Cass. com., 7 mai 2019, n° 17-26.774
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Sofrocay (SARL), Caycedo
Défendeur :
Sophragora, Ecole de sophrologie caycédienne du Languedoc, Ecole de sophrologie caycédienne de l'Artois, Académie Savoie-Dauphiné de sophrologie Caycédienne, Académie de sophrologie de Paris (SAS), Liabot
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Riffault-Silk
Rapporteur :
Mme Le Bras
Avocats :
SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, SCP Gadiou, Chevallier
La COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Sofrocay a été créée en Andorre par le professeur Caycedo, médecin psychiatre espagnol, fondateur de la sophrologie, afin de délivrer un enseignement sanctionné par un master en sophrologie caycédienne ; que la société Sofrocay a délégué, sur la base d'un code de déontologie et d'un bulletin d'adhésion, l'enseignement du premier cycle de formation à plusieurs écoles ou académies en France, parmi lesquelles l'Académie de sophrologie de Paris ; que les relations avec plusieurs de ces écoles s'étant dégradées lorsque l'Académie de sophrologie de Paris a obtenu son classement par la Commission nationale de certification professionnelle et a entendu en faire profiter d'autres écoles dans le cadre d'un réseau, la société Sofrocay, estimant que la création de ce réseau était en infraction avec les engagements des écoles déléguées, a résilié les siens et en a avisé les élèves de ces écoles ; que reprochant à la société Sofrocay d'avoir commis des actes de dénigrement en s'adressant directement à leurs élèves, la société Académie de sophrologie de Paris et les associations Sophragora, Ecole de sophrologie caycédienne du Languedoc, Ecole de sophrologie caycédienne de l'Artois, Académie Savoie-Dauphiné de sophrologie caycédienne ainsi que M. Liabot l'ont assignée pour concurrence déloyale ; qu'à titre reconventionnel, la société Sofrocay a demandé leur condamnation pour le même motif, leur reprochant d'avoir indiqué sur internet que le cursus andorran n'était plus reconnu en France ;
Sur le deuxième moyen : - Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Et sur le troisième moyen : - Attendu que la société Sofrocay fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes tendant à voir ordonner aux sociétés et associations Académie de sophrologie de Paris, Académie Savoie-Dauphiné de sophrologie caycédienne, Ecole de sophrologie du Languedoc, Ecole de sophrologie caycédienne de l'Artois et Sophragora et à M. Liabot, de cesser d'enseigner et diffuser la sophrologie caycédienne issue du code de déontologie et la méthode de sophrologie caycédienne qui y est décrite, de détruire tout support de formation à la sophrologie caycédienne dans les quinze jours de la publication du présent jugement sous astreinte, à l'autoriser à publier le dispositif de la décision sur son site internet et sa page facebook pendant une durée de trente jours, et à ordonner aux sociétés et associations sus-mentionnées de publier le dispositif de la présente décision dans les trente jours de sa publication sur leur site internet et leur page Facebook pour une durée de trente jours alors, selon le moyen, que la divulgation d'une information de nature à jeter le discrédit sur un concurrent constitue un dénigrement, peu important qu'elle soit exacte ; qu'en décidant en l'espèce que les appelantes n'ont commis aucune faute au motif que la délivrance en France de diplômes officiels comme le master est réglementée de sorte que les propos tenus par le docteur Chéné à destination du public constituent une information objective et ne sauraient être qualifiées de dénigrement, et en rejetant ainsi la demande de l'exposante au seul motif que les propos constituaient une information exacte, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil dans sa version applicable aux faits du litige ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le dénigrement allégué par la société Sofrocay reposait sur le caractère mensonger des informations diffusées sur le site internet du docteur Chéné, l'arrêt retient que les informations en cause constituaient une information objective ; qu'ayant ainsi écarté le caractère mensonger allégué et, partant, le caractère dépréciatif qui était supposé en résulter, la cour d'appel a pu retenir que les actes de dénigrement invoqués par la société Sofrocay n'étaient pas caractérisés ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa seconde branche : - Vu l'article 1382, devenu 1240, du Code civil ;
Attendu que pour ordonner à la société Sofrocay de cesser toute communication avec les élèves des écoles, dire que la société Sofrocay a commis une faute en dénigrant les écoles et en s'adressantdirectement à leurs élèves, la condamner à payer un euro de dommages-intérêts à chacune des écoles et à M. Liabot et ordonner, sous astreinte, la publication du dispositif de l'arrêt sur le site internet de la société Sofrocay, l'arrêt retient que les propos adressés directement aux élèves, affirmant que leur école ne pouvait plus enseigner la sophrologie caycédienne, constituent des propos dénigrants destinés à les détourner de leur école ;
Qu'en statuant ainsi, sans expliquer en quoi ces propos étaient dénigrants, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur ledernier grief : casse et annule, mais seulement en ce qu'il ordonne à la société Sofrocay de cesser toute communication avec les élèves de la société Académie de sophrologie de Paris, des associations Sophragora, Ecole de sophrologie caycédienne du Languedoc, Ecole de sophrologie caycédienne de l'Artois, Académie Savoie-Dauphiné de sophrologie caycédienne, dit que la société Sofrocay a commis une faute en les dénigrant et en s'adressant directement à leurs élèves, condamne la société Sofrocay à payer la somme d'un euro à chacune des écoles ainsi qu'à M. Liabot, ordonne la publication du dispositif du présent arrêt sur le site internet de la société Sofrocay pendant une durée de 15 jours et ce, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, et en ce qu'il statue les dépens et l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 31 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.