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Décisions

CA Aix-en-Provence, Pôle 3 ch. 4, 28 février 2019, n° 16-23080

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

BNP Paribas Personal Finance (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ponsot

Conseiller :

Mme Farssac

TGI Marseille, du 22 nov. 2016

22 novembre 2016

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Marseille du 22 novembre 2016 ayant, notamment :

- déclaré irrecevable l'action en nullité de la clause de monnaie de compte introduite par X,

- déclaré irrecevable l'action en responsabilité fondée sur des pratiques commerciales trompeuses et sur le dol introduite par X,

- déclaré irrecevable l'action en responsabilité fondée sur des manquements précontractuels introduite par X,

- déclaré recevable l'action en responsabilité fondée sur des manquements contractuels introduite par X,

- déclaré recevable l'action tendant à la sanction du caractère erroné du TEG introduite par X,

- débouté X de toutes ses demandes, fins et conclusions formées de ces chefs,

- rejeté la demande de publication du jugement formée par X,

- rejeté toute autre demande,

- condamné M. X à verser à la BNP Paribas Personal Finance la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

Vu la déclaration du 23 décembre 2016, par laquelle X a relevé appel de cette décision ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 17 décembre 2018, aux termes desquelles X demande à la cour de :

- le recevoir en son appel,

- réformer le jugement entrepris,

A titre principal :

- dire et juger que la BNP Paribas Personal Finance a conçu le contrat Helvet Immo en fraude de l'interdiction posée par les articles L. 111-1 et suivants du Code monétaire et financier,

- annuler les stipulations du contrat Helvet Immo relatives aux monnaies de compte et de paiement, en ce qu'elles sont contraires aux dispositions d'ordre public de direction du Code monétaire et financier,

- requalifier en conséquence le contrat Helvet Immo en contrat de crédit immobilier en euros,

- condamner la BNP Paribas Personal Finance à réparer intégralement le préjudice subi par le demandeur du fait de sa fraude à la loi sur le fondement de l'article 1382 du Code civil,

- dire et juger les clauses du contrat Helvet Immo relatives aux monnaies de compte et de paiement et celle relative à l'exercice de l'option abusives en ce qu'elles créent un déséquilibre significatif entre les parties,

- dire et juger l'ensemble de ces clauses réputées non écrites et en écarter l'application,

- dire et juger qu'après avoir écarté les clauses litigieuses, le contrat Helvet Immo est un contrat de crédit immobilier de 108.900 euros remboursable en euro qui devra être requalifié comme tel,

- condamner en conséquence la BNP Paribas Personal Finance à restituer au demandeur le montant des frais de changes et de tenue de compte déjà perçus par elle,

A titre subsidiaire :

- dire et juger que le contrat Helvet Immo est en réalité un contrat financier, et le requalifier en conséquence,

- dire et juger en conséquence que le contrat Helvet Immo a fait l'objet d'un démarchage bancaire et

financier illicite de nature à engager la responsabilité contractuelle de la BNP Paribas Personal Finance,

En tout état de cause :

- dire et juger que la pratique commerciale trompeuse est constituée et que la BNP Paribas Personal Finance engage à ce titre leur responsabilité sur le fondement des articles L. 120- l et suivants du Code de la consommation,

- condamner la BNP Paribas Personal Finance à réparer intégralement le préjudice subi par le demandeur du fait de la pratique commerciale trompeuse sur le fondement de l'article 1382 du Code civil,

- dire et juger que la BNP Paribas Personal Finance a commis un dol par réticence,

- condamner la BNP Paribas Personal Finance à réparer intégralement le préjudice subi par le demandeur du fait du dol sur le fondement de l'article 1382 du Code civil,

- dire et juger que la BNP Paribas Personal Finance a manqué à ses obligations relatives à l'échéancier d'amortissement,

- prononcer en conséquence la déchéance en totalité du droit aux intérêts de la BNP Paribas Personal Finance,

- condamner en conséquence la BNP Paribas Personal Finance à la restitution au demandeur des intérêts déjà perçus,

- dire et juger que la BNP Paribas Personal Finance a manqué à ses obligations d'information sur les risques financiers du contrat Helvet Immo,

- condamner en conséquence la BNP Paribas Personal Finance à réparer intégralement son préjudice subi,

- dire et juger qu'il est non averti concernant les risques induits par le contrat Helvet Immo,

- dire et juger que la BNP Paribas Personal Finance était tenue d'une obligation de conseil et de mise en garde à son égard,

- dire et juger que la BNP Paribas Personal Finance a violé son devoir de conseil et devoir de mise en garde vis-à- vis de lui concernant les risques du contrat Helvet Immo,

- condamner la BNP Paribas Personal Finance à réparer l'entier préjudice qu'il subit,

- condamner la BNP Paribas Personal Finance à réparer le préjudice qu'il subit du fait de la violation de ses obligations de prudence et de loyauté,

- dire et juger que la BNP Paribas Personal Finance a manqué à la bonne foi contractuelle et à son obligation d'informer son client durant l'exécution du contrat Helvet Immo ainsi qu'à l'occasion de 1'exercice de 1'option pourtant prévu au contrat,

- dire et juger que la BNP Paribas Personal Finance a commis une faute lourde lors de la conclusion et l'exécution du contrat Helvet Immo,

- condamner la BNP Paribas Personal Finance en conséquence à réparer intégralement le préjudice

qu'il subit,

- dire et juger que la BNP Paribas Personal Finance a manqué à son obligation de ne pas faire en commercialisant des conditions litigieuses le contrat Helvet Immo,

- condamner la BNP Personal Finance en conséquence à la réparation du préjudice qu'il subit,

- dire et juger le TEG erroné,

- dire et juger recevables ses demandes d'annulation en stipulation de taux d'intérêt conventionnel et de déchéance du droit aux intérêts,

- dire et juger qu'il justifie d'un intérêt à agir en nullité de la stipulation de taux d'intérêt conventionnel,

- dire et juger que ses demandes ne sont pas prescrites,

- dire et juger le TEG erroné en ce qu'il a été calculé sur la base de clauses réputées non écrites et sur une capitalisation des intérêts illicite,

- annuler le TEG en ce qu'il est faux,

- dire et juger en conséquence nulle la stipulation de taux d'intérêt conventionnel du contrat Helvet Immo et lui substituer le taux légal,

- ordonner la restitution au demandeur des intérêts indûment perçus par la BNP Paribas Personal Finance,

- prononcer la déchéance en totalité des intérêts conventionnels en raison du TEG erroné,

- dire et juger qu'il a subi un préjudice financier de 92.354,92 euros correspondant ' au jour de l'assignation ' à l'augmentation du capital et aux mensualités versées pour le contrat Helvet Immo souscrit,

- condamner en conséquence la BNP Paribas Personal Finance à lui payer la somme de 92.354,92 euros au titre de l'indemnisation de son préjudice financier,

- consolider le montant de ce préjudice évolutif et donc du montant de la condamnation au jour de son jugement,

- dire et juger qu'il a subi un préjudice moral du fait de l'angoisse qui doit être évalué à hauteur de 25.000 euros,

- dire et juger qu'il a subi un préjudice moral du fait de la pratique commerciale trompeuse qui doit être évalué à hauteur de 10.000 euros,

- condamner en conséquence la BNP Paribas Personal Finance à lui payer la somme de 35.000 euros au titre de l'indemnisation de son préjudice moral,

- dire et juger que la condamnation à venir produira des intérêts moratoires au taux légal à la date de la signification de la présente assignation suivant les dispositions des articles 1153 et 1153- l du Code civil et que les intérêts ainsi produits seront capitalisés de plein droit,

- ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans cinq journaux ou périodiques à son choix dans la

limite de 10.000 euros HT par insertion, aux frais payés de la BNP Paribas Personal Finance,

- condamner la BNP Paribas Personal Finance à lui payer la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la BNP Paribas Personal Finance à payer des dommages intérêts d'un montant de 1.500 euros pour s'être abstenue de former suffisamment tôt son appel incident dans une intention dilatoire,

- condamner la BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 14 janvier 2019, aux termes desquelles la SA BNP Paribas Personal Finance demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu le 22 novembre 2016 par le tribunal de grande instance de Marseille en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a jugé recevables les demandes formées par l'emprunteur au titre du TEG stipulé dans l'offre de prêt,

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé recevables les demandes formées par l'emprunteur au titre du TEG stipulé dans l'offre de prêt,

- par substitution de moyens, dire et juger que M. X ne justifie pas d'un intérêt à agir en nullité de la stipulation d'intérêt conventionnel,

- par substitution de moyens, dire et juger prescrites les demandes formées par M. X sur le fondement du caractère prétendument abusif de la clause de monnaie de compte,

- par substitution de moyens, dire et juger prescrites les demandes formées par M. X sur le fondement du TEG tendant à la nullité de la stipulation d'intérêt conventionnel et à la déchéance du droit aux intérêts,

- déclarer irrecevables les demandes formées par M. X sur le fondement du caractère prétendument abusif de la clause de monnaie de compte,

- déclarer irrecevables les demandes formées par M M. sur le fondement du TEG tendant à la nullité de la stipulation d'intérêt conventionnel et à la déchéance du droit aux intérêts,

- débouter M. X de l'intégralité de ses demandes,

- condamner M. X au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner M. X aux entiers dépens ;

SUR CE, LA COUR,

Attendu que M. X, qui souhaitait procéder à un investissement immobilier avec défiscalisation de ses revenus, a consulté la société Ficogep, laquelle a réalisé, à sa demande, une étude en 2008 ;

Que le 24 avril 2008, il a signé avec la société Akerys Promotion un contrat de réservation portant sur l'acquisition d'un appartement dans le cadre d'un programme immobilier à Libourne (33), pour un montant de 108.900 euros ;

Qu'à cette fin, il a sollicité la BNP Paribas Personal Finance (la BNP), laquelle lui a adressé le 2 juin

2008 une offre de prêt 'Helvet Immo' portant sur un montant de 180.169,61 Francs Suisses au taux initial de 4.05 % l'an (TEG 4,80 %) d'une durée initiale de 25 ans, offre qu'il a acceptée le 2 juillet 2008 ;

Que les caractéristiques générales du prêt sont les suivantes :

- le prêt est libellé en francs suisses (CHF), monnaie de compte, mais les remboursements s'effectuent en euros, monnaie de paiement indexée ;

- les échéances sont fixes pendant les cinq premières années ; en cas d'évolution du taux de change, celle ci se répercute sur la durée du crédit, qui est rallongée, si la devise se renchérit par rapport à la monnaie de paiement, ou qui est raccourcie, dans le cas contraire ;

- au terme des cinq premières années, à défaut d'opter pour une conversion du prêt en euros, le taux, à l'origine fixe de 4,05 % l'an, devient un taux variable calculé en additionnant deux composantes, l'une fixe égale à 0,95 %, l'autre égale à la moyenne mensuelle du taux SWAP francs suisses 5 ans du mois civil précédent l'application du nouveau taux ;

- enfin, au terme de chaque période de 5 ans, l'emprunteur peut opter pour une conversion du prêt en monnaie de compte en euros ; il dispose alors d'une option :

- soit en faveur d'un taux fixe égal au taux moyen mensuel des emprunts à long terme majoré de 1,05 % ;

- soit en faveur d'un taux variable, révisable tous les trois mois, égal à la somme de deux composantes, l'une fixe égale à 1,05 %, l'autre égale à la moyenne mensuelle du TIBEUR à 3 mois du mois civil précédant la date de révision ;

Que le 14 octobre 2008, Me Pata Lavigne, notaire, a reçu l'acte de vente avec paiement du prix au moyen du prêt Helvet Immo de la BNP d'un montant de 108.900 euros ;

Que lorsque la première période d'option s'est ouverte à lui, M. X a fait le choix de continuer à rembourser son prêt en francs suisses ; qu'il bénéficiait alors d'un taux de 1,78 % ; que lorsqu'une nouvelle période d'option s'est ouverte à lui, il a fait le choix de procéder à la conversion en euros à taux fixe de prêt ; qu'il règle à ce jour une échéance de 828,52 euros ;

Qu'estimant que le contrat de prêt souscrit était à l'origine d'un préjudice financier important, compte tenu du renchérissement du franc suisse par rapport à l'euro consécutif à la crise de la dette souveraine de certains États de la zone euro, M. X a, par acte du 23 juillet 2015, fait assigner la SA BNP Paribas Personal Finance devant le tribunal de grande instance de Marseille afin de remettre en cause les stipulations contractuelles du prêt et d'engager la responsabilité civile de la BNP pour pratiques commerciales trompeuses et manquement aux obligations d'information, de conseil et de mise en garde ; qu'il en a été débouté par le jugement entrepris ;

Sur la nullité du contrat pour objet illicite

Attendu M. X soutient que le contrat Helvet Immo réalise une fraude à la loi en contournant l'obligation énoncée à l'article L. 111-1 du Code monétaire et financier qui dispose que seul l'euro a cours légal et forcé ; que, selon lui, la fraude est constituée par le fait que la monnaie de compte est en francs suisses, mais que les remboursements (monnaie de paiement) sont en euros ;

Que par ailleurs, il considère que le contrat est également contraire à l'article L. 112-1 du Code monétaire et financier qui interdit toute clause d'indexation n'ayant pas de relation directe avec l'objet du contrat ou avec l'activité de l'une des parties ;

Qu'en réponse, la BNP demande à titre principal la confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré prescrite la demande en nullité ;

Qu'à titre subsidiaire, sur le fond, elle fait valoir que la licéité d'une clause de monnaie de compte a été admise par de nombreuses juridictions, dont la cour d'appel d'Aix en Provence, solution récemment consacrée par la Cour de cassation ;

Attendu, selon l'article 2224 du Code civil, que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ;

Qu'il est constant, que le contrat de prêt comporte, en page 1, l'indication suivant laquelle " Le montant du crédit est de 180.169,61 francs suisses ", et qu'il précise, en page 4, que " La monnaie de votre crédit sera l'euro. Vos règlements se feront en euros. " ;

Qu'ainsi que les premiers juges l'ont à juste titre relevé, M. X ne peut donc prétendre avoir ignoré, lors de la souscription du contrat de prêt, la devise dans laquelle était libellé le capital emprunté et celle dans laquelle les échéances de remboursement devaient être acquittées ;

Que le point de départ de la prescription devant être fixé à la date d'acceptation de l'offre de prêt, soit le 2 juillet 2008, c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu qu'à la date de délivrance de l'acte introductif d'instance, le 23 juillet 2015, l'action était prescrite depuis plus de deux ans ;

Que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Sur les clauses abusives

Attendu que M. X soutient que les clauses du contrat relatives aux monnaies de compte et de paiement, d'une part, et aux options pour un changement de monnaie de compte, d'autre part, seraient abusives ;

Qu'il soutient en premier lieu qu'une demande tendant à voir déclarer non écrite une clause abusive est imprescriptible ;

Qu'il considère en second lieu que, du fait de leur caractère obscur et peu compréhensible, la clause de monnaie de compte et d'indexation stipulée en francs suisses dans le prêt Helvet immo n'est ni claire ni compréhensible et que, par suite, elle entre dans le champ d'application des clauses abusives, en application de la jurisprudence de la CJUE ;

Qu'il estime, sur le fond que la clause de monnaie de compte ou d'indexation stipulée en francs suisses crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment exclusif du consommateur, en ce sens que le risque de change pèse exclusivement sur l'emprunteur ; qu'il considère que la BNP s'est ménagé gratuitement une couverture de son risque de change en la faisant entièrement supporter par l'emprunteur, lequel, simple consommateur, n'a reçu aucune contrepartie raisonnable à ce risque de change illimité ;

Que s'agissant de la clause relative aux options pour un changement de monnaie de compte, il estime que celle ci est abusive en ce qu'elle ne prévoit nullement que la BNP doive communiquer dans un certain délai à l'emprunteur toutes les informations utiles pour exercer son choix ; qu'il note qu'une telle clause a été déclarée abusive par la Commission des clauses abusives dans sa recommandation n° 04-03 relative au contrat de prêt immobilier ;

Qu'en réponse, la BNP oppose tout d'abord la prescription de l'action visant à déclarer abusive la clause de monnaie de compte ; qu'elle note que si la doctrine est divisée sur la prescriptibilité ou non d'une telle action, ni la Cour de cassation, ni la CJUE n'ont expressément condamné le fait d'enfermer le contrôle du caractère abusif d'une clause dans un délai de prescription ; que la jurisprudence de la cour d'appel de Paris est clairement en faveur de la prescriptibilité ;

Qu'elle rappelle que l'offre a été acceptée le 2 juillet 2008, et donc le contrat conclu à cette date, de sorte que l'expiration du délai quinquennal de prescription est intervenue le 3 juillet 2013 ; qu'elle demande en conséquence de juger prescrite toute demande tendant à déclarer non écrite la clause de monnaie de compte stipulée dans l'offre de prêt ;

Que, sur le fond, elle considère tout d'abord que les clauses litigieuses échappent au contrôle des clauses abusives, dans la mesure où elles portent sur la définition de l'objet principal du contrat ;

Que s'agissant de la clause de monnaie de compte, elle considère, au vu de la jurisprudence de la CJUE, qu'elle ne constitue pas une clause abusive, dans la mesure où le risque de change pèse également sur les deux parties, et qu'il n'y a donc pas de déséquilibre significatif au détriment du non professionnel entre les droits et obligations des parties ;

Que s'agissant de la clause de conversion, elle fait valoir que la recommandation de la Commission des clauses abusives invoquée par M. X n'est pas applicable, dans la mesure où elle vise une clause dans laquelle l'emprunteur ne disposait que d'un délai de 10 jours pour opérer son choix ; qu'en l'espèce, la BNP indique adresser un courrier à ses clients emprunteurs plusieurs mois avant l'ouverture de l'option ; qu'ainsi, en prévision de la première option, s'ouvrant le 10 octobre 2013, la BNP a adressé les 5 juillet et 10 septembre 2013 deux courriers d'information sur l'ouverture de l'option qu'elle verse aux débats, le courrier du 10 septembre invitant expressément M. X à contacter ses conseillers à un numéro de téléphone indiqué dans le courrier en vue, notamment, de simuler avec eux l'impact des différentes options sur le prêt ; qu'il en a été de même pour l'option s'étant ouverte le 10 octobre 2018 ;

Attendu, en premier lieu, que par arrêt de la CJCE du 21 novembre 2002, Cofidis, C-473/00, la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit que la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, s'oppose à une réglementation interne qui, dans une action intentée par un professionnel à l'encontre d'un consommateur et fondée sur un contrat conclu entre eux, interdit au juge national à l'expiration d'un délai de forclusion de relever, d'office ou à la suite d'une exception soulevée par le consommateur, le caractère abusif d'une clause insérée dans ledit contrat ;

Que la Cour fonde son raisonnement sur le constat suivant lequel la fixation d'une limite temporelle au pouvoir du juge d'écarter, d'office ou à la suite d'une exception soulevée par le consommateur, des clauses abusives est de nature à porter atteinte à l'effectivité de la protection voulue par les articles 6 et 7 de la directive ;

Attendu que la généralité des termes employés par la Cour ne peut conduire qu'à appliquer la même solution à la prescription quinquennale de droit commun prévue à l'article 2224 du Code civil ; que la fin de non recevoir tirée de la prescription sera écartée ;

Attendu, en second lieu, que par arrêt de la CJUE du 30 avril 2014, C-26/13, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que l'article 4, paragraphe 2, de la directive susvisée 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, doit être interprétée en ce sens que les termes " objet principal du contrat " ne recouvrent une clause, intégrée dans un contrat de prêt libellé dans une devise étrangère conclu entre un professionnel et un consommateur en vertu de laquelle le cours de vente de cette devise s'applique aux fins du calcul des remboursements du prêt, que pour autant qu'il est constaté, ce qu'il incombe au juge national de vérifier eu égard à la nature, à l'économie générale et aux stipulations du contrat ainsi qu'à son contexte juridique et factuel, que ladite clause fixe une prestation essentielle de ce contrat qui, comme telle, caractérise celui ci ;

Que la Cour poursuit en énonçant que l'article 4, paragraphe 2, de ladite directive doit être interprété en ce sens que, s'agissant d'une telle clause contractuelle, l'exigence selon laquelle une clause contractuelle doit être rédigée de manière claire et compréhensible pour le consommateur sur un plan grammatical, mais également que le contrat expose de manière transparente le fonctionnement concret du mécanisme de conversion de la devise étrangère auquel la clause concernée ainsi que la relation entre ce mécanisme et celui prescrit par d'autres clauses relatives au déblocage du prêt, de sorte que ce consommateur soit mis en mesure d'évaluer, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques qui en découlent pour lui ;

Que dans son arrêt C-186/16 du 20 septembre 2017, la Cour précise en outre que cette exigence implique qu'une clause selon laquelle le prêt doit être remboursé dans la même devise étrangère que celle dans laquelle il a été contracté soit comprise par le consommateur à la fois sur le plan formel et grammatical, mais également quant à sa portée concrète, en ce sens qu'un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, puisse non seulement connaître la possibilité de hausse ou de dépréciation de la devise étrangère dans laquelle le prêt a été contracté, mais aussi évaluer les conséquences économiques, potentiellement significatives, d'une telle clause sur ses obligations financières ;

Attendu qu'en application de ces principes, il y a lieu de constater que le contrat de prêt souscrit par M. X stipule que l'emprunteur souscrit un prêt en francs suisses qu'il doit rembourser, avec intérêts, en euros ; que cette caractéristique est exposée de façon constante dans l'offre de prêt qui précise que le franc suisse constitue la monnaie de compte et que l'euro est la monnaie de paiement ; que l'opération constitue une opération de droit interne pour laquelle, en raison de la prohibition dans les contrat de droit interne d'une monnaie étrangère comme monnaie de paiement, le contrat prévoit expressément que le règlement des échéances par l'emprunteur doit être effectué en euros pour être ensuite converti en francs suisses et permettre le remboursement du capital emprunté en francs suisses ; que le contrat implique, pour la mise en oeuvre et pour les obligations qu'il met à la charge des parties, la réalisation d'opérations de change, entraînant pour l'emprunteur le paiement de frais de change, et l'application d'un taux de change dont la variation est susceptible d'entraîner l'allongement ou le raccourcissement de la durée d'amortissement et l'augmentation ou la diminution corrélative de la charge de remboursement ;

Qu'ainsi, les conditions de remboursement du prêt ne revêtent pas un caractère accessoire mais définissent l'essence même du rapport contractuel ; que la clause Monnaie de compte, dont toutes les autres ne sont que la déclinaison ou la conséquence, fixe une prestation essentielle caractérisant le contrat ; qu'elle n'est dès lors susceptible d'entrer dans le champ d'application des règles régissant l'élimination des clauses abusives qu'à condition de considérer qu'elle n'est pas rédigée de manière claire et compréhensible ;

Attendu que l'examen de l'offre de prêt reçue et acceptée par M. X mentionne dès la première page que celui ci emprunte des sommes libellées en francs suisses comprenant des frais de change ; que les paragraphes intitulés Description de votre crédit précisent que le montant en francs suisses du crédit, soit 180.169,61 francs suisses, correspond au montant du financement en euros du projet et des frais de change relatifs à l'opération de change du montant du crédit en euros qui lui seront prélevés lors du déblocage des fonds au notaire ; que ces frais de change sont, page 8 de l'offre, fixés à 1,50 % des sommes à convertir dans le cadre des opérations de change ;

Que le contrat décrit ensuite de façon précise, sous la rubrique Ouverture d'un compte interne en francs suisses, le fonctionnement du prêt en devise et mentionne l'inscription des frais de change au débit du compte ; que sont ensuite détaillées pour le compte interne en francs suisses et le compte interne en euros les opérations effectuées lors du règlement des échéances ; que sous la rubrique Opérations de change, est à nouveau exposé le principe de fonctionnement du prêt, en particulier le fait qu'il s'agit d'un prêt en francs suisses, mais que s'agissant d'une opération qui n'est pas une opération de crédit international, les versements effectués au titre du prêt ne peuvent être effectués qu'en euros pour un remboursement de francs suisses ; qu'il est également précisé qu'en acceptant l'offre de crédit, l'emprunteur accepte les opérations de change de francs suisses en euros et d'euros en francs suisses nécessaires au fonctionnement et au remboursement du crédit ;

Que les paragraphes placés sous l'intitulé Remboursement de votre crédit exposent de façon non équivoque que l'amortissement du capital du prêt évoluera en fonction des variations du taux de change et décrivent notamment l'impact de cette variation sur la durée d'amortissement du capital ; qu'il est ainsi précisé que s'il résulte de l'opération de change une somme inférieure à l'échéance en francs suisses exigibles, l'amortissement du capital sera moins rapide et l'éventuelle part de capital non amorti au titre de l'échéance concernée sera inscrite au solde débiteur du compte interne en francs suisses ; que ceci exprime de façon claire et aisément intelligible que l'impact d'une variation défavorable du taux de change sur le montant du capital restant dû et sur l'allongement corrélatif de la durée d'amortissement et donc sur le coût du crédit ; que l'offre de prêt décrit ensuite l'impact de la variation des taux d'intérêts sur le montant des règlements en euros à compter de le cinquième année, où le taux fixe devient, sauf option de conversion en euros, un taux variable ; qu'il y est explicitement mentionné que l'amortissement du capital du prêt évoluera en fonction des variation du taux de change, et que l'amortissement du capital sera plus ou moins rapide selon qu'il résulte de l'opération de change une somme supérieure ou inférieure à l'échéance en francs suisses exigible ; que tout au long de l'offre de prêt, l'accent est mis sur la variabilité du taux de change et son incidence sur la durée d'amortissement et le coût du prêt ;

Que le plan d'amortissement prévisionnel annexé à l'offre rappelle que la monnaie de compte du prêt est le franc suisse et que le plan prévisionnel a été établi dans cette devise ;

Qu'enfin, l'attention de l'emprunteur est expressément appelée dans le formulaire d'acceptation de l'offre sur le fait que le crédit comporte des opérations de change pouvant avoir un impact sur son plan de remboursement ;

Qu'il résulte de ce qui précède que M. X a été clairement et objectivement informé, par l'offre de prêt, le plan prévisionnel d'amortissement et le formulaire d'acceptation, sur les caractéristiques du contrat et de l'impact des évolutions du taux de change sur la durée d'amortissement et sur le coût du crédit ; que le contrat expose de manière transparente le fonctionnement concret du mécanisme de conversion de la devise étrangère et met un consommateur moyen et raisonnablement attentif et avisé en mesure de connaître la possibilité de hausse ou de dépréciation de la devise étrangère dans laquelle le prêt a été contracté, mais aussi d'évaluer les conséquences économiques, potentiellement significatives, d'une telle clause sur ses obligations financières ;

Que le jugement sera, en conséquence, confirmé en ce qu'il a débouté M. X de sa demande tendant à voir déclarer abusive la clause de monnaie de compte ;

Sur la demande de requalification du contrat Helvet Immo en contrat financier

Attendu que, subsidiairement, M. X demande à la cour de requalifier le contrat de prêt en contrat financier au sens des articles L. 211-1 II et D. 211-1 A du Code monétaire et financier ; que, selon lui, le prêt Helvet Immo relève de la définition donnée par la doctrine d'un contrat financier, à savoir un engagement dont l'étendue dépend de l'évolution de la valeur d'un sous-jacent (notamment un indice taux d'intérêt) et qui se dénoue en principe par simple versement calculé en fonction de l'évolution du sous-jacent ;

Qu'au soutien de cette affirmation, il décompose le fonctionnement du contrat de prêt et en déduit qu'il présente toutes les caractéristiques d'un contrat financier ;

Qu'il en tire la conséquence qu'il s'agit d'un instrument de spéculation et de couverture sur le taux de change Euro/CHF, commercialisé comme un crédit immobilier sécurisé et sans risque, alors qu'il constitue un contrat financier hautement spéculatif, en ce sens qu'il permet de réaliser un pari sur une évolution favorable de son endettement en fonction du change Euro/CHF ;

Qu'il note également que le contrat Helvet Immo repose sur un sous jacent, en l'occurrence le taux de change Euro/CHF, et que ce sous jacent gouverne la mesure de l'évolution du capital dû par l'emprunteur tant que celui ci maintient son contrat en francs suisses, tandis que dès qu'il transforme son crédit en euros à taux fixe ou variable, le capital à rembourser cesse de dériver ;

Qu'il souligne par ailleurs que le contrat Helvet Immo comporte un terme, critère de qualification d'un contrat financier dans lequel l'exécution des obligations d'une des parties est affectée d'un ou plusieurs termes ;

Que, de même, un contrat financier se caractérise par le paiement d'un différentiel entre l'obligation initialement souscrite et celle qui résulte de l'évolution du sous jacent, en quoi il diffère d'une simple clause d'indexation ; qu'il constate que l'existence d'un différentiel entre le montant du capital emprunté et le montant du capital à rembourser au terme du contrat caractérise le contrat Helvet Immo, qui, compte tenu des échéances de remboursement fixes qu'il prévoit, conduit, en cas d'évolution défavorable pour l'emprunteur du taux de change, à une augmentation sans limite des mensualités sur les 5 dernières années du crédit prorogé pour ce faire ;

Qu'en conséquence de cette requalification du contrat Helvet Immo en contrat financier qu'il sollicite, M. X constate que la BNP a commercialisé ce contrat financier au mépris des règles énoncées à l'article L. 341-10 du Code monétaire et financier qui interdit le démarchage financier des produits dont le risque maximum n'est pas connu au moment de la souscription ou lesquels le risque de perte est supérieur au montant de l'apport financier initial, et des instruments financiers également appelés contrats financiers ; qu'il note, en tout état de cause que l'article L. 341-16 du Code monétaire et financier lui octroie un délai de rétractation de 14 jours ainsi qu'un délai de réflexion de 48 heures, dont il n'a pu bénéficier ;

Qu'il demande à la cour de constater qu'il a fait l'objet d'un démarchage illicite de nature à engager la responsabilité contractuelle de la BNP et son intermédiaire ;

Qu'en réponse, la BNP considère que M. X fait une lecture erronée des dispositions des articles L. 211-1 et D. 211-1 du Code monétaire et financier, qui, à aucun moment, ne répertorient les crédits immobiliers, fussent ils en devise, comme des produits financiers, pas plus que l'octroi d'un crédit immobilier en devise ne peut être qualifié de service d'investissement ;

Qu'elle estime que le prêt est un prêt libellé en francs suisses, et cette dette de capital en francs suisses n'évolue pas en fonction de la variation des cours ; que c'est uniquement, selon elle, l'imputation des sommes réglées en euros sur le capital après conversion qui est susceptible d'évoluer ; que le capital restant dû en francs suisses diminue à chaque échéance, mais cette diminution sera plus ou moins importante selon la variation du taux de change ; qu'ainsi, il est faux de prétendre que l'exécution du prêt Helvet Immo serait caractérisée par l'existence du paiement d'un différentiel entre l'obligation initialement souscrite et celle qui résulte de l'évolution du sous jacent au terme du contrat ;

Qu'elle estime par ailleurs qu'un contrat à terme au sens de l'article L. 211-1 du Code monétaire et financier est un produit standardisé, susceptible d'être acheté sur un marché organisé ; qu'il s'agit d'une opération par laquelle l'opérateur prend un engagement ferme d'acheter ou de vendre un quantité convenue d'actif à une date future convenue ;

Que l'octroi du prêt litigieux constitue une opération de banque au sens de l'article L. 311-1 du Code monétaire et financier, qui y inclut notamment les opération de crédit ; que cette opération de banque se caractérise par l'exécution d'une opération de change, laquelle constitue une opération connexe aux opérations de banque telle de définie par l'article L. 311-2 du Code monétaire et financier ;

Qu'elle observe que la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013, qui conditionne l'octroi des prêts en devise à certaines règles, n'a pas été intégrée dans les dispositions du Code monétaire et financier relatives aux produits financiers, mais dans la section réservée aux crédits immobiliers du Code de la consommation, en l'occurrence, l'article L. 312-3-1 dudit Code ;

Qu'elle ajoute par ailleurs que le prêt Helvet Immo ne constitue pas une opération spéculative ; qu'il s'agissait uniquement de proposer des taux d'intérêts attractifs pour financer l'achat de bien immobiliers ; que, par ailleurs, le taux de change euro contre franc suisse jouissait d'une stabilité qui perdurait à la date de l'offre de prêt ;

Qu'elle fait valoir que la clause de monnaie de compte, qui est certes susceptible de conduire à un allongement ou à raccourcissement de la durée d'amortissement du prêt, ne constitue pas une opération spéculative, mais est assimilable à une indexation, qui peut entraîner un surcoût ou permettre de réaliser des économies, ce qui ne suffit pas à qualifier l'opération comme étant spéculative ; que, selon elle, la spéculation implique la volonté de réaliser un gain dans un contexte et un laps de temps court et déterminé, ce qui ne se retrouve nullement dans le prêt Helvet Immo ;

Qu'elle conteste, par ailleurs, que le contrat de prêt ait fait l'objet d'un démarchage illicite, sanctionné par l'article L. 341-10 du Code monétaire et financier ; qu'elle rappelle que les contrats Helvet Immo ont été commercialisés exclusivement par des intermédiaires en opérations de banque, dont l'activité est soumise aux articles L. 519-1 du Code monétaire et financier, et considère que si des fautes ont été commis par ces intermédiaires, il s'agit de fautes personnelles et indépendantes, qui ne peuvent être mises à la charge du prêteur ;

Attendu, selon l'article L. 313-1 du Code monétaire et financier, que constitue une opération de crédit tout acte par lequel, notamment, une personne agissant à titre onéreux met ou promet de mettre des fonds à la disposition d'une autre personne ;

Que le prêt immobilier accordé par la BNP à M. X répond très précisément à cette définition, la remise à titre onéreux de fonds à ce dernier n'étant pas contestable ; que cette qualification est exclusive de toute autre, et notamment de celle de contrat financier au sens de l'article L. 211-1 du Code monétaire et financier ; que la circonstance que l'exécution du contrat de prêt donne lieu à une opération de change, opération connexe à l'activité principale des établissements de crédit qu'autorise l'article L. 311-2 du Code monétaire et financier, n'a pas pour effet de retirer au prêt accordé, dont l'objet principal est la remise des fonds à l'emprunteur, à charge pour lui de les rembourser selon les modalités prévues au contrat et moyennant un intérêt, sa nature d'opération de crédit ;

Qu'il s'ensuit que les griefs formulés par M. X sur le fondement de l'affirmation erronée que le contrat de prêt constituerait un contrat financier sont inopérants ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Sur les fautes commises à l'occasion de la commercialisation

Sur les pratiques commerciales trompeuses

Attendu que M. X soutient que la BNP aurait eu recours à des pratiques commerciales trompeuses définies aux articles L. 121-2 et L. 121-1-1 du Code de commerce, en raison d'allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur le consommateur, et en ayant omis, dissimulé ou fourni à contretemps au consommateur une information substantielle ;

Qu'il constate que la BNP, qui a choisi de distribuer ce crédit complexe et risqué en dehors de son réseau d'agence en sélectionnant et en formant des conseillers en gestion de patrimoine et des conseillers en investissements financiers pour que ceux ci commercialisent ce produit, a mis en œuvre une présentation trompeuse et déloyale sur la sécurité et les avantages du crédit Helvet Immo, dont elle a caché le risque inhérent ;

Qu'il constate qu'une plaquette commerciale de 16 pages, intitulée " Le nouveau produit ", comporte des information trompeuses par rapport au fonctionnement réel du contrat, notamment en dissimulant les facteurs de risque ; qu'il estime qu'il en est de même d'un autre document commercial de 73 pages, intitulé " Helvet Immo Premium " qui insiste notamment sur la sécurité et l'effort d'épargne réduit au maximum, de même que sur la fixité du taux d'intérêt, la fixité des mensualités et même la fixité de la durée du crédit ; que ce document reste muet sur les risques existant ; qu'en particulier la variabilité du taux d'intérêt n'est pas mise en avant et est insuffisamment expliquée ;

Qu'il considère que le délit de pratiques commerciales trompeuses est caractérisé, et qu'il en résulte un dol qu'il demande à la cour de sanctionner par l'allocation de dommages intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code civil ;

Qu'en réponse, la BNP soutient que l'action est prescrite en constatant que les pratiques commerciales invoquées sont antérieures à l'acceptation de l'offre, le 2 juillet 2008, et que l'assignation a été délivrée le 23 juillet 2015 ;

Qu'elle considère, en toute hypothèse que l'action est mal fondée, car ce n'est pas elle qui a pu commettre les pratiques commerciales incriminées, n'ayant pas été en rapport direct avec M. X ; qu'au demeurant, les documents invoqués par M. X n'étaient pas destinés à être remis aux clients ;

Attendu qu'ainsi le relève la BNP, les pratiques incriminées, à supposer qu'elles puissent être imputés à la BNP et à supposer que M. X ait été effectivement en possession des documents litigieux, ont été commises antérieurement à la souscription du contrat de prêt ; que M. X n'allègue ni ne démontre que le point de départ du délai de prescription doive être reporté à une date ultérieure ; qu'il s 'ensuit que tant l 'action en nullité du contrat de prêt que l 'action en dommages intérêts qu'il entend exercer sur ce fondement sont prescrites en application de l'article 2224 susvisé du Code civil ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Sur les manquements aux devoirs d'information, de conseil et mise en garde

Attendu que M. X fait valoir qu'en annexant à l'offre un échéancier d'amortissement, la BNP a choisi volontairement de se soumettre à la législation d'ordre public résultant de l'article L. 312-8, modifié par la loi du 3 janvier 2008 entrée en vigueur le 1er octobre 2008 ; qu'ayant fait ce choix, la BNP devait se soumettre entièrement à l'obligation d'annexer à l'offre un échéancier d'amortissement et une notice d'information sur l'influence des taux d'intérêt variables ;

Que rappelant que l'échéancier doit permettre à l'emprunteur, d'un seul coup d''il, de juger de l'effort financier à consentir et l'évolution dans le temps de sa dette en capital, il estime que tel n'était pas le cas de l'échéancier communiqué, dès lors qu'il ne prend pas en compte les frais de change, les frais de tenue de compte, la commission d'ouverture de compte ainsi que les primes d'assurance ; qu'en outre, les échéances y sont indiquées en francs suisses, ce qui ne permet pas à l'emprunteur, d'un seul coup d''il de prendre la mesure de son effort financier ainsi que de l'évolution de la dette ;

Qu'il estime, plus largement, que la BNP a manqué à son obligation d'information, et note que l'offre de crédit, d'une trentaine de pages, ne comporte jamais la mention " risque de change " ou " risque d'augmentation de capital ", mais se contente de formules qualifiées d'alambiquées et procède systématiquement par renvoi ; qu'il note également que l'offre prévoit une variation du taux d'intérêt en fonction du taux " Swap francs suisses 5 ans ", sans que cet indice soit disponible à l'emprunteur et que la BNP fournisse d'information à ce sujet ;

Que M. X soutient en outre que la BNP aurait manqué à ses devoirs de conseil et de mise en garde ; qu'il note que si le banquier est tenu d'un devoir de non immixtion, c'est à la condition que l'opération envisagée ne soit pas risquée ; qu'en pareil cas, le banquier doit informer son client et s'informer de la situation comptable de son client avant de lui octroyer un prêt, et ne peut se retrancher derrière le devoir de non immixtion ; qu'il se réfère, par ailleurs, à la recommandation de l'Autorité de contrôle prudentiel du 6 avril 2012, rendue à la suite des manquements de la BNP constatés lors de la commercialisation des contrats Helvet Immo, rappelant que le risque de change devait faire l'objet d'une information spécifique par les professionnels commercialisant des crédits en devises ; qu'ainsi, le banquier ne peut échapper à sa responsabilité qu'à condition d'avoir mis effectivement en garde son client contre ce risque de change ; qu'il considère qu'en l'espèce le contrat comporte un risque de change important, puisqu'il s'est d'ores et déjà traduit par une augmentation d'environ 30 % du capital emprunté ; qu'il s'agit d'un risque anormal puisque, selon la jurisprudence, lorsque les échéances sont régulièrement acquittées, ce qui est le cas, le capital restant dû ne saurait être plus important que le capital emprunté ;

Qu'il rappelle qu'il était un emprunteur non averti, et que la banque était tenue d'un devoir de mise en garde concernant les risques du contrat Helvet Immo ;

Qu'enfin, il soutient que la BNP aurait manqué à son obligation de prudence et de loyauté et aurait dû s'abstenir de commercialiser un contrat qu'elle savait risqué à une clientèle qui n'était pas en capacité de prendre la mesure de ce risque ; que cette légèreté blâmable a, selon lui, engagé sa responsabilité ;

Qu'en réponse, la BNP soutient que l'action est prescrite, le point de départ du délai étant le jour de l'acceptation de l'offre, et l'assignation ayant été délivrée le 13 juillet 2015 ;

Que subsidiairement, elle fait valoir qu'elle a respecté son obligation de délivrer une information neutre et objective, et rappelle qu'elle n'était pas tenue de fournir une simulation, la loi du 3 janvier 2008 n'étant entrée en vigueur que postérieurement à la souscription du prêt ; que, pour autant, elle estime avoir délivré une information très complète sur l'impact de la variation du taux de change ;

Qu'elle mentionne qu'elle a apporté l'information nécessaire en cours d'exécution du contrat, avec les relevés trimestriels, mentionnant le capital restant dû en francs suisses et sa contrevaleur en euros ;

Qu'elle ajoute qu'elle n'était tenue à aucun devoir de conseil, en vertu du principe de non immixtion, n'étant pas le concepteur de l'opération financée ; que, par ailleurs, la recommandation de l'Autorité de contrôle prudentiel émise le 6 avril 2012 sur la commercialisation auprès des particuliers de prêts comportant un risque de change, qui ne relève pas d'une obligation de conseil mais d'information, ne saurait s'appliquer rétroactivement à un prêt souscrit plus 4 ans avant son entrée en vigueur, le 1er octobre 2012 ;

Qu'enfin, tout en ne contestant pas que M. X était un emprunteur non averti, elle constate que celui ci n'allègue ni ne démontre pas l'existence d'un risque d'endettement ; qu'elle rappelle que, lors de la souscription du prêt, il a été fait une analyse scrupuleuse des ressources de l'emprunteur confrontée à ses charges, et constate du reste que M. X est à jour de ses paiements ;

Attendu que pour les motifs précédemment énoncés à propos des pratiques commerciales trompeuses, les manquements aux obligations et devoirs précontractuels étant antérieurs ou concomitants à la souscription du contrat de prêt, il s'ensuit que l'action en dommages intérêts engagée par M. X sur ce fondement est prescrite ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Sur la capitalisation des intérêts

Attendu que M. X rappelle que, hors le cas des intérêts produits par le solde débiteur d'un compte courant, les intérêts conventionnels ne sont capitalisables qu'à la double condition que les intérêts soient échus depuis au moins un an, et que les parties aient prévu cette capitalisation par une clause expresse ;

Qu'il fait valoir que le contrat Helvet Immo ne comporte aucune clause expresse stipulant que les intérêts conventionnels seront capitalisés, mais constate néanmoins, au vu des relevés, que le capital en franc suisse augmente, ce qui ne pourrait s'expliquer que par la capitalisation des intérêts ; que par ailleurs, ces relevés font apparaître que la BNP n'aurait pas respecté le délai impératif minimum d'un an prévu à l'article 1154 du Code civil ;

Qu'il demande, en conséquence que la BNP soit condamnée à lui restituer l'ensemble des intérêts capitalisés ;

Mais attendu qu'ainsi que le relève la BNP et que l'ont exactement rappelé les premiers juges, l'article 1154, devenu 1343-2, du Code civil ne s'applique qu'en cas d'inexécution d'une obligation de paiement ; qu'en l'espèce, l'augmentation constatée du capital restant dû sur les premiers relevés est la conséquence d'un déblocage fractionné du prêt de 24 mois, pendant lequel les intérêts perçus constituaient une rémunération et non une indemnisation pour défaut de paiement ;

Que le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande présentée par M. X à ce titre ;

Sur le caractère erroné du taux effectif global

Attendu que M. X demande la nullité de la stipulation d'intérêts en raison du caractère erroné du TEG ; que ce caractère erroné résulterait, d'une part, du fait qu'il est fondé sur des clauses abusives, réputées non écrites, d'autre part, d'une capitalisation des intérêts illicite et, enfin, d'erreurs intrinsèques ; qu'à cet égard, le taux aurait dû ressortir à 4,76 % et non à 4,80 %, étant également observé que la BNP a procédé à tort à un arrondi à 4,80 %, alors qu'elle aurait dû l'arrondir à 4,831255053 % ; qu'en ajoutant les frais d'acte qui, selon lui, n'aurait pas été pris en considération, le TEG devrait ressortir à 5,18 % et non à 4,80 + 0,15 = 4,95 % comme le suggère l'offre de prêt ;

Qu'il estime que l'erreur provenant non pas de la prise en compte des frais d'acte mais sur une erreur intrinsèque du calcul du taux, elle n'était pas décelable à la seule lecture du contrat de prêt, et qu'en conséquence, la prescription ne lui est pas opposable ;

Qu'il considère que l'erreur commise est susceptible d'être sanctionnée tant pas la nullité de la stipulation d'intérêts et la substitution du taux d'intérêt légal, que par la déchéance du droit aux intérêts ;

Qu'en réponse, la BNP soulève tout d'abord la prescription de la demande en considérant que l'erreur relative au défaut de prise en compte des frais d'acte notarié était décelable dès la réception de l'offre ; qu'elle ajoute que l'offre de prêt a retenu l'estimation donnée par le notaire ;

Que s'agissant de la contestation concernant l'arrondi, elle fait valoir que le taux de période mentionné dans l'offre est un taux arrondi à 0,40 % au lieu de 0,400058 % ; qu'elle estime que le TEG mentionné dans l'offre, est bien égal à 0,4000058 x 12 = 0,4800696 arrondi à 4,80 % ; qu'elle rappelle à cet égard que la précision doit être d'au moins d'une décimale ;

Attendu en premier lieu, que M. X n'étant pas fondé à se prévaloir d'une erreur de calcul intervenue en sa faveur, il ne peut soutenir que l'action en contestation du TEG ne serait pas prescrite au motif que seul un calcul effectué par un spécialiste aurait permis de mettre en évidence l'erreur de calcul qu'il invoque, dès lors que cette erreur, à la supposer constituée, aurait fait ressortir un TEG de 4,76 % au lieu des 4,80 % mentionnés sur l'offre ;

Que l'erreur invoquée, en ce qu'elle tient par ailleurs à la prise en compte d'une simple estimation des frais d'acte notariés et non des frais effectivement supportés, était décelable à la seule lecture de l'offre ;

Qu'en effet, l'offre de prêt est ainsi rédigée :

Le taux effectif global (hors frais d'acte) est calculé sur la base :

- du taux initial des 5 premières années du prêt supposé constant pendant toute la durée du prêt

- des charges annexes de 0,47 %

Le TEG en résultant s'élève à 4,80 % l'an, soit un taux mensuel de 0,40 %, à supposer que le taux de change et le taux d'intérêt du crédit restent constants pendant toute la durée du crédit. L'incidence des frais d'acte sur ce taux est d'environ 0,15 % l'an ;

Que les charges annexes elles mêmes sont définies plus avant dans l'offre comme incluant les primes d'assurance d'un montant initial de 22,11 euros, la commission d'ouverture de crédit, d'un montant de 1.105,33 euros, les frais de change égaux à 1,50 % des sommes à convertir dans le cadre des opérations de change et les frais de tenue de compte, d'un montant annuel de 31 euros ;

Qu'ainsi, l'offre de prêt met clairement en évidence le caractère estimatif des frais d'acte, d'environ 0,15 % l'an, de sorte que M. X était en mesure, à la seule lecture de l'offre de prêt, d'en déduire que le montant définitif des frais d'acte notarié était susceptible d'être différent ; qu'il disposait donc, dans le délai de prescription, de la possibilité de vérifier ou faire vérifier l'exactitude du TEG retenu au vu des frais effectivement acquittés, et de le contester le cas échéant ;

Qu'il convient, en conséquence, de déclarer prescrite la contestation élevée par M. X au titre du TEG, étant rappelé que l'erreur, en ce domaine, n'est sanctionnable que par la déchéance du droit aux intérêts, dans la mesure appréciée par le juge ;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Attendu que M. X, qui succombe dans ses prétentions, doit supporter les dépens de la procédure d'appel ;

Attendu que l'équité justifie d'allouer en cause d'appel à la BNP une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Par ces motifs : Statuant publiquement et contradictoirement, Confirme le jugement rendu le 22 novembre 2016 par le tribunal de grande instance de Marseille, sauf en ce qu'il a déclaré recevable l'action tendant à la sanction du caractère erroné du taux effectif global ; Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant, - Déclare irrecevable comme prescrite l'action tendant à voir sanctionner le caractère erroné du taux effectif global ; - Condamne M. X à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; Rejette toute autre demande des parties, Condamne M. X aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.

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