CA Paris, Pôle 2 ch. 2, 11 avril 2019, n° 17-16699
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
De Lage Landen Leasing (SAS),
Défendeur :
Association CAP Charenton
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Poinseaux
Conseillers :
Mmes Lefevre, Bou
- rendu par défaut
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre et par Madame Fatima-Zohra AMARA, greffière présente lors du prononcé.
Par acte sous seing privé en date du 14 septembre 2009, l'association Cercle athlétique de Paris Charenton, ci-après l'association CAP Charenton, a souscrit auprès de la société De Lage Landen Leasing un contrat de location portant sur du matériel de reprographie, soit un copieur Canon IR 2200, un chargeur de documents, une carte imprimante et une carte fax, d'une durée de 63 mois, moyennant le paiement de 21 loyers trimestriels de 1 818 euros HT.
A la suite d'un impayé, la société De Lage Landen Leasing a adressé à l'association CAP Charenton une mise en demeure datée du 17 mai 2013 de lui régler sous huitaine la somme de 2 314,37 euros TTC.
En l'absence de régularisation, la société De Lage Landen Leasing a constaté, aux termes d'une lettre du 21 juin 2013, la résiliation du contrat puis, par acte d'huissier du 10 juillet 2013, a fait assigner l'association CAP Charenton devant le tribunal de grande instance de Créteil en paiement de la somme de 17 325,21 euros augmentée des intérêts contractuels et en restitution du matériel litigieux encore en sa possession.
Par jugement contradictoire du 4 janvier 2016, le tribunal a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- débouté l'association CAP Charenton de sa demande de nullité du contrat ;
- condamné l'association CAP Charenton à payer à la société De Lage Landen Leasing la somme de 2 274, 37 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 mai 2013 ;
- rejeté la demande de délais de paiement ;
- dit n'y avoir lieu à article 700 du Code de procédure civile ;
- condamné l'association CAP Charenton aux dépens de l'instance ;
- rejeté le surplus des demandes.
Par déclaration du 9 février 2016, la société De Lage Landen Leasing a interjeté appel de ce jugement.
Par acte d'huissier du 23 mars 2016 déposé en l'étude de l'huissier de justice instrumentaire, la déclaration d'appel a été signifiée à l'association CAP Charenton.
Par conclusions notifiées le 27 avril 2016 par voie électronique, la société De Lage Landen Leasing a demandé à la cour, au visa des articles L. 133-2 du Code de la consommation, 1147 du Code civil et 700 du Code de procédure civile, de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a écarté la nullité du contrat et débouté l'association CAP Charenton de ses prétentions au titre des manœuvres dolosives et du démarchage ;
à titre principal :
- infirmer le jugement concernant la qualification de non-professionnel de l'association CAP Charenton ;
à titre subsidiaire :
- infirmer le jugement sur l'illisibilité des clauses du contrat et leur caractère abusif ;
- condamner l'association CAP Charenton à payer à la société De Lage Landen Leasing la somme de 17 325,21 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 1% par mois à compter du 20 mai 2013 ;
à titre très subsidiaire :
- condamner l'association CAP Charenton à payer à la société De Lage Landen Leasing la somme de 17 325,21 euros à titre de dommages et intérêts du fait de la mauvaise exécution du contrat ;
à titre infiniment subsidiaire :
- condamner l'association CAP Charenton à payer la somme de 9 137,48 euros correspondant à l'indemnité équivalente au montant des loyers impayés jusqu'à la restitution du matériel ;
en tout état de cause :
- condamner l'association CAP Charenton à payer à la société De Lage Landen Leasing la somme de 2 000 euros en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
L'association CAP Charenton a constitué avocat mais, par jugement prononcé le 13 juin 2016 par le tribunal de grande instance de Créteil, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à son égard, Maître Gilles P. ayant été désigné en qualité de mandataire judiciaire et Maître T. P. en qualité d'administrateur judiciaire avec mission d'assistance.
L'affaire, enrôlée sous le numéro de RG 16/03651, a été radiée par ordonnance du 5 octobre 2016.
Par déclaration du 24 août 2017, la société De Lage Landen Leasing a de nouveau saisi la cour, joignant les actes d'huissier du 15 mars 2017 délivrés à domicile par lesquels elle a fait assigner en intervention forcée Maître P. en qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de l'association CAP Charenton et Maître T. P. en qualité d'administrateur judiciaire de celle-ci et leur a fait signifier ses conclusions du 27 avril 2016, sollicitant la jonction de l'affaire avec celle enrôlée sous le numéro de RG 16/03651, l'allocation du bénéfice de ses conclusions, la fixation de sa créance au passif de l'association CAP Charenton à la somme de 17 325,21 euros avec intérêts au taux contractuel de 1 % par mois à compter du 20 mai 2013 et la condamnation de Maître P. ès qualités au paiement de la somme de 2 000 euros en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile outre aux entiers dépens.
Maître P. ès qualités et Maître T. P. ès qualités n'ont pas constitué avocat.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 février 2019.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il n'y a pas lieu d'ordonner la jonction des affaires enrôlées sous les numéros de RG 16/03651 et 17/16699 dès lors que la première a fait l'objet d'une décision de radiation, le 5 octobre 2016, et que la seconde correspond au rétablissement de cette affaire, sollicité aux termes de la déclaration du 24 août 2017 par suite de la mise en cause des organes de la procédure collective.
En l'absence de critique de ce chef, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté l'association CAP Charenton de sa demande de nullité du contrat.
La société De Lage Landen Leasing fait valoir que conformément aux conditions générales du contrat acceptées par l'association et à la suite de la mise en demeure de payer restée infructueuse, la résiliation du contrat est intervenue et les sommes réclamées sont dues.
Elle soutient que le tribunal a, à tort, considéré l'association CAP Charenton comme un non-professionnel au sens de l'article L. 132-1 du Code de la consommation et retenu que l'article 10 des conditions générales intitulé résiliation était réputé non écrit. Elle prétend que le contrat litigieux a un rapport direct avec l'activité professionnelle de l'association CAP Charenton et que l'application des dispositions du Code de la consommation doit être écartée. A titre subsidiaire, elle affirme le caractère parfaitement lisible des conditions générales et estime que le tribunal ne pouvait se fonder sur une recommandation de la commission des clauses abusives pour déclarer telles les conditions générales du contrat. A supposer applicables les dispositions du Code de la consommation, elle soutient que le manquement de l'association CAP Charenton à ses obligations engage sa responsabilité contractuelle et l'oblige à réparer son préjudice financier, soit les loyers impayés, les intérêts de retard, le gain manqué égal à la somme des loyers restant à courir jusqu'au terme prévu et la clause pénale. A titre infiniment subsidiaire, elle se prévaut d'un préjudice correspondant aux loyers impayés jusqu'à la restitution du matériel, en date du 13 mai 2014.
L'association CAP Charenton a apposé sa signature sur les conditions particulières du contrat de location, sous la mention suivant laquelle elle déclare avoir pris connaissance des conditions générales de location et les accepter. Celles-ci prévoient en leur article 10-1 qu'en cas de non-paiement à l'échéance d'un seul terme de loyer (...), ce dernier (le contrat) ainsi que tous autres contrats conclus antérieurement ou postérieurement avec le bailleur pourront être résiliés de plein droit par le bailleur sans qu'il ait besoin de remplir aucune formalité judiciaire huit jours après simple mise en demeure au locataire demeurée sans effet d'avoir à exécuter ses obligations contractuelles. L'article 10-3 des conditions générales énonce qu'à la suite de la résiliation du contrat, le locataire paiera immédiatement au bailleur et sans mise en demeure préalable les sommes dues au titre des loyers échus et impayés au jour de la résiliation, ainsi que les intérêts de retard contractuellement stipulés et leurs accessoires, une indemnité de résiliation égale à la somme des loyers restant à courir à la date de la résiliation jusqu'au terme initialement prévu du contrat ainsi qu'à titre de pénalité pour inexécution du contrat, une somme égale à 10 % du montant hors taxes des loyers restant à courir avec un minimum de 250 euros HT et que toute somme due en vertu du contrat sera majorée le cas échéant de toutes taxes applicables et de tous frais et honoraires exposés pour en assurer le recouvrement et, si elle reste impayée à sa date d'échéance, portera intérêts sans mise en demeure préalable à compter de cette date et jusqu'à son paiement à un taux égal, dans la limite autorisée par la loi, à 1 % par mois.
Aux termes de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, dans sa version en vigueur à la date de signature du contrat, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. L'article L. 133-2 du même Code, dans sa version également en vigueur à la date de signature du contrat, prévoit que les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non-professionnels doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible.
Les dispositions précitées peuvent être invoquées par une personne morale mais ne s'appliquent pas aux contrats qui ont un rapport direct avec l'activité professionnelle exercée par le cocontractant.
En l'espèce, ainsi que l'a retenu le tribunal, l'association CAP Charenton est une association sportive, ayant des membres et adhérents, dont l'objet est la pratique des exercices physiques et du sport, notamment le football. C'est à juste titre que la société De Lage Landen Leasing fait valoir que l'association CAP Charenton ne peut assurer son activité sans disposer d'un matériel de reprographie professionnel. Il apparaît ainsi que l'association CAP Charenton a souscrit le contrat litigieux portant sur du matériel de ce type, destiné à être installé en son sein, au stade Henri Guerin à Charenton Le Pont, dans le cadre de son activité afin de permettre et améliorer les conditions d'exercice de celle-ci. Il existe un rapport direct entre le contrat et l'activité de l'association CAP Charenton, soit la pratique et la promotion du sport, qui est une activité professionnelle en sorte que les dispositions précitées ne sont pas applicables au litige.
C'est dès lors à tort que le tribunal a retenu, en vertu de ces dispositions, que l'article 10 des conditions générales était réputé non écrit et il convient au contraire de faire application de cet article.
L'association CAP Charenton n'ayant pas payé l'échéance du 1er mai 2013 dans les huit jours de la mise en demeure datée du 17 mai 2013, réceptionnée par elle le 22 mai 2013, la société De Lage Landen Leasing s'est à juste titre prévalue de la résiliation du contrat par sa lettre recommandée du 21 juin 2013.
En application de l'article 10 des conditions générales, la créance de la société De Lage Landen Leasing s'élève à :
- 2 274,37 euros au titre du loyer échu impayé ;
- 13 646,22 euros au titre de l'indemnité de résiliation égale à la somme des six loyers restant à courir jusqu'au terme du contrat ;
- 1 364,62 euros au titre de la pénalité égale à 10 % des loyers restant à courir ;
- 40 euros au titre de la commission forfaitaire prévue à l'article 8-6 des conditions générales ; soit la somme totale de 17 325,21 euros avec intérêts au taux de 1 % par mois à compter du 21 juin 2013, date à laquelle l'intégralité des sommes dues est devenue exigible du fait de la résiliation du contrat et a été réclamée par la société De Lage Landen Leasing.
Cette créance sera fixée au passif de l'association CAP Charenton, le jugement étant infirmé en ce sens.
L'association CAP Charenton sera condamnée aux dépens d'appel. Compte tenu de sa situation économique, il n'y a pas lieu à la condamner au titre des frais irrépétibles d'appel. Le jugement sera confirmé sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance.
Par ces motifs LA COUR, statuant publiquement, par mise à disposition de la décision au greffe, par défaut : Confirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné l'association Cercle athlétique de Paris Charenton à payer à la société De Lage Landen Leasing la somme de 2 274,37 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 Mai 2013 ; Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant : Fixe la créance de la société De Lage Landen Leasing au passif de l'association Cercle athlétique de Paris Charenton à la somme de 17 325,21 euros avec intérêts au taux de 1 % par mois à compter du 21 juin 2013 ; Rejette toute autre demande ; Condamne l'association Cercle athlétique de Paris Charenton aux dépens d'appel.