Livv
Décisions

CA Reims, ch. civ. sect. 1, 18 juin 2019, n° 18-00808

REIMS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

SCEV le B. Alexandre (Sté)

Défendeur :

Mafroco (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Martin

Conseillers :

Mme Maussiere, M. Lecler

TGI Chalons-en-Champagne, du 21 févr. 20…

21 février 2018

Le 4 février 2011, la société civile d'exploitation viticole Le B. Alexandre (la société Le B.) a acquis un matériel Trimovigne 31 CH TD servant au travail des vignes auprès de la société à responsabilité limitée Mafroco, pour la somme de 84 151,73 euros hors taxes.

Le 22 août 2011, le matériel est livré à ce client.

Le 23 août 2011, Monsieur Alexandre Le B., né le 26 février 1985, gérant de la société Le B., a été victime d'un accident corporel lors de l'utilisation de ce matériel, et a subi une intervention chirurgicale.

Par exploit d'huissier en date du 4 décembre 2014, la société Le B. et Monsieur Alexandre Le B. ont fait assigner la société Mafroco en référé devant le tribunal de grande instance de Châlons en Champagne aux fins de faire désigner un expert avec mission d'ordonner une expertise du Trimovigne 31 CH TD.

Par ordonnance du 3 mars 2015, le juge des référés a désigné deux experts :

- Monsieur B., aux fins d'examen du matériel litigieux,

- le Docteur V., aux fins d'évaluation du préjudice corporel subi par Monsieur Le B..

Le 14 octobre 2016, les experts commis ont chacun déposé leur rapport, le second fixant la date de consolidation de Monsieur Le B. au 23 janvier 2012.

Par exploit d'huissier en date du 22 novembre 2016, la société Le B. et Monsieur Le B. ont fait assigner la société Mafroco devant le tribunal de grande instance de Châlons en Champagne sur le fondement des articles 1240, 1231-1 et 1245 et suivants du Code civil, sur le fondement de l'article 3 du décret n° 2005-1236 du 30 septembre 2005modifié, et des dispositions du décret n° 92-767 du 29 juillet 1992 relatif aux règles techniques et aux procédures de ratification de conformité applicables aux équipements de travail, aux fins d'obtenir réparation.

En dernier lieu, la société Le B. et Monsieur Le B. ont sollicité le tribunal, sur le fondement des articles 1226, 1240, 123 1-1 et 1245 et suivants du Code civil, de l'article 3 du décret n° 2005-1236 du 30 septembre 2005 et des dispositions du décret n°92-767 du 29 juillet 1992, et au visa de l'article 700 du Code de procédure civile, de :

- les accueillir dans l'ensemble de leurs demandes,

- constater la non-conformité de l'engin litigieux,

- constater les fautes commises par la société Mafroco,

- condamner la société Mafroco à verser à Monsieur Le B. les sommes suivantes :

- incapacité fonctionnelle temporaire sur le plan personnel : 517,50 euros,

- incapacité fonctionnelle temporaire sur le plan professionnel 19 961,66 euros,

- déficit fonctionnel permanent 1900 euros,

- souffrances endurées 3 000 euros,

- préjudice temporaire esthétique d'agrément : 1 500 euros,

- préjudice esthétique définitif 3 000 euros,

- aide d'une tierce personne 225 euros,

- condamner la société Mafroco à payer à la société Le B. la somme totale du prix d'acquisition de l'engin litigieux et de ses accessoires, soit 91 643,26 euros hors taxes (ht) ;

- condamner la société Mafroco à payer à la société Le B. la somme de 9 854,15 euros, correspondant aux intérêts bancaires payés par elle dans le cadre de l'acquisition de l'engin litigieux,

- condamner la société Mafroco à payer à la société Le B. la somme de 2 337,10 euros correspondant aux frais de réparation de l'engin litigieux,

- condamner, à titre principal, la société Mafroco à payer à la société Le B. la somme de 71 620,38 euros ht, correspondant à l'indemnisation au titre de la perte d'exploitation et à celle de 53 141,68 euros au titre du préjudice subi du fait de l'absence de fourniture d'une machine en remplacement de celle litigieuse,

A titre subsidiaire,

- désigner un expert dont la mission sera l'évaluation des pertes d'exploitation subies par la société Le B., à la suite de l'accident dont a été victime Monsieur Le B., des différentes immobilisations de l'engin litigieux, de la restitution de l'engin et du fait de l'absence de fourniture d'une machine en remplacement de celle litigieuse ;

- condamner la société Mafroco à payer à la société Le B. la somme de 20 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Dans le dernier état de ses demandes, la société Mafroco a sollicité le tribunal, sur le fondement des articles 1245 et suivants du Code civil, des articles 1641 et suivants du même Code, et de l'article 122 du Code de procédure civile, de :

A titre principal,

- dire que l'action de Monsieur Le B. sur le fondement de la responsabilité des produits défectueux est prescrite,

- dire et juger irrecevable Monsieur Le B. en l'ensemble de ses prétentions,

A titre subsidiaire seulement,

- dire et juger M. Alexandre Le B. mal fondé en l'ensemble de ses demandes,

En conséquence,

- l'en débouter,

Sur l'engin litigieux,

A titre principal :

- dire et juger que l'action de la société Le B. est forclose,

- dire et juger irrecevable la société Le B. en l'ensemble de ses prétentions,

A titre subsidiaire seulement,

- dire et juger mal fondée la société Le B. en l'ensemble de ses prétentions,

- l'en débouter,

En tout état de cause :

- condamner la société Le B. et Monsieur Le B. in solidum aux entiers dépens et à payer à la société Mafroco la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Par jugement en date du 21 février 2018, le tribunal de grande instance de Châlons en Champagne a :

- déclaré irrecevable les demandes de Monsieur Le B. et de la société Le B. fondées sur l'ancien article 1382 du Code civil devenu l'article 1240 du Code civil, et sur l'ancien article 1147 devenu l'article 1231-1 du Code civil, par application des anciens articles 1386-1 et suivants du Code civil, devenus les articles 1245 et suivants du Code civil ;

- déclaré la société Mafroco, responsable du préjudice subi par Monsieur Le B., sur le fondement des dispositions de l'article 1386-1 du Code civil,

- dit que la responsabilité sera partagée par moitié entre M. Alexandre Le B., et la société Mafroco,

Par voie de conséquence,

- condamné la société Mafroco à payer à Monsieur Le B. les sommes suivantes :

- incapacité fonctionnelle temporaire totale du 23 août au 27 août 2011 : 57,50 euros,

- incapacité fonctionnelle temporaire partielle estimée à 25 % (GTPII) du 28 août 2011 au 26 septembre 2011 inclus : 86,25 euros,

- incapacité fonctionnelle temporaire partielle estimée à 10 % du 27 septembre 2011 au 22 janvier 2012 inclus : 135,70 euros,

- déficit fonctionnel permanent : 950 euros,

- souffrances endurées : 1 500 euros,

- préjudice temporaire esthétique : 1 500 euros,

- préjudice esthétique définitif : 1 000 euros,

- aide d'une tierce personne : 112,50 euros,

Soit la somme totale de : 5 341,95 euros,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires ;

- condamné la société Mafroco à verser à Monsieur Le B. et à la société Le B. la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Le tribunal a estimé que :

- sur les fondements invoqués par les demandeurs, ces derniers n'établissaient pas l'existence d'une faute distincte du défaut de sécurité de la machine litigieuse, leurs demandes fondées sur l'ancien article 1382 du Code civil devenu l'article 1240 du Code civil, et sur l'ancien article 1147 devenu l'article 1231-1 du Code civil, sont irrecevables par application des anciens articles 1386-1 et suivants du Code civil devenu les articles 1245 et suivants du Code civil ;

- sur la prescription, si la date de connaissance du dommage et de l'identité du producteur par Monsieur L. devait être fixée au 23 août 2011, soit le jour de l'accident, c'était la date de sa consolidation, soit le 23 janvier 2012, selon l'expert, qui devait être retenue comme celle de la connaissance du dommage par le demandeur ;

- l'exploit d'huissier du 4 décembre 2014 et l'ordonnance de référé du 3 mars 2015 avaient eu pour effet d'interrompre la prescription. La prescription ayant pris un nouveau point de départ pour un délai de trois ans par l'ordonnance de référé du 3 mars 2015, désignant les deux experts judiciaires, les demandes de Monsieur Le B. n'étaient pas prescrites ;

- il n'était pas contesté que la société Le B. avait demandé des réparations du matériel agricole litigieux à plusieurs reprises au cours de l'année 2012, qu'une expertise amiable avait été diligentée au cours du mois de juillet 2013, et que par la suite, l'introduction de la procédure de référé avait eu des effets interruptifs, puis suspensifs de prescription ; de telle sorte que les demandes de la société Le B. n'étaient pas prescrites ;

Sur la responsabilité

Le premier juge a rappelé le rapport de l'expert pour lequel :

" L'ergonomie du poste de conduite était insuffisante s'agissant de l'appréhension de la poignée de la portière gauche ouverte ;

Le positionnement à l'origine de la ligne de couteaux B en avant du mât gauche constituait un facteur de risque de blessure pour l'opérateur installé au poste de conduite, pouvant être évité par le positionnement derrière le mât, comme réalisé par la société Mafroco après l'accident ;

Les circonstances de l'accident étaient incertaines, compte tenu notamment de la variation des déclarations de Monsieur L., ayant déclaré initialement à l'expert que le sinistre s'était produit quand il était à l'extérieur du poste de conduite, puis ensuite alors qu'il était installé assis au poste de conduite ;

Le respect des consignes de sécurité eût permis d'éviter l'accident, notamment en ce que celles-ci recommandaient, si l'opérateur devait quitter l'engin, de neutraliser toutes les commandes de l'outil installé et d'arrêter le moteur, et de ne jamais approcher de la rogneuse lors de la rotation des couteaux ;

Et que le mototracteur se trouvait équipé d'un dispositif de sécurité non obligatoire, stoppant la rotation des couteaux de la rogneuse lorsque l'opérateur n'était pas assis au poste de conduite, ce qui impliquait que dans la version initiale narrée par la victime, la sécurité du siège était débranchée ;

La deuxième reconstitution de l'accident, en fonction de l'extension supplémentaire du buste du bras de la victime, conjuguée avec un réglage du tranchant du couteau transversal poussé davantage sur la droite, sans la butée formée par le boulon anti-perte, permettait de faire correspondre l'extrémité de la cicatrice sur l'avant-bras gauche avec le tranchant du couteau ;

Que ce constat réalisé 4 ans après les faits ne semblait pas suffisant à l'expert pour confirmer le scénario de Monsieur Le B., de telle sorte qu'à son sens, les circonstances exactes de l'accident demeuraient incertaines ;

Que le non-respect des règles élémentaires de prudence, que l'intéressé ne pouvait pas ignorer en sa qualité de prestataire de service viticole, lui semblait constituer le facteur déterminant de cet accident. "

Le premier juge a donc retenu au visa des conclusions de l'expert à la fois que :

- l'ergonomie du poste de conduite, facteur de risque de blessure pour l'opérateur installé au poste de conduite, aboutissait à rendre le produit anormalement dangereux, et que celui-ci n'avait pas présenté la sécurité à laquelle son utilisateur était en droit de s'attendre ;

- le non-respect des règles élémentaires de prudence, qu'en sa qualité de prestataire de service viticole mécanisé, Monsieur Le B. ne pouvait ignorer, semblait constituer le facteur déterminant dans le cadre de cet accident, et ce malgré l'absence de remise de la notice d'instructions sur l'utilisation du produit, alléguée par son fabricant ; il a estimé qu'il appartenait à cet utilisateur de stopper la rotation des couteaux pour toute intervention externe au poste de conduite.

Il a considéré comme inopérant le grief formé par le fabricant à l'encontre de l'utilisateur, auquel était reproché d'avoir fait un mauvais usage du produit, et de ne pas avoir effectué les démarches d'entretien, sans qu'il fût démontré que l'accomplissement de ces actions aurait empêché la survenance de l'accident.

Il a estimé que les demandeurs n'établissaient aucun lien de causalité entre un éventuel défaut de conformité du produit aux normes de la communauté européenne et les dommages subis, ou encore entre ces derniers et une éventuelle non-conformité technique de la machine en rapport avec les démarches de certification.

Le premier juge en a donc déduit que :

- la société Mafroco, en sa qualité de fabricant du produit, se trouvait tenue de réparer le préjudice de Monsieur Le B., en application des articles 1386-l et suivants du Code civil ;

- la propre responsabilité de Monsieur Le B. dans l'accident devait réduire son indemnisation à hauteur de moitié.

Sur l'indemnisation :

Sur la réparation des dommages de Monsieur Le B., le tribunal a notamment débouté celui-ci de sa demande au titre de son incapacité fonctionnelle temporaire totale de travail pour la période du 23 août 2011 au 1er novembre 2011, en considérant que les documents produits ne permettaient pas de déterminer le montant des rémunérations perçues par le seul Monsieur Le B., alors qu'il était fait état du montant global des rémunérations perçues par les associés de la société Le B., au nombre de 3.

Sur la réparation des dommages de la société Le B., le premier juge a rappelé que le régime de responsabilité du fait des produits défectueux excluait de son champ la réparation du dommage résultant d'une atteinte au produit défectueux lui-même, et par voie de conséquence, aux préjudices économiques découlant de l'atteinte au produit lui-même.

Il a considéré que les préjudices économiques dont se prévalaient tant Monsieur Le B. que la société Le B. avaient tous trait à une atteinte à la machine litigieuse. Il a ainsi débouté les demandeurs de leurs demandes au titre :

- de la somme totale du prix d'acquisition de l'engin et de ses accessoires ;

- des intérêts bancaires payés dans le cadre de l'acquisition de la machine ;

- des frais de réparation de l'engin ;

- de la perte d'exploitation ;

- du préjudice résultant de l'absence de fourniture d'une machine en remplacement de l'engin litigieux.

Le 11 avril 2018, Monsieur Le B. et la société Le B. Alexandre ont interjeté appel de ce jugement.

Le 23 avril 2019, a été ordonnée la clôture de l'instruction de l'affaire.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Pour plus ample exposé, il est expressément renvoyé aux écritures déposées par les parties :

- le 4 janvier 2019 par la société Le B. et par Monsieur Le B., appelants ;

- le 16 avril 2019 par la société Mafroco, intimée ;

- le 2 avril 2019 par la société anonyme Gan Assurances, en sa qualité d'assureur de responsabilité civile de la société Le B., intervenant volontaire.

Monsieur Le B. et la société Le B. demandent l'infirmation du jugement en ce qu'il a :

- dit la société Mafroco responsable du préjudice subi par Monsieur Le B. du fait d'un produit défectueux ;

- ordonné un partage de responsabilité par moitié ;

- alloué diverses sommes à Monsieur Le B. en réparation de son préjudice corporel ;

- débouté Monsieur Le B. et la société Le B. du surplus de leurs prétentions.

Les appelants demandent la condamnation de la société Mafroco au titre de sa responsabilité du fait des produits défectueux, in solidum avec la société Gan Assurance :

- à payer à Monsieur Le B. les sommes initialement réclamées par celui-ci en réparation de son préjudice corporel, sauf à hausser à 558,90 euros sa demande au titre de l'incapacité fonctionnelle temporaire sur le plan personnel;sauf à réduire à 6286 euros sa demande au titre du préjudice professionnel subi à raison de son incapacité temporaire de travail ;

- à payer à la société Le B. une somme de 61 433,75 euros à titre de dommage intérêts pour préjudice de perte d'exploitation.

Les appelants présentent une demande nouvelle tendant à voir prononcer la résolution du contrat de vente du matériel litigieux, en raison de ses nombreuses non-conformités, et tendant à la condamnation in solidum de la société Mafroco et de son assureur à payer les sommes initialement réclamées par la société Le B., sauf à préciser que :

- la première somme réclamée relative au prix d'acquisition de l'engin et de ses accessoires, correspond à la restitution du prix de vente après sa résolution ;

- la somme réclamée au titre des intérêts bancaires est actualisée à hauteur de 9 974,47 euros ;

- la somme réclamée au titre de l'indemnisation de la perte d'exploitation est réduite à 10 186,63 euros hors taxes.

Les appelants indiquent à titre subsidiaire fonder les demandes de la société Le B. sur la base d'une action rédhibitoire.

En tout état de cause, les appelants demandent le débouté intégral des prétentions de la société Mafroco et de son assureur de leurs demandes, et leur condamnation in solidum à leur payer la somme de 25 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Ils font valoir que :

-la société Mafroco est responsable de leurs préjudices du fait de la défectuosité de l'engin Trimovigne,

- la date de connaissance du dommage est celle de la consolidation, permettant seule au demandeur d'en mesurer l'étendue et d'en avoir connaissance, de telle sorte que Monsieur Le B. étant consolidé le 23 janvier 2012, l'action n'est pas prescrite lors de l'introduction de l'instance en référé expertise le 4 décembre 2014, et s'est trouvée depuis suspendue; ils précisent que le préjudice de la société Le B. est la conséquence directe de la blessure de son gérant, seule personne générant son activité;

-la société Mafroco avait une obligation légale de fournir à M. Alexandre Le B. une notice d'information conforme aux règles applicables et l'informant des risques liés à l'utilisation,

- le premier juge a parfaitement caractérisé le défaut de sécurité de l'engin, qui se trouve en lien de causalité avec son préjudice (page 14/35) ;

-l'accident de Monsieur Le B. ne serait pas survenu si la société Mafroco avait respecté les diverses obligations à sa charge, de telle sorte que le comportement de la victime ne peut pas être exonératoire de responsabilité ;

-la société Le B. est fondée à engager la responsabilité de la société Mafroco sur le fondement de la responsabilité contractuelle pour non-conformité et sur le fondement des produits défectueux pour manquement du vendeur aux obligations légales qui lui incombent ;

-l'action en non-conformité n'est pas prescrite puisque la société Le B. n'a eu connaissance de la non-conformité de la machine achetée aux normes applicables qu'au moment du dépôt du rapport du sapiteur le 22 juillet 2016, (absence de conformité aux normes Ce et absence d'homologation), ou au plus tôt à la fin du mois de janvier 2013, lorsqu'elle a fait retour de l'engin à son fabricant ;

-l'engin Trimovigne vendu n'était pas conforme aux normes de sécurité obligatoires qui lui était applicables,

-l'engin Trimovigne est grevé de défauts cachés engageant la responsabilité du vendeur au titre de la garantie des vices cachés ; la prescription de l'action en garantie des vices cachés a été interrompue par l'assignation en référé signifiée le 4 décembre 2014 puis suspendue jusqu'au dépôt du rapport de M. B. le 14 octobre 2016,

-la compagnie GAN Assurances doit venir en garantie de la société Mafroco au titre de la police d'assurance responsabilité civile.

S'agissant de la responsabilité au titre des produits défectueux, la société Mafroco réitère ses demandes initiales tendant à voir dire prescrite l'action des appelants fondée sur ce régime de responsabilité, et les dires irrecevable en l'ensemble de leurs prétentions. A titre subsidiaire, elle demande le débouté intégral des prétentions adverses.

A titre plus subsidiaire, elle demande à voir dire que la responsabilité sera partagée à hauteur de 80 % pour Monsieur Le B. et 20 % pour elle-même.

Elle demande donc à être condamnée à payer à Monsieur Le B. tout au plus les sommes suivantes :

- incapacité fonctionnelle temporaire totale du 23 août au 27 août 2011 : 23 euros

- incapacité fonctionnelle temporaire par elle estimée à 25 % (GTPII) du 28 août 2011 au 26 septembre 2011 inclus : 34,50 euros,

- incapacité fonctionnelle temporaire par elle estimée à 10 % du 27 septembre 2011 au 22 janvier 2012 inclus : 54,28 euros,

- déficit fonctionnel permanent : 380 euros,

- souffrances endurées : 600 euros,

- préjudice temporaire esthétique : 300 euros,

- préjudice esthétique définitif : 400 euros,

- aide d'une tierce personne : 45 euros,

Soit la somme totale de 1 836,78 euros,

A titre infiniment subsidiaire, elle demande sur la base d'un partage de responsabilité par moitié, à voir fixer à 750 euros le montant du préjudice esthétique temporaire mis à sa charge, et d'infirmer le jugement sur ce point.

S'agissant de la demande en résolution de la vente pour vices cachés, la société Mafroco demande à titre principal à voir l'action des deux appelants de ce chef déclarée prescrite, à titre subsidiaire de débouter la société Le B. de ses demandes ou à titre encore plus subsidiaire, de n'admettre une condamnation à restitution limitée à 10 000 euros, correspondant à la valeur résiduelle de la machine.

A titre encore plus subsidiaire, en cas d'accueil de la demande tendant à la résolution de la vente, la société Mafroco demande :

- la condamnation de la société Le B. Alexandre à lui payer les sommes de :

-12 674,53 euros ttc au titre des frais de remise en état,

- 20 000 euros au titre de la jouissance de la machine litigieuse, pour la période d'août 2011 à janvier 2013 ;

- 20 000 euros au titre de l'immobilisation de la machine ;

- ordonner la compensation avec la somme de 107 701,24 euros ttc correspondant au prix de vente de la machine.

En tout état de cause, la société Mafroco demande la condamnation de la société Le B. et de Monsieur Le B. in solidum à lui payer la somme de 20 000 euros au titre des frais irrépétibles.

La société Mafroco expose que :

- la responsabilité du fait des produits défectueux est exclusive des autres responsabilités de droit commun, dès lors que le fait générateur allégué procède du défaut de sécurité du produit ;

- Monsieur Le B. a eu une connaissance du dommage et de l'identité du fabricant au jour même de l'accident, soit le 23 août 2011, date qu'il convient de retenir pour apprécier le délai de trois ans de prescription, lequel était expiré lors de l'assignation en référé expertise du 4 décembre 2014,

- il n'est pas démontré que le produit soit affecté d'un défaut de sécurité ;

- l'implication du produit et le simple fait qu'il ait causé un dommage ne suffisent pas à prouver son caractère défectueux et il faut démontrer qu'il était affecté d'un défaut de sécurité à l'origine du dommage ;

- une notice d'utilisation et d'entretien est remise à l'acquéreur, à savoir la notice d'utilisation et d'entretien ainsi que les instructions de montage, réglages et d'entretien du Trimovigne,

- il ressort expressément du rapport d'expertise que le non-respect des règles élémentaires de prudence, qu'en sa qualité de prestataire viticole mécanisé M. Alexandre Le B. ne pouvait ignorer, constitue le facteur déterminant dans le cadre de cet accident,

- à aucun moment l'expert ne retient le caractère dangereux de la machine ;

- la faute de la victime est la cause exclusive de son accident et des dommages consécutifs qu'il a subis en ne respectant pas les règles les plus élémentaires de sécurité, aucun partage de responsabilité ne pouvant dès lors être prononcé,

- le régime de la responsabilité des produits défectueux ne s'applique pas à la réparation du dommage qui résulte d'une atteinte au produit défectueux lui-même, et donc par conséquent aux préjudices économiques découlant de l'atteinte au produit lui-même,

- c'est en complète contradiction avec des experts en machinisme agricole compétents et reconnus, M. A. (Intervia consulting), M. L. (IRSTEA, UTAC Céram), M. F. (CNRV Centre National de Réception des Véhicules) que Monsieur B., après avoir classifié le Trimovigne 31cv dans son pré-rapport du 21 novembre 2015 en MAGA (Machine Agricole Automotrice), a malgré tout commandé à Monsieur L. de pratiquer un examen de réception T.4.1 pour étayer son rapport d'expertise,

- sur les photos du Trimovigne faisant l'objet de l'expertise, envoyées à l'époque à Monsieur L. par Monsieur B., ne figurait pas la porte papillon gauche ni les caractéristiques techniques du Trimovigne, éléments fondamentaux qui sont à l'origine des erreurs de classification et de jugement,

-les appelants ne démontrent pas un quelconque défaut de conformité de la machine, de surcroît en lien de causalité avec les dommages qu'ils allèguent ;

- sur la garantie des vices cachés, l'action sur le fondement du défaut de conformité est prescrite depuis le 23 août 2013 car le prétendu vice est connu depuis la réalisation de l'accident survenu le 23 août 2011,

- la récurrence des pannes de l'engin après la vente ne démontre pas l'existence d'un vice caché au moment de celle-ci, mais au contraire, un défaut d'utilisation de la part de Monsieur Le B., (conclusions du cabinet Semaa) ;

La société Gan Assurances demande à être dite recevable et bien fondée en son intervention volontaire.

Elle demande la confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de Monsieur B. et de la société Le B. fondées sur la responsabilité délictuelle et la responsabilité contractuelle de droit commun par application du régime de responsabilité du fait des produits défectueux.

Elle demande l'infirmation du jugement en ce qu'il a déclaré la société Mafroco responsable du préjudice subi par Monsieur B. sur le fondement de responsabilité du fait des produits défectueux, et le rejet de l'ensemble des prétentions des appelantes, tenant notamment à la prescription de cette action.

Subsidiairement, l'assureur demande un partage de responsabilité dans la survenance de l'accident, laissant à la charge de Monsieur Le B. une part de responsabilité qui ne saurait être inférieure à 80 %, et de liquider son préjudice comme suit :

- déficit fonctionnel temporaire : 486 euros,

- déficit fonctionnel permanent : 1 950 euros,

- souffrances endurées : 1 500 euros,

- préjudice esthétique temporaire : 500 euros,

- préjudice esthétique définitif : 1 000 euros,

- tierce personne : 150 euros,

Soit au total à limiter à 1 117,20 euros après partage de responsabilité la somme qui peut être allouée à Monsieur Le B. après limitation du droit à indemnisation.

Elle demande enfin de débouter Monsieur Le B. et la société Le B. de toutes demandes plus amples ou contraires.

La société Gan Assurances rappelle que le cadre et sous la réserve des garanties offertes par sa police, elle ne pourra pas être amenée à garantir les postes suivants :

- remboursement du prix du mototracteur vendu,

- frais de réparation du véhicule,

- remboursement de l'engin acheté pour remplacer en partie le matériel vendu.

Elle rappelle la limite d'un plafond de 160 000 euros par année d'assurance et après application d'une franchise de 3 500 euros pour la garantie relative aux dommages immatériels avec plafonnement en tout état de cause à 1 250 000 euros.

Elle demande de débouter toute partie de ses demandes plus amples ou contraires.

Elle réclame enfin la condamnation de Monsieur Le B. et de la société Le B. à lui payer la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.

A l'appui de ses prétentions, la société Gan Assurances expose que :

- elle a un intérêt légitime à intervenir à la présente procédure, la société Mafroco ayant souscrit auprès d'elle une police d'assurance responsabilité civile,

- sont opposables à l'assuré comme aux tiers victimes les exclusions contractuelles de garantie et les clauses qui limitent le montant du capital garanti et établissent des franchises,

- sa garantie inclut les dommages causés par le produit livré, mais exclut les dommages subis par le produit livré lui-même, ainsi que le coût des mesures nécessaires à son remplacement ;

- le régime de la responsabilité du fait des produits défectueux est exclusif de tout régime général de responsabilité ayant le même fondement,

- lors de l'assignation en date du 4 décembre 2014, l'action y afférente était déjà prescrite par trois ans depuis l'accident survenant le 23 août 2011 ;

- il n'est pas démontré l'existence d'un défaut de sécurité du produit qui serait à l'origine de l'accident, seule la victime a commis une faute, cause exclusive de l'accident et des dommages consécutifs subis ;

- au regard des dispositions de l'article 1245-3 et 1245-12 du Code civil, Monsieur Le B. ne saurait engager une autre responsabilité que la sienne à l'occasion de cet accident,

- aucune perte d'exploitation, alléguée à hauteur de 20 %, n'est caractérisée par la société Le B.;

- les demandes de Monsieur Le B. et de la société Le B. au titre de leur préjudice commercial à la suite de la vente d'un engin non conforme sont mal fondées car si le régime de responsabilité du fait des produits défectueux n'exclut pas l'application d'autres régimes de responsabilité, c'est à la condition que ceux-ci reposent sur des fondements différents de celui d'un défaut de sécurité du produit litigieux, telle la garantie des vices cachés ou la faute,

- non seulement les non-conformités alléguées se résument à reprocher au produit un défaut de sécurité, mais de surcroît, aucun lien de causalité n'est démontré entre ces non-conformités prétendues et les dommages ;

- la demande au titre de la garantie des vices cachés est prescrite depuis le 23 août 2013 et n'est pas justifiée, faute pour les appelants d'établir l'existence de vices qui n'étaient pas décelables,

- la garantie souscrite auprès de l'assureur ne peut en toute hypothèse pas être mise en œuvre au titre des demandes relatives au remboursement du produit vendu, à sa réparation et à son remplacement,

- si la garantie relative aux dommages immatériels était mise en œuvre, ce ne pourrait être que dans la limite d'un plafond de 160 000 euros par année d'assurance et après application d'une franchise de 3 500 euros.

MOTIVATION :

Sur la recevabilité des prétentions de la société Le B. et de Monsieur Le B. sur les fondements de la responsabilité contractuelle et de la responsabilité délictuelle de droit commun :

Le premier juge a déclaré les actions des demandeurs irrecevables sur les fondements susdits, eu égard au caractère exclusif du régime de responsabilité du fait des produits défectueux, et alors que les intéressés n'avaient pas établi l'existence d'une faute distincte du défaut de sécurité de la machine litigieuse.

A hauteur d'appel, les appelants ne viennent pas critiquer le jugement de ce chef, dont les intimées demandent confirmation, qu'il y aura lieu d'ordonner.

Sur la recevabilité de l'action de la société Le B. et de Monsieur Le B. pour défaut de conformité :

A hauteur d'appel, les appelants présentent une demande pour défaut de conformité du matériel vendu, en demandant notamment la résolution de la vente.

Ils réclament toutefois toujours la confirmation du jugement en ce qu'il a accueilli leur action en responsabilité du fait des produits défectueux.

Le premier juge avait exactement rappelé que si le régime de la responsabilité du fait des produits défectueux n'excluait pas l'application d'autres régimes de responsabilité contractuelle ou extracontractuelle, c'était à la condition que ceux-ci reposent sur des fondements différents de celui tiré d'un défaut de sécurité du produit litigieux.

Or, pour se prévaloir à hauteur de cour de cette action, les appelants indiquent eux-mêmes que l'engin Trimovigne vendu n'était pas conforme aux normes de sécurité obligatoires qui lui étaient applicables.

Ils citent à cet égard exclusivement le rapport d'expertise judiciaire duquel il résulte que :

- la nature de l'engin (tracteur enjambeur) devait imposer l'observation d'une procédure de demande d'homologation nationale ;

- la société Mafroco n'a pas respecté cette obligation, faute d'avoir fourni un dossier technique à l'organisme chargé de l'homologation, se contentant sur ce point d'une auto certification, de surcroît en se référant à ces textes obsolètes, abrogés ou annulés, ou à un rapport de l'organisme d'homologation concernant un engin d'un autre type ;

- la procédure d'auto certification de la société Mafroco n'a pas été accomplie selon les prescriptions réglementaires, notamment en ce qui concerne la constitution d'un dossier technique et le respect des règles essentielles de sécurité lors de la conception ;

- selon l'appréciation de l'organisme homologateur, qu'ils reprennent à leur compte, l'engin présente une non-conformité réglementaire et des points de non-conformité aux règles techniques de santé et de sécurité du travail résultant :

Du défaut d'information et de prescription de sécurité dans la notice d'instruction ;

Du défaut d'accès au poste de conduite ;

De l'absence de sortie d'urgence de la cabine ;

Du défaut de protection des éléments moteurs ;

- selon l'appréciation de l'organisme homologateur, qu'ils reprennent à leur compte, l'absence de preuve présentée par la société Mafroco ne permet pas formellement de statuer sur la conformité concernant :

La protection en cas de renversement ;

Le siège conducteur ;

Le niveau sonore ;

Le freinage ;

- l'absence de remise des notices d'instruction constitue également un point de non-conformité.

Sur ce dernier, il sera observé que le premier juge a exactement rappelé l'appréciation de l'expert judiciaire (pages 30 et 31 de son rapport), pour lequel le respect des consignes de sécurité mentionnées dans la notice de la rogneuse, aurait permis d'éviter l'accident.

Il sera donc observé que sous couvert de non-conformité, les appelants viennent en réalité reprocher à la société Mafroco la défectuosité du produit résultant du défaut de sa sécurité.

Il conviendra donc de dire irrecevable leur demande fondée sur le défaut de conformité du produit.

En tout état de cause, il convient d'observer que le défaut de conformité allégué, tenant à la sécurité du produit, ne comporte aucun lien de causalité avec les dommages dont la société Le B. poursuit la réparation, en lien avec les avaries ci-dessus énumérées.

Sur la recevabilité de l'action de la société Le B. et de Monsieur Le B. en garantie des vices cachés :

A l'inverse de la prétention examinée ci-dessus, il sera observé que les appelants soutiennent l'existence de vices cachés grevant le motoculteur vendu, selon eux existants au moment de la vente, et dont ils entendent voir déduire la démonstration de l'existence au regard des multiples pannes et avaries ayant affecté l'engin du 30 mars 2012 au 16 août 2012, rappelant de surcroît avoir déposé le matériel vendu auprès de la société Mafroco au mois de janvier 2013, pour une remise en état à la suite d'une surchauffe hydraulique, nécessitant le remplacement des pompes d'avancement.

Les appelants ne viennent donc pas, à l'appui de leur action en garantie des vices cachés, faire grief à la société Mafroco de la défectuosité du produit résultant du défaut de sa sécurité.

Il conviendra donc de dire recevable l'action des appelants fondée sur la garantie des vices cachés.

Sur la prescription de l'action de la société Le B. et de Monsieur Le B. en garantie des vices cachés :

Si en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à l'autre, il en est autrement lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent à un même but, de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première.

L'action initiale de la société Le B. et de Monsieur Le B., fondée notamment sur la responsabilité contractuelle de la société Mafroco, et tendant notamment à la réparation de leur préjudice résultant de l'inexécution contractuelle, intégrait virtuellement l'action en garantie des vices cachés, susceptible de donner lieu à restitution du prix et à dommages-intérêts de telle sorte que l'interruption de la prescription propre à la première a bénéficié à la seconde, quand bien même cette dernière n'aurait-elle été introduite à hauteur d'appel par les appelants que dans leurs premières écritures en date du 11 juillet 2018.

Le point de départ de cette action est celui de la découverte du vice par l'acquéreur.

C'est donc de manière inopérante que la société Mafroco soutient que ce point de départ doit être fixé au 23 août 2011, date de l'accident corporel de Monsieur Le B., alors que les appelants se prévalent de désordres postérieurs, dont aucun élément du dossier ne démontre la survenance dès l'accident susdit.

Monsieur Le B. et la société Le B. soutiennent que leur connaissance du vice doit être fixée au 14 octobre 2016, date de dépôt de son rapport par l'expert automobile, ou à tout le moins au mois de janvier 2013, date à laquelle ils ont restitué la machine à la société Mafroco, en indiquant dans leurs écritures (page 26/35) alors avoir compris qu'aucune réparation durable ne serait plus possible.

Les appelants indiquent en outre avoir bénéficié de l'interruption, et le cas échéant de la suspension de la prescription, attachées aux actions en justice, notamment jusqu'au dépôt du rapport d'expertise judiciaire.

Avec les appelants, il conviendra de retenir que ceux-ci ont eu connaissance du vice au plus tard au mois de janvier 2013, date à laquelle ils ont restitué la machine à la société Mafroco, en indiquant dans leurs écritures (page 26/35) avoir alors compris qu'aucune réparation durable ne serait plus possible. Il sera ajouté à cet égard que le rapport d'expertise amiable du 10 octobre 2013 précise qu'au début du mois de janvier 2013, le matériel avait été déposé à la société Mafroco pour une remise en état suite à une surchauffe hydraulique, et qu'au vu du blocage de la situation, Monsieur Le B. avait fait appel à son assurance de protection juridique.

Il conviendra donc de dire que l'action de la société Le B. et de Monsieur Le B. en garantie des vices cachés n'est pas prescrite.

Sur la prescription de l'action en responsabilité du fait des produits défectueux :

Selon l'article 1245-16 du Code civil, l'action en réparation fondée sur le régime de responsabilité du fait des produits défectueux se prescrit dans un délai de 3 ans à compter de la date à laquelle le demandeur a eu ou aurait dû avoir connaissance du dommage, du défaut, et de l'identité du producteur.

La société Mafroco et son assureur soutiennent que ce délai de prescription a commencé à courir dès la survenance de l'accident le 23 août 2011, et se trouvait déjà acquis le 23 août 2014, alors que l'assignation devant le juge des référés n'a eu lieu que le 4 décembre 2014.

Monsieur Le B. et la société Le B. approuvent le premier juge d'avoir retenu comme point de départ de la prescription celui de sa date de consolidation au 23 janvier 2012, à laquelle il a eu connaissance du dommage consolidé, de telle sorte que son action n'était pas prescrite au 4 décembre 2014, puis a été ultérieurement interrompue puis suspendue par la saisine du juge des référés, jusqu'au dépôt du rapport d'expertise, avant d'être de nouveau interrompue par son assignation au fond.

L'article 2226 du Code civil dispose que l'action en responsabilité née à raison d'un événement ayant entraîné un dommage corporel, engagée par la victime directe ou indirecte des préjudices qui en découlent, se prescrit par dix ans à compter de la date de consolidation du dommage initial ou aggravé.

Si c'était au jour de l'accident que Monsieur Le B. et la société Le B. avaient eu connaissance du défaut de sécurité et de l'identité du fabricant, ce n'est qu'à compter de la consolidation du premier qu'ils ont eu connaissance de leurs dommages.

L'action de Monsieur Le B. et de la société Le B. sur le fondement de la responsabilité des produits défectueux sera déclarée recevable comme non touchée par la prescription, et le jugement, qui a omis de statuer sur cette prétention dans son seul dispositif, sera complété de ce chef.

Sur l'action en garantie des vices cachés :

Les appelants reprennent l'historique des divers pannes survenues sur la machine, telles que listées notamment dans l'expertise amiable susdite, et tenues comme constantes :

16 février 2012 : remplacement de la sonde du radiateur, suite à des surchauffes moteurs intempestives ; remplacement des glaces des deux pompes suite à une surchauffe hydraulique ;

30 mars 2012 : rupture de la courroie d'avancement ;

12 mai 2012 : panne de l'électrovanne, puis remplacement de celle-ci ;

25 mai 2012 : fissuration de la courroie directionnelle, puis remplacement de celle-ci, au cours de laquelle a été constatée une fissuration d'un support moteur, lui aussi remplacé ;

26 mai 2012 : fuite d'huile suite au desserrage d'un flexible alimentant la pompe droite ;

20 juin 2012 : nouvelle rupture de la courroie directionnelle, et réparation à cette occasion du galet tendeur, grippé ;

23 juin 2012 : défaillance du galet tendeur remplacé, conduisant à son nouveau remplacement ;

18 juillet 2012 : remise en état sur l'atomiseur de la turbine à la suite de la rupture de l'arbre ;

21 juillet 2012 : absence de démarrage du solo droit, conduisant à son remplacement ;

16 août 2012 : remplacement de la courroie d'avancement, ayant conduit à son remplacement.

Ils avancent que compte tenu de la date de la première apparition des défauts relevés et de leur récurrence, ceux-ci existaient nécessairement au moment de l'acquisition de l'engin, date à laquelle s'ils en avaient eu connaissance que l'engin allait subir autant de pannes, ils n'en auraient pas fait l'acquisition.

Toutefois, Monsieur Le B. et la société Le B. défaillent dans la démonstration qui leur incombe, de l'existence de tels vices lors de la vente, seuls susceptibles de faire prospérer leur action.

Le rapport d'expertise amiable, intervenu à la suite des pannes ci-dessus énumérées, qui a indiqué avoir notamment pour but de déterminer l'origine de ces désordres, n'a apporté aucun éclaircissement sur ce point.

Se prononçant sur les 10 avaries ci-dessus listées, le rapport d'expertise judiciaire a recueilli les explications de la société Mafroco, selon lesquelles exceptés :

- les travaux de remplacement des glaces des deux pompes d'avancement, consécutifs à une surchauffe hydraulique ;

- la remise en état de la turbine d'atomiseur droit, due également à un défaut d'entretien ;

- le remplacement du moteur d'atomiseur dû à un défaut d'entretien ;

Toutes les autres interventions résultaient d'avaries ayant pour cause un défaut de pièce: courroie d'avancement, électrovanne d'arrêt moteur, sonde de radiateur.

L'expert a recueilli les observations de la société Mafroco, selon laquelle le défaut de pièce résulte pour partie de son choix de changement de fabricant, et qui rappelle que toutes les réparations afférentes ont été prises en charge au titre de la garantie, y compris celles dues au manque d'entretien.

Par ailleurs, l'expert retient comme établi que Monsieur Le B. n'a pas procédé aux vidanges périodiques, et que compte tenu du résultat d'analyse de l'échantillon de lubrifiant prélevé sur l'autre moteur d'atomiseur, l'imputation de l'avarie du moteur d'atomiseur droit à un défaut d'entretien n'apparaît pas démontrée.

Il résulte de l'expertise judiciaire que seules les avaries touchant la courroie d'avancement, l'électrovanne d'arrêt moteur, et la sonde de radiateur, procèdent d'un défaut de pièce, qu'en sa qualité de professionnel, la société Mafroco ne pouvait pas ignorer.

Toutefois, il est constant que la société Le B. a accepté que la société Mafroco procède à la réparation des avaries procédant des défauts de pièces reconnues par ce fabricant.

Dès lors, compte tenu de la disparition du vice initial, les appelants sont mal fondés, s'agissant de ces premières avaries, à invoquer la garantie des vices cachés.

Pour le surplus des avaries, il n'est pas démontré que celles-ci procéderaient de vices qui auraient été existants et cachés à l'acquéreur lors de la vente.

A l'appui de leur action en garantie des vices cachés, les appelants entendent aussi se prévaloir de l'appréciation de l'expert judiciaire, au sujet de la surchauffe hydraulique, susceptible d'être à l'origine des désordres affectant les pompes d'avancement, allégué par Monsieur Le B..

L'expert a précisé que dans l'hypothèse de la survenance de cette avarie, la conception du matériel et sa documentation apparaissent déterminantes dans cette avarie (page 37 et 38) :

- absence d'information concernant la température maximale de fonctionnement dans la notice d'utilisation et d'entretien de l'engin, et de la conduite à tenir par l'utilisateur en cas de dépassement ;

- absence de repère sur l'indicateur mentionnant la zone rouge à ne pas atteindre par l'utilisateur ;

- absence de signal d'alerte, visuel et/ou sonore, en cas de dépassement de la température maximale de fonctionnement.

Cependant, l'expert a précisé que dans les conditions d'examen qui lui ont été offertes, les éventuels désordres sur les pompes n'ont pas pu être constatés (pages 32 et 51).

Dès lors Monsieur Le B. est défaillant dans la démonstration du vice qu'il allègue, et plus encore, de l'existence de celui-ci lors de la vente.

Au titre de leur action en garantie des vices cachés, les appelants entendent encore se prévaloir des observations de l'expert judiciaire ayant trait aux normes de sécurité obligatoires qui étaient applicables à l'engin, telles qu'invoquées précédemment à l'appui de leur action pour manquement du vendeur à son obligation de délivrance conforme.

Cependant, les appelants viennent ainsi en réalité encore reprocher à la société Mafroco la défectuosité du produit résultant du défaut de sa sécurité.

Alors qu'ils continuent à invoquer la responsabilité du fait des produits défectueux, la base factuelle susdite y afférente ne pourra pas faire prospérer l'action en garantie des vices cachés.

Il résultera du tout que la société Le B. sera déboutée de son action en garantie des vices cachés.

Sur la responsabilité du fait des produits défectueux :

Les intimés contestent tout manquement à une obligation de sécurité du produit, mais encore, à supposer celle-ci établie, tout lien de causalité de celle-ci avec les dommages corporels de Monsieur Le B..

Il résulte pourtant des appréciations et conclusions de l'expert judiciaire que :

-l'ergonomie du poste de conduite est insuffisante s'agissant de l'appréhension de la poignée de la portière gauche ouverte ;

- le positionnement à l'origine de la ligne de couteaux B en avant du mât gauche constitue un facteur de risque de blessure pour l'opérateur installé au poste de conduite, pouvant être évité par le positionnement derrière le mât, comme réalisé par la société Mafroco après l'accident ;

- les circonstances de l'accident sont incertaines, compte tenu notamment de la variation des déclarations de Monsieur Le B., ayant déclaré initialement à l'expert que le sinistre s'était produit quand il était à l'extérieur du poste de conduite, puis ensuite alors qu'il était installé assis au poste de conduite ;

- le respect des consignes de sécurité aurait permis d'éviter l'accident, notamment en ce que celle-ci recommande, si l'opérateur doit quitter l'engin, de neutraliser toutes les commandes de l'outil installé et d'arrêter le moteur, et de ne jamais approcher de la rogneuse lors de la rotation des couteaux, ce que l'intéressé, en sa qualité de prestataire de service mécanisé viticole se devait de connaître, malgré l'absence de remise de la notice d'instruction alléguée ; et que le mototracteur se trouve équipé d'un dispositif de sécurité non obligatoire, stoppant la rotation des couteaux de la rogneuse lorsque l'opérateur n'est pas assis au poste de conduite, ce qui implique que dans la version initiale narrée par la victime, la sécurité du siège était débranchée ;

- la deuxième reconstitution de l'accident, en fonction de l'extension supplémentaire du buste du bras de la victime, conjuguée avec un réglage du tranchant du couteau transversal poussé davantage sur la droite, sans la butée formée par le boulon anti-perte, permet de faire correspondre l'extrémité de la cicatrice sur l'avant-bras gauche avec le tranchant du couteau ;

- le constat réalisé 4 ans après les faits ne semblait pas suffisant à l'expert pour confirmer le scénario de Monsieur Le B., de telle sorte qu'à son sens, les circonstances exactes de l'accident demeuraient incertaines

- que le non-respect des règles élémentaires de prudence, que l'intéressé ne pouvait pas ignorer en sa qualité de prestataire de service viticole, lui semblait constituer le facteur déterminant de cet accident.

Le premier juge a en outre observé qu'il n'était pas établi que Monsieur Le B. ait reçu une information précise relative à l'utilisation de ce matériel.

Ces éléments issus de l'expertise établissent suffisamment l'existence d'un défaut de sécurité de l'engin, compte tenu de son usage.

C'est exactement que le premier juge a retenu l'existence d'un lien de causalité entre ce défaut de sécurité et la survenance du dommage, dans la mesure où ceux ont concouru à la survenance du dommage subi par Monsieur Le B., nonobstant sa faute plus haut analysée.

Il y a lieu d'observer à la fois que :

- l'ergonomie du poste de conduite était un facteur de risque de blessure pour l'opérateur installé au poste de conduite, aboutissait à rendre le produit anormalement dangereux, et que celui-ci n'avait pas présenté la sécurité que son utilisateur était en droit d'attendre ;

- le non-respect des règles élémentaires de prudence, qu'en sa qualité de professionnel de l'activité viticole, Monsieur Le B. ne pouvait pas ignorer, semblait constituer le facteur déterminant dans le cadre de cet accident, et ce malgré l'absence de remise de la notice d'instruction d'utilisation du produit, alléguée par son fabricant ; il appartenait à cet utilisateur de stopper la rotation des couteaux pour toute intervention externe au poste de conduite.

Il y a donc lieu de dire que la faute de Monsieur Le B. dans la survenance de l'accident sera de nature à réduire de moitié son droit à indemnisation, de telle sorte que la société Mafroco, en sa qualité de fabricant du produit, sera tenue de réparer le préjudice de Monsieur Le B. à hauteur de moitié, sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux, et le jugement sera confirmé de ces chefs.

Sur l'évaluation des postes de préjudice personnels de Monsieur L. :

Le rapport d'expertise conclut que les séquelles de Monsieur Le B. sont en relation directe et certaine avec l'accident de travail du 23 août 2011, sans état antérieur, et fixe au 23 janvier 2012 la date de sa consolidation.

Incapacité fonctionnelle temporaire personnelle :

Incapacité fonctionnelle temporaire totale du 23 au 27 août 2011 :

Monsieur L. demande à ce titre 23 euros par jour.

La société Mafroco demande à être condamnée en totalité pour ce poste, soit après partage de responsabilité, à 23 euros.

L'assureur propose 20 euros par jour.

Sur ce poste correspondant à la gêne totale pendant la période d'hospitalisation, le préjudice de Monsieur L. sera entièrement réparé par l'allocation d'une somme de 23 euros par jour, soit pendant 5 jours, à la somme de 115 euros.

Compte tenu du partage de responsabilité, l'indemnisation à revenir à la victime sera fixée à 57,50 euros.

Incapacité fonctionnelle temporaire partielle à 25 % du 28 août 2011 au 26 septembre 2011 inclus :

Monsieur L. demande à ce titre 23 euros par jour, avec application de la réduction proportionnelle au taux d'incapacité retenue.

La société Mafroco demande à être condamnée en totalité pour ce poste, soit après partage de responsabilité, à 34,50 euros au plus.

L'assureur propose 20 euros par jour, avec application de la réduction proportionnelle au taux d'incapacité retenue.

L'expert a fixé le taux de cette incapacité de niveau 2 pour la période correspondant à l'immobilisation du membre supérieur gauche dans une résine, puis dans un gantelet, définitivement ôtés le 26 septembre 2011.

Sur base de 23 euros par jour pendant 30 jours, il conviendra de dire que le préjudice de Monsieur Le B. sera entièrement réparé par une somme de 172,50 euros.

Compte tenu du partage de responsabilité, l'indemnisation à revenir à la victime sera fixée à 86,25 euros.

Incapacité fonctionnelle temporaire partielle à 10 % du 27 septembre 2011 au 22 janvier 2012 inclus :

Monsieur L. demande à ce titre 23 euros par jour, avec application de la réduction proportionnelle au taux d'incapacité retenue.

La société Mafroco demande à être condamnée en totalité pour ce poste, soit après partage de responsabilité, à 54,28 euros au plus.

L'assureur propose 20 euros par jour, avec application de la réduction proportionnelle au taux d'incapacité retenue.

L'expert a fixé le taux de cette incapacité de niveau 1 jusqu'à la veille de la date de consolidation.

Sur base de 23 euros par jour pendant 118 jours, il conviendra de dire que le préjudice de Monsieur Le B. sera entièrement réparé par une somme de 271,40 euros.

Compte tenu du partage de responsabilité, l'indemnisation à revenir à la victime sera fixée à 135,70 euros.

Déficit fonctionnel permanent :

Selon l'expert, la victime conserve les séquelles suivantes :

- au niveau du membre supérieur gauche : paresthésies au niveau du tiers inférieur de la cicatrice lors de l'appui sur cette zone sur une table, sans autre retentissement somatique ;

- sur le plan général et psychologique : amaigrissement salutaire, absence d'altération de ses capacités de travail, discrètes réminiscences de l'accident, sans syndrome de répétition nocturne ou diurne, non envahissantes.

L'expert fixe à 2 % le taux de déficit fonctionnel permanent , sans état antérieur de nature à en modifier l'appréciation.

La société Mafroco demande à être condamnée sur ce poste au plus à 380 euros.

L'assureur et la victime acquiescent à l'évaluation faite par le premier juge à hauteur de 1900 euros, soit 950 euros le point.

Il conviendra de dire que le préjudice de Monsieur Le B. de ce chef sera entièrement réparé par une somme de 1 900 euros.

Compte tenu du partage de responsabilité, l'indemnisation à revenir à la victime sera fixée à 950 euros.

Sur les souffrances physiques et morales :

L'expert les a évaluées de légères à modérées, soit à 2,5/7 compte tenu :

- du traumatisme initial ;

- des 5 jours d'hospitalisation ;

- de l'intervention chirurgicale sous anesthésie locorégionale ;

- de l'immobilisation par résine pendant 30 jours ;

- des 15 séances de rééducation signalées comme très douloureuses ;

- de la souffrance psychologique jusqu'à consolidation.

La victime sollicite une évaluation à 3 000 euros de ce chef, et approuve les premiers juges de l'avoir ainsi retenue.

La société Mafroco demande à être condamnée de ce chef tout au plus à la somme de 600 euros.

L'assureur propose une évaluation à 1 500 euros, selon lui plus conforme à la réparation de ce préjudice.

Il conviendra de dire que le préjudice de Monsieur Le B. de ce chef sera entièrement réparé par une somme de 3 000 euros.

Compte tenu du partage de responsabilité, l'indemnisation à revenir à la victime sera fixée à 1 500 euros.

Sur le préjudice esthétique temporaire :

Monsieur Le B. avait sollicité des sommes sous le vocable de préjudice temporaire esthétique et d'agrément.

Or, il sera observé que l'intéressé ne justifie d'aucune pratique sportive ou de loisir dont il aurait été privé du fait de son incapacité temporaire : cette pratique ne peut pas suffisamment résulter de ses propres affirmations, quand bien même celles-ci auraient été recueillies par l'expert.

Selon le rapport d'expertise, le préjudice esthétique n'a été temporaire que pendant les 15 premiers jours à compter de l'accident, pour les cicatrices de l'avant-bras gauche, et doit être considéré comme modéré, et évalué à 3/7.

Monsieur Le B. demande que ce préjudice soit évalué à 1 500 euros, comme l'a fait le premier juge.

La société Mafroco demande à être condamnée de ce chef tout au plus à 300 euros, en relevant qu'après évalué ce préjudice à 1 500 euros, le tribunal a omis d'y appliquer le partage de responsabilité par moitié qu'il avait retenu.

L'assureur propose une somme de 500 euros, eu égard à la brièveté de ce poste de préjudice.

Il conviendra de dire que conformément à sa demande, le préjudice de Monsieur Le B. de ce chef sera entièrement réparé par une somme de 1 500 euros.

Compte tenu du partage de responsabilité, l'indemnisation à revenir à la victime sera fixée à 750 euros, et le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur le préjudice esthétique définitif :

Après les 15 premiers jours susdits, l'expert a considéré que le préjudice esthétique relatif aux cicatrices de l'avant-bras gauche est devenu définitif, l'a estimé léger, et l'a évalué à 2/7.

Le tribunal a fixé ce poste à 2 000 euros.

Monsieur Le B. en sollicite l'évaluation à 3 000 euros.

La société Mafroco demande à être condamnée sur ce poste tout au plus à 400 euros.

L'assureur propose l'allocation d'une somme de 1 000 euros.

Il conviendra de dire que le préjudice de Monsieur Le B. de ce chef sera entièrement réparé par une somme de 2 000 euros.

Compte tenu du partage de responsabilité, l'indemnisation à revenir à la victime sera fixée à 1 000 euros.

Aide à tierce personne :

Le rapport d'expertise fait ressortir qu'une aide à tierce personne non spécialisée a été assurée pendant un mois avec un temps lissé quotidien de 30 minutes pendant les 30 jours d'immobilisation de son membre supérieur gauche.

Il précise que la tierce personne a apporté une aide pour la toilette, l'habillage et le déshabillage, matin et soir, et pour couper ou peler les aliments lors des repas.

Monsieur Le B. approuve les premiers juges d'avoir retenu de ce chef un taux horaire de 15 euros, et d'avoir évalué ce poste à 225 euros.

La société Mafroco demande à être condamnée sur ce poste tout au plus à 45 euros.

L'assureur propose l'allocation d'une somme de 150 euros, sur la base d'un taux horaire de 10 euros, en l'absence d'exposition de charges sociales.

Vu le caractère actif de la tierce personne, et la justification des besoins de la victime, mais non pas celle de la dépense engagée, il conviendra de dire que le préjudice de Monsieur Le B. de ce chef sera entièrement réparé par une somme de 225 euros.

Compte tenu du partage de responsabilité, l'indemnisation à revenir à la victime sera fixée à 125,50 euros

Sur le préjudice professionnel temporaire de Monsieur Le B. :

Compte tenu de son incapacité fonctionnelle temporaire totale du 23 août 2011 au 1er novembre 2011 à dire d'expert, et de son statut de gérant non salarié de la société civile Le B., Monsieur L. indique qu'il convient de :

- se référer au bénéfice réalisé par la société sur l'exercice 2011 -2012, soit 27 465 euros,

- prendre en compte le nombre de parts sociales qu'il détient, soit 39 022 sur 39 024 au total ;

- pour en déduire que sa perte de bénéfice sur cette période doit être évaluée à 2 811 euros par mois, soit 6 228 euros pour son entière période d'incapacité fonctionnelle.

Cependant, Monsieur Le B.ne démontre en rien que du fait et dans la période de son incapacité fonctionnelle totale, sa société aurait subi une perte ou une diminution de son résultat, de laquelle il peut suffisamment se déduire ses pertes de revenus personnels.

Sur le préjudice de la société Le B. :

La société Le B. fonde sa demande au titre de la perte d'exploitation, selon elle consécutive à l'accident corporel de Monsieur Le B., sur la responsabilité du fait des produits défectueux (pages 16 et 17).

Elle sollicite de ce chef une somme de 61 433,75 euros hors taxes.

Elle fait ainsi valoir qu'eu égard à sa durée, l'incapacité fonctionnelle de son gérant a nécessairement impacté :

- son chiffre d'affaire correspondant à la vente de raisins de l'exercice courant du 1er août 2011 au 31 juillet 2012, qui s'établissait à 86 546 euros ;

- son chiffre d'affaire correspondant à la vente de champagne après deux ans de fabrication, soit celui de l'exercice du 1er août 2013 au 1er août 2014, s'établissant à 159 189 euros.

Elle affirme que le préjudice découlant de l'impossibilité dans laquelle son gérant s'est trouvé de participer et diriger les vendanges 2011 peut être évalué à une perte de production de 20 % sur chacun de ses chiffres respectifs.

Toutefois, la société Le B. défaille à démontrer en quoi l'incapacité fonctionnelle de son gérant a fait chuter sa production pendant la période susdite, et corrélativement les deux chiffres d'affaires susdits.

La société Le B. sera déboutée de sa demande à titre de perte d'exploitation sur le fondement de la responsabilité des produits défectueux.

Sur la réparation des dommages subis par la société Le B. sur la base de la responsabilité du fait des produits défectueux :

Le premier juge a débouté la société Le B. de ses demandes au titre du remboursement du prix d'acquisition de l'engin, des intérêts bancaires, des frais de réparation, de la perte d'exploitation, et de l'absence de fourniture de machine de remplacement.

Le jugement sera confirmé de ces chefs.

Il a retenu à bon droit que le régime de responsabilité du fait des produits défectueux n'avait pas trait à la réparation des dommages causés au produit défectueux lui-même, ni au titre des préjudices économiques découlant de l'atteinte au produit lui-même.

Il a exactement observé que l'ensemble des réparations réclamées par la société Le B. concerne des préjudices économiques consécutifs à l'atteinte au produit lui-même.

Sur la garantie de l'assureur :

Alors que la société Gan ne dénie sa garantie qu'à l'égard de la demande de remboursement du mototracteur, des frais de sa réparation, ou du remboursement de l'engin acheté en remplacement du matériel vendu, en précisant que les dommages immatériels qu'elle couvre sont plafonnés à 160 000 euros, il conviendra de condamner in solidum la société Mafroco et la société Gan Assurance à payer à Monsieur Le B. les sommes allouées telles que ci-dessus évaluées.

Le jugement sera donc infirmé pour avoir condamné la seule société Mafroco, de surcroît après avoir omis d'appliquer au préjudice esthétique définitif le partage de responsabilité par moitié.

Il conviendra de dire que la garantie de la société Gan interviendra après application d'une franchise contractuelle de 3 500 euros.

Il sera rappelé que le présent arrêt vaudra titre de restitution des sommes versées en exécution du jugement déféré.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société Mafroco aux entiers dépens de première instance, l'a déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance, et l'a condamnée à payer aux demandeurs la somme de 2 000 euros au même titre.

A hauteur de cour, il y aura lieu de condamner la société Mafroco aux entiers dépens d'appel.

Eu égard au contrat d'assurance produit aux débats, n'incluant pas dans la garantie de la société Gan les frais exposés à l'occasion des procédures judiciaires, il conviendra de dire n'y avoir lieu à condamner la société Gan in solidum avec la société Mafroco aux entiers dépens d'appel.

L'issue du litige à hauteur de cour conduira à débouter chaque partie de sa demande au titre des frais irrépétibles d'appel.

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi, Déclare irrecevable l'action de la société civile d'exploitation viticole Le B. Alexandre fondée sur le défaut de conformité du produit, comme fondée sur le défaut de sécurité du produit ; Déclare recevable l'action de la société civile d'exploitation viticole Le B. Alexandre fondée sur la garantie des vices cachés, comme non fondée sur le défaut de sécurité du produit ; Déclare recevable comme non prescrite l'action de Monsieur Alexandre Le B. et de la société civile d'exploitation viticole Le B. Alexandre fondée sur la responsabilité du fait des produits défectueux; Déclare recevable comme non prescrite l'action de la société civile d'exploitation viticole Le B. Alexandre fondé sur la garantie des vices cachés; Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a condamné la société à responsabilité limitée Mafroco à payer à Monsieur Alexandre Le B. les sommes de : incapacité fonctionnelle temporaire totale du 23 août au 27 août 2011 : 57,50 euros, incapacité fonctionnelle temporaire partielle estimée à 25 % (GTPII) du 28 août 2011 au 26 septembre 2011 inclus : 86,25 euros, incapacité fonctionnelle temporaire partielle estimée à 10 % du 27 septembre 2011 au 22 janvier 2012 inclus : 135,70 euros, déficit fonctionnel permanent : 950 euros, souffrances endurées : 1 500 euros, préjudice temporaire esthétique : 1 500 euros, préjudice esthétique définitif : 1 000 euros, aide d'une tierce personne : 112,50 euros, Soit la somme totale de : 5 341,95 euros, Infirme le jugement de ces seuls chefs;

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant : Déboute la société civile d'exploitation viticole Le B. Alexandre de l'intégralité de ses demandes au titre de la garantie des vices cachés ; Déboute la société civile d'exploitation viticole Le B. Alexandre de sa demandes au titre de la perte d'exploitation fondée sur la responsabilité du fait des produits défectueux ; Condamne in solidum la société à responsabilité limitée Mafroco et la société anonyme Gan Assurances à payer à Monsieur Alexandre Le B. les sommes de : incapacité fonctionnelle temporaire totale du 23 août au 27 août 2011 : 57,50 euros, incapacité fonctionnelle temporaire partielle estimée à 25 % (GTPII) du 28 août 2011 au 26 septembre 2011 inclus : 86,25 euros, incapacité fonctionnelle temporaire partielle estimée à 10 % du 27 septembre 2011 au 22 janvier 2012 inclus : 135,70 euros, déficit fonctionnel permanent : 950 euros, souffrances endurées : 1500 euros, préjudice temporaire esthétique : 750 euros, préjudice esthétique définitif : 1 000 euros, aide d'une tierce personne : 112,50 euros,

Soit la somme totale de : 4 591,95 euros, Dit que la société anonyme Gan Assurances sera tenue au paiement des sommes susdites, après application d'une franchise de 3 500 euros pour la garantie relative aux dommages immatériels ; Rappelle que le présent arrêt vaudra titre de restitution des sommes versées en exécution du jugement déféré; Déboute toutes les parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles d'appel ; Condamne la société à responsabilité limitée Mafroco aux entiers dépens d'appel ; Dit n'y avoir lieu à condamner la société anonyme Gan Assurances aux entiers dépens d'appel.