CA Rennes, 3e ch. com., 21 mai 2019, n° 16-04546
RENNES
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Centre Technique d'Hygiène (SA) , Chauveau Nutrition (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Contamine (rapporteur)
Conseillers :
Mmes Jeorger Le Gac, Sochacki
Avocats :
Mes Demidoff, Wattel, Morin
FAITS ET PROCEDURE :
La société Centre technique d'hygiène (la société CTH) et M. X sont convenus de la conclusion d'un contrat d'agence commerciale à compter du 8 octobre 1993.
En 2003, le groupe Jarco, auquel la société CTH appartient, a constitué la société Chauveau Nutrition dans le cadre de la reprise du fonds de commerce de la société Chaveau qui exploitait une activité complémentaire à l'activité de la société CTH dans le domaine de la nutrition animale. A la suite de cette reprise d'une activité complémentaire, il a été convenu de réduire le secteur de M. X qui s'étendait alors sur 22 cantons.
Le 13 juillet 2006, la société CTH et M. X ont donc formalisé un avenant au contrat d'agence commercial les liant. Cet avenant précise le secteur géographique attribué à M. X qui est composé de 10 cantons et ajoute que, outre ce secteur pour lequel aucune exclusivité n'est consentie, M. X bénéficiera d'une exclusivité sur ses clients actuels domiciliés sur les 12 autres cantons qui lui étaient antérieurement attribués. Cet avenant accorde, au surplus, à M. X une garantie de rémunération correspondant au montant des " commissions perçues sur le chiffre d'affaires hors taxes de 2005, y compris la commission de 1 % sur chiffre d'affaires (soit la somme de 66 578,06 euros) à condition que le chiffre d'affaires annuel réalisé soit au minimum de 100 000 euros hors taxes". Dans l'hypothèse où les commissions perçues par M. X seraient inférieures, il était prévu à son profit le paiement d'un complément de commissions.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 17 juin 2013, M. X a notifié à la société CTH la rupture à ses torts du contrat d'agence commerciale les liant en raison des ventes réalisées par d'autres commerciaux au bénéfice de ses clients réservés et a demandé le paiement de l'indemnité compensatrice de fin de contrat prévue par l'article L. 134-12 du Code de commerce. Il a ensuite assigné la société CTH d'une demande de paiement de l'indemnité compensatrice de fin de contrat et de reliquats de commissions et la société Chaveau en paiement de dommages intérêts pour avoir également prospecté ses clients et secteurs exclusifs.
Par jugement du 20 mai 2016, le tribunal de grande instance de Saint Brieuc a :
- Condamné la société CTH à payer à M. X la somme de 34 433,67 euros hors taxes, au titre du solde de commissions dues en 2013, avec intérêts au taux légal à compter du 22 août 2014,
- Condamné in solidum les sociétés CTH et Chauveau Nutrition à payer à M. X la somme de 126 286 euros hors taxes à titre de commissions en ce qui concerne la société CTH et de dommages intérêts s'agissant de la société Chauveau Nutrition, étant précisé que :
- à l'égard de la société CTH, ladite somme sera majorée de la TVA au taux en vigueur à la date du jugement et produira intérêts au taux légal à compter du 22 août 2014 sur la somme de 120 000 euros et du 5 octobre 2015 pour le surplus,
- à l'égard de la société Chauveau Nutrition, ladite somme produira intérêts au taux légal à compter du jugement,
- Condamné la société CTH à payer à M. X la somme de 133 156 euros au titre de l'indemnité de rupture, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,
- Dit que par application de l'article 1154 du Code civil, les intérêts des sommes susvisées, échus à compter du 5 octobre 2015, produiront eux-mêmes intérêts dès lors qu'ils seront dus au moins pour une année entière,
- Condamné in solidum les sociétés CTH et Chauveau Nutrition à payer à M. X la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- Condamné In solidum les sociétés CTH et Chauveau Nutrition aux dépens,
- Ordonné l'exécution provisoire.
Les sociétés Centre technique d'hygiène et Chauveau nutrition ont interjeté appel le 13 juin 2016.
Le 31 octobre 2016, la société CTH a absorbé la société Chauveau nutrition. La société CTH intervient aujourd'hui seule à l'instance, en son nom et comme venant aux droits de la société Chauveau nutrition.
Les dernières conclusions des sociétés Centre technique d'hygiène et Chauveau nutrition sont en date du 18 mars 2019. Les dernières conclusions de M. X sont en date du 13 mars 2019.
PRETENTIONS ET MOYENS :
La société CTH demande à la cour de :
- Dire recevable et bien fondé l'appel interjeté par la société CTH,
- Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. X de sa demande tendant au paiement d'un complément de commission de 480,32 euros au titre de l'exercice 2012,
- Réformer le jugement pour le surplus,
Statuant à nouveau,
Sur la garantie de commission :
- Dire et juger qu'aucune somme n'est due à M. X au titre de la garantie de commission stipulée dans l'avenant du 13 juillet 2006 au titre de l'année 2013,
Par conséquent débouter M. X de ses demandes à ce titre.
Sur les commissions indirectes :
A titre principal :
- Dire et juger que M. X a manqué à ses obligations essentielles privant ainsi son droit à commissions indirectes de toute contrepartie ce qui justifie l'application par la société CTH de l'exception d'inexécution,
Par conséquent débouter M. X de ses demandes à ce titre,
A titre subsidiaire :
- Dire et juger que le montant de commissions indirectes s'élève à la somme de 79 394,49 euros,
- Dire et juger que M. X à indument perçu la somme de 15 676,81 euros au titre de la garantie de commissions stipulée dans l'avenant du 13 juillet 2006,
- Ordonner la compensation des sommes dues entre les parties,
- Dire et juger que le solde dû à M. X s'élève à la somme de 63 717,68 euros,
Sur l'indemnité de fin de contrat :
- Dire et juger que les faits invoqués par M. X étant anciens et n'étant pas la cause exclusive de son arrêt d'activité, celui-ci est mal fondé à soutenir que la résiliation du contrat d'agence commerciale serait due à des circonstances imputables au mandant,
Par conséquent débouter M. X de sa demande d'indemnité de compensatrice de rupture,
A titre subsidiaire
- Dire et jugée que les demandes de M. X à ce titre son disproportionnées au regard du préjudice qu'il prétend avoir subi,
Par conséquent, ramener les demandes de M. X à de plus justes proportions,
- Condamner M. X à payer à la société CTH la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
M. X demande à la cour de :
Confirmer le jugement en ce qu'il a :
- Condamné la société CTH au paiement de la somme de 34 433,61 euros hors TVA, majorées des intérêts au taux légal capitalisés à compter de l'assignation,
- Condamné la société CTH à payer à M. X Z somme de 126 286 euros hors taxe à titre de commissions, outre TVA au taux en vigueur à la date du jugement, ce avec intérêts au taux légal capitalisés,
- Jugé la société CTH responsable de la rupture du contrat d'agent commercial et condamné la société CTH a payer à M. X la somme de 133 156 euros à titre d'indemnité légale de rupture avec intérêts au taux légal capitalisés,
- Condamné in solidum la défenderesse au paiement de la somme de 3 500 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile,
- Condamné la même aux dépens avec application de l'article 699 du Code de procédure civile,
Y additant,
- Condamner la société CTH au paiement de la somme de 408,32 euros Hors Taxe outre TVA à titre de rappel de prime 1 % pour 2012,
- Condamner in solidum l'appelante au paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages intérêts pour préjudice moral,
- De facon infiniment subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour ne ferait pas droit à la garantie de commission de l'année 2013, condamner la société CTH à payer le solde de commissions sur le CA réalisé en août 2013, soit 1 456,65 euros, et le reliquat de commissions 2013 pour 1 330,86 euros,
- Débouter la société CTH de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- Ordonner la capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1154 du Code civil,
- Condamner in solidum la société CTH au paiement de la somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure au titre de la procédure d'appel,
- Condamner la société CTH aux entiers dépens et dire qu'il sera fait application de l'article 699 du Code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra.
DISCUSSION :
Sur la garantie de commissions :
L'avenant signé le 13 juillet 2006, entre M. X et la société CTH, prévoit que les commissions que percevra M. X en rémunération de ses services ne seront pas inférieures au montant des commissions perçues sur le chiffre d'affaires hors taxes de 2005, y compris la commission de 1 % sur chiffre d'affaires, à condition que le chiffre d'affaires annuel réalisé soit au minimum de 100 000 euros hors taxes. Il prévoit également que dans le cas où celles-ci seraient inférieures, un complément de rémunération serait versé à M. X
Il résulte de la lettre de la direction juridique de la société CTH du 12 octobre 2006 que pour déterminer la base de la garantie, il sera fait référence pour l'année 2005 à un montant de commission hors taxe de 64 639,04 euros, montant auquel s'ajoute la commission de 1 % pour laquelle la référence retenue est de 1 939,02 euros.
Il en résulte que M. X était garanti de percevoir des commissions pour au moins 66 578,06 euros chaque année.
Pour vérifier si le montant perçu était ou non conforme au montant garanti, il convenait d'additionner toutes les commissions perçues par M. X, et donc y compris celle de 1 %. La commission de 408,39 euros perçue au titre de la commission de 1 % pour l'année 2012 devait donc être prise en compte pour vérifier si le montant des commissions perçues au titre de cette année avait atteint le minimum garanti.
Il y a donc lieu de rejeter la demande de paiement de la somme de 408,39 euros au titre du reliquat de commission pour 2012.
Pour 2013, M. X a perçu 32 144,45 euros de commissions, soit moins que le montant garanti. Il demande le paiement de la différence. La société CTH fait valoir qu'il a été en arrêt pour maladie à compter du 17 juin 2013 avant de quitter ses fonctions.
L'avenant prévoit que les commissions viennent en rémunération des services de M. X. Les services d'un agent commercial correspondent avant tout au chiffre d'affaire qu'il apporte à son mandant et non à une activité encadrée dans des horaires particuliers. Le fait que l'agent commercial soit en arrêt pour maladie ne lui fait pas perdre le droit à rémunération au titre des affaires qui ont été apportées grâce à une intervention qui peut avoir été réalisée antérieurement à la période de maladie mais porter ses effets au cours de cette période. Un arrêt pour maladie ne fait donc pas perdre à l'agent commercial son droit à rémunération.
En revanche, la fin du contrat d'agent commercial fait perdre à ce dernier le droit à rémunération attaché aux affaires apportées après la date de la fin du contrat. Il en résulte que le droit à rémunération pour les affaires nouvellement apportées a pris fin à la date de la fin du contrat notifiée par lettre recommandée de M. X, soit le 17 juin 2013. Si les parties au contrat ont entendu faire bénéficier M. X d'un montant annuel garanti de commission, ce montant ne s'entendait, selon leur volonté, que pour une année entière d'activité.
M. X devait donc bénéficier de la garantie de rémunération calculée pro rata temporis du 1er janvier au 13 juin 2013, soit 45,83 % de 66 578,06 = 30 512,72 euros. Ayant perçu un montant de commissions supérieur à cette somme, sa demande de complément de commission doit être rejetée. Le jugement sera infirmé sur ce point.
M. X justifie qu'il lui reste du, pour l'année 2013, un solde de commission pour août 2013 de 1 456,65 euros et à un reliquat de commission pour l'année 2013 de 1 330,86 euros. Il y a lieu de condamner à la société CTH à lui payer ces sommes.
Sur les commissions indirectes :
Il résulte des stipulations contractuelles que M. X bénéficiait d'une exclusivité de démarchage pour le compte de la société CTH sur 10 cantons et, en outre, sur certains clients identifiés situés en dehors de cette zone d'exclusivité.
Il apparaît que des opérations de démarchage pour le compte de la société CTH ont été effectuées dans la zone géographique et auprès des clients exclusifs de M. X. Il a droit à la commission pour les opérations conclues pendant la durée du contrat d'agence avec les personnes appartenant à son secteur exclusif ou avec ses clients exclusifs.
Le fait que M. X ait pu manquer à ses devoirs de prospection des secteurs et clients qui lui étaient attribués n'est pas une cause de perte de son droit à commission au titre des opérations réalisées sur ces derniers.
En outre, ce manquement de M. X n'est pas établi alors qu'il est justifié qu'il a maintenu un chiffre d'affaires régulier. Si le chiffre d'affaire réalisé sur ces domaines d'exclusivité a pu être amélioré après son départ, ce fait ne permet pas d'établir un manquement de M. X à ses obligations.
Aucun contrat d'agent commercial n'avait été passé entre M. X et la société Chauveau nutrition. M. X ne peut donc, sur un fondement contractuel, reprocher à cette dernière d'avoir effectué des opérations de démarchage dans sa zone géographique ou auprès de ses clients exclusifs.
Les sociétés CTH et Chauveau nutrition appartenaient à la même holding, le groupe Jarco. Elles avaient un président commun, s'adressaient à la même clientèle, avec des produits en partie identiques et exploitaient les fichiers clients l'une de l'autre dans un même but. Les véhicules commerciaux étaient communs aux deux sociétés. Il est justifié que la liste des tarifs de la société CTH comportait des produits de la société Chauveau nutrition.
C'est d'ailleurs à l'occasion de l'entrée dans le groupe de la société Chauveau nutrition que l'avenant au contrat d'agent commercial de 2006 a été élaboré et signé.
Il apparaît ainsi qu'en démarchant le secteur ou les clients de M. X, la société Chauveau nutrition savait qu'elle portait atteinte au contrat d'agent commercial qui liait ce dernier à la société CTH avec laquelle elle avait des liens très étroits.
Le préjudice subi par M. X du fait de ces démarchages résulte dans la perte des commissions qu'il aurait perçues s'il n'avait pas été porté atteinte à ses exclusivités.
Même si la société CTH, qui a absorbé la société Chauveau nutrition, ne produit pas de décompte de chiffre d'affaires certifiés par son commissaire aux comptes, les pièces qu'elle produit devant la cour sont suffisamment pertinentes pour permettre d'en établir la réalité. M. X ne produit d'ailleurs pas d'éléments ni ne soulève de contestations précises de nature à remettre en cause la pertinence des décomptes produits par la société CTH.
Il apparaît ainsi que de 2008 à 2012 les agents de la société CTH ont réalisé un chiffre d'affaires de 12 890,72 euros avec des clients exclusifs de M. X et de 164 680,59 euros sur le secteur exclusif de M. X
En appliquant à ces chiffres d'affaires le taux moyen de commission alloué à M. X pour chacune de ces années, il apparaît que M. X a été privé de commissions pour un montant de 3 858,55 + 49 372,76 = 53 231,31 euros.
La société CTH fait valoir, à juste titre, que du fait de la réintégration de ces commissions dans les sommes payées à M. X, il y a lieu de tenir compte des sommes perçues au titre de la garantie de commission.
La prospection des clients exclusifs et des zones exclusives a privé M. X de :
- pour 2008 : 445,20 + 5 362,14 = 5 807,34 euros de commission,
- pour 2009 : 579,01 +14 551,12 = 15 130,13 euros de commission,
- pour 2010 : 1 708,62 + 15 267,65 = 16 976,27 euros de commission,
- pour 2011 : 792,57 + 12 128,37 = 12 920,94 euros de commission,
- pour 2012 : 333,15 + 2 063,48 = 2 396,63 euros de commission,
soit un total de 53 231,31 euros.
M. X a perçu au titre de la garantie de commission les sommes de :
- pour 2008 : 2,075,03 euros,
- pour 2009 : 4 776,16 euros,
- pour 2010 : 1 936,30 euros,
- pour 2011 : 853,19 euros,
- pour 2012 : 6 036,13 euros.
Il n'y a que pour l'année 2012 que la prospection des clients et secteurs de M. X ne lui a pas fait perdre une rémunération. Il ne peut cependant cumuler le rappel de commission avec la garantie de commission. Il convient donc de déduire le montant du rappel de commission, soit 2 396,63 euros. Pour les autres années, les sommes perçues au titre de la garantie de commission doivent venir en déduction des sommes dues au titre des prospections irrégulières soit 2 075,03 + 4 776,16 + 1.936,30 + 853,19 = 9 640,68 euros.
Au titre des commissions indirectes, la société CTH reste donc devoir la somme de 53 231,31 - 9 640,68 2 396,63 = 41 194 euros HT. Il y aura lieu de la condamner à lui payer cette somme avec intérêts au taux légal à compter du 11 août 2014, date de l'assignation de la société CTH.
Il apparaît que de 2008 à 2012 les agents de la société Chauveau ont réalisé un chiffre d'affaires de 7 455,19 euros avec des clients exclusifs de M. X et de 84 009,61 euros sur le secteur exclusif de M. Y
En appliquant à ces chiffres d'affaires le taux moyen de commission alloué à M. X pour chacune de ces années, il apparaît que M. X a été privé de commissions pour un montant de 2 120,57 + 24 042,61 euros = 26 163,18 euros.
Comme il a été vu supra, M. X a bénéficié pour l'année 2012 d'un paiement au titre de la garantie de commission pour 6 036,13 euros, soit 6 036,13 - 2 396,63 = 3 639,50 euros de plus que ce que la somme des commissions CTH telle que corrigée.
Les commissions perdues pour 2012 au titre de la prospection par la société Chauveau des clients de M. X sont de 1 178,34 euros et au titre de la prospection de son secteur de 10 400,63 euros. Ces commissions sont d'un montant supérieur au montant du solde de la somme payée au titre de la garantie de commission pour 2012. Le préjudice subi par M. X doit donc être diminué de ce solde, soit 3 639,50 euros.
Le préjudice subi par M. X du fait des prospections au profit de la société Chauveau est donc de 26 163,18 - 3 639,50 = 22 523,68 euros.
La société CTH, qui a absorbé la société Chauveau, doit donc être condamnée à payer la somme de 22 523,68 euros à M. X à titre de dommages intérêts.
Sur l'indemnité compensatrice de rupture :
Lorsque l'agent commercial est à l'origine de la cessation du contrat, l'indemnité de rupture lui est néanmoins due si elle est justifiée par des circonstances imputables au mandant :
Article L. 134-13 du Code de commerce :
La réparation prévue à l'article L. 134-12 n'est pas due dans les cas suivants :
1° La cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l'agent commercial ;
2° La cessation du contrat résulte de l'initiative de l'agent à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ou dues à l'âge, l'infirmité ou la maladie de l'agent commercial, par suite desquels la poursuite de son activité ne peut plus être raisonnablement exigée ;
3° Selon un accord avec le mandant, l'agent commercial cède à un tiers les droits et obligations qu'il détient en vertu du contrat d'agence.
Il en résulte que le mandant qui ne respecte pas la clause d'exclusivité dont bénéficie l'agent et qui ne lui verse pas les commissions pour toute opération conclue pendant la durée du contrat avec une personne appartenant au secteur exclusif dont il bénéficie, crée les circonstances qui lui rendent imputable la rupture du contrat à l'initiative de l'agent.
Il est justifié en l'espèce que la société CTH n'a pas respecté l'exclusivité de M. X. La durée et l'importance des manquements à cette exclusivité montrent qu'il ne s'agit pas d'incidents isolés mais d'une pratique courante qui s'est poursuivie malgré les contestations de M. X. Il est en outre justifié que la société CTH n'a pas payé certaines des sommes dues au titre de la garantie de commission dans des délais raisonnables.
Le fait que M. X ait pu occasionner un dommage à un client à la suite d'une erreur de livraison ne justifie pas les manquements de la société CTH à ses obligations de loyauté dans l'exécution du contrat d'agent commercial.
Au vu de ces seuls manquements, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres, il est justifié que la cessation des relations contractuelles à l'initiative de M. X est justifiée par des circonstances imputables à la société CTH. M. X a donc droit à l'indemnité de rupture.
Au vu de l'ancienneté des rapports contractuels, du montant des commissions des dernières années d'exercice du mandat, de la situation de M. X qui a depuis fait valoir ses droits à la retraite et des circonstances de la rupture, il y a lieu de fixer l'indemnité à la somme de 133 156 euros.
Sur le préjudice moral :
M. X fait valoir qu'il aurait subi un préjudice moral du fait de l'exécution fautive du contrat.
Si M. X justifie de quelques propos inappropriés tenus à son encontre et d'une certaine mise à l'écart sur certains sujets, il ne s'agit que d'évènements anciens et isolés.
M. X ne justifie pas d'un préjudice autre que celui résultant de la cessation du contrat, déjà indemnisé. Sa demande de dommages intérêts pour préjudice moral sera rejetée.
Sur les frais et dépens :
Il y a lieu de condamner la société CTH aux dépens et à payer à M. X la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par ces motifs : LA COUR : Infirme le jugement en ce qu'il a : - Condamné la société CTH à payer à M. X la somme de 34 433,67 euros hors taxes, au titre du solde de commissions dues en 2013, avec intérêts au taux légal à compter du 22 août 2014, - Condamné in solidum les sociétés CTH et Chauveau Nutrition à payer à M. X la somme de 126 286 euros hors taxes à titre de commissions en ce qui concerne la société CTH et de dommages intérêts s'agissant de la société Chauveau Nutrition, étant précisé que : - à l'égard de la société CTH, ladite somme sera majorée de la TVA au taux en vigueur à la date du jugement et produira intérêts au taux légal à compter du 22 août 2014 sur la somme de 120 000 euros et du 5 octobre 2015 pour le surplus, - à l'égard de la société Chauveau Nutrition, ladite somme produira intérêts au taux légal à compter du jugement, Confirme le jugement pour le surplus, Statuant à nouveau : - Condamne la société CTH à payer à M. X la somme de 1 456,65 euros HT au titre d'un solde de commission pour août 2013 et celle de 1 330,86 euros HT au titre d'un solde de commission pour l'année 2013, - Condamne la société CTH à payer à M. X la somme de 41 194 euros HT au titre des commissions indirectes, avec intérêts au taux légal à compter 22 août 2014, outre la TVA en vigueur à la date de la présente décision, - Condamne la société CTH à payer à M. X la somme de 22 523,68 euros à M. X à titre de dommages intérêts avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision, - Dit que les intérêts dus pour une année seront capitalisés en application des dispositions de l'article 1154 du Code de procédure civile, - Rejette les autres demandes des parties, - Condamne la société CTH à payer à M. X la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, - Condamne la société CTH aux dépens d'appel.