CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 19 juin 2019, n° 17-05169
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Distribution Guy Degrenne (SAS), Boutiques GD (SAS)
Défendeur :
Din Art (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Luc
Conseillers :
M. Bedouet, Mme Comte
FAITS ET PROCÉDURE
La société Guy Degrenne SAS a pour activité la conception d'articles d'art de la table, commercialisés en France et à l'étranger sous la marque " Guy Degrenne " dont elle a la propriété exclusive.
Ses deux filiales, la société Boutiques GD et la société Distribution Guy Degrenne (ci-après dénommée " Distribution GD "), assurent, pour la première, l'exploitation commerciale de la marque à titre d'enseigne pour les magasins détenus en propre et sous forme de franchise, et, pour la seconde, la fabrication des produits de la marque et leur distribution dans l'ensemble du réseau commercial.
Le 5 mai 2009, après une première rencontre lors d'un salon consacré à la franchise, la société Boutiques GD, qui a retenu le dossier de candidature des époux X pour l'ouverture d'une boutique en franchise de cette marque dans le futur centre commercial " Les Armoiries " à Bry sur Marne, à proximité d'un magasin Ikea, leur remettait un document d'information précontractuelle (DIP).
Mme et M. X ont alors créé la société Din Art, laquelle a signé le 29 juillet 2009 un contrat de franchise avec la société Boutiques GD, comprenant notamment une clause d'approvisionnement exclusif auprès de la société Distribution GD.
La société Din Art a procédé à l'ouverture de la boutique sous franchise le 25 mars 2010. Néanmoins celle-ci a très vite rencontré des difficultés d'exploitation. Elle a déploré auprès du franchiseur la fréquentation insuffisante du centre commercial " Les Armoiries " et a formulé également un certain nombre de griefs, notamment le défaut de qualité des produits délivrés par la société Distribution GD, des retards dans l'exécution des commandes, et un niveau de prix de cession trop élevé.
De 2009 à 2012 la société Din Art n'est pas parvenue à couvrir ses charges et à procéder au paiement à échéance convenue des factures émises par la société Distribution GD.
En raison des difficultés de la société Din Art, les parties sont parvenues en 2011 à un accord amiable et ont fixé un échéancier pour le règlement des factures impayées par cette dernière.
Malgré la survenance de cet accord, les difficultés de la société Din Art ont persisté.
Par courrier du 26 février 2013, la société Din Art a résilié le contrat de franchise conclu avec la société Boutiques GD à effet au 26 mars 2013.
La société Boutiques GD a contesté par lettre du 26 mars 2013 les motifs de résiliation invoqués par la société Din Art.
Courant du mois d'avril 2013, un inventaire des produits a été dressé contradictoirement, et les articles et mobiliers de présentation couverts par la clause de réserve de propriété stipulée en faveur des sociétés Boutiques GD et Distribution GD ont été enlevés par ces dernières.
Par courrier du 15 mai 2013, les sociétés Boutiques GD et Distribution GD ont mis en demeure la société Din Art d'avoir à régler sous huitaine la somme restante due après mise en œuvre de la clause de réserve de propriété, d'un montant de 117 600,06 euros, outre intérêts et frais de recouvrement. Cette mise en demeure est restée sans effet.
Par acte du 6 juin 2013, les sociétés Boutiques GD et Distribution GD ont alors assigné la société Din Art devant le tribunal de commerce de Caen, aux fins d'obtenir le règlement de ces sommes impayées ainsi que le paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la résiliation anticipée du contrat de franchise et de la rupture brutale des relations commerciales établies. Le tribunal saisi s'est déclaré territorialement incompétent. Les sociétés Boutiques GD et Distributions GD ont réitéré leur acte d'assignation devant le tribunal de commerce de Paris par actes des 6 et 11 août 2013.
Parallèlement, le tribunal de commerce de Créteil, par jugement du 26 juin 2013, a placé la société Din Art en redressement judiciaire, fixé la date de cessation des paiements au 31 mai 2013 et nommé Maître Y ès qualités de mandataire judiciaire et Maître Z ès qualités d'administrateur judiciaire.
Par jugement du 6 janvier 2016, le tribunal de Créteil a prononcé la liquidation judiciaire de la société Din Art, et a désigné Maître Y ès qualités de liquidateur judiciaire.
Le 21 mars 2016, les sociétés Boutiques GD et Distribution GD ont renouvelé leurs déclarations de créance.
Par jugement du 15 février 2017, le tribunal de commerce de Paris a :
- dit le tribunal compétent,
- joint les causes enrôlées sous les numéros RG 2016026785 et RG 2014048658,
- constaté la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs de la société Boutique GD et a retenu sa responsabilité contractuelle pour l'indemnisation du préjudice subi par la société Din Art,
- débouté la société Distribution GD et la société Boutique GD de leurs demandes de dommages et intérêts pour rupture brutale de relations commerciales,
- constaté la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs de la société Boutique DG,
- débouté la société Din Art représentée par Maître Y, ès qualités de liquidateur judiciaire, de sa demande de paiement par la société Distribution GD de dommages et intérêts pour dommages causés par la mauvaise qualité des marchandises,
- condamné la société Boutique GD à payer à Maître Y, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Din Art, la somme de 60 807 euros à titre de dommages et intérêts,
- condamné la société Boutique GD et la société Distribution GD à payer in solidum à Maitre Y, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Din Art, la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire,
- débouté les parties de leurs demandes autres plus amples ou contraires au présent dispositif,
- condamné in solidum la société Distribution GD et la société Boutique GD aux dépends, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 105,84 euros dont 17,42 euros de TVA.
Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 13 mars 2017, les sociétés Distribution GD et Boutiques GD ont relevé appel de ce jugement.
Vu l'appel interjeté le 10 mars 2017 par la société Distribution GD et de la société Boutiques GD, et leur conclusions, déposées et notifiées le 18 mars 2019, par lesquelles il est demandé à la cour, au visa des articles 1134 ancien et suivants du Code civil, et L. 442-6, I, 5° du Code de commerce, de :
- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 15 février 201, sauf en ce qu'il a débouté la société Din Art de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre de la société Distribution GD,
- dire que la société Distribution GD est titulaire d'une créance en principal de 204 867,33 euros TTC à l'encontre de la société Din Art correspondant aux factures d'articles de table et de mobilier de présentation restées impayées,
- dire que cette somme sera augmentée (i) des pénalités pour retard de paiement courant de la date d'exigibilité de chaque facture à la date du jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société Din Art, et (ii) de l'indemnité pour frais de recouvrement,
- fixer la créance de la société Distribution GD au passif de la société Din Art à la somme de 204 867,33 euros TTC en principal à titre de créance chirographaire, somme qui sera augmentée (i) des pénalités pour retard de paiement courant de la date d'exigibilité de chaque facture à la date du jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société Din Art, et (ii) de l'indemnité de frais de recouvrement,
- ordonner la compensation de la somme totale due par la société Din Art à la société Distribution GD avec les sommes suivantes, correspondant à la reprise de produits et mobilier par la société Distribution GD en application des clauses de réserves de propriété mentionnées sur les factures :
* 51 410,36 euros TTC au titre des produits,
* 35 856,91 euros TTC au titre du mobilier,
- dire que les sociétés Distribution GD et Boutiques GD n'ont commis aucune faute dans l'exécution de leurs obligations respectives,
- dire que la société Din Art s'est rendue coupable d'une rupture brutale des relations commerciales établies avec la société Distribution GD, causant à cette dernière un préjudice,
- dire qu'en mettant fin au contrat de franchise la liant à la société Boutiques GD avant son terme, la société Din Art a causé un préjudice à la société Boutiques GD,
- condamner la société Din Art à indemniser le préjudice subi par les sociétés Distribution GD et Boutiques GD à hauteur de 7 500 euros chacune,
- constater la créance de dommages et intérêts de la société Distribution GD et la fixer au passif de la société Din Art à la somme de 7 500 euros à titre de créance chirographaire,
- constater la créance de dommages et intérêts de la société Boutiques GD et la fixer au passif de la société Din Art à la somme de 7 500 euros, à titre de créance chirographaire,
- condamner Maître P., ès qualités, à payer à chacune des sociétés Distribution GD et Boutiques GD la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner Maître P. ès qualités aux entiers dépens de l'instance et de ceux de la requête afin d'être autorisées à procéder à une saisie conservatoire de créance et de la saisie conservatoire opérée, étant précisé que ces dépens seront recouvrés en application de l'article 699 du Code de procédure civile ;
Vu les dernières demandes de Maître Y ès qualités de liquidateur de la société Din Art, intimé, déposées et notifiées le 4 mars 2019, par lesquelles il est demandé à la cour au visa des articles 9 du Code de procédure civile, 1315, 1134 et 1382 anciens du Code civil, L. 330-3, R. 330-1, L. 442-6, I, 5°, L. 442-5 et L. 622-28 du Code de commerce, de :
- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 15 février 2017 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté Me Y de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre de la société Distribution GD et a limité la réparation du préjudice subi par la société Din Art à la somme de 60 807 euros,
- débouter les sociétés Distribution GD et Boutiques GD de l'ensemble de leurs demandes,
Statuant à nouveau,
- dire que la société Boutiques GD a commis des fautes précontractuelles et contractuelles à l'égard de la société Din Art, ce qui justifie la résiliation du contrat de franchise à ses torts exclusifs,
En conséquence,
- condamner la société Boutiques GD à réparer le préjudice causé à la société Din Art :
- la condamner à payer à la société Din Art au titre des dommages et intérêts la somme de 78 824 euros correspondant au montant des pertes cumulées résultant de l'exécution du contrat de franchise Guy Degrenne,
- subsidiairement, confirmer la condamnation de la société Boutiques GD au paiement de la somme de 60 807 euros au profit de Me Y ès qualités,
Subsidiairement,
- dire que la demande non chiffrée de la société Distribution GD est irrecevable,
Subsidiairement, condamner la société Boutiques GD à payer au lieu et place de la société Din Art à la société Distribution GD le montant de la dette de marchandises qui serait due à la société Distribution GD,
- condamner la société Boutiques GD à payer à la société Din Art au titre des dommages et intérêts la somme de 78 824 euros correspondant au montant des pertes cumulées résultant de l'exécution du contrat de franchise Guy Degrenne,
- subsidiairement confirmer la condamnation de la société Boutiques GD au paiement de la somme de 60 807 euros au profit de Me Y ès qualités,
- condamner la société Distribution GD à payer à la société Din Art la somme de 7 500 euros au titre des dommages et intérêts pour dommages causés par la mauvaise qualité des produits livrés,
- condamner les sociétés Boutiques GD et Distribution GD à payer solidairement à la société Din Art la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel,
- laisser la totalité des frais et dépens de la procédure à la charge des appelantes ;
SUR CE LA COUR,
La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.
En application de l'article 954 alinéa 2 du Code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.
Sur les demandes de Maître P., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Din Art
Sur la résiliation du contrat de franchise et les fautes alléguées à l'encontre de la société Boutiques GD
Sur les manquements précontractuels allégués
Sur le choix de l'emplacement du point de vente de la société Din Art
Maître P., ès qualités, fait grief au franchiseur d'avoir opéré un choix inadapté concernant l'emplacement du point de vente de la société Din Art, qui n'a pas permis à celle-ci de réaliser un chiffre d'affaires assurant sa rentabilité. Il estime que la société Boutiques GD engage sa responsabilité à ce titre, et doit réparer le préjudice causé à la société Din Art.
Il soutient également que la société Boutiques GD a failli à ses obligations légales et réglementaires en s'abstenant de fournir au candidat franchisé un état du marché local comme national et des perspectives de développement. Il relève en effet que l'annexe 11 du contrat de franchise ne renvoie qu'à des informations sommaires et succinctes.
Il prétend enfin que le comportement fautif de la société Boutiques GD est démontré par une lettre de licenciement adressée par cette dernière le 15 décembre 2010 à un de ses employés, dans lequel le franchiseur reconnaît une erreur dans l'identification de l'emplacement du point de vente de la société Din Art.
La société Boutiques GD conteste avoir présenté les informations relatives à la fréquentation du centre commercial comme étant " une donnée acquise et certaine " et le fait qu'elle aurait dû attirer l'attention des futurs franchisés sur les aléas de telles estimations. Elle considère en effet que les données relatives à l'emplacement du futur franchisé et présentées dans le cadre du DIP revêtaient nécessairement un caractère estimatif, ce que la société Din Art ne pouvait ignorer dès lors que le centre commercial dont il est question n'était pas encore ouvert au jour de la signature du contrat de franchise. Elle estime que la société Din Art s'est engagée en toute connaissance de cause, étant par ailleurs relevé que cette dernière ne prétend pas que son consentement aurait été vicié. Elle ajoute qu'aucun élément ne permet d'affirmer que le centre commercial choisi n'était pas en adéquation avec le concept Guy Degrenne ou avec les prévisions de rentabilité attendues. En toute hypothèse, elle allègue qu'il ne lui revenait pas de procéder à une contre-expertise ou de justifier les prévisions du bailleur, dès lors que le centre commercial a été ouvert près de sept mois après la signature du contrat de franchise, et qu'elle ne possède aucune expertise en immobilier commercial. En conséquence, elle estime que le franchisé n'a été privé d'aucune information de la sa part. Elle fait valoir également que le franchisé en qualité de commerçant indépendant est, nonobstant l'obligation d'information du franchiseur, responsable de la pertinence et de la viabilité économique de son projet. Elle rappelle enfin que les difficultés ultérieures liées au centre commercial sont indépendantes du concept Guy Degrenne et ne peuvent lui être imputables.
L'article L. 330-3 du Code de commerce met à la charge du franchiseur l'obligation de présenter un état et les perspectives de développement du marché concerné. L'article R. 330-1 dudit Code l'oblige notamment à une présentation de l'état général et local du marché des produits ou services devant faire l'objet du contrat et des perspectives de développement de ce marché, ce qui est par nature descriptif. En revanche, la loi ne mettant pas à la charge du franchiseur une étude du marché local, il appartient au franchisé de procéder, lui-même, à une analyse d'implantation précise lui permettant d'apprécier le potentiel, et, par là même, la viabilité du fonds de commerce qu'il envisage d'exploiter en franchise.
Le DIP remis par la société Boutiques GD précise le lieu d'implantation du futur local commercial, dans le centre commercial " Les Armoiries " à Bry sur Marne.
Le DIP contient également en annexe 11 une étude de secteur qui présente l'implantation de la boutique Guy Degrenne au sein du centre commercial de Bry sur Marne, décrit la zone de chalandise, analyse les générateurs de flux, ainsi que les concurrents directs et indirects, et constitue une étude du marché local.
Il n'est pas contesté que les données relatives au centre commercial " Les Armoiries " ont été élaborées et transmises à la société Boutiques GD par le créateur et bailleur du centre, la société Ikea. Il ressort notamment d'un courrier du 11 novembre 2010 adressé à la société Ikea, bailleur du centre de Bry sur Marne par la société Din Art, que cette dernière a reconnu que le choix d'établissement a été déterminé par les annonces faites par la société Ikea laquelle promettait notamment " un chiffre de fréquentation de 4,5 millions de visiteurs par an ".
La fréquentation du centre s'est néanmoins avérée bien en deçà des estimations initiales, de sorte que la société Ikea a notamment consenti une réduction de loyer de 30 % pour les 1er, 2e, et 3e trimestre 2011, ainsi qu'un avoir de 5 130 euros correspondant aux pénalité de retard à l'ouverture du point de vente, à la société Din Art qui a sollicité une renégociation du loyer.
Compte tenu des éléments de contexte fournis par la société Ikea, la société Boutiques GD ne pouvait toutefois présager de l'échec commercial du centre, étant par ailleurs relevé que de nombreuses grandes enseignes s'y sont installées, de sorte qu'il n'y a pas lieu de considérer ce choix comme fautif.
Au surplus, l'analyse du marché local fournie par la société Boutique GD ne dispensait pas la société Din Art de rechercher les éléments de nature à l'éclairer sur la rentabilité économique du projet envisagé et de procéder à une analyse d'implantation précise de son point de vente.
Dès lors, au regard de l'ensemble de ces éléments, aucune [faute] n'a été commise par la société Boutiques GD dans le choix de l'emplacement du local commercial.
Il y a donc lieu de rejeter le grief de ce chef.
Sur l'établissement des comptes provisionnels d'exploitation
Maître P. soutient que c'est sur la base des chiffres prévisionnels fournis par la société Boutiques GD, laquelle annonçait invariablement le chiffre d'affaires moyen par unité de 450 000 euros, que la société Din Art a établi ses comptes prévisionnels. Or, il relève que ces comptes se sont avérés totalement irréalistes en ce que, sur les six premiers mois, la société Din Art a réalisé 92 009 euros de chiffre d'affaires contre 150 000 euros dans le prévisionnel, qu'elle a clos son deuxième exercice avec un écart de 40 %, et que cet écart était de 60 % la troisième année. Il en déduit que la société Boutiques GD, qui a manqué à ses obligations d'information précontractuelle en ne donnant pas des informations sérieuses et en surestimant le chiffre d'affaires prévisionnel, a commis une faute à l'égard de la société Din Art. Il explique que le franchiseur ne saurait se dégager de sa responsabilité à ce titre en soutenant que le caractère irréaliste du chiffre d'affaires prévisionnel était lié à la seule erreur d'appréciation par la société Ikea du niveau de fréquentation du centre commercial de Bry sur Marne.
Il ajoute qu'en tout état de cause aucun manquement ou erreur dans la gestion du point de vente par la société Din Art ne peut justifier un écart de 40 à 60 % avec le prévisionnel.
La société Boutiques GF affirme, en premier lieu, que la société Din Art a établi elle-même son compte prévisionnel, le franchiseur lui ayant seulement fourni les chiffres clefs relatifs à quelques boutiques " Guy Degrenne " et les données relatives à la saisonnalité moyenne des ventes au cours d'un exercice. Elle estime donc n'avoir jamais fourni de chiffre d'affaires prévisionnel à la société Din Art.
Elle souligne en outre que le fait d'avoir accompagné les époux X à un rendez-vous auprès de leur banque ne présume en rien de son intervention dans l'élaboration des comptes prévisionnels ni de leur validation tacite.
Enfin, elle rappelle que la simple existence d'un écart entre le chiffre d'affaires provisionnel et le chiffre d'affaires réalisé par le franchisé n'implique pas en soi une faute du franchiseur, dès lors que ces données revêtent un caractère nécessairement aléatoire.
Elle prétend en outre, que l'absence d'atteinte du chiffre d'affaires prévisionnel par la société Din Art s'expliquait par des facteurs extérieurs à elle, notamment l'erreur de la société Ikea, à hauteur de plus de 50 %, dans l'appréciation du niveau de fréquentation du centre commercial, et l'adoption par la société Din Art de chiffres optimistes dans son prévisionnel.
Si le franchiseur n'est pas tenu de remettre un compte d'exploitation prévisionnel au candidat à la franchise, aux termes du 6° de l'article R. 330-1 du Code de commerce, le document d'information précontractuelle doit contenir " la nature et le montant des dépenses et investissements spécifiques à l'enseigne ou à la marque que la personne destinataire du projet de contrat engage avant de commencer l'exploitation ". Il appartient ensuite à chaque franchisé d'établir son compte prévision à partir de ces données. En revanche, si le franchiseur remet un compte d'exploitation, il doit donner des informations sincères et vérifiables.
Le contrat de franchise stipule en son article 9.5 que " Guy Degrenne ne garantit pas une rentabilité minimum, ni un niveau de profit ou de perte à aucun des franchisés, et en particulier au Franchisé, qui a procédé ou fait procéder en toute confidentialité, à l'évaluation des risques et des opportunités liés à l'ouverture du (des) point(s) de vente sur le territoire ".
Il n'est pas contesté que, par courrier du 14 avril 2009 puis en annexe 6 du DIP remis le 5 mai 2009 aux époux X, la société Boutiques GD a communiqué à ces derniers les chiffres clefs de quelques boutiques Guy Degrenne ainsi que les données relatives à la saisonnalité moyenne des ventes au cours d'un exercice, lesquelles données ne constituent pas des chiffres d'exploitation prévisionnels.
C'est donc en vain que Maître P., ès qualités, expose que la société Boutiques GD aurait fourni à la société Din Art les chiffres prévisionnels pour la boutique de Bry sur Marne, et aurait surestimé le chiffre d'affaires prévisionnel de la société Din Art.
La société Boutiques GD fait à cet égard justement observer que les époux X, qui disposaient de plus trois mois entre la remise du DIP et la signature du contrat de franchise pour effectuer leur travail de prévision, ont établi seuls leur compte de résultat prévisionnel.
Par ailleurs, il n'est pas établi que les chiffres communiqués par la société Boutiques GD soient erronés.
Ainsi la seule circonstance qu'un écart soit apparu entre les chiffres d'affaires prévisionnels et les chiffres d'affaires réalisés par la société Din Art est insuffisante à établir la preuve du caractère non sincère ou trompeur des chiffres et documents fournis par le franchiseur, lequel ne pouvait être tenu de garantir la réalisation des prévisionnels de la société Din Art, sauf à méconnaître le principe de l'autonomie juridique et financière du franchisé, agissant en qualité de commerçant indépendant.
Dès lors ce second grief doit être rejeté.
Il résulte de tout ce qui précède qu'aucune violation de ses obligations précontractuelles d'information n'est établie à l'égard de la société Boutiques GD, de sorte que Maître P., ès qualités, sera débouté de l'ensemble de ses demandes à ce titre.
Sur les manquements contractuels allégués
Sur l'obligation de conseil et d'assistance
Maître P. fait valoir que la société Boutiques GD a manqué à son obligation essentielle d'assistance et de conseil à l'égard de son franchisé. En effet, il relève que systématiquement informé par le franchisé des difficultés de ce dernier, le franchiseur n'a proposé aucune mesure sérieuse de nature à améliorer l'exploitation du franchisé. Il relève que les seules mesures proposées consistent dans l'élaboration d'un échéancier de règlement de la dette, sans aucune autre mesure destinée à augmenter le chiffre d'affaires ou la marge de la société Din Art, la société Boutiques GD ayant notamment refusé de baisser le prix de cession des produits pour permettre à la société Din Art de dégager une meilleure marge. Il considère que ce manquement contractuel justifie la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs de la société Boutiques GD, et l'allocation de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.
La société Boutiques GD affirme avoir pleinement satisfait à son obligation de conseil et d'assistance à l'égard de la société Din Art, à laquelle elle indique avoir proposé de nombreuses solutions afin de lui permettre d'améliorer sa situation financière et d'augmenter son chiffre d'affaires. Elle indique que malgré la signature d'un accord portant échelonnement des paiements dus par la société Din Art le 15 décembre 2011, à compter de cette date, elle n'a reçu aucun courrier de la société Din Art sollicitant une assistance de sa part, jusqu'à la lettre de rupture du 26 février 2013. Elle fait également observer que la société Din Art a refusé de participer à plusieurs opérations promotionnelles et de communication organisées par la société Boutiques GD à compter de décembre 2011. Elle estime que ce comportement atteste de ce que les époux X préparaient leur sortie du réseau, aux fins de création d'une nouvelle société d'exploitation d'un magasin d'arts de la table à Meaux.
Elle considère également que les premiers juges ne pouvaient se contenter de faire référence à une lettre de licenciement adressée par le franchiseur à l'un de ses préposés, dans laquelle il était reproché à ce denier de n'avoir pas suffisamment assisté certains franchisés, dont la société Din Art, dès lors que d'une part, une telle lettre de licenciement a nécessairement été rédigée à charge, et d'autre part cette lettre est datée du 15 décembre 2010 de sorte qu'il ne peut en être déduit que la société Boutiques GD aurait manqué à son obligation d'assistance durant toute la durée du contrat de franchise, soit jusqu'en mars 2013.
La cour relève que l'article 4.2 intitulé " Assistance technique et commerciale " du contrat de franchise régularisé entre la société Din Art et la société Boutiques GD précise les modalités de l'assistance du franchiseur lors de la création comme pendant l'activité commerciale du franchisé. Les actions que s'est engagée à assumer la société Boutiques GD en cours d'exécution du contrat comprennent notamment la réalisation d'action promotionnelles et de communication au plan national et local, la transmission de prix conseillés facultatifs, la fourniture de documents de contrôle de gestion et la communication des chiffres d'affaires réalisés au sein du réseau de franchise, et le suivi de programmes de formation.
Il ressort notamment de l'instruction du dossier que :
- la société Boutiques GD a systématiquement répondu aux demandes d'assistance formulées par la société Din Art, soit en apportant une réponse aux courriels et lettres de cette dernière soit en proposant l'organisation de réunions, qui se sont effectivement tenues avec le franchisé,
- des réunions ont ainsi été organisées entre les époux X, gérants de la société Din Art, et les représentants de la société Boutiques GD, le 21 octobre 2010, le 22 novembre 2010, le 14 février 2011, le 28 février 2011, le 6 mai 2011, le 10 juin 2011, le 28 octobre 2011, le 30 novembre 2011, le 10 décembre 2011, le 5 janvier 2012, le 19 février 2013 et le 25 mars 2013,
- une aide financière relative aux publications publicitaires engagées pour la fin de l'année 2010 a été proposée par la société Boutiques GD à son franchisé par courriel du 2 novembre 2010,
- une formation de merchandising a été proposée à la société Din Art lors de la réunion du 14 février 2011,
- la société Din Art a refusé de participer à plusieurs opérations promotionnelles organisées par la société Boutiques GD à compter de 2011,
- la société Boutiques GD s'est engagée à plusieurs reprises à assister le franchisé dans le développement de son chiffre d'affaires grâce à la mise à disposition de produits complémentaires, à accorder une remise de 1 400 euros afin de permettre à la société Din Art d'atteindre un niveau de marge brute équivalent à celui en vigueur dans le réseau, à échelonner la dette de la société Din Art en plusieurs mensualités de remboursement, à mettre en place un plan d'apurement du passif de la société Din Art, et à procéder à la réalisation d'un inventaire et la reprise partielle de stock à hauteur de 10 à 30 000 euros HT,
- le 10 décembre 2011 les parties ont renégocié un nouvel échéancier de paiement, l'accord a été signé par la société Din Art le 15 décembre 2011,
- à compter du mois de décembre 2011, aucune demande d'assistance n'a été adressée par la société Din Art au franchiseur, jusqu'à la lettre de rupture du 26 février 2013.
C'est aussi à juste titre que la société Boutiques GD relève que la lettre de licenciement, adressée à son préposé M. G., le 15 décembre 2010, lui faisant grief de ne pas avoir suffisamment assisté les franchisés, dont la société Din Art, ne peut être retenue à son encontre pour considérer que la société Boutiques GD a manqué à son obligation d'assistance pendant toute la durée du contrat de franchise, dès lors que les griefs énoncés portent sur une courte période d'exécution du contrat, soit du 29 juillet 2009 au 15 décembre 2010, et surtout il est démontré que de nombreuses actions ont été prises afin de porter assistance à la société Din Art.
Maître P. fait encore grief à la société Boutiques GD d'avoir refusé de baisser le prix de cession des produits Guy Degrenne pour permettre à la société Din Art de dégager une meilleure marge. Mais, si le franchiseur doit effectivement une certaine assistance commerciale et technique à son franchisé, qui peut également être assortie d'une assistance financière et d'un devoir de conseil, il n'est aucunement fait obligation au franchiseur, qui ne peut se substituer au franchisé, commerçant indépendant, dans la gestion de ses affaires, de baisser ses prix de cession afin de permettre au franchisé d'augmenter son chiffre d'affaires ou sa marge bénéficiaire.
Il est encore reproché à la société Boutiques GD d'avoir empêché une vente importante auprès d'un client tchadien de la société Din Art, en ayant tardé dans la délivrance d'un devis portant sur la personnalisation des produits commandés. Mais cet incident isolé n'est pas de nature à démontrer une carence de la société Boutiques GD dans son obligation d'assistance. En tout état de cause, elle a offert la mise en place d'une assistance dans la gestion des commandes ultérieures.
Il résulte de ces éléments que la société Boutiques GD a satisfait son obligation de moyen au titre de l'assistance due au franchiseur.
Ce grief doit également être rejeté.
Sur la pratique de prix imposés
Maître P., ès qualités, soutient que la société Boutiques GD pratiquait une politique de prix imposés à l'égard de ses franchisés, privant la société Din Art de la possibilité de baisser ses prix de vente par rapport aux prix de vente fixés par la société Guy Degrenne. Il affirme ainsi que les marchandises étaient livrées préétiquetées et préenregistrées dans le logiciel de gestion de caisse. Il prétend que cette pratique, qui contrevient aux dispositions des articles L. 442-5 du Code de commerce et L. 420-1 du Code de commerce et 81 du Traité CE, constitue une faute contractuelle à l'égard de la société Din Art.
La société Boutique GD réplique que le contrat de franchise se contentant de faire état de la mise en place de prix conseillés applicables, lesquels demeuraient facultatifs, le franchisé conservait une entière latitude pour pratiquer des prix soit inférieurs soit supérieurs. La société Din Art ne démontre, en tout état de cause, pas l'existence d'une police de prix. Elle ajoute que le grief formulé par la société Din Art relatif à un niveau de marge insuffisant pendant les périodes de soldes, est inopérant, l'objectif des soldes n'étant pas la réalisation d'une marge importante mais l'écoulement des stocks.
Elle en conclut que les griefs ainsi formulés par Maître P., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Din Art, à son encontre ne sont ni sérieux ni motivés. Aucun préjudice n'est par ailleurs démontré.
L'article L. 442-5 du Code de commerce prohibe le fait pour toute personne d'imposer directement ou indirectement un caractère minimal au prix de revente d'un produit.
L'article 4.2.2 du contrat de franchise régularisé le 29 juillet 2009 entre la société Din Art et la société Boutiques GD stipule que :
" Guy Degrenne assistera le Franchisé dans la Commercialisation des Produits par : La transmission de prix conseillés applicables aux Produits distribués pour assurer l'unité de la politique commerciale du réseau et préserver l'image des Marques, des Produits et du réseau à l'égard de la clientèle ; le Franchisé reconnaît qu'il reste entièrement libre de sa politique commerciale et qu'il peut toujours à sa convenance, pratiquer des prix inférieurs ou supérieurs aux prix conseillés ".
Il apparaît encore que l'article 8.4 intitulé " Prix de revente des produits " du contrat de franchise du 29 juillet 2009, est libellé comme suit :
" Le franchisé fixe à son gré et sous sa seule responsabilité le prix de revente des Produits. Guy Degrenne ne donnera à ce sujet, s'il le demande, que des indications de prix conseillés ".
Il ressort de ces stipulations contractuelles que la société Boutique GD ne fixe aucun prix minimum ou maximum de vente mais conseille ses franchisés par le biais de prix de vente conseillés ou indicatifs.
C'est donc en vain que Me Y ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Din Art allègue que la société Boutiques GD, en qualité de franchiseur, lui imposait les prix, alors qu'il apparaît que :
- la société Din Art a organisé des événements promotionnels, M. X a notamment informé la société Boutiques GD de la mise en place d'une remise de 10 % sur tout le magasin en février-mars 2011 à l'occasion d'une campagne publicitaire organisée par le bailleur de la boutique,
- de nombreux franchisés du réseau pratiquaient des remises,
- il n'est aucunement démontré que la société Boutiques GD avait accès au logiciel de gestion de caisse de la société Din Art, ni de ce que celle-ci n'avait pas la maîtrise de ce logiciel.
Partant, il n'est pas démontré que la société Boutiques GD aurait, dans les faits, imposé des prix de revente des produits à son franchisé, lequel a librement déterminé les prix de revente des produits commercialisés dans sa boutique.
Me Y prétend également que le franchiseur exerçait un contrôle des marges du franchisé, en période de soldes, en violation des dispositions de l'article L. 442-5 du Code de commerce qui prohibe également le contrôle des marges en ce qu'il concourt au contrôle du prix de vente.
Il apparaît toutefois que l'article 8.3 du contrat de franchise stipule que le franchisé doit fournir au franchiseur les informations suivantes : un état détaillé et synthétique des ventes de produits par secteur et par catégorie, un récapitulatif annuel indiquant le nombre, le prix et la nature des ventes réalisées et des marges respectives
Ainsi, la fourniture d'informations relatives aux marges pratiquées par le franchisé ne préjuge pas de l'exercice d'un contrôle par le franchiseur sur ces marges. C'est donc à juste titre que la société Boutiques GD objecte qu'elle n'a jamais contrôlé les marges de son franchisé en période de solde. En tout état de cause, aucune preuve d'une telle pratique n'est établie par Me Y, ès qualités.
Cet autre grief n'est pas plus fondé.
Dans ces conditions aucun grief invoqué par Me Y, ès qualité, n'est établi et ne peut donc pas caractériser un manquement suffisamment grave à une obligation contractuelle de la part de la société Boutiques GD pour justifier ses demandes.
En l'absence de la preuve d'un manquement contractuel de la société Boutiques GD, il y a lieu de rejeter les demandes formulées par Me Y, ès qualités, de ce chef.
Le jugement entrepris sera par conséquent infirmé en ce qu'il a :
- constaté la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs de la société Boutique DG,
- condamné la société Boutique GD à payer à Maître Y, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Din Art, la somme de 60 807 euros à titre de dommages et intérêts.
Sur les défauts allégués de qualité des produits Guy Degrenne
Maître P., ès qualités, affirme que la société Distribution GD a procédé à la livraison de produits systématiquement défectueux et de mauvaise qualité, ayant causé à la société Din Art un préjudice commercial et en conclut que cette faute justifie la rupture du contrat de franchise, même sans préavis, et l'allocation de dommages et intérêts d'un montant de 7 500 euros pour atteinte à la réputation commerciale de la société Din Art, perte de clientèle, surcoût de fonctionnement lié à la gestion du service après-vente et des retours de marchandises.
Les sociétés appelantes expliquent que la société Din Art ne respectait pas la procédure de vérification de la conformité des produits stipulée au contrat de franchise, puisque le respect de cette obligation était de nature à éviter que des produits présentant des défauts de qualité soient présentés à la vente. Elles font en outre valoir, qu'en tout état de cause, les défauts de qualité allégués ne sont aucunement démontrés, de même que le préjudice prétendument subi.
Les seuls échanges de courriels entre un franchisé du réseau Guy Degrenne et le franchiseur, ainsi que la lettre de résiliation du contrat de franchise litigieux, versés aux débats, sont inopérants à démontrer le caractère systématiquement défectueux des produits livrés ou leur mauvaise qualité.
Il ressort en outre de l'instruction du dossier qu'aucune lettre de mise en demeure relative à ce grief n'a, pendant l'exécution du contrat, été adressée ni à la société Boutiques GD ni à la société Distribution GD, de sorte que ce grief n'est pas établi.
La demande de ce chef doit donc être rejetée.
Sur les demandes des sociétés boutiques GD et distribution GD
Sur la créance de la société Distribution GD sur la société Din Art
La société Distribution GD estime que la réalité de sa créance vis-à-vis de la société Din Art est démontrée par les factures versées aux débats et relatives à des articles et du mobilier vendus à la société Din Art entre juillet 2009 et février 2013. Elle ajoute que la société Din Art n'a jamais contesté le bien-fondé de cette créance, ni des mises en demeure de payer qui lui ont été adressées les 2 et 15 novembre 2011 et le 26 mars 2013. Elle fait valoir que les factures produites sont suffisantes à rapporter la preuve de sa créance, la société Din Art ne justifiant en outre d'aucune demande d'avoir ou de contestations sur la réception des marchandises correspondantes, et étant le distributeur exclusif de la société franchisé, elle recevait nécessairement livraison des marchandises facturées. En toute hypothèse, elle fait valoir que ces factures s'accompagnent d'autres éléments de preuve à même d'établir la réalité de la créance, notamment la reconnaissance expresse de la dette par la société Din Art.
Maître P., ès qualités, explique que la société Distribution DG est défaillante dans l'administration de la preuve de la créance alléguée, dès lors qu'elle ne verse aux débats que ses propres factures de marchandises, lesquelles ne peuvent suffire, en l'absence de bons de livraisons détaillés et émargés, à prouver la créance litigieuse. Il indique en outre qu'aucun des courriers produits n'est relatif à la même somme, qu'ils ne font état d'aucune commande, livraison ou facture, et que l'absence de contestation ne suffit pas à prouver l'existence d'une créance.
Il ressort de l'instruction du dossier que :
- le compte rendu de la réunion du 14 février 2011 qui s'est tenue entre le franchiseur et la société Din Art, rédigé par cette dernière, fait ressortir que M. X a validé l'encours financier de 120 170,12 euros dû par le franchisé,
- le 4 avril 2011, la société Distribution GD a procédé à l'arrêt des livraisons en raison des impayés de la société Din Art ; le 6 avril 2011 la société Din Art sollicitait la mise en place d'un plan d'apurement de sa dette,
- par courrier du 20 décembre 2011, Mme X a retourné signé avec la mention " bon pour accord " la proposition de la société Distribution GD de mise en place d'un d'apurement d'une dette d'un montant, au 9 décembre 2011, de 125 417 euros,
- par courriers des 2 et 5 novembre 2011, le franchiseur a mis en demeure la société Din Art de payer la somme de 123 876,88 euros à la société Distribution GD,
- par courrier du 26 mars 2013 le franchiseur a, à nouveau, mis en demeure la société Din Art de régler le montant des impayés restant dus à la société Distribution GD, soit à cette époque la somme de 204 867,33 euros, outre les pénalités de retard et l'indemnité pour frais de recouvrement telle que stipulée à l'article 8 des conditions générales de vente de la société Distribution GD. Elle faisait aussi part de son intention de se prévaloir des clauses de réserve de propriété convenues entre les parties aux fins de restitution des biens objets des factures impayées et toujours en possession du franchisé,
- par courrier d'avocat du 28 mars 2013, la société Din Art reconnaît être redevable d'une dette à l'égard de la société Distribution GD. Ce dernier courrier est rédigé comme suit : " Au terme de ce rendez-vous il était confirmé : que le traitement de la dette marchandise de l'ordre de 145 K devait faire l'objet d'un accord. Un délai d'un mois au 24 avril était prévu pour trouver cet accord sachant que ma cliente demandait l'abandon en totalité de cette créance pour compenser ses préjudices alors que vous proposez d'abandonner 50 % de votre créance " (Pièce n° 28 des appelantes),
- un inventaire des biens, devant faire l'objet de la clause de réserve de propriété, a été dressé contradictoirement entre les parties le 2 et le 5 avril 2013 et le 10 puis le 12 avril 2013, la société Boutiques GD a procédé avec l'accord de la société Din Art à l'enlèvement des articles et mobiliers couverts par la clause de réserve de propriété,
- par courriel du 5 avril 2013, Mme X, gérante de la société Guy Degrenne, a validé le fichier issu de l'inventaire contradictoire qui a eu lieu le même jour, et a donné son accord aux opérations d'enlèvement du stock,
- par lettre du 7 mai 2013, la société Boutiques GD a informé la société Din Art de ce que le montant des articles repris s'est élevé à la somme de 42 985,25 euros HT soit 51 410,36 euros TTC, le mobilier restitué a été quant à lui valorisé à la somme de 29 980,69 euros HT soit 35 856,91 euros TTC, et a réitéré sa mise en demeure à l'intention de la société Din Art aux fins de paiement de la somme de 131 901,34 euros TTC, hors pénalités pour retard de paiement et indemnité pour frais de recouvrement. Cette mise en demeure est restée lettre morte.
Si au vu des dispositions de l'article L. 110-3 du Code de commerce la preuve est libre en matière commerciale, il n'en demeure pas moins que la seule production de factures est insuffisante pour justifier de l'obligation de la partie à laquelle on l'oppose. De sorte que les factures produites par les sociétés appelantes au soutient de leur demande sont insuffisantes à établir l'existence de la créance alléguée.
En revanche, il ressort de l'ensemble des éléments susmentionnés que la société Din Art a reconnu être redevable à l'égard de la société Distribution GD de la somme de 145 000 euros au titre du paiement des marchandises livrées par la société Distribution GD. La société Distribution GD ne prouve être créancière que de cette créance, aucune autre pièce autre que des factures n'étant par ailleurs produites par cette dernière pour établir sa créance supplémentaire.
En conséquence la demande de compensation est sans objet.
Il ressort en outre de l'article 8 des conditions générales de vente de la société Distribution Guy Degrenne que :
" Par application de la loi 2008-776 du 4 aout 2008, toute somme non payée à l'échéance prévue sur la facture ou tout règlement non conforme au montant donnera lieu de plein droit après mise en demeure préalable, au paiement de pénalités de retard calculées à un taux égal à trois fois le taux de l'intérêt légal (sur le montant hors taxe) par mois de retard. Ces pénalités courant le lendemain du jour de déchéance jusqu'au jour du paiement et tout mois commencé sera dû dans son entier, le montant minimum de cette pénalité étant fixée à 60 euros. Les frais de dossier et de recouvrement exposés par notre société pour une telle situation devront lui être remboursés. ".
En application de ces dispositions les demandes de la société Distribution GD au titre des pénalités de retard doivent être considérées comme chiffrées.
En revanche, Maître P. soulève à juste titre le caractère non chiffré de la demande de la société Distribution GD au titre des frais de recouvrement, laquelle sera donc rejetée.
Il y a donc lieu de fixer la somme de 145 000 euros au passif de la société Din Art, à titre de créance de la société Distribution GD, outre les pénalités pour retard de paiement courant de la date d'exigibilité de chaque facture à la date du jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société Din Art, soit le 26 juin 2013.
Sur la résiliation du contrat de franchise et les sommes réclamées par la société Boutiques GD
La société Boutiques GD estime que la résiliation anticipée par la société Din Art du contrat de franchise était injustifiée et fautive. Elle explique en effet que le contrat de franchise avait été conclu pour une durée déterminée de 5 ans, de sorte que la rupture anticipée intervenue le 26 mars 2013 revêt un caractère abusif.
L'article 17.1 du contrat de franchise signé entre la société Din Art et la société Boutiques GD stipule qu' : " en cas d'inexécution par l'une des Parties d'une seule de ses obligations contractuelles, la résiliation du Contrat serait encourue de plein droit, trente (30) jours après une mise en demeure signifiée par lettre recommandée avec accusé de réception restée sans effet ".
La société Din Art, le 26 février 2013 a adressé à la société Boutiques GD une lettre recommandée (Pièce n° 22 de Maître P.) dans laquelle elle lui notifiait la résiliation du contrat de franchise suivant un préavis contractuel d'un mois, soit le 26 mars 2013.
La société Din Art a reproché à la société Boutiques GD dans son courrier de résiliation :
- le dysfonctionnement de la carte privilège
- des défauts de qualité des produits Guy Degrenne
- des marges insuffisantes
- le non-respect de l'engagement de garantie de la marge pendant les périodes de solde
- une politique de prix élevés
- la livraison de produits " spécial soldes " sans reprises des invendus
- un chiffre d'affaires inférieur au prévisionnel fourni.
Par courrier du 26 mars 2013, la société Boutiques GD a contesté l'ensemble des griefs formulés à son encontre.
Or il convient de relever, que la cour a jugé plus haut que Maître P. agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Din Art, ne démontre aucun des griefs toujours maintenus dans le cadre de la présente instance à l'encontre de la société Boutiques GD, les autres n'étant pas développés et donc démontrés.
La résiliation par la société Din Art est donc fautive.
La société Boutiques GD sollicite à ce titre la somme de 7 500 euros en réparation du préjudice subi en raison de la désorganisation du réseau et de l'émergence d'un sentiment de défiance chez les autres franchisés du réseau. Elle demande à ce que cette somme soit fixée au passif de la société Din Art.
Mais la société Boutiques GD ne verse aux débats aucune pièce susceptible de justifier de son préjudice, ni n'explicite le mode de calcul de l'indemnité sollicitée, de sorte que la demande sera rejetée.
Sur la rupture de la relation contractuelle avec la société Distribution GD
La société Distribution GD explique que la société Din Art s'est régulièrement approvisionnée auprès de la société Distribution GD entre 2009 et 2013, de sorte qu'il existe entre elles des relations commerciales établies. Elle ajoute qu'en raison de la stipulation dans le contrat de franchise conclu entre la société Din Art et la société Boutiques GD d'une clause d'exclusivité d'approvisionnement en sa faveur, la société Distribution GD pouvait légitimement escompter que la relation commerciale avec la société Din Art durerait au moins jusqu'au terme du contrat de franchise, soit le 28 mars 2014. Or, elle relève qu'à compter du 25 février 2013, la société Din Art a cessé de manière soudaine de s'approvisionner auprès de la société Distribution DG, et ce sans aucun préavis. Elle explique que le préavis contractuel d'un mois annoncé n'a pas été effectif, la société Din Art n'ayant passé aucune commande auprès de la société DG entre le 26 février et le 26 mars 2013. Elle en déduit que la rupture ainsi intervenue revêt un caractère brutal à son égard. En tout état de cause, elle considère que les prétendus défauts de qualité dénoncés par la société Din Art ne pouvaient justifier à eux seuls une telle rupture, puisqu'elle relève que de tels défauts, non démontrés, ne présentent pas le caractère de gravité suffisante justifiant une rupture sans préavis. Elle avance qu'eu égard à la durée de leur relation commerciale, elle aurait dû bénéficier d'un préavis d'au moins deux mois.
Elle indique qu'au cours du dernier exercice clos avant la rupture, entre le 1er mars 2012 et le 28 février 2013, elle réalisait un chiffre d'affaires annuel de 96 912 euros HT avec la société Din Art avec un taux de marge brute moyen de 46,4 %. Elle sollicite par conséquent à titre d'indemnisation la somme de 7 500 euros correspondant à deux mois de marge brute, et la fixation de cette créance de réparation au passif de la société Din Art.
Maître P. estime qu'en raison des fautes commises par la société Distribution GD, celle-ci ne peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 442-5, I, 5° du Code de commerce. Il ajoute que la société Distribution GD ne démontre pas la part des commandes de la société Din Art dans son chiffre d'affaires global, ni que la perte de ce partenaire n'a pu être remplacée, qu'elle n'établit pas non plus de préjudice résultant de la brutalité alléguée de la rupture, et qu'elle ne démontre pas plus en quoi le délai d'un mois était insuffisant pour anticiper la perte d'un client.
Il rappelle que l'obligation d'approvisionnement exclusif résulte du contrat de franchise, de sorte que les dispositions de ce dernier ont vocation à régir les relations entre la société Din Art et la société Distributeurs GD. Il estime à ce titre que le respect du prévis d'un mois stipulé contractuellement état largement suffisant.
Aux termes de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce :
" Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers (...) de rompre unilatéralement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels.
Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ".
Les parties s'accordent sur l'ancienneté de la relation, sur son caractère établi, sur l'auteur de la rupture et sur la date de l'annonce de celle-ci, mais s'opposent sur la brutalité de la rupture, la durée du préavis et l'indemnisation du préjudice.
Il ressort de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce que la brutalité de la rupture résulte de l'absence de préavis écrit ou de l'insuffisance de la durée de ce préavis au regard des relations commerciales antérieures. L'évaluation de la durée du préavis à accorder est fonction de toutes les circonstances de nature à influer son appréciation au moment de la notification de la rupture, notamment de l'ancienneté des relations, du volume d'affaires réalisé avec l'auteur de la rupture, du secteur concerné, de l'état de dépendance économique de la victime, des dépenses non récupérables dédiées à la relation et du temps nécessaire pour retrouver un partenaire sur le marché de rang équivalent.
Par courrier du 26 février 2013 la société Din Art a notifié à la société Boutiques GD la résiliation du contrat de franchise conclu entre elles le 29 juillet 2009, suivant un préavis d'un mois. Ce contrat de franchise stipulait une clause d'approvisionnement exclusif auprès de la société Distribution GD et des fournisseurs référencés du réseau Guy Degrenne.
La société Distribution GD conteste néanmoins avoir bénéficié d'un préavis d'un mois et affirme qu'à compter du 26 février 2013, la société Din Art a cessé, brutalement de s'approvisionner auprès d'elle.
Il est constant que la prévisibilité de la rupture n'exclut pas nécessairement son caractère brutal. Ainsi, la circonstance que la société Din Art ait connu des difficultés économiques ne peut valoir annonce certaine d'une rupture à venir.
Il n'est pas établi que le préavis ait été effectif.
La rupture est donc brutale.
Le délai de préavis doit s'entendre du temps nécessaire à l'entreprise délaissée pour se réorganiser, c'est-à-dire pour préparer le redéploiement de son activité, trouver un autre partenaire ou une autre solution de remplacement. Les principaux critères à prendre en compte sont la dépendance économique, l'ancienneté des relations, le volume d'affaires et la progression du chiffre d'affaires, les investissements spécifiques effectués et non amortis, les relations d'exclusivité et la spécificité des produits et services en cause. Le délai de préavis suffisant s'apprécie au moment de la notification de la rupture.
La société Din Art et la société Distribution GD étaient en relation commerciale depuis plus de trois ans. La société Distribution GD prétend qu'elle réalisait au cours du dernier exercice, avant la rupture, un chiffre d'affaires de 96 912 euros HT avec la société Din Art, avec un taux de marge de 46,4 %.
Maître P., ès qualités, relève à juste raison qu'il n'est pas communiqué à la cour la part des commandes de la société Din Art dans le chiffre d'affaires global de la société Distribution GD.
De ces seuls éléments soumis à l'appréciation de la cour, il y a lieu de fixer le préavis dont aurait dû bénéficier la société Distribution GD à un mois.
Il est constant que le préjudice résultant du caractère brutal de la rupture est constitué par la perte de la marge dont la victime pouvait escompter bénéficier pendant la durée du préavis qui aurait dû lui être accordé. La référence à retenir est la marge sur coûts variables, définie comme la différence entre le chiffre d'affaires dont la victime a été privée sous déduction des charges qui n'ont pas été supportées du fait de la baisse d'activité résultant de la rupture.
La société Distribution DG qui se prévaut d'un chiffre d'affaire annuel de 96 912 euros HT avec la société Din Art et d'un taux moyen de marge brute de 46,4 %. Or, seule la marge sur coûts variables doit être prise en compte.
Dès lors, compte tenu du secteur d'activité, il y a par conséquent lieu de retenir un taux de marge moyenne sur coûts variables de 20 %.
La cour fixera en conséquence le préjudice de la société Distribution GD lié à la rupture brutale des relations commerciales établies avec la société Din Art à la somme de 1 615,2 euros [(96 912/12) x 20 %].
Il y a donc lieu d'infirmer le jugement de ce chef et de fixer la somme de 1 615,2 euros au passif de la société Din Art à titre de créance indemnitaire de la société Distribution GD pour rupture brutale des relations commerciales établies.
Sur les dépens et frais irrépétibles
Le sens du présent arrêt conduit à infirmer le jugement sur les dépens et l'application qui a été faite de l'article 700 du Code de procédure civile.
Me Y sera condamné à payer à chacune des sociétés appelantes, la société Boutiques GD et Distribution GD, la somme de 7 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.
Par ces motifs : LA COUR, Infirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a : débouté la société Din Art représentée par Maître Y, ès qualités de liquidateur judiciaire, de sa demande de paiement par la société Distribution GD de dommages et intérêts pour dommages causés par la mauvaise qualité des marchandises ; débouté la société Boutique GD de sa demande de dommages et intérêts pour rupture abusive des relations commerciales, Statuant à nouveau : Fixe à 145 000 euros la créance de la société Distribution Guy Degrenne au passif de la société Din Art au titre des factures impayées, outre les pénalités de retard ; Fixe à 1 615,2 euros la créance de la société Distribution Guy Degrenne au passif de la société Din Art au titre des dommages et intérêts pour rupture brutale des relations commerciales établies ; Y ajoutant, Condamne Maître P. ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Din Art aux dépens d'instance et d'appel, Condamne Maître P. ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Din Art à payer à la société Boutiques GD la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne Maître P. ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Din Art à payer à la société Distribution GD la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Rejette toute autre demande.