CA Lyon, 1re ch. civ. B, 5 mars 2019, n° 18-00477
LYON
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
BRET
Défendeur :
MMA IARD , Habitat Horizon (SARL), Agro Systemes (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Carrier
Conseillers :
M. Ficagna, Mme Papin
Avocats :
Selarl Cvs, Selarl Pinet Barthelemy Ohmer & Associes, Selarl C3lex
Exposé de l'affaire
Selon facture du 19 juillet 2003, M. et Mme D. et Denise Bret M. ont acquis auprès de la société Habitat Horizon un insert de cheminée de marque Godin type Absisse.
Cette société a procédé au raccordement de cet appareil sur un conduit d'évacuation de fumée déjà existant.
Le 15 décembre 2011, un incendie s'est déclaré au niveau de la toiture de la maison, en l'absence de tout occupant, alors que la cheminée était en fonctionnement et avait été chargée avec des bûches de bois compressé commercialisées par la société Agro Systèmes.
Par ordonnances du date du 3 août et 27 novembre 2012 et 22 février 2013, le juge des référés, saisi par M. et Mme Bret M., a ordonné une expertise judiciaire qui a été réalisée au contradictoire notamment de la société Habitat Horizon, de ses assureurs la société Maaf et la société Axa Iard, et de la société Agro systèmes.
M. K. désigné en qualité d'expert pour y procéder a déposé son rapport le 27 janvier 2014 aux termes duquel il a conclu que l'incendie avait pour cause, une quantité excessive de bûches chargées dans le foyer, un dégagement important de chaleur au niveau du passage du conduit de fumée à travers les éléments de la charpente en bois, ce passage ne respectant pas la distance de sécurité de 16 cm.
Parallèlement, la société MMA Iard, assureur incendie de M. et Mme Bret M. a procédé à l'indemnisation de ses assurés.
Par acte des 9 et 10 avril 2015, la société MMA Iard exerçant son recours subrogatoire et M. et Mme Bret M. ont assigné la société Habitat Horizon, la société Axa France Iard, en qualité d'assureur de la société Habitat Horizon et la société Agro Systèmes, devant le tribunal de grande instance de Lyon en déclaration de responsabilité et indemnisation des préjudices subis.
Par jugement du 28 novembre 2017, le tribunal a :
- dit que la société Habitat Horizon a engagé sa responsabilité en installant la cheminée alors que le conduit antérieurement installé par la maître de l'ouvrage n'était pas conforme,
- constaté que M. et Mme Bret M. ont manqué de prudence dans l'utilisation de la cheminée,
- fixé leur préjudice indemnisable à la somme de 220 000 ,
- condamné in solidum la société Habitat Horizon et son assureur la société Axa à payer à la compagnie MMA Iard et à M. et Mme Bret M. la somme globale de 220 000 TTC en réparation des conséquences dommageables de l'incendie du 15 décembre 2011,
- rejeté le surplus des demandes indemnitaires et les demandes accessoires,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné chacune par moitié le compagnie MMA Iard et M. et Mme Bret M. d'une part, et la société Habitat Horizon et la société Axa Assurances d'autre part, aux dépens comprenant les frais d'expertise.
M. et Mme D. Bret M. ont relevé appel principal de ce jugement à l'encontre de toutes les parties.
Aux termes de leurs conclusions communes, M. et Mme Bret M. et la société MMA Iard demandent à la cour :
Vu l'article 1147 du Code civil,
Vu l'article L 111-1 du Code de la consommation,
Vu l'article L 121-12 du Code des assurances,
- de confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que la société Habitat Horizon a engagé sa responsabilité à l'égard de M. et Mme Bret M. en installant la cheminée et a manqué aux obligations lui incombant,
- de l'infirmer pour le surplus et statuant de nouveau :
- de condamner solidairement la société Habitat Horizon, son assureur la compagnie AXA et la société Agro Sytèmes à verser à la compagnie MMA, en sa qualité d'assureur subrogé, la somme de 359 662 TTC,
- de condamner solidairement la société Habitat Horizon, son assureur la compagnie AXA, et la société Agro Sytèmes à verser à M. et Mme Bret M. la somme de 99 321 TTC au titre de leur préjudice,
- de condamner les parties succombantes in solidum à verser la somme de 5 000 à la compagnie MMA et aux époux B.M., au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- de condamner les parties succombantes in solidum aux entiers dépens, comprenant les frais d'expertise judiciaire, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, dont distraction au profit de Cornet Vincent Segurel, avocat aux offres de droit.
Ils soutiennent :
- que la société Habitat Horizon et la société Agro Sytèmes ont été défaillantes dans l'obligation de conseil et d'information,
- que le préjudice, fixé contradictoirement par les parties en expertise et l'expert, s'élève à :
- 289 483 TTC au titre des travaux de reconstruction de l'immeuble,
- 65 905 TTC au titre de la perte des biens meubles, vétusté comprise,
- 46 685 HT au titre des frais divers,
Soit la somme totale de : 402 073 HT ;
- que le montant de la perte d'usage doit être fixé à 2 300 TTC par mois, à compter du 15 décembre 2011 jusqu'à la date de reprise de la maison par les consorts B.M. au mois septembre 2014, soit 33 mois, soit la somme de 75 900 TTC,
- que si le conduit de cheminée a été mis en place par M. Bret M. il revenait à la société Habitat Horizon, en sa qualité de professionnelle, de contrôler l'installation préexistante, ce qui aurait permis de révéler l'écart insuffisant entre le conduit de cheminée et les éléments de charpente,
- que M. et Mme Bret M. n'ont jamais été en possession de la notice d'utilisation de l'insert de marque Godin et ignoraient que la cheminée vendue par la société Habitat Horizon était une cheminée d'agrément de type ornemental,
- que lors de l'achat des bûchettes compactées, les époux Bret M. n'ont reçu aucune information relative aux caractéristiques de ces produits ou à leur éventuelle incompatibilité avec leur cheminée,
- que la capture d'écran du site internet au 15 mars 2013, ne permet en rien de justifier qu'une information identique était disponible sur le site internet de la société fin 2011, lors de l'achat effectué par M. Bret M.,
- que l'information était essentielle puisque les briquettes ont un très haut potentiel calorifique incompatible avec le type de cheminée,
- que la somme forfaitairement fixée par le tribunal ne permet pas de savoir quels postes ont été retenus au titre des préjudices invoqués, pas plus que leur répartition entre M. et Mme Bret M. et les MMA,
- que la perte d'usage de leur maison s'est étendue sur 33 mois, de décembre 2011 à septembre 2014, soit la somme de 33 * 2.300 = 75 900 ,
- que sur le montant total du préjudice fixé par l'Expert à 402 073 TTC, la compagnie MMA a d'ores et déjà versé la somme de 359 662 et est donc subrogée en vertu de l'article L.121-12 du Code des Assurances, dans les droits de M. et Mme Bret M.,
- que cette subrogation légale n'exige nullement de justifier d'une quittance subrogative, dans la mesure où il est justifié des sommes payées par les MMA,
- qu' AXA a manifestement pris la direction du procès dès le stade de l'expertise, sans jamais faire valoir une éventuelle non garantie à l'encontre de son assurée,
- que le refus de garantie opposé est apparu en outre intervenir très tardivement et n'a jamais été régulièrement opposé à la société Habitat Horizon, entraînant son irrecevabilité.
La société Agro Sytèmes demande à la cour :
à titre principal,
- de confirmer le jugement, sauf en ce qu'il n'a pas rejeté le recours subrogatoire des MMA alors qu'il n'était pas justifié et a fixé le préjudice indemnisable à la somme de 220 000 ,
à titre subsidiaire,
- dire et juger que la part de responsabilité susceptible d'être à mise à la charge de la société Agro Systèmes sera purement résiduelle, voir symbolique,
- de condamner M. et Mme Bret M. à lui verser la somme de 3 000 en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement par Maître Caroline Cerveau colliard de la Selarl C3lex.
Ils soutiennent :
- qu'elle rapporte la preuve qu'elle a mis le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles des bûches en bois qu'elle a vendues à M. et Mme Bret M.,
- que c'est M. Bret M. qui a pris contact avec la société Agro Systèmes par téléphone, le 7 décembre 2011, après avoir visité son site internet,
- que le consommateur est parfaitement informé de la puissance calorique des bûches de bois commercialisées par Agro Systèmes, comme étant quatre fois plus caloriques que du bois sec, puisque c'est précisément cette seule question qui guide son choix en raison de l'économie pécuniaire escomptée,
- que cette information est systématiquement donnée par téléphone par les préposés de la société Agro Systèmes et a été donnée verbalement à M. Bret M. par le préposé de la société Agro Systèmes lors de leur entretien téléphonique du 7 décembre 2011,
- qu'il est déconseillé de mettre plus de deux bûches en même temps dans le foyer,
- qu'il sera également rappelé qu'il s'agit d'une cheminée d'ornement, c'est-à- dire prévue pour un usage très ponctuel et non régulier,
- qu'il devra être nécessairement pris en considération la part de responsabilité incombant à la société Habitat Horizon pour ne pas avoir respecté l'écart au feu de la cheminée, et à M. et Mme Bret M. qui ont utilisé des bûchettes non préconisées par le constructeur de leur cheminée et ce dans des proportions inconsidérées, qui constitue également une faute délictuelle imputable à leur négligence,
- que le consommateur moyen d'un produit combustible, quel qu'il soit, est censé se comporter avec un minimum de précaution, et ne peut être considéré que comme une personne négligente s'il laisse brûler un tel produit en étant absent du local où se fait la combustion,
- que les MMA ne justifient pas du paiement de l'indemnité de 378 652 TTC alléguée et de leur recours subrogatoire par la production d'une simple lettre d'acceptation de leurs assurés, qui ne vaut pas quittance, et par la production d'un relevé de paiements interne, qui ne constitue pas une pièce comptable en tant que tel,
- que les demandeurs ne justifient nullement de la date à laquelle ils prétendent avoir réintégré leur domicile à la suite des travaux de réparation,
- que la cour ne pourra que débouter les appelants de leur demande de prise en charge des frais de location ultérieurement au 27 janvier 2014, date du dépôt du rapport de l'expert judiciaire.
La société Axa France Iard demande à la cour :
Vu les dispositions de l'article 1382 du Code civil,
Vu les dispositions de l'article 1147 du Code civil,
Vu les dispositions de l'article L 111-1 du Code de la consommation,
Vu les dispositions de l'article L 121-12 du Code des assurances,
- de réformer le jugement déféré,
- de rejeter toute demande dirigée contre elle ès qualités d'assureur de la société Habitat Horizon,
- de condamner M. et Mme Bret M. et les MMA à lui rembourser la somme de 219 000 qui leur a été versée le 16 janvier 2018 en exécution du jugement ,
À titre subsidiaire,
- de limiter à la somme de 220 000 le préjudice de Mr et Mme Bret M.,
- de condamner la société Agro Systèmes, à la relever et garantir indemne la compagnie AXA France Iard de toute condamnation,
- de condamner qui il appartiendra à verser à la société AXA France Iard la somme de 4 000 au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens, distraits au profit de Me Hervé Barthélémy, avocat, sur son affirmation de droit.
Elle soutient :
- que la compagnie MMA Iard ne justifie pas de la subrogation dont elle fait état,
- que la distance de sécurité de 8 cm entre le conduit de fumée double paroi et les pièces de charpente est conforme au DTU 24.2.2,
- que le conduit litigieux est un conduit double peau avec un isolant en laine de roche compressée de 25 millimètres d'épaisseur type GI 304 fabriqué par la Tôlerie Industrielle des Alpes,
- que le DTU 24.2.2 de novembre 1990, applicable en 2003 lors de l'installation de la cheminée, vise lui aussi, comme la notice de la cheminée Godin, la distance de sécurité "écart au feu" de 16 cm, mais ce DTU, qui constitue les règles de l'art à respecter, prend soin de préciser que :
"pour certains conduits sous avis technique, cette distance peut être diminuée",
- que le conduit mis en œuvre par M. Bret M., qui n'est pas un conduit "ordinaire" bénéficie d'un avis technique,
- que la distance mesurée sur site est de 7 à 10 cm après incendie,
- que rien n'établit que les lieux se retrouvaient, au moment de l'expertise, dans leur configuration d'origine, et que la distance de 8 cm n'était pas respectée avant le sinistre,
- que la société Habitat Horizon n'a commis aucune faute au titre de son obligation de résultat, et que sa responsabilité ne peut être engagée de ce fait,
- que M. et Mme Bret M. prétendent, sans en justifier, que la société Habitat Horizon ne leur aurait pas remis la notice d'utilisation de la cheminée après la réalisation des travaux de pose de celle ci,
- que la société Habitat Horizon n'a commis aucun manquement à son devoir de conseil ni aux règles de l'art,
- que l'avis de l'expert selon lequel, à partir du moment où le fabricant de la cheminée impose en aggravation à ladite réglementation, une distance supérieure, c'est cette dernière qui aurait dû être prise en compte, par principe de précaution, ne saurait être admis, puisqu'il n'existe de la part du fabriquant de la cheminée aucune volonté d'aggraver la réglementation, puisqu'il se contente d'exiger une distance de sécurité de 16 cm, qui s'applique pour les conduits classiques,
- que l'incendie trouve son origine dans l'utilisation en très grande quantité de bûches de bois reconstitué, qui est la cause exclusive du sinistre,
- que le vendeur des bûches de bois reconstitué ne communique aucune information sur l'utilisation des dites bûches,
- que M. et Mme Bret M. d'une part, et la société Agro Systèmes d'autre part, sont responsables de la survenance de l'incendie,
- que la police décennale de la société AXA, souscrite postérieurement à la pose de la cheminée, n'a pas vocation à s'appliquer,
- que la police décennale de la société AXA, ne garantit pas la responsabilité contractuelle de la société Habitat Horizon,
La société Horizon Habitat n'a pas constitué avocat malgré l'avis qui lui a été adressé par le greffe le 23 janvier 2018 et la signification de la déclaration d'appel qui fait apparaître qu'elle a été effectuée par acte d'huissier en date du 17 mai 2018.
MOTIFS
Sur la responsabilité de la société Agro Systèmes
La notice d'installation et d'utilisation de l'appareil Godin acquis par M. et Mme Bret M., indique :
"combustible recommandé : bois en bûche de longueur de 45 cm,
combustibles de remplacement : briquette de lignite
combustible interdit : tous les autres."
L'expert en déduit que l'utilisation de bûches de bois compressé serait interdite par le fabricant de l'insert.
Toutefois, force est de constater que les bûches de bois compressées sont constituées uniquement à base de déchets de bois ou de sciure de bois et ne sont donc que du bois en bûche.
Elle sont donc nécessairement compatibles avec tous type de poêle ou de foyer à bois.
D'ailleurs, la classification NF des appareils de chauffage au bois, annexée au rapport d'expertise classe ces appareils en trois catégories selon le combustible à savoir :
"3.1.3 :
- combustibles utilisés :
type B appareil utilisant seulement le bois, en bûche
type M appareils mixtes utilisant outre le bois, certains combustibles minéraux solides
type T appareils transformables utilisant outre le bois, certains combustibles minéraux solides"
En suivant le raisonnement de l'expert, il n'existerait donc aucun appareil de chauffage au bois, susceptible d'être utilisé avec des bûches de bois compressé, ce qui ne peut être admis.
La société Agro systèmes n'était donc tenue d'aucune information particulière à cet égard dès lors que son produit correspond à du bois en bûche.
En revanche, selon l'expertise une bûche de bois compressé a un pouvoir calorifique 2,5 à 4 fois supérieur à une bûche de bois classique à volume égal de sorte qu'il est recommandé de ne charger qu'une bûche ou deux à la fois, au maximum.
La société Agro Sytèmes ne conteste pas que cette information qui figure d'ailleurs sur son site internet, avec la précision " risque de surchauffe", doit être donnée à l'acheteur.
Ce fournisseur se borne à soutenir qu'elle a donné à M. Bret M. cette information, oralement, lors de son appel téléphonique, ce que conteste M. Bret M..
La société Agro Systèmes ayant la charge de la preuve, il doit être considéré que cette preuve n'est pas rapportée, et qu'elle a donc manqué à son obligation pré contractuelle d'information.
Il existe un lien de causalité avec l'incendie dès lors que l'expertise confirme que c'est la quantité excessive de bûches de bois compressé qui est à l'origine de la surchauffe du conduit de fumée et par convection, de l'inflammation d'un élément de la charpente.
La responsabilité de la société Agro Systèmes sera donc retenue.
Sur la responsabilité de la société Habitat Horizon
a - en ce qui concerne la distance de sécurité
Le tribunal a retenu que la société Habitat Horizon avait commis une faute en installant un insert de cheminée sans s'assurer de la conformité du conduit existant au regard des distances de sécurité.
L'expert a indiqué que cette non-conformité était établie en raison du non respect des distances de sécurité préconisées par le fabricant du foyer, la société Godin, à savoir 16 cm.
Toutefois, ce raisonnement ne peut être retenu si les règles de l'art admettent des distances différentes en fonction de la nature particulière du conduit.
En l'espèce, le DTU 24.2.2 dans sa version applicable à l'époque de l'installation mentionne que les conduits de fumée doivent être disposés par rapport aux éléments combustibles avec un écart de 16 cm entre la paroi intérieure du conduit et l'élément combustible le plus proche mais que pour certains conduits sous avis technique cette distance peut être diminuée.
En l'espèce, il n'est pas contesté que le conduit modinox mis en œuvre est un conduit double paroi avec isolant interne, sous avis technique et que l'écart au feu peut être réduit à 8 cm entre la paroi extérieure et l'élément combustible le plus proche.
L'expert estime que par "précaution" il devait être retenu un écart de 16 cm.
La notice d'installation du foyer Godin, ne comporte aucune mention laissant penser à une restriction par rapport aux préconisation du DTU en cas d'utilisation de conduit sous avis technique.
L'expert n'a pas interrogé la société Godin, pour se faire confirmer que même en cas d'utilisation d'un conduit double paroi isolé la distance de sécurité ne pouvait être inférieure à 16 cm.
L'expert ne fournit d'ailleurs pas les caractéristiques du conduit litigieux.
En conséquence, le raisonnement de l'expert ne peut être retenu et il doit être admis que le DTU autorisait une distance de 8 cm entre la paroi extérieure du conduit et la partie combustible la plus proche.
L'expert indique avoir mesuré une distance comprise entre 7 cm et 10 cm.
Compte tenu de l'incendie, de l'intervention des pompiers et du démontage de la souche de cheminée, il ne peut être considéré que la distance n'était pas respectée, le conduit ayant nécessairement été déplacé.
En conséquence, il ne peut être retenu une responsabilité de la société Habitat Horizon de ce seul chef alors que l'expert n'a cité aucun autre désordre concernant le conduit de fumée.
b - sur le défaut de remise de la notice d'utilisation du poêle
M. et Mme Bret M. font valoir qu'ils n'avaient pas connaissance que le foyer acquis était un appareil classé A, à savoir un appareil ayant "essentiellement un rôle ornemental" au sens de la classification NF.
Toutefois, ils ont su utiliser sans difficulté leur cheminée pendant 8 ans sans réclamer cette notice.
D'autre part, ce type de foyer peut parfaitement fonctionner avec des bûches de bois compressé.
En conséquence, la notice ne pouvait en aucun cas les éclairer sur l'usage possible ou non des bûches de bois compressé.
En l'absence de lien de causalité entre l'absence de notice et le dommage, aucune conséquence ne peut être retenue de cet éventuel manquement.
Au vu de ces éléments, la responsabilité de la société Horizon Habitat n'est pas établie ce dont il résulte que la garantie de la société Axa France Iard ne pourrait être mobilisée quand bien même elle serait tenue contractuellement.
Le jugement sera donc infirmé de ce chef et les appelants seront déboutés de leurs demandes à l'encontre de cette société et de la société Axa France Iard
Sur la responsabilité de M. et Mme Bret M.
Il est indiqué par M. et Mme Bret M. qu'il s'agissait de la première utilisation de ce type de bûches achetées quelques jours auparavant.
En chargeant le foyer d'environ 6 ou 7 bûches de bois compressé, et juste avant de s'absenter, Mme Bret M. a commis une imprudence patente, alors que l'utilisation d'un produit nouveau en guise de combustible doit faire l'objet de la part d'une personne normalement raisonnable et prudente d'un minimum de questionnement, alors que les risques d'emballement de l'insert ou de feu de cheminée sont des risques notoirement connus.
Le manquement de la société Agro Systèmes à son obligation d'information ne peut venir exonérer totalement le consommateur de toutes les conséquences de ses agissements fautifs.
Au vu de ces circonstances, il convient de retenir un partage de responsabilité à hauteur de 50%.
Sur le préjudice
Les préjudices ont été vérifiés contradictoirement entre les experts d'assurances et l'expert judiciaire sur la base de justificatifs.
Cette méthode n'a pas fait l'objet de contestations de la part des parties qui n'ont adressé à l'expert aucun dire à cet égard.
En conséquence, il sera retenu le chiffrage de l'expert, page 30 de son rapport à savoir :
Mesures conservatoires : 5 100 HT.
Déblai - Démolition : 25 320 HT.
Reconstruction : 210 816 HT.
total : 241 236 HT
TVA : 20% = 48 247,20
sous/total : 289 483,20 TTC.
Mobilier - Contenu :Vétusté déduite : 65 905 TTC.
Nettoyage : 4 941 TTC.
Frais de relogement provisoire: 4 996 TTC.
Divers :
Mise en conformité : 1 113 TTC.
Maîtrise d'œuvre : 13 534 TTC.
Mission SPS : 3 384 TTC.
Frais ingénieur structure : 1 734 TTC.
Honoraires d'expert d'assuré :
Ce poste de préjudice, retenu pour une somme de 16 983 TTC n'étant pas justifié par les pièces produites, il ne peut qu'être rejeté.
Perte d'usage :
L'expert a retenu un montant de 27 mois X 2 300 = 62 100 TTC (3 mois ont été rajoutés suite à la dernière réunion d'expertise sur site au vu de l'avancée des travaux. Ce délai est donc certain).
Toutefois, ce montant ne fait l'objet d'aucune explication alors que les appelants produisent un
contrat de bail pour une maison individuelle d'un montant de 1 700 par mois en date du 16 janvier 2012.
En conséquence, il sera retenu ce montant mensuel soit :
27 mois X 1700 = 45 900 TTC
Le total du préjudice sera donc fixé à la somme totale de 430 990,20 TTC.
Compte tenu du partage de responsabilité le montant des dommages et intérêts dus par la société Agro Systèmes s'élève à : 215 495,10
Sur la subrogation de la société MMA
Aux termes de l'article L121-12 du Code des assurances, l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur.
Le bénéfice de la subrogation légale n'est pas subordonné à la production de quittances.
La société MMA justifie par ses relevés de comptes avoir indemnisé ses assurés, ce que ces derniers admettent, en exécution de la garantie incendie du contrat d'assurance souscrit auprès d'elle par M. et Mme Bret M. la somme de 359 662 .
Sur le solde revenant aux époux B.M.
Le préjudice non indemnisé des époux B.M. s'élève à :
430 990,20 - 359 662 = 71 328,20
Le solde de la somme due par la société Agro Systèmes sera versée à la société MMA subrogée, soit 215 495,10 - 71 328,20 = 144 166,90 en application de l'article 1252 ancien du Code civil, la subrogation ne pouvant nuire au créancier.
Sur l'article 700 du Code de procédure civile
Il convient de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Sur les dépens
Les dépens seront partagés entre la société Agro Sytèmes d'une part, et M. et Mme Bret M. et la société MMA Iard d'autre part.
Par ces motifs LA COUR, Réformant le jugement et statuant de nouveau, - Déclare la société Agro Systèmes responsable des préjudices subis par M. et Mme Bret M. à l'occasion de l'incendie de leur maison survenu le 15 décembre 2011 à Jonage ( 69), à hauteur de 50%, - Fixe le préjudice total à la somme de 430 990,20 , dont 215 495,10 à la charge de la société Agro Systèmes, - Condamne la société Agro Systèmes à payer : à la société MMA Iard, subrogée dans les droits de leurs assurés, la somme de 144 166,90 , outre la somme de 1 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, à M. et Mme Bret M. , la somme de 71 328,20 outre la somme de 1 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Déboute M. et Mme Bret M. et la société MMA Iard de leurs demandes dirigées contre la société Habitat et Horizon et la société Axa France Iard, et rappelle que le présent arrêt vaut titre pour le remboursement des sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement, - Condamne M. et Mme Bret M. et la société MMA Iard à payer à la société Axa France Iard la somme de 2 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, - Déboute les parties de leurs autres demandes, - Fait masse des dépens de première instance et d'appel, qui comprendront les frais d'expertise, et dit qu'ils seront partagés par moitié entre la société Agro Systèmes entre d'une part et M. et Mme Bret M. et la société MMA Iard d'autre part, dont distraction au profit de Me Hervé Barthélémy, avocat, sur son affirmation de droit.