CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 18 avril 2019, n° 16-19886
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Max Transports (EURL)
Défendeur :
Marti (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Birolleau
Conseillers :
Mmes Soudry, Moreau
Avocats :
Mes Garnaud, Chardin, Pachalis, Levin
FAITS ET PROCÉDURE :
La société Max Transports est une société de transport de colis et palettes en région parisienne.
Elle a sous-traité, à partir de janvier 2003, une partie de ses livraisons à la société Marti. Les deux sociétés ont alors conclu, le 1er janvier 2003, un contrat de prestations de service exclusif en matière de transport routier de marchandises, d'une durée de 12 mois renouvelable pour une même durée par tacite reconduction, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties par lettre recommandée au moins deux mois avant la date d'échéance.
A compter de fin septembre 2011, les prestations de fret de la société Marti pour le compte de la société Max Transports ont cessé.
C'est dans ce contexte que, par acte délivré le 20 décembre 2012, la société Marti a fait assigner la société Max Transports devant le tribunal de commerce de Pontoise aux fins de voir constater la résiliation du contrat aux torts et griefs de la société Max Transports, condamner ladite société à lui payer une somme de 51 272,62 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice, outre une somme de 2 511,60 euros indûment retenue sur sa facture du 31 juillet 2011.
Par jugement rendu le 18 mars 2015, le tribunal de commerce de Pontoise a :
- constaté la prescription de la demande de la société Marti en paiement par la société Max Transports de la somme de 2 511,60 euros et l'en a débouté ;
- prononcé la résiliation du contrat de transport conclu le 1er janvier 2003 aux torts et griefs de la société Max Transports ;
- déclaré la société Max Transports mal fondée en ses demandes reconventionnelles, et l'en a débouté ;
- condamné le société Max Transports à payer à la société Marti la somme de 31.728 euros au titre de dommages et intérêts ;
- déclaré le société Max Transports mal fondée en sa demande de paiement de dommages et intérêts, et l'en a débouté ;
- condamné la société Max Transports à payer à la société Marti la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- déclaré la société Max Transports mal fondée en sa demande de paiement sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, et l'en a débouté ;
- condamné le société Max Transports aux dépens de l'instance, liquidés à la somme de 81,12 euros, ainsi qu'aux frais d'acte et de procédure d'exécution, s'il y a lieu ;
- ordonné l'exécution provisoire du jugement.
Par déclaration du 5 octobre 2016, la société Max Transports a interjeté appel à l'encontre de cette décision.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Par dernières conclusions notifiées le 26 avril 2017, la société Max Transports, appelante, demande à la cour, de :
Vu les dispositions des articles L. 442-6 et D. 442-3 du Code de commerce,
- dire et juger l'appel de la société Max Transports qui tend à l'annulation du jugement du tribunal de commerce de Pontoise et subsidiairement à sa réformation recevable,
- annuler le jugement rendu le 18 mars 2016 par le tribunal de commerce de Pontoise,
Subsidiairement,
In limine litis,
Vu l'article L. 133-6 du Code de commerce (ancien article 108 du Code du commerce),
- constater que l'assignation notifiée le 20 décembre 2012 interrompt la prescription,
- constater que toutes les demandes judiciaires visant des livraisons réalisées avant le 20 décembre 2011 sont prescrites,
En conséquence,
- débouter la société Marti de sa demande en irrecevabilité de l'appel de la société Max Transports,
- confirmer le jugement en ce qu'il a constaté la prescription de la demande de la société Marti en paiement par la société Max Transports de la somme de 2 511,62 euros et l'en a débouté,
- infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la résiliation du contrat de transport aux torts et griefs de la société Max Transports,
- condamner la société Marti au paiement de 20 464 euros outre les intérêts à compter de la décision,
- condamner la société Marti au paiement de la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- condamner la société Marti au paiement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et en tous les dépens.
La société Max Transports soulève tout d'abord la nullité du jugement de première instance pour excès de pouvoir dès lors que le tribunal de commerce de Pontoise ne figure pas parmi les juridictions ayant compétence exclusive pour connaître des actions fondées sur l'article L. 442-6 du Code de commerce, en application de l'article D. 442-3 dudit Code.
Elle précise qu'elle n'a pas formé d'appel nullité, mais un appel de droit commun tendant à l'annulation de la décision entreprise, subsidiairement à sa réformation, fondé sur les dispositions de l'article 542 du Code de procédure de procédure civile et qui est recevable.
Elle soulève également la prescription annale de l'action en application de l'article L. 133-6 du Code de commerce, pour toutes les demandes visant des livraisons réalisées avant le 20 décembre 2011, l'assignation ayant été délivrée le 20 décembre 2012.
Au fond, elle fait valoir que la rupture des relations commerciales est imputable à la société Marti qui ne s'est plus présentée pour exécuter ses tournées à compter du 28 septembre 2011, la dernière facture de celle-ci datant du 30 septembre 2011. Elle considère que la nature des relations entre les parties ne justifiait pas d'adresser une mise en demeure à la société Marti, après plusieurs appels téléphoniques demeurés infructueux. Elle soutient que la rupture des relations commerciales ne saurait lui être imputée au seul motif que la société Marti aurait contesté en être à l'origine et qu'elle n'y avait aucun intérêt, ainsi que l'ont retenu à tort les premiers juges, alors qu'en mettant un terme à sa sous traitance, la société Marti a fait en sorte de ne pas s'expliquer sur la disparition de 200 palettes Europes sur sa tournée du mois de juillet 2011, au titre desquelles elle a appliqué à la société Marti une retenue de 2 511,60 euros au mois de juillet 2011 puis émis une facture, sans que l'intimée ne formule de contestation à ce titre durant un an. Elle ajoute que la société Marti est immédiatement devenue sous-traitante d'un autre prestataire qu'elle a facturé dès le 30 novembre 2011 et que la réorganisation économique rapide de celle-ci, qui lui a permis de rendre bénéficiaire son activité alors déficitaire, est incompatible avec les allégations de ladite société quant à l'initiative de la rupture, mais également sur son état de dépendance économique vis à vis d'elle.
Elle précise qu'elle n'a pas payé les factures des prestations de transport de la société Marti car celle-ci ne les lui a pas adressées avant de les lui transmettre via son conseil, et qu'elle s'en est acquittée dès réception, sans que ladite société n'ait relevé la moindre carence de sa part.
Elle soutient que la rupture brutale des relations commerciales, sans préavis, par l'intimée, suivie par la fin de la relation commerciale avec la société Transports Gilbert, les dirigeants appartenant à la même famille, lui a causé, du fait de la désorganisation ainsi générée, un préjudice qu'elle évalue à la somme de 15 000 euros. Elle estime que la société Marti aurait dû respecter un préavis de 3 mois en application du contrat type de transport, et correspondant à la somme de 20 464 euros, à laquelle devront être appliqués les intérêts au taux légal à compter de la décision à venir.
A supposer que la rupture lui soit imputable, elle conteste le préjudice allégué par l'intimée qu'elle n'estime nullement démontré, la société Marti ne justifiant que d'un seul mois d'interruption d'activité et confondant le chiffre d'affaires et le résultat.
Par dernières conclusions notifiées le 27 février 2017, la société Marti, intimée, demande à la cour de :
- dire et juger irrecevable l'appel nullité de la société Max Transports,
- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a dit et jugé la société Max Transports responsable de la rupture du contrat de sous traitance signé entre les parties en date du 1er janvier 2003,
- confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la résiliation du contrat de transport aux torts et griefs de la société Max Transports,
- débouter la société Max Transports de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
- porter à la somme de 51 272,62 euros le montant des dommages et intérêts qui lui ont été alloués par les premiers juges en réparation de la faute commise par la société Max Transports dans la rupture du contrat du 1er janvier 2003 conclu avec elle,
- condamner la société Max Transports au paiement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la société Max Transports aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la société Recamier, représentée par Maître Christophe Pachalis, avocat aux offres de droit.
Elle soulève l'irrecevabilité de l'appel nullité de la société Max Transports, dès lors que cette voie de recours est une construction jurisprudentielle permettant de demander à la cour d'annuler une décision uniquement dans le cas où la voie d'appel n'existe pas, et que l'appel de droit commun est ouvert en l'espèce. Elle relève, en outre, que le jugement entrepris est fondé sur les dispositions de l'article 1134 du Code civil, et non pas de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce, de sorte que l'excès de pouvoir allégué n'est pas caractérisé.
Sur la prescription annale soulevée par l'appelante, elle s'en rapporte.
Elle considère que la rupture du contrat est imputable à la société Max Transports qui, à compter de fin septembre 2011, ne lui a plus confié de prestations de transport. Elle ajoute que l'appelante lui a réglé avec retard et après mise en demeure ses deux dernières factures, la première du 31 août 2011 pour un montant de 6 847,10 euros TTC et la seconde du 30 septembre 2011 pour un montant de 5 633,16 euros. Elle indique qu'après cette cessation des commandes de prestations, la société Max Transports lui a facturé sans motif, le 30 septembre 2011, 200 palettes prétendument non restituées, pour un montant de 2 511,60 euros, alors que ni son camion de 20m3 ni son entrepôt ne lui permettent de transporter et de conserver un tel nombre de palettes. Elle rappelle qu'elle a dénoncé la rupture abusive du contrat par lettre de mise en demeure du 10 novembre 2011 et que l'appelante ne lui a jamais adressé de mise en demeure aux fins de reprise des tournées, ni aucune demande de restitution des palettes prétendument disparues avant l'envoi de ce courrier, et n'a pas non plus déposé plainte pour vol.
Elle indique que la société Max Transports ayant cessé de lui donner tout fret, elle a perdu en un instant et sans préavis son unique client en violation des dispositions de l'article L. 442-6 du Code de commerce, et que la rupture brutale de cette relation commerciale ininterrompue et ancienne de huit ans, alors qu'elle était en situation de dépendance économique par rapport à l'appelante à laquelle elle consacrait l'intégralité de son activité et que la relation entre les parties était similaire à un contrat de travail, lui a causé un préjudice qu'elle évalue à dix mois de facturation correspondant à une somme de 51 272,62 euros. Elle précise à ce titre qu'elle n'a exercé aucune activité en octobre 2011 et qu'elle a rapidement dû trouver un autre client, la société Zycler, à laquelle elle a facturé des prestations pour des montants bien inférieurs au chiffre d'affaires réalisé avec l'appelante, et que doit également être pris en considération le temps nécessaire pour retrouver un même volume d'activité.
MOTIFS
Sur la recevabilité de l'appel :
Selon l'article 542 du Code de procédure civile, "L'appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d'appel".
L'article 543 du même Code dispose que " La voie d'appel est ouverte en toutes matières, même gracieuses, contre les jugements de première instance s'il n'en est autrement disposé ".
L'article 561 du même Code énonce que " L'appel remet la chose jugée en question devant la juridiction d'appel pour qu'il soit de nouveau statué en fait et en droit (...) ".
La société Max Transports a formé appel selon déclaration du 5 octobre 2016 mentionnant "appel total". Cet appel, qui tend à la réformation ou à l'annulation du jugement entrepris, est un appel de droit commun, et non pas un appel nullité pour excès de pouvoir tendant à voir juger que les premiers juges ont méconnu l'étendue de leur pouvoir de juger. L'irrecevabilité de l'appel alléguée de ce chef n'est donc pas caractérisée.
L'appel est donc recevable.
Sur la nullité du jugement entrepris :
Ainsi que le fait valoir l'intimée, qui formait en première instance une demande indemnitaire au titre de la résiliation du contrat, les premiers juges n'ont pas statué sur le fondement des dispositions de l'article L. 442-6 I.5° du Code de commerce, lesquelles ne sont pas visées dans le jugement.
La demande de nullité du jugement pour excès de pouvoir est donc mal fondée, et l'appelante en sera déboutée.
Sur la prescription :
Selon l'article L. 133-6 du Code de commerce, " Les actions pour avaries, pertes ou retards, auxquelles peut donner lieu contre le voiturier le contrat de transport, sont prescrites dans le délai d'un an, sans préjudice des cas de fraude ou d'infidélité (...) ".
Sont soumisses à la prescription annale éditée par cet article, sauf en cas de fraude ou d'infidélité, toutes les actions auxquelles le contrat de transport peut donner lieu.
Ainsi que l'ont jugé avec pertinence les premiers juges, la demande, formulée par la société Marti, aux fins de restitution de la somme de 2 511,60 euros indûment retenue sur sa facturation de juillet 2011 par la société Max Transports, au titre de 200 palettes utilisées à l'occasion de livraisons durant ce même mois, prétendument non restituées et facturées par l'appelante le 30 septembre 2011, est prescrite, l'assignation interruptive du délai de prescription ayant été délivrée devant le tribunal de commerce de Pontoise le 20 décembre 2012, soit plus d'un an après l'exécution des prestations de transport en cause.
Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.
Sur la rupture brutale de la relation commerciale établie :
A titre liminaire, il convient de relever que l'intimée formule en cause d'appel une demande fondée sur les dispositions de l'article L. 442-6 I, 5° du Code de commerce qu'elle vise explicitement.
Les parties ayant expressément prévu un délai de préavis contractuel, distinct de celui du contrat-type du contrat de transport, l'article L. 442-6 I, 5° a vocation à s'appliquer.
Selon l'article L. 442-6 I, 5° du Code de commerce, " Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers :
5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni sous marque de distributeur. A défaut de tels accords, des arrêtés du ministre chargé de l'Economie peuvent, pour chaque catégorie de produits, fixer, en tenant compte des usages du commerce, un délai minimum de préavis et encadrer les conditions de rupture des relations commerciales, notamment en fonction de leur durée. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure. Lorsque la rupture de la relation commerciale résulte d'une mise en concurrence par enchères à distance, la durée minimale de préavis est double de celle résultant de l'application des dispositions du présent alinéa dans les cas où la durée du préavis initial est de moins de six mois, et d'au moins un an dans les autres cas ".
La rupture, pour être préjudiciable et ouvrir droit à des dommages et intérêts, doit être brutale c'est-à-dire effectuée sans préavis écrit tenant compte des relations commerciales antérieures ou des usages reconnus par des accords professionnels.
Les usages commerciaux en référence desquels doit s'apprécier la durée du préavis de résiliation du contrat de sous-traitance de transport contractuellement convenu sont nécessairement compris comme conformes au contrat-type dont dépendent les professionnels concernés.
Les parties ne discutent pas l'existence d'une relation commerciale établie, nouée entre elles à compter de la conclusion d'un contrat de sous-traitance de transport routier de marchandises affrètement du 1er janvier 2003 et qui a donné lieu à un flux d'affaires stable et durable entre les parties, ni de l'ancienneté de la relation, de près de 9 ans au moment de la rupture intervenue fin septembre 2011, mais de l'imputabilité de ladite rupture.
Le contrat de sous-traitance de transport routier de marchandises affrètement conclu entre les parties le 1er janvier 2003 précise que le commissionnaire, disposant de trafics routiers dont il ne peut assurer la réalisation par ses moyens propres, recherche un sous-traitant capable de lui fournir une solution de remplacement, que le voiturier, de son côté, cherche à s'assurer une activité régulière dans le cadre d'une sous-traitance de longue durée avec une garantie de rémunération. Les parties se sont donc engagées sur une régularité des commandes de prestations de transports confiées à la société Marti.
Les prestations de fret de la société Marti pour le compte de la société Max Transports ont été régulières entre 2006 et le 30 septembre 2011, ainsi qu'en justifient les factures dressées par ladite société entre 2004 et 2011 produites aux débats, dont il ressort que le chiffre d'affaires mensuel moyen réalisé par la société Marti était de 5780 euros en 2009, 6844 euros en 2010 et 6 324 euros en 2011. Le flux d'affaires a été interrompu fin septembre 2011.
La société Max Transport, qui n'a plus confié de prestations de fret à la société Marti fin septembre 2011, ne justifie nullement de l'envoi d'un courrier de mise en demeure ni même d'un échange écrit avec celle-ci, antérieur à la rupture de la relation commerciale établie et lui reprochant de ne plus s'être présentée pour exécuter ses tournées à compter du 28 septembre 2011, ou même d'avoir détourné ses palettes. La seule facturation, par la société Max Transports à la société Marti le 30 septembre 2011, de 200 palettes Europes non rendues et l'allégation, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 18 novembre 2011, soit postérieurement à la cessation du flux d'activité entre les parties, que M. Y ne s'est plus présenté depuis le 28 septembre 2011 au siège de la société Max Transports alors qu'il venait d'être convoqué afin de s'expliquer sur la disparition des palettes, ne suffisent pas à établir ces manquements.
La rupture est donc imputable à la seule société Max Transports, et non pas à la société Marti, dont les manquements invoqués par l'appelante ne sont pas caractérisés, la relation de confiance que cette dernière prétend avoir entretenue avec la société Marti ne la dispensant pas de rapporter la preuve des dits manquements.
En outre, la seule circonstance que la société Marti ait trouvé un autre prestataire à compter du mois de novembre 2011 n'est pas de nature à lui imputer la rupture de la relation commerciale établie.
La rupture étant imputable à la société Max Transports, celle-ci est mal fondée à former une demande indemnitaire à ce titre à l'encontre de l'intimée.
La rupture de la relation commerciale est intervenue alors que la société Marti pouvait légitimement espérer que celle-ci perdurerait, compte tenu des commandes régulières et stables entre les parties, et présente un caractère brutal, dès lors qu'elle a été effectuée sans préavis écrit.
Le délai de préavis raisonnable tenant compte des relations commerciales antérieures ou des usages reconnus par des accords professionnels devant être respecté en cas de rupture de la relation commerciale établie doit être de nature à permettre de trouver de nouveaux partenaires commerciaux, sans qu'il y ait lieu à prendre en considération la réalisation, ou non, de cet objectif ultérieurement à la rupture de la relation commerciale.
La société Marti ne produit pas aux débats d'éléments de sa comptabilité générale, mais une seule attestation de son expert-comptable en date du 6 juin 2014 relative au chiffre d'affaires réalisé par l'intimée après la rupture de la relation commerciale établie, ainsi que ses déclarations d'impôts sur les sociétés mentionnant une production vendue de services de 50 980 euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2010, de 60 866 euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2011 et de 42 736 euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2012, dont les montants déclarés confirment qu'elle réalisait son chiffre d'affaires avec la seule société Max Transports, et donc sa situation de dépendance économique au moment de la rupture de la relation commerciale établie, peu important qu'elle ait pu rapidement trouver un autre partenaire commercial ultérieurement à celle-ci.
Le préavis raisonnable qui aurait dû être respecté en référence aux usages du commerce est celui de trois mois prévu dans le contrat-type de transport applicable à tous les transports routiers de marchandises, lequel préavis est de nature à permettre à la société Marti de trouver de nouveaux partenaires commerciaux compte tenu de la nature du secteur concerné, quand bien même les relations commerciales entre les parties étaient anciennes de près de neuf ans au moment de la rupture et que la société Marti était en situation de dépendance économique.
Le préjudice de la société Marti, qui consiste à réparer la seule brutalité de la rupture de la relation commerciale établie et non pas les conséquences de ladite rupture, équivaut à la perte de marge brute durant le délai de préavis non respecté.
Faute pour ladite société de justifier la marge brute réalisée, qui ne saurait être équivalente au chiffre d'affaires réalisé, il convient de retenir la marge brute de 25 % régulièrement réalisée s'agissant d'une activité de transport routier.
Le préjudice de la société Marti doit donc être évalué sur la base du chiffre d'affaires mensuel moyen réalisé les trois dernières années, soit 6 313 euros, et la marge brute susvisée, et donc à la somme de 4 737 euros (6 313 x 3 x 25 %).
Le jugement entrepris sera donc infirmé s'agissant du quantum alloué, la cour condamnant la société Max Transports à payer à la société Marti une indemnité de 4 737 euros en réparation de son préjudice.
Sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile :
Le jugement critiqué sera confirmé en ce qu'il a condamné la société Max Transports aux dépens et sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Il convient, en outre, de condamner l'appelante, échouant en ses prétentions, aux dépens exposés en cause d'appel avec les modalités de recouvrement prévues à l'article 699 du Code de procédure civile.
L'équité commande de ne pas condamner la société Max Transports au paiement d'une indemnité supplémentaire au titre des frais exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens.
Par ces motifs, LA COUR, Statuant par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort, Dit l'appel de la société Max Transports recevable, Déboute la société Max Transports de sa demande en nullité, pour excès de pouvoir, du jugement rendu par le tribunal de commerce de Pontoise le 18 mars 2015, Confirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Pontoise le 18 mars 2015 sauf en ce qu'il a condamné la société Max Transports à payer à la société Marti une somme de 31 728 euros à titre de dommages et intérêts, Statuant de nouveau, Condamne la société Max Transports à payer à la société Marti une somme de 4 737 euros en réparation de son préjudice euros à titre de dommages et intérêts, Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires, Déboute la société Marti de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la société Max Transports aux dépens exposés en cause d'appel, lesquels pourront être recouvrés selon les modalités de l'article 699 du Code de procédure civile.