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Décisions

Cass. com., 23 janvier 2019, n° 17-20.055

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Mercedes-Benz France (SAS)

Défendeur :

Carré Pistollet, Sanoe (Sasu)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Le Bras

Avocat général :

Mme Pénichon

Avocats :

SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel

T. com. Versailles, du 16 sept. 2015

16 septembre 2015

LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en sa première branche : - Vu l'article 16 du Code de procédure civile ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Carré Pistollet a acquis les parts sociales constituant le capital des sociétés Sanoe et Jura Automobiles, distributeurs et réparateurs agréés de la marque Mercedes- Benz respectivement à Bourg-en-Bresse et Lons-le-Saulnier en vertu de contrats de distribution et de services conclus avec la société Mercedes-Benz France (la société Mercedes-Benz), importateur en France des véhicules neufs de la marque ; que ces concessions ayant enregistré des pertes, M. Carré Pistollet a demandé à la société Mercedes-Benz son agrément pour les céder au groupe Suma ; que la société Mercedes-Benz a opposé un refus à sa demande et notifié son agrément à un autre candidat ; qu'estimant que la société Mercedes-Benz avait commis un abus dans l'exercice de son droit d'agrément, M. Carré Pistollet et la société Sanoe l'ont assignée en paiement de dommages-intérêts ;

Attendu que pour retenir une faute de la société Mercedes-Benz et la condamner à payer à M. Carré Pistollet et à la société Sanoe des dommages-intérêts, l'arrêt énonce qu'à la suite de l'article 1er, paragraphe 1, sous f), le Règlement (CE) n° 1400/2002 de la Commission du 31 juillet 2002 exempte de l'article 81, paragraphe 3 du traité, les accords de " système de distribution sélective " par lesquels " le fournisseur s'engage à ne vendre les biens ou les services contractuels, directement ou indirectement, qu'à des distributeurs ou des réparateurs sélectionnés sur la base de critères définis ", tandis que par arrêt du 14 juin 2012 (affaire C-158/11), la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que par les termes " critères définis ", il y a lieu d'entendre, s'agissant d'un système de distribution sélective quantitative au sens du Règlement, des critères dont le contenu précis peut être vérifié et que pour bénéficier de l'exemption prévue par ledit règlement, il n'est pas nécessaire qu'un tel système repose sur des critères qui sont objectivement justifiés et appliqués de façon uniforme et non différenciée à l'égard de tous candidats à l'agrément ; qu'il relève que la société Mercedes-Benz a refusé d'examiner l'offre de la société Suma ; qu'il retient qu'elle n'établit pas qu'elle a agréé le membre du réseau sur la base de critères dont le contenu précis peut être vérifié, de sorte qu'il convient de retenir à son encontre cette discrimination dans l'agrément sur le fondement de l'article L. 420-1 et suivants du Code de commerce ;

Qu'en statuant ainsi, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce moyen qu'elle relevait d'office, tiré de l'appréciation du caractère discriminatoire du comportement de la société Mercedes-Benz dans le choix des membres du réseau, suivant les critères définis visés à l'article 1er, paragraphe 1 sous f) du règlement 1400/2002, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : Casse et annule, mais seulement en ce qu'il condamne la société Mercedes-Benz France à payer la somme de 200 000 euros à la société Sanoe et la somme de 20 000 euros à M. Carré Pistollet, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile, l'arrêt rendu le 25 avril 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris.