sport 2000 France à payer à la société Lajoze la somme de 27 300,40 euros au titre des restitutions dues au titre de la nullité des contrats susvisés,
- condamner la société Sport 2000 France à payer à la société Lajoze la somme de 200 000 euros pour perte de chance de faire un meilleur empli des fonds utilisés,
II- dire que la société Sport 2000 France a validé le projet d'implantation présenté par M. X sans égard à la pertinence de l'emplacement proposé et du marché local,
en conséquence,
- condamner la société Sport 2000 France à payer à la société Lajoze la somme de 148 444,42 euros à titre de dommages intérêts,
III- dire que la société Sport 2000 France a manqué à ses obligations précontractuelles d'information et à ses obligations d'assistance et de suivi, en conséquence,
a) si par extraordinaire, le contrat de partenariat et les contrats liés ne faisaient pas l'objet d'une annulation, condamner la société Sport 2000 France à payer la somme de 27 300,40 euros à la société Lajoze à titre de dommages intérêts, et la somme de 200 000 euros au titre de la perte de chance de faire un meilleur emploi des fonds utilisés,
b) - condamner la société Sport 2000 France à payer à M. X la somme de 200 000 euros au titre des sommes apportées à la société pour l'exercice par la société Lajoze de son activité sous l'enseigne S2,
- condamner la société Sport 2000 France à payer à M. X la somme de 33 000 euros au titre de la perte de chance de ne pas être actionné en qualité de caution par la société DZB Bank GmbH,
- condamner la société Sport 2000 France au paiement d'une somme de 15 000 euros au titre du préjudice moral subi par M. X,
c) condamner la société Sport 2000 France à payer la somme de 127 690 euros à la société Lajoze à titre de dommages intérêts, en réparation de l'inexécution de ses obligations contractuelles d'assistance et de suivi,
IV- en tout état de cause,
- condamner la société Sport 2000 France à payer la somme de 2 000 euros à la société Lajoze et la somme de 2 000 euros à M. X en application de l'article 700 du CPC,
- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir, cette mesure étant nécessaire et compatible avec le présent litige,
- condamner la société Sport 2000 France aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
Vu les dernières conclusions de la société Sport 2000 France, intimée, déposées et notifiées le 10 mai 2017 par lesquelles il est demandé à la cour de :
- confirmer le jugement du tribunal de commerce d'Evry en ce qu'il a débouté les appelants de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
- condamner conjointement et solidairement Maître Y ès qualités de mandataire liquidateur de la société Lajoze et M. X à payer solidairement à la société Sport 2000 France la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;
SUR CE, LA COUR,
Sur la nullité du contrat de partenariat
Les appelants demandent à la cour l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il les a déboutés de leur demande de nullité du contrat de partenariat pour dol et erreur. Ils invoquent une absence d'information sur l'état général et local du marché dans le document d'information précontractuelle qui leur a été remis, l'absence de sincérité des prévisionnels qui leur ont été communiqués par le franchiseur et le fait que le local validé par le franchiseur était en réalité très mal situé car en proximité directe avec des entreprises préexistantes qui drainaient la majorité des clients sur la zone de chalandise.
La société Sport 2000 demande à la cour la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a débouté les appelants de leur demande de nullité du contrat de partenariat. Elle soutient qu'elle n'a pas vicié le consentement du franchisé car elle lui a remis un document d'information précontractuelle présentant le marché du sport, que les prévisionnels ont été établis de manière contradictoire, qu'il n'est pas démontré qu'ils étaient mensongers et qu'elle n'a pas validé le choix du local par le franchisé. Par ailleurs, elle soutient que la société Lajoze a bénéficié d'un délai de sept mois qu'elle juge suffisant pour prendre sa décision définitive d'adhésion en connaissance de cause.
En application des dispositions des articles 1108 et 1109 anciens du Code civil dans leur rédaction applicable, le consentement de la partie qui s'oblige est une condition essentielle de la validité d'une convention et il n'y a point de consentement valable si ce consentement n'a été donné que par erreur ou surpris par dol. L'article 1110 ancien du même Code dispose que l'erreur n'est une cause de nullité que si elle porte sur la substance même de la chose qui en est l'objet et l'article 1116 ancien précise que le dol est une cause de nullité lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté, qu'il ne se présume pas et qu'il doit être prouvé.
Par ailleurs, l'article L. 330-3 du Code commerce dispose que " toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause ". Ce document d'information précontractuelle, " dont le contenu est fixé par décret, précise notamment, l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise, l'état et les perspectives de développement du marché concerné, l'importance du réseau d'exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités ".
Selon l'article R. 330-1 du Code commerce, le DIP doit contenir : " (....) 4° La date de la création de l'entreprise avec un rappel des principales étapes de son évolution, y compris celle du réseau d'exploitants, s'il y a lieu, ainsi que toutes indications permettant d'apprécier l'expérience professionnelle acquise par l'exploitant ou par les dirigeants. Les informations mentionnées à l'alinéa précédent peuvent ne porter que sur les cinq dernières années qui précèdent celle de la remise du document. Elles doivent être complétées par une présentation de l'état général et local du marché des produits ou services devant faire l'objet du contrat et des perspectives de développement de ce marché. Doivent être annexés à cette partie du document les comptes annuels des deux derniers exercices ou, pour les sociétés dont les titres financiers sont admis aux négociations sur un marché réglementé, les rapports établis au titre des deux derniers exercices en application du III de l'article L. 451-1-2 du Code monétaire et financier ; 5° Une présentation du réseau d'exploitants qui comporte : a) La liste des entreprises qui en font partie avec l'indication pour chacune d'elles du mode d'exploitation convenu ; b) L'adresse des entreprises établies en France avec lesquelles la personne qui propose le contrat est liée par des contrats de même nature que celui dont la conclusion est envisagée ; la date de conclusion ou de renouvellement de ces contrats est précisée ; Lorsque le réseau compte plus de cinquante exploitants, les informations mentionnées à l'alinéa précédent ne sont exigées que pour les cinquante entreprises les plus proches du lieu de l'exploitation envisagée ; c) Le nombre d'entreprises qui, étant liées au réseau par des contrats de même nature que celui dont la conclusion est envisagée, ont cessé de faire partie du réseau au cours de l'année précédant celle de la délivrance du document. Le document précise si le contrat est venu à expiration ou s'il a été résilié ou annulé ; d) S'il y a lieu, la présence, dans la zone d'activité de l'implantation prévue par le contrat proposé, de tout établissement dans lequel sont offerts, avec l'accord exprès de la personne qui propose le contrat, les produits ou services faisant l'objet de celui-ci ; 6° L'indication de la durée du contrat proposé, des conditions de renouvellement, de résiliation et de cession, ainsi que le champ des exclusivités. Le document précise, en outre, la nature et le montant des dépenses et investissements spécifiques à l'enseigne ou à la marque que la personne destinataire du projet de contrat engage avant de commencer l'exploitation ".
Il résulte de la combinaison des articles susvisés qu'un manquement à l'obligation d'information précontractuelle prévue à l'article L. 330-3 du Code de commerce n'entraîne la nullité du contrat de franchise que s'il a eu pour effet de vicier le consentement du franchisé.
Sur le Document d'Information Précontractuelle et l'état général et local de marché
Les appelants soutiennent que le Document d'Information Précontractuelle ne contient aucune information relative à l'état général du marché de la vente de chaussure de sport, mais seulement une description du marché du sport en général qui n'est pas relatif aux produits ou services objets du contrat de partenariat " S2 ". Elle invoque aussi que ce document ne contenait aucune information sur l'état du marché local qui aurait pu lui permettre de réaliser une étude de marché et de se rendre compte que l'emplacement validé par le franchiseur se trouvait en réalité dans une zone très concurrentielle. Elle reproche enfin au franchiseur que les données afférentes au marché présenté figurant dans ce document n'étaient pas actuelles et n'apportaient aucun élément sur les perspectives de développement du marché.
En réplique, la société Sport 2000 soutient que figure, dans le Document d'information précontractuelle remis au franchisé le 14 juin 2010, une présentation du marché général du sport et qu'il n'existe pas de marché spécifique de la chaussure de sport tendance et mode, mais uniquement un segment de marché pour lequel les acteurs et leaders sont les mêmes que dans le marché général du sport. Elle soutient aussi que figurait dans ce document une présentation spécifique du réseau S2 " l'enseigne chaussures du Groupe Sport 2000 ". De plus, elle fait valoir que la société Lajoze avait une parfaite connaissance de l'environnement local commercial et a décidé seule du choix de l'emplacement, sans réaliser d'étude de marché dont l'initiative lui appartenait. Elle invoque enfin que pesait sur M. X un devoir général de se renseigner et de contacter d'autres membres du réseau, mais aussi par l'intermédiaire de son frère, exploitant un point de vente à l'enseigne S2 à Nancy.
Il n'est pas contesté par les parties que le document d'information précontractuelle (pièce 5 des appelants) a bien été remis par la société Sport 2000 à la société Lajoze préalablement à la conclusion du contrat de partenariat, même si celui-ci n'est ni daté ni signé. De plus, le franchisé a confirmé avoir reçu un Document d'Information Précontractuelle complet conforme à l'article L. 330-3 du Code de commerce lorsqu'il a signé, le 16 janvier 2011, le contrat de franchise.
Ce document contient bien un état général du marché du sport suffisant pour que M. X puisse prendre connaissance des différents acteurs opérant sur ce marché et de l'état de celui-ci au moment où il a signé le contrat de partenariat. En effet, le DIP fait état d'un réseau d'affiliés Sport 2000 de 589 magasins et liste les différentes ouvertures et fermetures de magasins ayant eu lieu en 2009, tout en précisant leur appartenance aux différentes enseignes du réseau Sport 2000 (Sport 2000, S2, Mondovélo), aux différents réseaux (plaine ou montagne) et leur localisation. De plus, les informations sur le marché datant de 2008 et de 2009 ne nécessitaient pas d'être actualisées et étaient suffisamment récentes pour être pertinentes, le franchiseur ayant remis ce DIP en juin 2010. Le fait que le franchisé ait signé le contrat de franchise six mois plus tard, en juin 2011, ne saurait être suffisant pour estimer que le franchiseur a violé son obligation d'information précontractuelle.
En revanche, l'article L. 330-3 du Code de commerce met à la charge du franchiseur l'obligation de présenter un état et les perspectives de développement du marché concerné. La présentation de l'état local du marché comporte, comme pour son état national, la définition du marché et la description de son état de manière à permettre au futur franchisé de s'engager en connaissance de cause. La présentation sincère du marché local constitue une obligation déterminante et essentielle du franchiseur.
Or le DIP, en l'espèce, ne contient aucun état du marché local, et le franchiseur ne démontre pas que le document intitulé " Présentation S2 - L'enseigne chaussure du groupe 2000 " ait bien été transmis au franchisé avec le DIP et, en tout état de cause, ce document ne contient aucune description du marché local.
Mais l'absence de présentation par le franchiseur d'un état du marché local dans le DIP ne constitue pas en soi un motif d'annulation du contrat de franchise pour dol, la société franchisée ne démontrant pas en quoi cette absence l'aurait conduite à se méprendre sur sa situation. Ce grief sera donc écarté.
Sur la remise de prévisionnels excessifs ayant entraîné une erreur substantielle sur la rentabilité
Les appelants font valoir que la société Sport 2000 a communiqué un prévisionnel d'activité irréaliste, puisque la société Lajoze n'a pu atteindre que 39 % de l'objectif fixé au cours de la première année et 59 % de l'objectif au cours de la seconde année, ce qui constitue une erreur grossière d'évaluation dépassant la marge habituelle d'erreur. Or, selon eux, c'est sciemment que le franchiseur a fourni des informations non sincères et erronées en gonflant la marge commerciale à 47 % pour que le prévisionnel présente un léger bénéfice et ce, alors que la marge commerciale attendue pour les magasins S2 se situe entre 39 et 43 %, afin de tromper son futur franchisé.
Si le franchiseur n'est pas tenu de remettre un compte d'exploitation prévisionnel au candidat à la franchise, aux termes du 6° de l'article R. 330-1 du Code de commerce, le document d'information précontractuelle doit contenir " la nature et le montant des dépenses et investissements spécifiques à l'enseigne ou à la marque que la personne destinataire du projet de contrat engage avant de commencer l'exploitation ". Il appartient ensuite à chaque franchisé d'établir son compte prévisionnel à partir de ces données. En revanche, si le franchiseur remet un compte d'exploitation, il doit donner des informations sincères et vérifiables.
En l'espèce, la société Sport 2000 a communiqué des comptes prévisionnels d'activité sur 3 ans. Alors qu'il était prévu dans le prévisionnel pour les deux premières années, 2011 et 2012 la réalisation de chiffres d'affaires de 355 000 euros et 391 000 euros, la société Lajoze a enregistré des chiffres d'affaires de 114 742 euros sur l'exercice de 2011 ayant duré 13 mois et de 183 140 euros sur l'exercice de 2012 ayant duré 12 mois, soit des chiffres sans commune mesure avec les prévisions. Mais s'il apparaît que ces chiffres réalisés par le franchisé sont très éloignés de la tendance générale qui se dégage du document " Présentation S2 - L'enseigne chaussure du groupe Sport 2000 " communiqué à tous les futurs franchisés et que la société Sport 2000 soutient avoir transmis à la société Lajoze, qui prévoit un chiffre d'affaires moyen au m2 de 6 000 euros, soit un chiffre d'affaires moyen de 240 000 euros pour un magasin ayant une surface de vente de 40 m2 tel que celui de la société Lajoze, la société Sport 2000 relève à juste titre que les chiffres prévisionnels ont été établis de manière contradictoire, sur la base d'échanges avec son futur franchisé et sur la base de ratios et critères financiers au titre desquels aucune erreur grossière n'a été relevée et que la différence entre les chiffres prévisionnels et les chiffres réels résulte des différents aléas de la vie des affaires et des capacités commerciales et de gestion de son franchisé, les appelants ne démontrant pas le caractère mensonger des précisions données, la seule confrontation des résultats effectifs aux prévisions ne pouvant suffire à caractériser le dol ou l'erreur sur la rentabilité.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris, d'une part, en ce qu'il a estimé que la société Sport 2000 n'avait pas trompé la société Lajoze sur les conditions réelles dans lesquelles elle avait contracté, et ne s'est pas rendue coupable d'un dol ayant vicié le consentement de celle-ci, et, d'autre part, en ce qu'il a rejeté la demande de nullité du contrat de franchise.
Sur le choix du local
Les appelants soutiennent que la société Sport 2000 a validé le choix de l'emplacement à la suite d'une visite courant avril 2010, alors que celui-ci était mal placé, se trouvant sur une zone très concurrentielle, dont elle ne pouvait se rendre compte, ne disposant pas des informations nécessaires pour réaliser une étude de marché. Ils concluent que le franchiseur n'a pas rempli son rôle d'assistance qui était contractuellement prévu et qui constitue une obligation essentielle du franchiseur, en validant à la légère le projet soumis, sans prendre en considération ni le marché local, ni le site d'implantation du magasin, ni la concurrence.
En réplique, la société Sport 2000 soutient qu'elle n'a pas validé le choix du local, et qu'elle n'a réalisé qu'une simple visite du local. Elle estime que le choix de l'emplacement a été fait uniquement par le franchisé qui souhaitait s'implanter en centre-ville et n'a pas été dicté par le franchiseur. Elle conclut donc que ce choix ne peut caractériser un dol, puisqu'il n'y a eu aucune manœuvre du franchiseur pour déterminer le franchisé à s'engager sur un local que le franchisé avait trouvé et réservé tout seul.
Si la société Sport 2000 prétend qu'elle ne serait pas intervenue dans le choix et la validation du local, il ressort d'une part du document d'information précontractuelle que " Le service développement apporte non seulement une aide à tous ceux qui souhaitent rejoindre l'enseigne mais également aux affiliés du réseau qui aspirent à se développer (recherche de nouveaux sites, études de marché, montage du dossier CDAC, assistance pour le montage du dossier bancaire') ". D'autre part, il résulte du déroulement des faits qu'aucune décision définitive n'avait été prise par la société Lajoze dans le choix des locaux, lorsque les deux parties se sont rapprochées. En effet, il ressort de l'instruction du dossier que si un compromis de cession de droit au bail a été conclu le 18 mai 2010, l'acte définitif d'acquisition du droit au bail n'a été signé que le 10 mars 2011, alors que le contrat de partenariat a été conclu le 7 janvier 2011. De plus, un émissaire de la société Sport 2000 s'est déplacé en avril 2010 pour visiter différents locaux entre lesquels M. X hésitait dont le local rue Foch ayant fait l'objet de son choix définitif (pièce 41 des appelants).
Cependant, les appelants ne démontrent pas que la société Sport 2000 a validé l'emplacement rue Foch, suite à cette visite. Cette dernière ne peut être tenue pour responsable de la mauvaise situation de ce local et du fait que ce bail était trop onéreux par rapport aux gains annoncés. Ainsi, même si la localisation de l'emplacement constitue une donnée essentielle pour le franchisé, le franchiseur n'a pas dissimulé ou falsifié des informations, ni commis de manquements aux obligations de conseil et d'assistance au développement prévues par le DIP.
Aucun vice du consentement ni aucune faute contractuelle ne sont donc caractérisés à cet égard. Le jugement déféré sera également confirmé sur ce point.
Sur les manquements de la société Sport 2000 à ses obligations d'assistance
Le jugement querellé sera également confirmé en ce qu'il a estimé que les appelants ne rapportaient pas la preuve du défaut d'assistance du franchiseur.
Il sera simplement rappelé que les appelants se contentent d'une simple affirmation d'ordre général, mettant en cause un prétendu défaut d'assistance émanant de la société Sport 2000, alors que :
- durant toute l'exécution du contrat, aucune mise en demeure sur une quelconque demande spécifique n'a été adressée par Monsieur X à Sport 2000
- des mails envoyés par Sport 2000, versés aux débats, démontrent son soutien et son implication auprès de son adhérent.
Sur les frais et les dépens
Me Y ès qualitès et M. X, succombant au principal, seront condamnés in solidum aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à la société Sport 2000 la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par ces motifs : La Cour, confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ; condamne Me Y ès qualités et M. X aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ; condamne in solidum Me Y ès qualités et M. X à payer à la société Sport 2000 la somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile.