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Décisions

ADLC, 25 février 2019, n° 19-DCC-32

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

relative à la création d'une entreprise commune par les groupes VYV et Habitat Développement

ADLC n° 19-DCC-32

25 février 2019

Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 21 janvier 2019, relatif à la création d'une entreprise commune par les groupes VYV et Habitat Développement ; Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l'instruction ; Adopte la décision suivante :

I. Les entreprises concernées et l'opération

1. L'union mutualiste de groupe (UMG) Groupe VYV (ci-après " VYV "), soumise aux dispositions du livre II du code de la mutualité, est constituée de dix mutuelles : la MGEN, la MGEN Filia, la MGEN Vie, la Mutuelle Nationale Territoriale, la Mutuelle Générale de l'Économie, des Finances et de l'Industrie, Harmonie Mutuelle, Harmonie Fonction Publique, Mutuelle Mare-Gaillard, Chorum et SMACL. Compte tenu, notamment, des liens de solidarité financière établis entre l'UMG et ses membres affiliés, de la combinaison de leurs comptes, ainsi que du pouvoir de gestion économique unique et durable dont elle est dotée, VYV constitue un seul et même ensemble économique, non contrôlé au sens du contrôle des concentrations(1). VYV intervient principalement dans les domaines de l'assurance santé complémentaire, de la prévoyance, de l'assurance emprunteur, de l'assurance obsèques et de l'assurance épargne retraite.

2. Habitat Développement (ci-après " HD ") est la holding de tête du groupe Arcade, actif dans le secteur de l'immobilier en particulier la gestion d'actifs immobiliers et la promotion immobilière de logements sociaux. Elle est contrôlée par un fond commun de placement d'entreprises détenu par les salariés et qui ne détient aucune autre participation contrôlante.

3. En premier lieu, selon les termes du protocole d'accord signé en date du 22 mai 2018, l'opération consiste en la création d'une société anonyme (ci-après " Newco "). [Confidentiel]. Selon les termes du pacte d'actionnaire, VYV et HD détiendront in fine chacun 40 % des droits de vote, le solde étant réparti entre les autres actionnaires (Crédit Agricole, Action Logement, CDC et Croix Rouge)(2).

4. Par ailleurs, selon les dispositions des statuts, Newco sera gouvernée par un conseil d'administration composé de 15 membres dont 5 seront respectivement nommés par VYV et HD. Les décisions seront adoptées à la majorité simple. Par ailleurs, il ressort du pacte de majorité que le conseil d'administration sera tenu de consulter un comité stratégique dont les membres seront choisis par le conseil d'administration parmi les administrateurs nommés par VYV et HD en ce qui concerne un certain nombre de décisions stratégiques telles que la définition de la stratégie du groupe ou du budget annuel ou la nomination et la révocation des membres des organes d'administration. Toutefois, son avis ne sera pas contraignant pour le conseil d'administration. Partant, ni VYV ni Arcade ne pourront adopter ou bloquer seuls les décisions au sein de la cible. Dès lors, sur le fondement des dispositions des statuts et des pactes d'actionnaires et de majorité, aucun actionnaire de Newco ne sera en mesure d'exercer seul ou conjointement le contrôle de cette dernière.

5. Néanmoins, il convient d'examiner si VYV et HD, détenteurs des portions de droits de vote les plus importantes, seraient en mesure d'exercer dans les faits une influence déterminante sur l'entreprise.

6. Le point 48 des lignes directrices précisent que " [P]our déterminer si un actionnaire minoritaire dispose d'une influence déterminante, l'Autorité examine en premier lieu, les droits qui lui sont conférés et leurs modalités d'exercice. Elle tient compte par exemple :

• des droits de veto, en particulier ceux portant sur le plan stratégique, la nomination des principaux dirigeants, les investissements et le budget ;

• de la possibilité de bénéficier de droits particuliers conférant immédiatement ou dans le futur une part dans les décisions supérieures à la part dans le capital ;

• de la possibilité de nommer certains responsables au sein des organes de dirigeants de l'entreprise ;

• de la possibilité de monter dans le capital ultérieurement soit du fait d'accords particuliers, soit par la détention de titres convertibles en actions, ou encore en l'existence d'options d'achat ; en elles-mêmes, de telles options ne peuvent conférer un contrôle sur une période antérieure à leur exercice, à moins que cette option s'exerce dans un proche avenir conformément à des accords juridiquement contraignants, mais elles peuvent venir conforter d'autres indices d'une influence déterminante ;

• de la possession de droits de préemption ou de préférence ;

• de la possibilité d'obtenir des informations détaillées sur les activités de l'entreprise, en particulier celles généralement réservées au management ou aux entreprises mères. "

7. En l'espèce, les dispositions du pacte de majorité signé entre VYV et HD prévoient que le poste de président du conseil d'administration soit attribué à un administrateur désigné par VYV et le poste de vice-président à un administrateur désigné par HD. En outre, le poste de directeur général sera désigné sur proposition de HD. Par ailleurs, il ressort des dispositions du pacte d'actionnaires que les parties se consentent mutuellement un droit de préférence portant sur les titres dont ils sont propriétaires. Enfin, bien que le conseil d'administration ne soit pas tenu par leurs avis, ce dernier est entouré de plusieurs comités parmi lesquels le comité stratégique, le comité d'audit, le comité des nominations et des rémunérations et le comité de développement dont les compétences sont définies dans le pacte de majorité. HD et VYV sont les seuls actionnaires à être représentés dans l'ensemble de ces comités et ainsi à avoir accès aux informations échangées au sein de ces instances. Ces différentes informations portent notamment sur la définition de la stratégie et du budget annuel, la destination des apports de VYV, la nomination et la révocation des organes d'administration et de direction, la politique générale et les éléments de rémunération, l'élaboration et le contrôle des informations comptables et financières, les opérations de partenariat et de croissance externe ainsi que les modalités juridique et financière des coopérations entre organismes d'habitations à loyer modéré. Partant, VYV et HD seront en mesure d'exercer ensemble une influence déterminante sur Newco.

8. En second lieu, Newco sera la holding de tête d'un groupe regroupant les activités de HD et de VYV sur le marché du logement social. Elle dispose ainsi d'une activité dédiée, différente de ses sociétés mères. Elle disposera également de moyens financiers adéquats ainsi que d'un personnel d'exploitation propre. Enfin, il ressort des statuts que Newco a été créée pour une durée de 99 ans. Dès lors, l'entreprise commune disposera de ressources suffisantes lui permettant de fonctionner sur le marché de manière autonome et durable et peut ainsi être qualifiée d'entreprise commune de plein exercice.

9. Ainsi, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la création de Newco s'analyse comme la création d'une entreprise commune de plein exercice. Par conséquent, l'opération notifiée constitue une concentration au sens de l'article L. 430-1 du code de commerce.

10. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d'affaire hors taxe total sur le plan mondial de plus de 150 millions d'euros (Groupe VYV : [=150 millions] d'euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2018 et HD : [=50 millions] pour le même exercice). Chacune de ces entreprises a réalisé en France un chiffre d'affaire supérieur à 50 millions d'euros (Groupe VYV : [=50 millions] d'euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2018 et HD : [=50 millions] pour le même exercice). Compte tenu de ces chiffres d'affaires, les seuils prévus par l'article 1, paragraphe 2, a) et b) du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil du 20 janvier 2004 sont atteints. Néanmoins, les parties réalisant chacune plus des deux tiers de leurs chiffres d'affaires européen en France, l'opération ne relève pas de la compétence de l'Union européenne. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l'article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. La présente opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatifs à la concentration économique.

II. Délimitation des marchés pertinents

11. Les parties à l'opération sont simultanément actives sur les marchés des services immobiliers. Par ailleurs, VYV est également présente sur les marchés de la gestion de copropriété, de l'hébergement de longue durée des personnes âgées et des personnes jeunes, des services à la personne et des marchés des soins infirmiers à domicile qui présentent un lien vertical ou congloméral avec le marché des services immobiliers.

A. LES MARCHÉS DES SERVICES IMMOBILIERS

1. LES MARCHÉS DE PRODUITS ET DE SERVICES

12. Les autorités de concurrence nationale(3) et européenne(4) ont envisagé, tout en laissant la question ouverte, différentes segmentations dans le secteur des services immobiliers selon (i) les destinataires des services, les biens étant destinés soit aux particuliers, les immeubles concernés étant alors à usage résidentiel, soit aux entreprises, les immeubles concernés étant alors à usage commercial ou professionnel, (ii) le mode de fixation des prix (immobilier résidentiel libre et logements sociaux ou intermédiaires aidés), (iii) le type d'activité exercée dans les locaux (bureaux, locaux commerciaux et autres locaux d'activités comme par exemple les entrepôts ou les hôtels) et (iv) la nature des services ou biens offerts.

13. Pour cette dernière segmentation, les services suivants ont été identifiés :

(i) la promotion immobilière qui comprend les activités de construction et de vente de biens immobiliers ;

(ii) la gestion d'actifs immobiliers pour compte propre ;

(iii) la gestion d'actifs immobiliers pour compte de tiers (des investisseurs institutionnels, principalement des banques et des compagnies d'assurances) qui recouvre le conseil et la gestion de portefeuille immobilier (arbitrage et valorisation d'actifs), le montage des opérations d'investissement immobilier et la gestion d'actifs immobiliers et de véhicules d'investissements spécialisés (notamment les sociétés civiles immobilières) ;

(iv) l'administration de biens immobiliers qui recouvre les activités de gestion des immeubles pour le compte de propriétaires et qui peut être segmentée entre la gestion locative et la gestion de copropriété ;

(v) l'expertise immobilière ;

(vi) le conseil immobilier ;

(vii) l'intermédiation dans les transactions immobilières pour laquelle l'intermédiation dans les opérations d'achat/vente est distinguée de l'intermédiation dans les opérations de location.

14. Au sein de la gestion d'actifs immobiliers résidentiels pour compte propre, le ministre de l'économie a considéré qu'il convenait de distinguer " la gestion de logements sociaux, dans la mesure où cette activité évolue dans un cadre réglementaire particulier, par le biais duquel l'État joue un rôle important, tant en termes d'aides financières que d'attribution de logements "(5). Cette distinction est toujours d'actualité.

15. En effet, la gestion du parc locatif social est encadrée par l'État par le biais de conventions conclues avec les organismes d'habitation à loyer modéré(6) (dites " conventions APL "). Des entreprises, qualifiées d'organismes de logement social (OLS), sont soumises au contrôle de l'Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS)(7). Il existe en France 755 bailleurs sociaux (ou " organismes HLM ") qui se répartissent en trois catégories : (i) 275 OPH créés et gérés par les collectivités locales (communes, intercommunalités, départements)(8), (ii) 278 entreprises sociales pour l'habitat (ESH) de droit privé à but non lucratif(9) dont 72 appartiennent au groupe Action Logement et (iii) 168 coopératives d'habitations à loyer modéré(10).

16. La principale caractéristique du parc locatif social est de proposer à des populations ciblées sous condition de ressources(11) des logements à des loyers nettement inférieurs à ceux pratiqués au sein du parc locatif privé(12), dont l'attribution est décidée par une commission d'attribution.

17. Le ministre de l'économie a également envisagé de distinguer les logements sociaux des logements locatifs intermédiaires au motif que " le logement locatif intermédiaire présente des caractéristiques économiques comparables à celles du logement social, la principale différence consistant en l'absence de réglementation imposant des plafonds de ressources ou des limitations de loyers. De telles contraintes existent cependant, mais elles résultent des "accords de réservation" conclus le plus souvent sur des durées longues, allant de 9 à 15 ans, avec des réservataires (administrations publiques locales ou nationales, entreprises nationales), au bénéfice de leurs fonctionnaires ou agents titulaires. "(13). Cette distinction est également toujours actuelle.

18. Par ailleurs, en ce qui concerne le marché de la détention et de la gestion d'actifs immobiliers pour compte propre d'immeubles à usage d'autres activités que celle de bureau ou de local commercial, tout en laissant la question ouverte, la pratique décisionnelle(14) a envisagé une segmentation plus fine du marché selon la nature des activités, s'agissant d'un immeuble à vocation d'EHPAD. Dans cette hypothèse, les parties ont communiqué leurs positions sur un marché qui serait limité aux seuls actifs immobiliers à usage d'EHPAD.

19. Par analogie, les parties proposent également de retenir, au sein de ce marché, un segment relatif à la détention et à la gestion pour compte propre d'immeubles à usage d'hébergement de longue durée pour personnes jeunes. Dans cette hypothèse, les parties ont communiqué leurs positions sur ce segment.

20. Enfin, en ce qui concerne le marché de la promotion immobilière résidentielle, la pratique décisionnelle(15) a envisagé de distinguer la promotion immobilière résidentielle de la promotion immobilière de locaux destinés aux entreprises.

21. En l'espèce, les parties sont simultanément présentes sur le segment des " logements locatifs sociaux " au sein du marché de la gestion des actifs immobiliers résidentiels pour compte propre, sur le marché de la détention et de la gestion d'actifs immobiliers pour compte propre d'immeubles à usage d'autres activités que celle de bureau ou de local commercial, éventuellement sur un segment limité aux seuls actifs immobiliers à usage d'EHPAD et sur un segment limités aux seuls actifs immobiliers à usage d'hébergement de longue durée pour personnes jeunes, ainsi que sur le marché de la promotion immobilière résidentielle.

22. La question de la délimitation exacte de ces marchés peut être laissée ouverte, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurant inchangées, quelles que soient les délimitations retenues.

2. LES MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES

23. La pratique décisionnelle(16) considère que les marchés de services immobiliers à destination des particuliers sont de dimension locale. En revanche, les opérations relatives à des marchés de services immobiliers à destination des entreprises ont été analysées tant au niveau local qu'au niveau national(17).

24. S'agissant en particulier du marché de la détention et gestion pour compte propre d'actifs immobiliers, les autorités de concurrence ont mené leurs analyses concurrentielles au niveau régional ou infrarégional. S'agissant du marché de la promotion immobilière, les autorités ont mené leurs analyses au niveau régional ou infrarégional pour les régions hors de l'Île-de-France.

25. La question de la délimitation géographique exacte des marchés du secteur de l'immobilier peut toutefois être laissée ouverte, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurant inchangées, quelles que soient les délimitations retenues.

26. Au cas d'espèce, l'analyse sera conduite à l'échelle de la région Pays de la Loire, à l'échelle du département de la Loire-Atlantique et à l'échelle de l'agglomération de Nantes.

B. LES MARCHÉS DE L'HÉBERGEMENT DE LONGUE DURÉE DES PERSONNES ÂGÉES

1. MARCHÉ DE SERVICES

27. Les parties sont simultanément actives dans le secteur de l'hébergement aux personnes âgées, qui se distingue du marché de la gestion d'immeubles destinés à l'hébergement de personnes âgées décrit supra. Dans ce secteur, la pratique décisionnelle(18) considère que le marché regroupe (i) les maisons de retraite ou établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (ci-après " EHPAD "), (ii) les logements-foyers ou résidences de services qui sont des groupes de logements permanents autonomes, en chambre ou en appartement, qui proposent des équipements et des services collectifs dont l'usage est facultatif, les personnes âgées étant propriétaires ou locataires de leur logement, et (iii) les unités de soins de longue durée (" USLD ") qui sont des structures médicalisées destinées à la prise en charge permanente de personnes très dépendantes.

28. La pratique décisionnelle a estimé qu'il n'était pas pertinent de sous-segmenter ce marché en fonction du statut juridique de l'établissement ou selon la participation financière qui est demandée à la personne âgée. En revanche, la question d'un marché distinct des USLD a été examinée. Les parties estiment que cette question peut être laissée ouverte dans la mesure où elles exploitent des EHPAD et des résidences services, et non des USLD.

29. Il n'y a pas lieu de remettre en cause la délimitation de ce marché à l'occasion de la présente décision. La question d'un marché distinct des USLD peut être laissée ouverte dans la mesure où, quelle que soit la segmentation retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle resteront inchangées.

2. MARCHÉ GÉOGRAPHIQUE

30. En ce qui concerne la délimitation géographique du marché de l'hébergement aux personnes âgées, la pratique décisionnelle(19) a retenu pour l'ensemble du territoire hors région parisienne, l'existence de marchés de dimension départementale, le critère de choix de l'établissement étant sa proximité avec le domicile de la personne âgée ou du référent familial. En ce qui concerne la région parisienne, la prise en compte de l'ensemble de la région a été envisagée.

31. La question de la définition exacte du marché géographique concerné peut cependant être laissée ouverte dans la mesure où, quelle que soit la délimitation retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurent inchangées.

C. LES MARCHÉS DE L'HÉBERGEMENT DE LONGUE DURÉE DES PERSONNES JEUNES

32. Les parties détiennent des établissements d'hébergement de longue durée destiné à un public jeune. Ces établissements sont ensuite exploités par des associations agréées. En ce qui concerne HD, certains établissements en région parisienne sont exploités par une association interne au groupe. En ce qui concerne le groupe VYV, les six établissements qui seront rattachés à Newco sont exploités par le CROUS ou une association agréée.

33. Les parties proposent de définir un marché de l'hébergement de longue durée des personnes jeunes, qui se distinguerait du marché de la gestion d'immeubles destinés à l'hébergement de personnes jeunes décrit supra. Elles soutiennent que ce marché regroupe les résidences étudiantes, les résidences pour jeunes actifs et les résidences pour jeunes travailleurs. Elles estiment également qu'il n'y a pas lieu de distinguer entre les différents types de résidences.

34. En l'espèce, l'analyse concurrentielle sera menée sur les marchés tels que définis par les parties. La délimitation exacte de ce marché peut néanmoins être laissée ouverte dans la mesure où, quelle que soit la segmentation retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle restent inchangées.

35. Les parties proposent de retenir une dimension régionale du marché en ce qui concerne la région parisienne. Pour le reste du territoire, une dimension départementale peut être retenue. La délimitation géographique exacte de ce marché peut néanmoins être laissée ouverte dans la mesure où, quelle que soit la segmentation retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle restent inchangées.

D. LES MARCHÉS DES SERVICES À LA PERSONNE

36. La pratique décisionnelle nationale a défini les services à la personne comme " des prestations de services généralement effectuées au domicile du consommateur afin de contribuer au bien-être dans sa vie quotidienne "(20). Elle a laissé ouverte la question d'une segmentation plus fine de ce marché, notamment entre la fourniture de service (i) à la famille, (ii) de la vie quotidienne, et (iii) aux personnes dépendantes.

37. En tout état de cause, la définition exacte de ces marchés de services peut être laissée ouverte, dans la mesure où les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurent inchangées quelle que soit la segmentation retenue.

38. En l'espèce, l'analyse concurrentielle sera menée au niveau national.

E. LES MARCHÉS DES SOINS INFIRMIERS À DOMICILE

39. La pratique décisionnelle nationale a laissé ouverte la question de distinguer les activités de soins infirmiers à domiciles de celles de soins dans le cadre d'établissements hospitaliers(21). En l'espèce, les parties étant présentes sur le marché des soins infirmiers à domicile, qui est le seul segment présentant des liens congloméraux avec les marchés où les parties sont présentes, l'analyse concurrentielle sera menée sur ce marché.

40. S'agissant de la délimitation géographique, la pratique décisionnelle nationale a retenu une dimension locale, au plus régionale, du marché des soins infirmiers à domicile(22).

III. Analyse concurrentielle

A. ANALYSE DES EFFETS UNILATÉRAUX HORIZONTAUX

1. SUR LE MARCHÉ DE LA DÉTENTION ET DE LA GESTION DES LOGEMENTS SOCIAUX

41. Aux niveaux régional (Pays de la Loire), départemental (Loire-Atlantique), et local (agglomération de Nantes), selon les estimations des parties, la part de marché de la nouvelle entité demeurera inférieure à 15 % quelle que soit la segmentation retenue.

42. Compte tenu de ces parts de marché limitées, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur le marché de la détention et de la gestion de logements sociaux.

2. LES MARCHÉS DE LA DÉTENTION ET DE LA GESTION IMMOBILIÈRE POUR COMPTE PROPRE

43. Les parties ont estimé leurs parts de marché à [0-5] % sur le marché national de la détention et de la gestion immobilière pour compte propre d'immeubles à usage d'hébergement de longue durée pour personnes âgées et inférieure à 5 % sur le marché national de la détention et la gestion immobilière pour compte propre d'immeubles à usage d'hébergement de longue durée pour personnes jeunes. Sur chacun de ces marchés, les parties indiquent qu'elles ont des parts de marché inférieures à 25 %, quelle que soit la segmentation envisagée.

44. Compte tenu de ces parts de marché limitées, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur le marché de la détention et de la gestion immobilière pour compte propre.

3. LE MARCHÉ DE LA PROMOTION IMMOBILIÈRE

45. Les parties ont estimé leurs parts de marché cumulées au niveau national à moins de 5 % sur le marché de la promotion immobilière.

46. Au niveau local, les activités des parties se chevauchent dans la région Pays de la Loire, dans le département de la Loire Atlantique et dans l'agglomération nantaise. Dans ces marchés locaux, leur part de marché cumulée n'excède pas 20 %.

47. Compte tenu de ces parts de marché limitées, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur le marché de la promotion immobilière.

B. ANALYSE DES EFFETS NON-HORIZONTAUX

48. Une concentration verticale peut restreindre la concurrence en rendant plus difficile l'accès aux marchés sur lesquels la nouvelle entité sera active, voire en évinçant potentiellement les concurrents ou en les pénalisant par une augmentation de leurs coûts. Ce verrouillage veut viser les marchés aval, lorsque l'entreprise intégrée refuse de vendre un intrant à ses concurrents en aval, ou les marchés amont, lorsque la branche aval de l'entreprise intégrée refuse d'acheter les produits des fabricants actifs en amont et réduit ainsi leurs débouchés commerciaux.

49. Par ailleurs, une concentration est susceptible d'entraîner des effets congloméraux lorsque la nouvelle entité étend ou renforce sa présence sur des marchés présentant des liens de connexité avec d'autres marchés sur lesquels elle détient un pouvoir de marché.

50. Cependant, la pratique décisionnelle considère en principe qu'un risque d'effet vertical ou congloméral peut être écarté dès lors que les parts de marché de l'entreprise issue de l'opération sur les marchés concernés ne dépassent pas les 30 %.

51. En l'espèce, sur l'ensemble des marchés concernés par l'opération et présentant entre eux des liens verticaux ou congloméraux (gestion de copropriété, hébergement de longue durée des personnes âgées, hébergement de longue durée des personnes jeunes, services à la personne, soins infirmiers à domicile) ne dépassent pas les 30 %.

52. Par conséquent, l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets non-horizontaux.

DÉCIDE

Article unique : L'opération notifiée sous le numéro 18-257 est autorisée.

NOTES :

1 Décision de l'Autorité de la concurrence n° 17-DCC-104 du 5 juillet 2017 relative à la fusion des Unions mutualistes de Groupe Istya et Groupe Harmonie.

2 En l'espèce, la répartition des droits de vote est décorrélée de la répartition capitalistique. Ainsi, VYV détiendra [...] % du capital et 40% des droits de vote ; HD, [...] % du capital et 40 % des droits de vote ; Crédit Agricole, [...]% du capital et [...] % des droits de vote ; Action Logement et la CDC, [...] % du capital chacun et [...] % des droits de vote chacun et enfin, la Croix Rouge, [...] % du capital et [...] % des droits de vote

3 Voir notamment la décision C2008-79 / Lettre du ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi du 22 août 2008, aux conseils des sociétés CDC et Eurosic, relative à une concentration dans le secteur de l'immobilier, BOCCRF N° 8 bis du 23 octobre 2008 et les décisions de l'Autorité n° 09-DCC-16 du 22 juin 2009 relative à la fusion entre les groupes Caisse d'Épargne et Banque Populaire, n° 15-DCC-156 du 7 décembre 2015 relative à la prise de contrôle conjoint d'un actif immobilier à usage de bureaux par Sogecap et Prédica, n° 14-DCC-46 du 1er avril 2014 relative à la prise de contrôle conjointe d'un actif immobilier industriel en Moselle par la Norges Bank et Prologis, n° 16-DCC-65 du 9 mai 2016 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Foncière de Paris par la société Eurosic, n° 16-DCC-84 du 24 juin 2016 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Foncière de Paris par la société Gecina, n° 17-DCC-68 du 31 mai 2017 relative à la prise de contrôle exclusif de certains actifs immobilier de l'office public interdépartemental de l'Essonne, du Val-d'Oise et des Yvelines (OPIEVOY) par Action Logement et n° 17-DCC-122 du 4 août 2017 relative à la prise de contrôle exclusif d'actifs de la société Eurosic par la société Gecina.

4 Voir les décisions de la Commission COMP/M.2110 Deutsche Bank / SEI / JV du 25 septembre 2000, IV/M.2825 Fortis AG SA / Bernheim-Comofi SA du 9 juillet 2002, COMP/M.3370 BNP Paribas/ARI du 9 mars 2004.

5 Lettre du ministre en date du 21 juin 2002 relative à la création de l'entreprise commune Eulia entre la Caisse des dépôts et consignations et la Caisse nationale des caisses d'épargne ; lettre du ministre en date du 8 novembre 2002 aux conseils de la société Gécina relative à une concentration dans le secteur des actifs immobiliers.

6 En application de l'article L 351-2-2° du code de la construction et de l'habitation (ci-après CCH).

7 Voir les articles L. 342-1 à L. 342-21 du CCH.

8 Voir les articles L. 421-1 à L. 421-26 du CCH.

9 Il s'agit des anciennes sociétés anonymes d'habitation à loyer modéré (SAHLM) ; voir les articles L. 421-2 à L. 421-2-1 du code de la construction et de l'habitation.

10 Voir les articles L. 422-3 à L. 422-3-2 du CCH.

11 L'article R. 331-12 du CCH subordonne l'attribution des subventions et prêts à la construction sociale à l'occupation des logements sociaux par des personnes dont l'ensemble des ressources, au moment de l'entrée dans les lieux, est inférieur à des plafonds fixés chaque année par arrêté ministériel.

12 En moyenne les loyers du parc social sont deux fois moins élevés que ceux du parc privé.

13 C2006-151 / Lettre du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie du 10 janvier 2007 au conseil du groupe Société Nationale Immobilière, relative à une concentration dans le secteur du développement et de la gestion de parc immobilier à vocation essentiellement résidentielle, BOCCRF n° 3bis du 23 mars 2007.

14 Décision de l'Autorité de la concurrence n° 13-DCC-146 du 22 octobre 2013 relative à la prise de contrôle conjoint d'une société civile immobilière pour la détention d'un actif immobilier à usage d'EHPAD par la Foncière Malherbe Claudel (Groupe Crédit Agricol) et la Caisse des Dépôts et Consignations.

15 Voir la décision de l'Autorité de la concurrence n° 11-DCC-138 du 30 septembre 2011 relative à la prise de contrôle exclusif par la société Altarea de la société Urbat Promotion.

16 Voir la décision de l'Autorité de la concurrence n°12-DCC-18 du 13 février 2012 relative à la prise de contrôle exclusif de la société immobilière de location pour l'industrie et le commerce par la société Icade.

17 Voir notamment la lettre du ministre de l'économie, des finances et de l'emploi C2007-52, précitée et.la décision 09-DCC-16 du 22 juin 2009 de l'Autorité de la concurrence relative à la fusion entre les groupes Caisse d'Épargne et Banque Populaire.

18 Voir les décisions de l'Autorité de la concurrence n° 14-DCC-132 du 15 septembre relative à la prise de contrôle exclusif de la société Colisée par le groupe Eurazeo, n° 14-DCC-22 du 21 février 2014 relative à la fusion-absorption de la société Médica par la société Korian, n° 10-DCC-179 du 13 décembre 2010 relative à la prise de contrôle exclusif du groupe Méditer et Mieux-Vivre par la société Orpéa et n° 10-DCC-132 du 11 octobre 2010 relative à la création de deux entreprises communes par Domus Vi et GDP Vendôme.

19 Voir les décisions précitées.

20 Voir notamment les décisions de l'Autorité n° 10-DCC-52 du 2 juin 2010 relatif à la création d'une société de groupe d'assurance mutuelle (SGAM) par la MACIF, la MAIF et la MATMUT et n° 17-DCC-74 du 1er juin 2017 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Asten Santé par la société La Poste Silver.

21 Voir la décision de l'Autorité de la concurrence n° 14-DCC-22 du 21 février 2014 relative à la fusion-absorption de la société Médica par la société Korian.

22 Voir la décision n° 14-DCC-22 précitée.