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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 25 janvier 2019, n° 17-12617

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

BigBen connected (SAS)

Défendeur :

In Nova (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Lis Schaal

Conseillers :

Mmes Bel, Cochet-Marcade

Avocats :

Mes Guyonnet, Platel, Rubaudo

T. com. Lille, du 25 avr. 2017

25 avril 2017

Faits procédure prétentions et moyens des parties :

La société In Nova est une société de conception et de fabrication de matériel en plastique qui produit des protections pour téléphones et tablettes portables.

Elle a été créée en 2015, suite à la cession de la société Nova placée successivement en redressement judiciaire en 2010 puis en liquidation judiciaire en 2015.

La société BigBen Connected (ci-après BigBen), de la marque BigBen, a une activité de distribution d'accessoires de téléphonie mobile en particulier, BigBen commercialisant les produits de Nova / In Nova principalement auprès des opérateurs de téléphonie (Orange, Free, Bouygues, SFR) via leurs réseaux de points de vente.

Constatant l'arrêt brutal des commandes en février 2016 sans préavis écrit, la société In Nova a fait délivrer assignation à la société BigBen devant le tribunal de commerce de Lille par acte du 25 juillet 2016 aux fins de voir juger que la société BigBen s'est rendu l'auteur d'une rupture brutale de la relation commerciale établie avec la société In Nova, l'activité portant sur des marques de distributeurs et la société In Nova se trouvant dans une situation de dépendance économique l'égard de BigBen, et voir en conséquence condamner la société BigBen à titre principal, au payement de la somme de 878 480 euros, à titre subsidiaire, au payement de la somme de 439 240 euros, ainsi que la condamnation au payement de la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La société BigBen s'y est opposée en soutenant l'absence de relation commerciale établie, l'insuffisance de proactivité de In Nova, la sous-estimation des difficultés de la société Nova à la reprise de celle-ci, l'absence de dépendance économique de In Nova, et faisant valoir que l'évolution du chiffre d'affaires entre les deux sociétés résulte exclusivement de choix industriels et commerciaux de In Nova et que la fabrication des produits n'est pas intervenue sous marque de distributeur.

Par jugement contradictoire en date du 25 avril 2017, le tribunal de commerce de Lille a condamné la société BigBen à payer à la société In Nova la somme de 154 607,20 euros en indemnisation du préjudice subi de la rupture brutale des relations commerciales établies en l'absence de délivrance de préavis écrit, engageant ainsi la responsabilité de la société, a condamné la société BigBen à payer la somme de 154 607,20 euros et la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Le tribunal a jugé que les relations commerciales étaient établies entre les parties au sens de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce, les parties ne contestant pas que la relation commerciale entre la société Nova puis In Nova et BigBen a démarré en 2012 et s'est poursuivie jusqu'en 2015 pour cesser en 2016 et que BigBen n'apporte pas la preuve de l'existence d'un préavis écrit.

L'état de dépendance économique de la société In Nova est avéré, à raison du caractère dynamique du marché des protections de téléphone, du nombre limité des clients du produit se livrant une guerre commerciale, du chiffre d'affaires entre les sociétés pendant leurs relations commerciales.

La demande de reconnaissance d'un aveu judiciaire par BigBen dans ses écritures sur l'état de dépendance économique de la société In Nova n'est pas fondée, le tribunal trouvant les éléments de cette dépendance dans les éléments produits.

La société In Nova ne prouve pas l'application entre les parties des accords du " Code de bonnes pratiques " édités par la FCD et FEEF, daté du 6 mai 2013 pour solliciter la fixation d'un préavis d'une durée de huit mois.

Elle ne démontre pas la fourniture de produits sous "marque de distributeur", de sorte que la demande de doublement de la durée du préavis n'est pas fondée.

Le tribunal a tenu compte de la durée de la relation entre les parties soit quatre ans, de la continuité de la relation après le changement d'actionnariat, de l'état de dépendance économique important dans lequel se trouvait la société In Nova début 2016 au moment de l'arrêt des commandes de BigBen.

Le tribunal a fixé la période de référence sur le chiffre d'affaires moyen de l'année 2015, qui laissait entrevoir une certaine prévisibilité d'un arrêt des commandes, soit 50 551,66 euros.

La société BigBen a relevé appel le 23 juin 2017.

Vu les conclusions notifiées et déposées le 13 juin 2018 par la société BigBen Connected aux fins de voir la cour :

Vu les articles L. 441-6, L. 442-6, I, 5° et L. 420-2 actuel du Code de commerce,

Vu l'article R. 412-47 (article L. 112-6 alinéa 2 ancien) du Code de la consommation,

Vu l'article 1356 du Code civil ;

Infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 25 avril 2017 par le tribunal de commerce de Lille,

Constater que les produits vendus par les sociétés Nova et In Nova à la société BigBen ne sont pas des produits sous marque de distributeur ;

Constater que l'article L. 441-6 du Code de commerce est inapplicable et que les sociétés In Nova et BigBen n'ont pas entretenu de relations commerciales établies au sens de l'article L. 442-6 du Code de commerce car ne reposant pas sur un contrat écrit, mais sur des usages établis entre les parties ;

Constater que la société In Nova n'a pas justifié de l'état de dépendance économique sous lequel elle a prétendu avoir été placée à l'égard de la société

Constater l'absence de rupture brutale de la relation existant entre les sociétés In Nova et BigBen imputable à cette dernière ;

Rejeter toute demande de la société In Nova de reconnaissance d'un aveu judiciaire de la part de la société BigBen Connected relatif à un état de dépendance économique de la première vis-à-vis de la seconde ;

Débouter la société In Nova de l'ensemble de ses prétentions, fins et conclusions et condamner la société In Nova au payement de la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La société appelante conteste l'application de l'article L. 441-6 du Code de commerce à la situation entre les parties en l'absence d'écrit. Elle reprend les moyens soutenus devant le premier juge.

Vu les conclusions notifiées et déposées le 13 novembre 2017 par la société In Nova aux fins de voir la Cour :

Vu l'article L. 442-6 du Code de Commerce,

Constater que les pièces 24 et 25 mentionnées dans les conclusions d'appel de la société Big Ben Connected n'ont pas été communiquées et ordonner, en conséquence, qu'elles soient retirées du débat.

Constater qu'aucune pièce n'a été communiquée dans le cadre de la procédure d'appel par Big Ben C. et en tirer toutes les conséquences.

Dire et juger que la société BigBen Connected a rompu brutalement une relation commerciale établie avec la société In Nova.

Constater les aveux judiciaires relatifs à la dépendance de In Nova dans les conclusions de BigBen

En conséquence

Confirmer le jugement de tribunal de commerce de Lille Metropole en date du 25 avril 2017en date du en ce qu'il a reconnu la brutalité de la rupture d'une relation commerciale établie entre Big Ben Connected et In Nova.

Reconventionnellement infirmer partiellement le même jugement en ce qu'il a limité le montant du préjudice d'In Nova à un montant de 154 607,2 € et statuant à nouveau

A titre principal, Condamner la société Big Ben Connected à verser la société In Nova 878 480 €uros pour absence de préavis

A titre subsidiaire, condamner la société Big Ben Connected à verser la société In Nova 439 240 €uros pour absence de préavis

En tout état de cause

Condamner la société BigBen Connected à verser à In Nova la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Condamner les sociétés BigBen Connected aux entiers dépens.

La société intimée conteste l'exigence d'un écrit pour que les dispositions de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce trouvent application. Elle fait valoir que les relations ont commencé entre la société Nova et BigBen et se sont poursuivies à la reprise de la société Nova par la société créée In Nova en mars 2015 jusqu'à l'arrêt brutal en février 2016, sans aucun préavis écrit de BigBen.

La société In Nova reprend les moyens soutenus en première instance.

MOTIFS

La Cour renvoie, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, à leurs écritures précitées.

1. Sur la demande tendant à voir écarter les pièces 24 et 25 mentionnées dans les conclusions d'appel de la société Big Ben Connected et non communiquées :

La société Big Ben justifiant d'une communication des deux pièces litigieuses par bordereau de communication du 13 juin 2018, il en résulte que les pièces ont été communiquées en temps utile, la partie appelante bénéficiant d'un délai pour répliquer jusqu'à l'ordonnance de clôture fixée au 8 novembre 2018, délai dont elle n'a pas fait usage.

L'intimée n'établit pas l'absence de communication de toutes pièces par l'appelante dès lors qu'il résulte du RPVA que le 5 décembre 2017 l'appelante a transmis son bordereau de communication de pièces au conseil de la société In Nova, sans réaction de cette dernière.

Les pièces sont déclarées recevables.

2. Sur le fond :

Sur l'existence de relations commerciales établies :

La société appelante soutient que l'article L. 441-6 du Code de commerce est inapplicable, que les sociétés In Nova et BigBen n'ont pas entretenu de relations commerciales établies au sens de l'article L. 442-6 du Code de commerce car ne reposant pas sur un contrat écrit, mais sur des usages établis entre les parties ; qu'il n'existe par ailleurs aucune clause d'exclusivité.

Aux termes de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce : "Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel on artisan : (...) 5°) De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminé, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ".

Les dispositions textuelles visant une "relation commerciale établie" ne posent pas l'exigence d'un écrit pour fonder de telles relations, les relations devant être qualifiées d'établies dès lors que les parties ont noué des relations d'affaires et qu'il existe entre elles un flux régulier.

Dès lors c'est vainement que l'intimée conclut à l'infirmation du jugement en l'absence de signature d'une lettre d'intention et d'une "offre" proposée par In Nova, le chiffre d'affaires de 2015 établissant des commandes mensuelles passées par BigBen à In Nova.

L'appelante soutient à tort que la cour ne peut juridiquement prendre en compte que les rapports entre la SAS BigBen connected et la société In Nova, seules parties à la présente instance, dès lors que la société In Nova a acquis le 30 avril 2015 dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Nova, les actifs de cette dernière, comprenant l'activité de fabrication, commercialisation... de protection pour téléphone mobile..., tous les actifs corporels et incorporels de la société Nova, de sorte que les relations d'affaires nouées entre les sociétés Big Ben et Nova se sont poursuivies entre les sociétés Big Ben et In Nova.

Le moyen de l'absence de clause d'exclusivité stipulée entre les parties est en voie de rejet, la détermination de relations commerciales établies n'exigeant pas la stipulation d'une telle clause au bénéfice du fournisseur.

Le montant des flux financiers entre les parties s'est élevé de 2012 à janvier 2016 à :

- pour l'année 2012, le montant des commandes est de 742 780 euros,

- pour l'année 2013, le montant des commandes est de 1 085 800 euros,

- pour l'année 2014, le montant des commandes est de 1 079 000 euros,

- pour l'année 2015, le montant des commandes est de 637 895 euros,

- pour l'année 2016, le montant des commandes est de 32 010 euros,

L'intimée faisant la preuve de relations d'affaires établies depuis 2012 générant un certain chiffre d'affaires, il s'ensuit que c'est exactement que le tribunal a jugé qu'était démontrée l'existence de relations commerciales établies entre les parties.

Sur la rupture brutale des relations établies :

Il est établi que les commandes étaient passées mensuellement par BigBen tout au long de l'année ainsi qu'il résulte d'un tableau des commandes pour l'année 2015 inséré dans les conclusions d'intimée, dont la teneur n'est pas contestée par l'appelante.

Il est constant qu'après le mois de janvier 2016, BigBen a cessé toutes commandes, ce qui a conduit la société In Nova a adresser à BigBen un courrier en date du 25 février 2016, demandant les raisons de l'absence de commandes et proposant de convenir d'un rendez-vous pour planifier les commandes sur les neuf prochains mois, auquel a répondu BigBen le 15 mars 2016, cette société mentionnant avoir tout mis en œuvre pour éviter les écarts dans l'activité, avoir progressivement réduit les commandes en volume et en valeur, qu'elle ne saurait être tenue pour responsable des choix et investissements de In Nova et qu'elle est disposée d'étudier la situation.

Les commandes n'ont pas repris, aucun plan de commandes n'a été élaboré, même après l'envoi d'un courriel du 22 mars 2016 par lequel In Nova a attiré l'attention de BigBen sur la baisse de ses commandes sur une période de trois mois de 2016 comparée à la même période en 2015, de près de 80 %, le chiffre d'affaires passant de 183K euros à 40K euros.

Alors que les relations commerciales établies étaient continuées depuis 2012 dégageant ainsi le chiffre d'affaires annuel ci-avant mentionné pour In Nova, laissant le fournisseur légitimement croire en la pérennité de la relation depuis la relocalisation de la production en France, BigBen, a déloyalement interrompu les commandes passées à In Nova à la fin du mois de janvier 2016 au profit d'un autre fournisseur basé en Europe, et ne les a pas reprises à la date de délivrance de l'assignation le 25 juillet 2016,

La rupture brutale et totale des relations commerciales établies est rapportée par l'intimée à la date du mois de janvier 2016 sans que l'appelante ne justifie de la délivrance d'un préavis écrit.

Pour contester l'imputabilité de la rupture, l'appelante fait valoir que le chiffre d'affaires de In Nova avait diminué également avec ses autres partenaires et que cette baisse résultait de l'absence de proactivité de In Nova, d'un insuffisant travail de renouvellement régulier de sa gamme de nouveaux produits accessoires, d'un mauvais placement en matière de prix, que, dès lors BigBen avait fait preuve de prudence en attendant l'envoi d'offres de produits attractifs; que les parties étaient en pourparlers pour relancer leur coopération, lors de la demande de réparation.

Les tentatives de In Nova de reprendre des relations d'affaires par des rencontres entre les partenaires suivies d'une demande d'indemnisation puis avant délivrance de l'assignation devant le tribunal de commerce, dès lors qu'elles ne sont pas suivies par BigBen d'une reprise des relations commerciales, ne sont pas susceptibles de conduire au rejet de la prétention à la rupture des relations par BigBen.

Aux termes de l'article L. 441-6 5° [sic] du Code de commerce " les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d' inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ".

Le moyen tiré d'une baisse continue des volumes d'affaires depuis plusieurs années, conduisant au caractère prévisible de la fin des relations commerciales, mentionnée au courrier du 15 mars 2016, est dépourvu de pertinence, une telle baisse, qui n'est pas démontrée par BigBen dès lors que les commandes passées ont augmenté en 2013 et 2014 et n'ont connu de baisse significative qu'au cours de l'année 2015 année du plan de cession, ne pouvant d'une part dispenser son auteur de la délivrance d'un préavis, BigBen ne faisant pas la preuve du caractère prévisible de la rupture pour l'année 2016, la baisse en volume et en chiffre d'affaires ne présentant pas un caractère non équivoque d'une volonté de BigBen de rompre l'année suivante, étant au contraire susceptible de constituer une rupture partielle de la relation, sauf à démontrer la survenance d'une circonstance ayant le caractère d'une force majeure, le premier juge ayant au contraire relevé le caractère dynamique du marché de la protection de téléphone mobile, dont BigBen qui en fait partie représente plus de 35 % de parts de marché nationale en matière d'accessoires de téléphone.

La prétention à la liberté contractuelle ne dispense pas l'auteur de la rupture de prévenir suffisamment à l'avance, par la notification d'un préavis écrit suffisant, son partenaire de sa volonté de rompre la relation établie.

N'est pas davantage fondée la prétention au choix délibéré de In Nova de privilégier ses relations avec BigBen, aucune preuve d'un tel comportement, dont le caractère fautif n'est au demeurant pas allégué, n'étant rapporté, un tel choix ne pouvant avoir d'incidence que sur le montant de l'indemnisation et non pas sur l'imputabilité de la rupture.

S'agissant du grief de l'absence du manque d'investissements et d'anticipation de In Nova, de la qualité et des prix des produits, les échanges de courriels entre les parties au cours de l'année 2014 sont écartés dès lors que BigBen a passé mensuellement des commandes au cours de l'année 2015 à hauteur de 637 895 euros, et que les courriels en 2015 se limitent à n'établir qu'un retard de livraison de trois jours portant sur des coques de mobiles du 4 mai 2015 au 7 mai 2015, retard que BigBen n'a pas alors qualifié de fautif dans un écrit, aucun élément extérieur à la relation des parties n'établissant réellement une insuffisance des produits.

Le mail de X de In Nova du 13 mars 2015 démontre que In Nova recherche une plus grande attractivité des produits fabriqués, sans qu'il puisse en être ultérieurement déduit que les produits fabriqués et fournis alors à BigBen présentaient une grave insuffisance.

S'agissant de l'allégation de l'absence de prix compétitifs, le seul courriel d'un salarié de BigBen du 9 février 2017, soit postérieurement à la rupture incriminée, sur le prix proposé par un fournisseur étranger, dès lors insuffisamment probant, est écarté.

Il résulte de l'ensemble des éléments ci-dessus que BigBen ne rapporte pas la preuve de manquements de In Nova d'une gravité suffisante pour l'exonérer de la responsabilité encourue dans la rupture des relations commerciales établies, de sorte que le jugement est confirmé en ce qu'il a jugé brutale la rupture des relations commerciales établies.

Sur l'indemnisation du préjudice subi :

La durée du préavis :

L'intimée demande de fixer la durée du préavis par référence à la durée fixée par l'accord interprofessionnel signé entre la Fédération des Entreprises de Commerce et de la Distribution et la Fédération des Entreprises et Entrepreneurs de France, soit pour une relation commerciale de 3 à 5 ans, avec une part de chiffre d'affaires du partenaire de plus de 35 %, la durée du préavis de 8 mois de marge brute, sans toutefois chercher à établir l'applicabilité de cet accord à la situation des parties, prétention rejetée faute de preuve par le premier juge, que la cour confirme en l'absence de toute pièce au soutien de la demande.

Sur la dépendance économique :

Aucun aveu judiciaire sur la dépendance économique de la société In Nova à l'égard de BigBen ne résulte des écritures de l'appelante, de sorte que c'est à bon droit que le premier juge a rejeté cette prétention élevée par In Nova.

Il n'est pas valablement contesté que BigBen a eu recours à Nova puis In Nova, pour pouvoir relocaliser son activité en France après une période d'approvisionnement en Chine, à raison de la hausse des coûts de transports et du manque de réactivité face à un marché très versatile, ce qui a conduit le fournisseur à augmenter ses investissements, le chiffre d'affaires ayant suivi jusqu'à plus d'un million d'euros en 2013 et 2014, ce que le tribunal a exactement relevé. Ainsi, même si les parties n'avaient pas stipulé de clause d'exclusivité, il est clairement démontré que In Nova avait développé son activité pour répondre aux besoins de son client jusqu'au montant du chiffre d'affaires réalisé avec celui-ci, dans l'intérêt des deux partenaires.

Il résulte également d'un article de presse spécialisée que, selon BigBen, il n'a pas été facile de trouver des partenaires industriels en France, ce qui démontre que c'est bien pour satisfaire son client que l'activité du fournisseur s'est orientée pour une grande partie de son chiffre d'affaires vers le client BigBen.

L'intimé a justifié devant le premier juge avoir vainement tenté de diversifier ses clients, mais que le marché des protections de téléphone est détenu par deux opérateurs principaux dont BigBen qui détient 35 % du marché et Ascendo, qui se livrent une guerre commerciale sans merci, laissant peu de possibilités de travailler avec ces deux importants clients à la fois, laissant peu de possibilité de travailler avec les deux opérateurs à la fois.

L'intimée justifie d'un chiffre d'affaires avec la société BigBen entre 45 % et 58 % pendant les années 2012/13/14 (6 mois) et 2015 (9 mois).

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'intimée établissant l'impossibilité de disposer d'une solution techniquement et économiquement équivalente aux relations contractuelles qu'elle a nouée avec une autre entreprise la dépendance économique est avérée.

La durée du préavis sera fixée en fonction de la durée de la relation et des autres circonstances de l'espèce.

Compte tenu d'une activité nouée en 2012 et brutalement interompue en février 2016, la durée du préavis est fixée à six mois.

Sur le moyen du doublement de la durée minimale de préavis :

Selon l'article L. 441-6 5° [sic] du Code de commerce "Lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée minimale de préavis de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni sous marque de distributeur".

Aux termes de l'article R. 412-47 (article L. 112-6 alinéa 2 ancien) du Code de la consommation, " Est considéré comme produit vendu sous marque de distributeur le produit dont les caractéristiques ont été définies par l'entreprise ou le groupe d'entreprises qui en assure la vente au détail et qui est le propriétaire de la marque sous laquelle il est vendu ".

C'est à bon droit et par motifs adoptés, que le premier juge a rejeté la prétention au doublement de la durée du préavis en relevant que In Nova ne rapportait pas la preuve que les caractéristiques des produits vendus par BigBen pendant leur relation commerciale ont été définies par cette dernière, cette preuve n'étant pas davantage rapportée en cause d'appel, un "stock de matières exclusives" n'étant pas suffisant à établir à lui seul une définition des caractéristiques d'un produit, lequel se définit par d'autres caractéristiques que la seule matière qui le compose.

L'examen de la condition de vente au détail est sans objet.

Sur le montant de l'indemnisation :

Au vu des éléments comptables produits portant sur plusieurs années d'activité, le montant de l'indemnisation sera calculé sur le chiffre d'affaires moyen des deux dernières années d'activité et non sur la seule année 2015 qui a vu une baisse du chiffre d'affaires entre les parties, de façon à refléter au plus près la réalité des flux financiers.

Au vu des pièces produites dont la teneur n'est pas contestée, la marge brute moyenne mensuelle s'élève à 69 500 X 78/100 X 6 mois = 325 260 euros, montant au payement duquel la société appelante sera condamnée.

S'agissant de la demande aux fins de voir supporter par le débiteur le montant des sommes de l'article 10 du décret du 8 mars 2001, modifiant le décret du 12 décembre 1996 n° 96-1080, relatif au tarif des huissiers, la demande est rejetée.

Par ces motifs, LA COUR, déclare recevables les pièces régulièrement communiquées par la société BigBen ; confirme le jugement dont appel sauf du chef du montant des dommages intérêts alloués à la société In Nova, statuant à nouveau de ce chef, condame la société BigBen Connected à payer à la société In Nova la somme de 325 260 euros, vu l'article 700 du Code de procédure civile, condamne la société BigBen Connected à payer à la société In Nova la somme de 10 000 euros ; rejette toute demande autre ou plus ample ; condamne la société BigBen Connected aux entiers dépens.