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Décisions

Cass. com., 20 février 2019, n° 17-13.215

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Optical center (SAS)

Défendeur :

Directeur départemental de la protection des populations de Paris

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Poillot-Peruzzetto

Avocats :

SCP Boullez, SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois

TGI Paris, prés., du 28 sept. 2015

28 septembre 2015

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 décembre 2016), que reprochant à la société Optical center des pratiques illicites consistant à proposer des rabais fictifs sur les produits d'optique, d'audioprothèse et les accessoires, le directeur départemental de la protection des populations de Paris l'a assignée devant le juge des référés aux fins de cessation des pratiques commerciales illicites et de publication d'un communiqué judiciaire ;

Sur le premier moyen : - Attendu que la société Optical center fait grief à l'arrêt d'ordonner la cessation de la pratique commerciale trompeuse consistant, par le biais de campagnes de rabais promotionnels, à attirer les consommateurs en leur faisant croire que ces rabais leur offrent un avantage tarifaire, alors qu'ils sont proposés ou appliqués aux consommateurs toute l'année, de sorte que lesdits rabais mis en avant ne reposent sur aucun prix de référence réel, sous astreinte, et d'ordonner la publication d'un communiqué, alors, selon le moyen : 1°) qu'il résulte de la jurisprudence communautaire (CJUE, 23 avril 2009, VTB-VAB, C-261/07 et C-299/07 ; CJUE, 10 juillet 2014, C-421/12 ; CJUE, 8 septembre 2015, ord., C-13/15) que la directive n° 2005/29/CE du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur s'oppose à ce que les États membres interdisent de manière générale une pratique déloyale dès lors qu'elle ne figure pas au nombre des trente et une pratiques commerciales énumérées à son annexe I, qui, conformément à l'article 5, paragraphe 5, de la même directive, sont réputées déloyales en toutes circonstances et peuvent donc être considérées comme déloyales sans faire l'objet d'une évaluation au cas par cas au titre des dispositions des articles 5 à 9 de la directive ; qu'en se déterminant en considération des articles 2 et 4 de l'arrêté du 11 mars 2015 imposant à l'annonceur, d'une part, un double marquage consistant à préciser, outre le prix réduit, le prix de référence sur lequel la réduction est pratiquée et, d'autre part, de justifier de la réalité du prix de référence à partir duquel la réduction de prix est annoncée, quand elle aurait dû au besoin d'office, écarter l'application de ce texte en tant qu'il ne permet pas d'apprécier in concreto le caractère trompeur ou non de la réduction et qu'il va donc au-delà des prévisions de la directive n° 2005/29/CE, la cour d'appel a violé la directive précitée ; 2°) qu'une pratique commerciale, qui ne figure pas sur la liste des pratiques commerciales réputées déloyales en toutes circonstances, ne peut être considérée comme déloyale qu'après une évaluation au cas par cas tendant à rechercher si elle constitue une pratique contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qui altère ou est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique, par rapport au produit, du consommateur moyen ; qu'en posant, en principe, que l'application par la société Optical center de remises permanentes constitue des pratiques déloyales interdites par l'arrêté du 11 mars 2015, à défaut pour l'annonceur de rapporter la preuve de la facturation effective du prix de référence, bien que la prohibition de remises continues sans facturation du prix de référence ne figure pas sur la liste des pratiques commerciales réputées déloyales en toutes circonstances, telle qu'elle est annexée à la directive n° 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales, la cour d'appel qui s'est bornée à énoncer que le consommateur moyen a nécessairement été trompé par de telles pratiques le conduisant à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement, dès lors qu'elles tendent à lui faire croire qu'il bénéficiait d'un avantage tarifaire qui, en réalité, bénéficie à tout consommateur toute l'année, n'a pas procédé à une appréciation au cas par cas ; qu'ainsi, elle a violé les articles L. 120-1 et L. 121-1, I, 3° du Code de la consommation, tels qu'interprétés à la lumière de la directive 2005/29/CE du Parlement et du Conseil du 11 mai 2005, ensemble l'article 809 du Code de procédure civile et l'arrêté précité ; 3°) qu'une pratique commerciale, qui ne figure pas sur la liste des pratiques commerciales réputées déloyales en toutes circonstances, ne peut être considérée comme déloyale qu'après une évaluation au cas par cas tendant à rechercher si elle constitue une pratique contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qui altère ou est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique, par rapport au produit, du consommateur moyen ; qu'en posant, en principe, que l'application par la société Optical center de remises permanentes constitue des pratiques déloyales interdites par l'arrêté du 11 mars 2015, à défaut pour l'annonceur de rapporter la preuve de la facturation effective du prix de référence, bien que la prohibition de remises continues sans facturation du prix de référence ne figure pas sur la liste des pratiques commerciales réputées déloyales en toutes circonstances, telle qu'elle est annexée à la directive n° 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales, la cour d'appel qui s'est bornée à énoncer que le consommateur moyen a nécessairement été trompé par de telles pratiques, sans expliquer, in concreto, en quoi la société Optical center avait manqué aux exigences de la diligence professionnelle, en pratiquant des remises permanentes sans justifier de l'application effective du prix de référence en considération desquelles elles avaient été consenties, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 120-1 et L. 121-1, I, 3° du Code de la consommation, tels qu'interprétés à la lumière de la directive n° 2005/29/CE du Parlement et du Conseil du 11 mai 2005, ensemble l'article 809 du Code de procédure civile et l'arrêté précité ; 4°) qu'en décidant que les remises tarifaires pratiquées par la société Optical center étaient trompeuses pour le consommateur moyen et qu'elles le conduisaient à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement, dès lors qu'elles tendent à lui faire croire qu'il bénéficie d'un avantage tarifaire qui en réalité bénéficie à tout consommateur toute l'année, sans expliquer en quoi l'absence de facturation d'un prix de référence constituait le motif déterminant qui l'avait incité à acheter les produits de la société Optical center plutôt qu'un autre, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs impropres à établir que son comportement économique avait été altéré de manière substantielle, privant ainsi sa décision de base légale au regard des articles L. 120-1 et L. 121-1, I, 3° du Code de la consommation, tels qu'interprétés à la lumière de la directive n° 2005/29/CE du Parlement et du Conseil du 11 mai 2005, ensemble l'article 809 du Code de procédure civile et l'arrêté précité ; 5°) que l'article 4 de l'arrêté du 11 mars 2015, tel qu'interprété à la lumière de la directive n° 2005/29/CE du Parlement et du Conseil du 11 mai 2005, exige de l'annonceur qu'il justifie seulement de la réalité d'un prix de référence en considération duquel le prix réduit a été déterminé, sans lui imposer de démontrer qu'il en facture effectivement le montant, ni interdire des remises permanentes ; qu'en affirmant que la pratique de remises permanentes, sans facturation effective du prix de référence, constitue une pratique prohibée, bien qu'elles n'entrent pas dans la liste de celles réputées déloyales per se par l'annexe I de la directive, la cour d'appel qui n'a pas procédé à une appréciation au cas par cas, en considération des critères posés par les articles 5 à 9 de la directive, a violé les dispositions précitées ;

Mais attendu que selon l'article 6, paragraphe 1, de la directive n° 2005/29/CE du 11 mai 2005, à la lumière de laquelle les textes français doivent être interprétés, une pratique commerciale est réputée trompeuse si elle contient des informations fausses ou induit ou est susceptible d'induire en erreur le consommateur moyen, notamment sur l'existence d'un avantage spécifique quant au prix, et qu'elle l'amène ou est susceptible de l'amener à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement ; que la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que, dans le cas où une pratique commerciale satisfait à tous les critères énoncés à l'article 6, paragraphe 1, de cette directive pour être qualifiée de pratique trompeuse à l'égard du consommateur, il n'y a pas lieu de vérifier si une telle pratique est également contraire aux exigences de la diligence professionnelle au sens de l'article 5, paragraphe 2, sous a), de la même directive, pour qu'elle puisse valablement être considérée comme déloyale et, partant, interdite au titre de l'article 5, paragraphe 1, de ladite directive (CJUE 19 septembre 2013 aff. C-435/11 CHS Tour Services) ; que par motifs propres et adoptés, l'arrêt relève que les offres promotionnelles sont appliquées en dehors de campagnes publicitaires, et en réalité toute l'année, et que la société Optical center, qui dispose des documents pour le faire, ne démontre pas que les prix à partir desquels les offres promotionnelles sont calculées étaient effectivement facturés de manière habituelle à ses clients et qu'ils correspondaient à une réalité commerciale, faisant ainsi ressortir que cette société n'a pas rapporté la preuve de l'exactitude de l'information relative à un avantage spécifique quant au prix ; qu'il retient, en outre, que ces pratiques conduisent le consommateur moyen à prendre une décision commerciale qu'il ne prendrait pas autrement, dès lors qu'il ne peut avoir conscience de ce que la remise qui lui est proposée est fictive et de ce que les prix affichés en magasin ne sont jamais pratiqués ; qu'en l'état de ces seuls motifs, abstraction faite de ceux critiqués par les première et cinquième branches qui sont surabondants, la cour d'appel a pu, par une analyse concrète des agissements reprochés, retenir qu'ils caractérisaient une pratique trompeuse ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen : Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.