Commission, 22 janvier 2019, n° 40049
COMMISSION EUROPÉENNE
Résumé de la décision
MasterCard II
Le 22 janvier 2019, la Commission a adopté une décision relative à une procédure d'application de l'article 101 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et de l'article 53 de l'accord EEE. Conformément aux dispositions de l'article 30 du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil (1) , la Commission publie ci-après les noms des parties et l'essentiel de la décision, ainsi que les sanctions qui leur ont, le cas échéant, été infligées, en tenant compte de l'intérêt légitime des entreprises à ce que leurs secrets d'affaires ne soient pas divulgués.
1. INTRODUCTION
(1) La décision est adressée aux sociétés MasterCard Incorporated, MasterCard International Incorporated et MasterCard Europe SA (ci-après dénommées conjointement "MasterCard"), qui utilisent le système de paiement par carte de MasterCard.
(2) MasterCard Incorporated a son siège statutaire dans l'État du Delaware (États-Unis d'Amérique) et elle est la société holding des filiales détenues à 100 % MasterCard International Incorporated et MasterCard Europe SA. MasterCard International Incorporated est une société ("membership corporation") ayant son siège à Wilmington, dans l'État du Delaware, aux États-Unis d'Amérique. Ses membres sont des banques et des prestataires de services de paiement qui sont acquéreurs de cartes ou émetteurs de cartes de paiement, ou les deux. MasterCard Europe SA est une filiale entièrement consolidée de MasterCard Incorporated.
(3) La décision établit que les règles en matière d'acquisition transfrontalière imposées par MasterCard constituaient une infraction à l'article 101 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (ci-après le "traité") et à l'article 53 de l'accord sur l'Espace économique européen (ci-après l'"accord EEE").
2. PRÉSENTATION DE L'AFFAIRE
2.1. Procédure
(4) Le 9 avril 2013, la Commission a engagé une procédure contre MasterCard.
(5) Le 9 juillet 2015, la Commission a adopté une communication des griefs, à laquelle MasterCard a répondu par écrit le 21 avril 2016. Le 6 mai 2016, MasterCard a présenté une réponse actualisée.
(6) Le 31 mai 2016, une audition au cours de laquelle MasterCard a développé ses arguments a eu lieu.
(7) Le 3 décembre 2018, MasterCard a présenté une proposition de transaction signée dans laquelle elle reconnaissait l'infraction et sa responsabilité pour la période couverte par la décision.
(8) Le comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes a rendu un avis favorable le 17 janvier 2019.
(9) La Commission a adopté la décision le 22 janvier 2019.
2.2. Destinataires et durée
(10) MasterCard Europe SA, MasterCard Incorporated et MasterCard International Incorporated ont enfreint l'article 101 du TFUE et l'article 53 de l'accord EEE en adoptant des décisions visant à réglementer la commission multilatérale d'interchange ("CMI") s'appliquant, dans l'EEE, aux acquisitions transfrontalières dans le secteur des paiements par carte.
(11) Eu égard à sa décision de 2014 relative à Visa Europe (2) rendant les engagements de cette dernière juridiquement contraignants, la Commission estime que, dans la présente affaire, une infraction a été commise à partir du 27 février 2014. La Commission estime que l'infraction a duré jusqu'au 8 décembre 2015, dans la mesure où les modifications apportées par MasterCard à ses règles en matière d'acquisition transfrontalière sont entrées en vigueur le 9 décembre 2015. La période couverte par la présente décision s'étend donc du 27 février 2014 au 8 décembre 2015.
2.3. Résumé de l'infraction
(12) MasterCard a appliqué un ensemble de règles en matière d'acquisition transfrontalière, qui ont fait obstacle aux échanges transfrontaliers de services d'acquisition au sein de l'EEE. On parle d'acquisition transfrontalière lorsque la banque acquéreuse (ci-après "l'acquéreur") est localisée dans un pays différent de celui du commerçant. Conformément aux règles établies par MasterCard, lorsqu'une opération de paiement par carte a été compensée et réglée, l'acquéreur doit verser une "commission d'interchange" à la banque du titulaire de la carte (ci-après l'"émetteur"). Les règles établies par MasterCard stipulaient que les acquéreurs transfrontaliers devaient fixer une CMI nationale valable dans le pays des commerçants, sauf si l'acquéreur avait conclu un accord bilatéral avec l'émetteur de la commission d'interchange.
(13) En vertu des règles en matière d'acquisition transfrontalière établies par MasterCard, les acquéreurs offrant des services dans les États membres où la CMI nationale était moins élevée ne pouvaient pas proposer aux commerçants établis dans les États membres où la CMI nationale était plus élevée des services moins coûteux basés sur la CMI appliquée dans leurs pays "d'origine". En outre, les commerçants n'ont pas pu profiter du marché intérieur ni bénéficier de services moins coûteux proposés par les acquéreurs de cartes de paiement établis dans les États membres où la CMI était moins élevée. Par conséquent, les règles en matière d'acquisition transfrontalière établies par MasterCard faisaient obstacle aux échanges transfrontaliers sur le marché de l'acquisition d'opérations de paiement par carte au sein de l'EEE.
(14) MasterCard et ses membres constituaient une association d'entreprises, et ses décisions relatives aux règles en matière d'acquisition transfrontalière étaient des décisions d'association d'entreprises au sens de l'article 101, paragraphe 1, du TFUE et de l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE.
2.4. Mesures correctives
(15) La décision applique les lignes directrices de 2006 pour le calcul des amendes (3).
2.4.1. Montant de base de l'amende
(16) Pour fixer le montant des amendes, la Commission a pris en compte la valeur des ventes des membres acquéreurs de MasterCard, dans la mesure où MasterCard demeurait un organe permanent d'une association d'entreprises et où l'infraction porte sur les activités de ses membres acquéreurs. L'infraction ayant duré du 27 février 2014 au 8 décembre 2015, la Commission a pris en compte le chiffre d'affaires réalisé pendant la durée de l'infraction ("les ventes réelles") en vue d'établir un exercice fiscal complet représentatif.
(17) La Commission a pris en compte le fait que les règles en matière d'acquisition transfrontalière résultaient d'une décision d'association d'entreprises, qu'elles restreignaient les échanges transfrontaliers, qu'elles empêchaient la réalisation du marché intérieur, qu'elles s'étendaient à la totalité du territoire de l'EEE et qu'elles constituaient une infraction grave à l'article 101 du traité. Compte tenu de ces éléments et de la position de MasterCard sur le marché, la proportion de la valeur des ventes prise en compte a été fixée à 11 %.
(18) La Commission a pris en considération la durée de l'infraction, comme indiqué ci-dessus (voir considérant 11).
2.4.2. Ajustements du montant de base
(19) La Commission a retenu une circonstance aggravante, et elle a augmenté le montant de base de l'amende de 50 % en raison de la récidive de MasterCard. En effet, le 19 décembre 2007, la Commission avait adopté une décision d'interdiction à l'égard de MasterCard en vertu de l'article 7 du règlement (UE) n° 1/2003, car elle estimait que les CMI intrarégionales constituaient une infraction à l'article 101 du traité. La décision a été confirmée par les juridictions de l'Union.
2.4.3. Application du plafond de 10 % du chiffre d'affaires
(20) L'amende n'excède pas 10 % de la somme du chiffre d'affaires total des membres acquéreurs de MasterCard actifs dans l'EEE.
2.4.4. Réduction de l'amende au titre de la coopération
(21) La Commission a conclu qu'afin de tenir compte du fait que MasterCard a coopéré de manière effective avec la Commission au-delà de son obligation juridique de le faire, l'amende qui lui aurait été infligée dans le cas contraire devrait, sur le fondement du point 37 des lignes directrices pour le calcul des amendes, être réduite de 10 %.
3. CONCLUSIONS
(22) Compte tenu de ce qui précède, le montant final de l'amende infligée à MasterCard en vertu de l'article 23, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1/2003 s'élève à 570 566 000 EUR.
NOTES
(1) JO L 1 du 4.1.2003, p. 1.
(2) Décision de la Commission du 26 février 2014 dans l'affaire COMP/39.398 - Visa MIF (JO C 79 du 12.3.2011, p. 8).
(3) JO C 210 du 1.9.2006, p. 2.