CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 30 janvier 2019, n° 16-14086
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Yooplaboom (SARL), Mayon (ès qual.)
Défendeur :
Joie Children's Products Co. Ltd (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Luc
Conseillers :
Mmes Mouthon-Vidilles, Comte
Avocats :
Mes Regnier, Coquery, Vignes, Bonneau, Sersiron
Faits et procédure,
Le groupe Wonderland produit et distribue en France des produits de puériculture, dont les marques Graco, Nuna et Chico qui ont été distribuées en France dans les années 90 par les sociétés EBI et Outlander, créées ou conseillées par Monsieur X.
En 2010, le groupe Wonderland, souhaitant commercialiser ses produits par l'intermédiaire d'une filiale, a créé la filiale " Joie Children's Products Co Ltd " (ci-après Joie Children's), société de droit honkongais, qui a pour principale activité la fabrication et la commercialisation de produits de puériculture. Elle a confié la distribution des produits de la marque Joie, avec l'assistance de l'agence Lewis Moberly, à la société Outlander, créée par M. X.
En juillet 2012 et suite à l'échec de la société Outlander dans la distribution des produits de la marque Joie en France, la société Joie Children's Products Co Ltd a entamé avec M. X, parti de la société Outlander, ainsi que M. Y avec lequel celui-ci envisageait une nouvelle collaboration, des discussions en vue de leur confier la distribution des produits Joie sur le territoire français.
Par courrier électronique du 20 juillet 2012, la société Yooplaboom, par la voix de X, a accepté d'assurer la distribution des produits de la marque Joie :
" Faisant suite à notre conversation téléphonique, je vous confirme que Yooplaboom est très excitée à l'idée d'accepter votre proposition de distribuer Joie en France ; Ci-après notre engagement :
- BDC couvert par la lettre de crédit jusqu'à 500 000 $ ;
- frais de marketing, médias sociaux et budget publicitaire : 250 000 euros, payés par YLB et non pas Joie ;
- l'usine nous donnera le meilleur prix possible ;
- nous commanderons immédiatement 4 HC : Tilt, Stages, poussettes combinées Air (à confirmer)
Dans l'attente de reprendre les activités ".
Aucun écrit n'a été formalisé mais les termes de l'accord de distribution ont été définis et déterminés dans le cadre des échanges de courriels entre les parties intervenus au mois de juillet 2012.
Le 1er octobre 2012, la société Yooplaboom a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Bordeaux avec pour objet la distribution d'articles de puériculture. Elle était gérée par Monsieur Y et avait pour associées trois personnes morales. Elle avait pour partenaire financier la société Harbocove Financial LLC et était conseillée par Monsieur D., gérant de la société Wrip.
Des commandes ont été passées, dont celle du 5 octobre 2012, mais, dès avril 2013, des différends sont apparus, la société Harbocove refusant la lettre de crédit se rapportant à une commande passée par la société Yooplaboom auprès de la société Joie.
La société Joie Children's Products Co Ltd a informé la société Yooplaboom que, si elle était incapable de mettre en place les crédits d'achat nécessaires, elle rechercherait un autre distributeur.
Le 10 septembre 2013, la société Joie a informé la société Harbocove que les commandes passées par Yooplaboom étaient prêtes à être livrées et a sollicité la lettre de crédit correspondante conformément à l'accord des parties de juillet 2012 (pièce de l'appelante n° 63).
Par courriel du 11 septembre 2013, la société Harborcove Financial LLC a informé les sociétés Joie, Wonderland et Yooplaboom de sa décision de retirer le support financier, marketing et managérial accordé à Yooplaboom, la société Harborcove ne souhaitant plus continuer à s'impliquer dans la distribution des produits Joie, ni en France, ni dans les autres pays.
Dans ce contexte, M. Z (du groupe Wonderland) a demandé au gérant de la société Yooplaboom, M. Y, s'il souhaitait toujours financer l'activité de Joie et poursuivre leurs relations avec eux.
Par courrier électronique du 11 septembre 2013, M. Y a expressément confirmé à M. Z sa décision de mettre un terme aux relations commerciales entre les sociétés Yooplaboom et Joie : " Russ a raison. Nous ne souhaitons pas continuer avec Joie. Nous en avons beaucoup discuté avec Louis et je sais qu'il a fait de son mieux. Nous dédierons nos fonds et notre énergie à Magicbed, Journey Bee, Lilypop. Je suis réellement désolé de cette décision car je sais que ce ne sont de bonnes nouvelles pour personne, mais je pense qu'il est important de vous dire la vérité avant la foire de Koeln et le Salon ABC, c'est pourquoi Russ et moi-même avons demandé à Louis de vous informer dès que possible de notre décision ".
M. X souhaitant continuer la distribution des produits Joie à titre personnel, il lui a été répondu par M. Brad B., du groupe Wonderland, le 15 septembre 2013 qu'il ne le pourrait que s'il disposait des capitaux nécessaires.
Mais, par message du 18 septembre 2013, M. X déclarait encore qu'il continuait la distribution des produits Joie et signalait les opérations engagées par la société Yooplaboom. Il demandait le remboursement, par la société Joie, des frais de marketing, soit 80 000 euros, demande refusée par celle-ci.
Par courriel du 18 septembre 2013, adressé par M. X, au nom de M. Y, ce dernier a reconnu que Joie avait raison et ce, dans les termes suivants : " Oui, je sais mais vous n'avez rien payé pour le marketing comme Louis et vous vous nous l'avez dit en avril. Nous demandons seulement moins de 15 000 euros et vous avez les factures concernées. Si vous souhaitez que votre nom soit inscrit en haut de certaines factures aux côtés de "Joie Children Products'" faîtes-le nous savoir. C'est tout. De plus, vous savez que Yooplaboom a fait un excellent travail pour votre Marque. C'est pourquoi, je suggère de régler ça correctement : vous payez les factures et vous en restez là avec Yooplaboom. Si vous souhaitez continuer avec Louis et Wrip, cela ne nous pose pas de problèmes. En revanche, YLB doit d'abord être payée. Je vous remercie de votre compréhension. Y " (Pièce n° 19 de l'intimée).
Par un courriel du 28 octobre 2013, la société Joie a pris acte de la rupture de leurs relations commerciales, à effet au 14 octobre précédent :
" (...) Comme vous le savez, nous avons reçu le 18 septembre [lire le 11 septembre 2013] un courriel de vos investisseurs stipulant que Yooplaboom SARL ne soutiendra plus nos produits Joie ; en outre, votre société a également indiqué que vous ne soutiendrez plus les produits Joie. En raison de la nature de votre lettre et des récents problèmes financiers de votre société, notre société accepte par la présente votre proposition de mettre un terme à notre relation commerciale. (...) Nous sommes désolés d'apprendre que votre société ne souhaite plus être notre partenaire commercial et nous vous souhaitons une bonne continuation. " (Pièce n° 20 de l'intimée) ".
Le 10 décembre 2013, la société Yooplaboom a adressé une mise en demeure à la société Joie, lui reprochant un comportement déloyal, ainsi que la rupture abusive et brutale des relations commerciales et sollicitant l'indemnisation de son préjudice, évalué à 545 000 euros
Par courrier du 17 décembre 2013, la société Joie a contesté l'intégralité des demandes de la société Yooplaboom.
Par exploit du 11 juin 2014, la société Yooplaboom a alors assigné la société Joie sur le fondement d'une exécution déloyale et d'une rupture brutale et abusive de leurs relations commerciales devant le tribunal de commerce de Bordeaux.
Par jugement du 8 avril 2016, le tribunal de commerce de Bordeaux a :
- débouté la société Yooplaboom de l'ensemble de ses demandes indemnitaires,
- condamné la société Yooplaboom à payer à la société Joie Children's Products la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné la société Yooplaboom aux dépens de l'instance, en ce compris les frais de traduction par traducteur assermenté.
La société Yooplaboom a interjeté appel du jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux le 8 avril 2016.
Par jugement du 30 août 2017, le tribunal de commerce de Bordeaux a prononcé la liquidation judiciaire de la société Yooplaboom et a désigné Maître Laurent Mayon en qualité de liquidateur.
Par conclusions déposées le 18 octobre 2018, Maître Laurent Mayon, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Yooplaboom, est intervenu volontairement à la présente instance.
La procédure devant la cour a été clôturée le 20 novembre 2018.
Vu les dernières conclusions de Me Laurent Mayon, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Yooplaboom, appelante, déposées et notifiées le 18 octobre 2018 par lesquelles il est demandé à la cour, au visa des articles 1134, 1149 et 1382 du Code civil et L. 422-6 du Code de commerce de :
- déclarer Maitre Laurent Mayon ès qualités de liquidateur de la société Yooplaboom recevable et bien fondé en son intervention volontaire,
- dire et juger Yooplaboom recevable en son appel et l'y dire bien fondée,
y faisant droit :
- infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
et statuant à nouveau,
à titre principal
- constater que la société Joie Children's Products Co a manqué à son obligation de bonne foi et de loyauté à l'égard de la société Yooplaboom,
- constater que la société Joie Children's Products Co s'est livrée à des agissements abusifs à l'égard de la société Yooplaboom,
- dire que la rupture notifiée par la société Joie Children's Products Co par un courrier du 28 octobre 2013 était abusive,
en conséquence :
- débouter la société Joie Children's Products Co de l'ensemble de ses demandes, moyens et conclusions, les disant non fondées,
- condamner la société Joie Children's Products Co à verser à Maître Laurent Mayon, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Yooplaboom, la somme de 70 796,56 euros en remboursement d'une quote part des investissements réalisés, des coûts et des frais exposés pour le développement de la marque Joie,
- condamner la société Joie Children's Products Co à verser à Maître Laurent Mayon ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Yooplaboom, une somme de 750 000 euros à titre de dommages intérêts en compensation du préjudice consécutif à la perte de chance de réaliser les bénéfices promis,
- condamner à Joie Children's Products Co à rembourser le stock de marchandises invendues pour un montant de 38 850,29 euros et à payer une somme de 10 000 euros (à parfaire) à titre de dommages intérêts en compensation du préjudice consécutif au frais de transports et de stockage desdites marchandises qu'elle a du engager, à titre subsidiaire,
- dire que la rupture notifiée par la société Joie Children's Products Co par un courrier du 28 octobre 2013 était brutale,
en conséquence :
- débouter la société Joie Children's Products Co de l'ensemble de ses demandes, moyens et conclusions, les disant non fondés,
- condamner la société Joie Children's Products Co à verser à Maître Laurent Mayon, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Yooplaboom, une somme de 369 000 euros à titre de dommages intérêts en compensation du préjudice consécutif à la rupture brutale de la relation commerciale, et à titre subsidiaire de ce chef, à la somme de 97 397 euros,
- condamner la société Joie Children's Products Co à verser à Maître Laurent Mayon, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Yooplaboom, la somme de 70 796,56 euros en remboursement d'une quote part des investissements réalisés, des couts et des frais exposés pour le développement de la marque Joie,
en tout état de cause,
- condamner la société Joie Children's Products Co à payer à Maître Laurent Mayon ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Yooplaboom la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile de première instance et la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile dans le cadre de l'instance d'appel,
- condamner la société Joie Children's Products Co aux entiers dépens en ce compris les frais de traduction de l'acte ;
Vu les dernières conclusions de la société Joie Children's Products Co Ltd, intimée, déposées et notifiées le 12 novembre 2018 par lesquelles il est demandé à la cour, au visa des articles 1134 du Code civil, L. 442-6 du Code de commerce de :
à titre principal,
- confirmer le jugement en date du 8 avril 2016 en toutes ses dispositions ;
en conséquence,
- dire que Yooplaboom a mis fin aux relations commerciales avec Joie le 11 septembre 2013 ;
- dire que Joie a exécuté ses obligations avec loyauté tout au long de la relation commerciale avec Yooplaboom ;
- débouter Yooplaboom et Maître Laurent Mayon, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Yooplaboom, de l'intégralité de leurs demandes ;
à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour jugerait que Joie a rompu brutalement les relations commerciales
- dire que Yooplaboom n'est pas fondée à réclamer des dommages et intérêts sur la base d'un préavis supérieur à 2 mois ;
- dire que Yooplaboom ne démontre ni l'existence, ni le quantum des préjudices allégués ;
en conséquence,
- débouter Yooplaboom et Maître Laurent Mayon, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Yooplaboom, de l'intégralité de leurs demandes à ce titre ;
en tout état de cause,
- condamner Maître Laurent Mayon, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Yooplaboom à payer à Joie la somme de 30 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamner Maître Laurent Mayon, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Yooplaboom aux entiers dépens d'instance dont distraction au profit de Maître Marie Catherine Vignes conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;
Sur ce, LA COUR,
Sur l'exécution déloyale de l'accord de distribution et les pratiques abusives de la société Joie Children's
La société Yooplaboom se prévaut à la fois des articles 1134 du Code civil, L. 442-6 et L. 442-5 du Code de commerce.
La société Joie Children's soutient, tout d'abord, qu'il s'est écoulé trois mois entre la notification de la rupture des relations à l'initiative de Yooplaboom (11 septembre 2013) et la formulation des premiers griefs à l'encontre de Joie (lettre du 10 décembre 2013 adressée par le conseil de Yooplaboom).
Sur les manquements dans l'exécution du contrat
La société Yooplaboom invoque un retard de 4 mois de la 1re livraison par la société Joie Children et le refus de la société Yooplaboom de l'indemniser de son préjudice alors qu'elle s'y était engagée.
Mais la société Joie Children's soutient à juste raison que ce grief n'entre pas dans le champ des articles L. 442-6, I, 1° du Code de commerce relatif à l'octroi d'un avantage injustifié et L. 442-6, I, 2° du même Code relatif au déséquilibre significatif du Code de commerce précités, tel qu'allégué par la requérante, et, par conséquent, que les retards de livraison invoqués ne sauraient être constitutifs d'une pratique restrictive.
Il ne constitue pas davantage un manquement dans l'exécution du contrat, les délais de la première livraison étant imputables à des changements du contenu des commandes en cours par Yooplaboom, notamment des divisions de commandes (pièce 18 de l'intimée), qui ont modifié le calendrier de livraison initialement prévu. Aucun retard dans les livraisons ne saurait donc être imputable à la société Joie.
Sur l'abus de confiance
La société Yooplaboom invoque un " abus de confiance " de la part de la société Joie Children's envers M. X, constitué par sa décision de rompre au bout de 15 mois l'accord de distribution, alors qu'il avait investi en vue d'une relation durable d'au moins 5 ans.
Mais, la société Joie Children's soutient à juste titre qu'il ne saurait lui être reproché la décision de rompre les relations commerciales seulement 15 mois après le début de celles-ci, car c'est bien la société Yooplaboom qui a, le 11 septembre 2013, choisi d'y mettre fin.
Sur les pratiques commerciales abusives
Sur le déséquilibre significatif et l'avantage injustifié de l'article L. 442-6- I, 1° et 2° du Code de commerce
La société Yooplaboom invoque un déséquilibre significatif entre les parties prohibé par L. 442-6- I, 2 du Code de commerce.
Elle soutient que :
- la société Joie Children's a fait supporter le coût de la constitution et de la gestion des stocks dans l'intérêt de sa filiale allemande, le temps que l'activité de celle-ci démarre, sans contrepartie,
- et elle a refusé, en parallèle, d'accorder à Yooplaboom, les prix ou mêmes conditions de paiement qu'elle réservait, pourtant, à ses autres distributeurs en Europe.
Mais, la proposition faite par Joie à Yooplaboom de se doter d'un stock en France avait pour unique objet de pallier la difficulté pour Yooplaboom, suite à la défection de son partenaire financier, de trouver les lettres de crédit dont les parties avaient convenu du principe au début de leurs relations dans un mail du 20 juillet 2012. Il s'agissait donc d'un moyen de pallier l'inexécution contractuelle imputable à la société Yooplaboom et nullement d'un avantage injustifié ou d'un déséquilibre dans les droits et obligations des parties.
La société Yooplaboom ne démontre pas davantage l'existence d'une discrimination tarifaire à son égard, ni a fortiori en quoi celle-ci caractériserait un avantage injustifié ou un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; par conséquent, aucun abus n'est caractérisé.
Sur la pratique sanctionnée à l'article L. 422-5 [sic] du Code de commerce
La société Yooplaboom expose que la société Joie Children's a cherché à dicter à Yooplaboom sa politique commerciale en lui imposant de relever ses prix pour diminuer la marge de ses revendeurs, en violation de l'article L. 422-5 [sic] du Code de commerce.
En réplique, la société Joie Children's soutient que la société Yooplaboom n'apporte pas la démonstration de ses allégations. A titre surabondant, elle invoque, en se fondant sur des échanges de courriels, qu'à aucun moment, elle n'a intimé à Yooplaboom d'appliquer le taux de marge qu'elle estimait approprié, qu'elle a procédé à une analyse économique de la situation, sans donner aucune instruction à Yooplaboom et que cette dernière a ainsi librement défini ses prix de revente et sa marge.
Aux termes de l'article L. 442-5 du Code de commerce : "Est puni d'une amende de 15 000 euros le fait par toute personne d'imposer, directement ou indirectement, un caractère minimal au prix de revente d'un produit ou d'un bien, au prix d'une prestation de service ou à une marge commerciale ".
Or, à aucun moment la société Joie n'a imposé à la société Yooplaboom un taux de marge. Elle répondait seulement à une demande de Yooplaboom, lui demandant de lui rembourser des frais marketing, que si elle avait donné une marge plus faible aux revendeurs, elle aurait pu assumer ses frais marketing (pièce n° 64 de Yooplaboom). Il s'agissait donc d'un simple conseil, qui n'était assorti d'aucune contrainte.
Sur la pratique sanctionnée à l'article L. 422-6, I, 4° [sic] du Code de commerce
La société Yooplaboom prétend que Joie Children's aurait subordonné le maintien de la relation commerciale à la réalisation d'un investissement de 500.000 euros dans l'achat des produits Joie, pratique également prohibée par l'article L. 422-6 I, 4° [sic] du Code de commerce.
En réponse, la société Joie Children's soutient que cette allégation n'est étayée par aucun document.
L'article sus visé réprime le fait "D'obtenir ou de tenter d'obtenir, sous la menace d'une rupture brutale totale ou partielle des relations commerciales, des conditions manifestement abusives concernant les prix, les délais de paiement, les modalités de vente ou les services ne relevant pas des obligations d'achat et de vente".
Or, il résulte des échanges de courriels entre la société Joie et M. X, postérieurs à la notification de la rupture des relations par Yooplaboom le 11 septembre 2013, qu'elle a indiqué à M. X qu'elle recherchait des distributeurs qui pourraient investir 500 000 euros dans la distribution des produits Joie.
Cet échange est totalement étranger à la société Yooplaboom.
Sur la rupture abusive
La société Yooplaboom invoque que la société Joie Children a engagé sa responsabilité contractuelle à l'égard de Yooplaboom au titre de l'exécution déloyale et de la rupture abusive du contrat.
Mais elle échoue à en rapporter la preuve, aucun des griefs allégués de manquements et d'agissements déloyaux invoqués par la société Yooplaboom n'étant démontré.
Sur la rupture brutale
A titre subsidiaire, la société Yooplaboom invoque, sur le fondement de l'article L. 442-6- I, 5° du Code de commerce que la société Joie Children a engagé sa responsabilité délictuelle à l'égard de Yooplaboom au titre de la rupture brutale sans préavis de leur relation.
Mais la rupture n'a nullement été brutale puisqu'elle a été notifiée par mail du 11 septembre 2013 par la société Yooplaboom elle-même, placée devant l'impossibilité de respecter ses obligations de couvrir les commandes par des lettres de crédit de 500 000 euros, telles qu'elles résultaient des échanges de mails du 20 juillet 2012, à cause du retrait de son financeur, la société Harborcove. Auteur de la rupture, elle ne saurait agir contre la société Yooplaboom en rupture brutale.
Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté l'ensemble des demandes de la société Yooplaboom.
Sur les dépens et frais irrépétibles
Maître Laurent Mayon, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Yooplaboom succombant au principal, sera condamné aux dépens de l'instance d'appel et à payer à la société Joie la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par ces motifs, LA COUR, confirme le jugement entrepris ; condamne Maître Laurent Mayon, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Yooplaboom aux dépens de l'instance d'appel ; condamne Maître Laurent Mayon, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Yooplaboom, à payer à la société Joie la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.