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Décisions

CA Toulouse, 1re ch. sect. 1, 17 juin 2019, n° 17-02336

TOULOUSE

Arrêt

PARTIES

Défendeur :

Albi Camping-Cars (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Belieres

Conseillers :

MM. Muller, Arriudarre

Avocats :

Mes Bonadei, Gil

TI Albi, du 20 mars 2017

20 mars 2017

EXPOSE DU LITIGE

Le 3 juillet 2014, M. Z et Mme A E Z ont fait l'acquisition d'un camping-car de marque Mac Louis, modèle 2014, auprès de la Sarl Albi Camping-Car au prix de 54 300 euros TTC.

Estimant que le véhicule présentait divers défauts, les consorts Z ont saisi la juridiction de proximité de Rodez le 7 novembre 2014 en vue d'obtenir la condamnation de la Sarl Albi Camping-Car d'avoir à leur verser la somme de 1 005 euros en remboursement de frais divers et d'avoir à réparer le véhicule sous astreinte.

Le 13 novembre 2014, les parties, en présence d'un conciliateur de Justice, ont établi un constat d'accord aux termes duquel M. Y, représentant de la Sarl Albi Camping-Car, s'est engagé à réparer le véhicule conformément à l'expertise ou à le reprendre ainsi qu'à rembourser une facture de 159 euros et M. Z s'est engagé à payer tout éventuel supplément de prix au titre du véhicule vendu en remplacement. Les consorts Z se sont désistés de leur action.

Le 15 novembre 2014, la Sarl Albi Camping-Car a repris le véhicule litigieux et a fait signer aux consorts Z un bon de commande pour un nouveau camping-car Challenger modèle Génésis, année 2015, au prix de 48 000 euros, les acquéreurs versant la somme de 1 000 euros correspondant à la différence entre ce nouveau véhicule et la valeur de reprise de l'ancien (47 000 euros). Le camping-car leur a été livré le 29 avril 2015.

Estimant que le nouveau camping-car n'était pas équivalent au précédent, les consorts Z ont, par l'intermédiaire de leur conseil, adressé un courrier au vendeur le 26 mai 2015 contestant l'échange intervenu, soutenant qu'ils avaient acquis le premier camping-car au prix de 54 300 euros et qu'ils s'étaient vu remettre un camping-car d'une valeur de 48 000 euros.

Par acte d'huissier en date du 19 avril 2016, les consorts Z ont fait assigner la Sarl Albi Camping-Car devant le tribunal d'instance d'Albi aux fins d'obtenir sa condamnation au paiement des sommes de 7 300 euros au titre de la différence de valeur entre les deux camping-cars et de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Par jugement contradictoire en date du 20 mars 2017, le tribunal :

- s'est déclaré compétent pour connaître du litige,

- a débouté M. Z et Mme A de l'ensemble de leurs demandes,

- a débouté la Sarl Albi Camping-Car de sa demande en dommages intérêts,

- a condamné M. et Mme Z à payer à la Sarl Albi Camping-Car la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- a condamné M. et Mme Z aux entiers dépens de l'instance.

Il a débouté M. et Mme Z de leurs demandes en l'absence de pièces déposées à l'appui de leurs prétentions et a considéré que l'accord intervenu entre les parties avait été respecté.

Par déclaration en date du 21 avril 2017, les consorts Z ont relevé appel total de ce jugement.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans leurs dernières écritures transmises par voie électronique le 7 novembre 2017, les consorts Z, appelants, demandent à la cour, au visa des articles 1224 et suivants, 1603 et suivants, 2044 et suivants du Code civil, L.211-4 du Code de la consommation, de :

- débouter la Sarl Albi Camping-Car de la totalité de ses demandes,

- réformer le jugement dans la totalité de ses dispositions,

- juger que la Sarl Albi Camping-Car n'a pas respecté le constat d'accord du 13 novembre 2014 ni son obligation de délivrance et de conformité,

- en conséquence, condamner la Sarl Albi Camping-Car à leur payer la somme de 7 710 euros correspondant à la différence de valeur entre les deux camping-cars,

- condamner la Sarl Albi Camping-Car à leur rembourser la facture de 159 euros,

- condamner la Sarl Albi Camping-Car à leur payer la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la Sarl Albi Camping-Car aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Christine Bonadei.

Ils soutiennent que le constat d'accord, qui vaut transaction, n'a pas été respecté puisqu'ils entendaient échanger leur véhicule acquis pour la somme de 54 300 euros pour un autre de valeur identique, qu'ils ont pour cela réglé la somme de 1 000 euros conformément à leur engagement, que le seul véhicule qui leur a été proposé, sur catalogue, est d'une valeur à neuf de 46 590 euros et leur a été vendu pour 48 000 euros contre restitution de leur véhicule d'origine évalué à 47 000 euros par l'intimée. Ils font valoir que leur camping-car d'origine était doté de différentes options qui devaient se retrouver sur le véhicule échangé, qu'aucune mention du bon de commande ou de la facture ne permet de considérer que ces options ont été offertes ou qu'elles portaient la valeur du véhicule à 54 235 euros comme le soutient l'intimée, l'attestation versée aux débats par celle-ci n'ayant aucune valeur puisqu'elle émane de cette dernière et non d'un tiers.

Ils soulignent les contradictions de la Sarl Albi Camping-Car dans la mesure où elle a indiqué que leur véhicule d'origine, acquis pour 54 300 euros, ne valait plus que 47 000 euros au moment de l'échange alors qu'elle l'a revendu quelques jours après les avoir pressés de le lui restituer pour 55 000 euros. Ils en concluent que la transaction, qui ne lie que M. Z et n'est pas opposable à Mme Z qui ne l'a pas signée, doit être résolue pour inexécution et sollicitent la somme de 7 710 euros correspondant à la différence de valeur entre les deux véhicules.

Ils font valoir que le vendeur a manqué à son obligation de délivrance conforme en ce que le véhicule de remplacement qui leur a été vendu n'est pas équivalent au premier et n'est pas équipé des options pack VIP et C D, GPS, caméras présentes sur leur véhicule d'origine.

Ils se prévalent également d'un préjudice de jouissance qu'ils évaluent à 2 000 euros lié à la restitution du premier véhicule qui leur a été imposée au mois de novembre 2014 et de la livraison du véhicule en échange qu'au mois d'avril 2015 et sollicitent le remboursement de la somme de 159 euros exposée pour les frais de carte grise.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 14 septembre 2017, la Sarl Albi Camping-Car, intimée, demande à la cour, au visa des articles 1110, 1315, 1382, 1604 anciens du Code civil, L. 211-4 et suivants du Code de la consommation, 9 du Code de procédure civile, de :

- constater qu'elle a parfaitement respecté son obligation de délivrance conforme et, de manière générale, l'ensemble de ses obligations contractuelles envers les époux Z,

- débouter en conséquence les consorts Z de l'ensemble de leurs demandes,

- confirmer le jugement,

- condamner reconventionnellement les époux Z d'avoir à lui régler la somme de 2 000 euros à titre de dommages pour procédure abusive,

- condamner enfin les époux Z à lui régler la somme complémentaire de 4 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle rappelle que les vices affectant le premier véhicule acquis relevaient de la garantie du fabricant mais correspondait au contrat signé, que le second véhicule est conforme au bon de commande signé entre les parties, les appelants ne pouvant pas se prévaloir d'un défaut de conformité du second véhicule aux caractéristiques du premier véhicule vendu.

Elle prétend qu'en exécution de la transaction intervenue devant le conciliateur de justice, ils ont bénéficié d'un camping-car neuf de la collection 2015 d'une valeur, compte tenu des options ajoutées, de 54 352 euros en lieu et place de leur camping-car d'occasion de la collection 2014 d'une valeur au jour de sa reprise de 38 270 euros qu'elle a accepté de reprendre au prix de 47 000 euros par souci de conciliation, les consorts Z omettant de prendre en compte la remise supplémentaire de près de 7 000 euros qu'elle leur a accordé sur le prix du véhicule de remplacement qu'elle aurait dû leur facturer plus cher. Elle souligne que les consorts Z étaient parfaitement informés de l'ensemble de ces éléments puisque le prix de reprise de leur véhicule était clairement mentionné sur le bon de commande ainsi que le paiement de la somme de 1 000 euros complémentaire et qu'en signant, tous les deux, ce bon de commande, ils ont accepté cet échange, conformément aux termes de la transaction du 13 novembre 2014.

Elle s'oppose à la demande formulée au titre du préjudice de jouissance en ce qu'il n'est pas justifié, que la restitution du premier véhicule n'était prévue qu'à la date de livraison du second véhicule selon les mentions contenues dans le bon de commande et que seuls les appelants ont pris la décision de le restituer bien avant.

Elle sollicite, pour sa part, une indemnisation pour procédure abusive en expliquant que les défauts du premier camping-car acquis par les consorts Z relevaient de la seule garantie du fabricant et qu'elle a accepté une opération de remplacement en abandonnant sa marge commerciale en facturant le véhicule de remplacement à 48 000 euros et en proposant à plusieurs reprises des gestes commerciaux par souci de conciliation.

MOTIFS :

Suivant constat d'accord en date du 13 novembre 2014, qui vaut transaction au sens de l'article 2044 du Code civil, la Sarl Albi Camping-Car a concédé " une reprise du véhicule dans des conditions acceptées par les deux parties " et M. Z s'est engagé " à payer un supplément si le prix du nouveau véhicule était plus élevé ". La mention relative au versement d'un supplément de prix permet d'affirmer que la reprise du camping-car de marque Mac Louis n'a été acceptée qu'en contre partie de la remise d'un véhicule équivalent et d'une valeur identique.

Les consorts Z ne démontrent pas que le véhicule Challenger qui leur a été remis en échange de celui de marque Mac Louis qu'ils avaient acquis n'est pas de valeur identique et que la transaction n'a pas été correctement exécutée par la Sarl Albi Camping-Car étant précisé que s'ils évoquent une résolution de la vente résultant de la transaction dans le corps de leurs conclusions, ils ne sollicitent que la condamnation de l'intimée à lui restituer une somme qui correspondrait à la différence de valeur entre les deux véhicules dans le dispositif qui seul saisit la cour en application de l'article 954 du Code de procédure civile.

Le camping-car Mac Louis qu'ils ont acquis le 3 juillet 2014 pour une somme de 54 300 euros leur a été repris pour un montant de 47 000 euros selon les mentions du bon de commande en date du 15 novembre 2014 signé par les époux Z. Cette valeur de reprise apparaît cohérente, s'agissant d'un véhicule d'occasion et eu égard aux options supplémentaires qu'il présentait, avec la cote de 38 270 euros indiquée pour ce type de camping-car sur le tableau établi par la fédération nationale des distributeurs de véhicules de loisirs versée aux débats. Le fait qu'il ait été revendu quelques jours après, soit le 22 novembre 2014, pour une valeur de 55 000 euros ne permet pas de démontrer que la Sarl Albi Camping-Car a sous-évalué leur véhicule dans le cadre de la reprise alors que sa livraison aux nouveaux acquéreurs n'a été prévue qu'en décembre 2014 selon le bon de commande communiqué et qu'il était affecté de plusieurs dysfonctionnements auquel la Sarl Albi Camping-Car a dû remédier avant de pouvoir le revendre.

Le camping-car de marque Challenger, qu'ils ont choisi suivant bon de commande du 15 novembre 2014, qui leur a été remis en échange est un véhicule neuf, de l'année 2015, dont la valeur a été fixée à 48 000 euros sur le bon de commande, ce montant étant cohérent avec le tarif de 46 590 euros conseillé par Challenger pour ce type de véhicule selon le tableau versé aux débats pour les tarifs applicables au 16 juin 2014. Il ressort du bon de commande établi le 15 novembre 2014 que des options similaires à celles présentes sur le véhicule Challenger initial ont été ajoutées (antenne, télévision, batterie, panneau solaire, store extérieur, porte vélos, multimédia) sans pour autant que ces éléments ne soient facturés comme cela ressort tant du bon de commande indiquant uniquement la somme de 48 000 euros au titre du prix du véhicule hors options et prestations particulières, étant observé que la modification de motorisation (155 CV à la place de 125 CV) a été prise en compte dans ce montant, que de la facture établie le 30 avril 2015. Une moustiquaire a également été rajoutée suite au mail de Mme Z en date du 14 avril 2015. La valeur de ces différentes options qui ont été ajoutées portent la valeur totale du véhicule à la somme de 55 352 euros selon les tarifs indiqués pour chacune des options sur l'attestation de prix établie le 25 mai 2016 versée aux débats (et non 54 235 euros). Si les consorts Z contestent la valeur de cette attestation en considérant qu'elle a été établie par l'intimée, elle a également été signée par deux autres sociétés concessionnaires Trigano, Perpignan Camping-Cars et Caravaning Loisirs selon les cachets des sociétés et les signatures mentionnés. Elle repose sur la base des prix officiels Trigano Challenger et le catalogue d'accessoires Destinea selon les mentions indiquées et apparaît en parfaite adéquation avec le tableau réalisé par Challenger, versé aux débats par les consorts Z, qui fait état du même prix que celui mentionné sur cette attestation, à savoir 1 000 euros TTC, pour une motorisation 125 CV modifiée en 155 CV.

Les consorts Z ne démontrent pas davantage un manquement de l'intimée à son obligation de délivrance en raison de l'absence des pack VIP et multimédia sur le camping-car Challenger qui leur a été remis. Ils ne versent aucun élément à l'appui de leurs allégations, leur première lettre de réclamation adressée à la Sarl Albi Camping-Car, datée du 26 mai 2015, faisant uniquement état, outre une différence de valeur de 7 300 euros, de l'absence d'un coussin de siège et des housses de siège cabine.

Par ailleurs, les consorts Z, s'ils allèguent d'un préjudice de jouissance tenant à l'absence de camping-car entre novembre 2014, date à laquelle ils ont restitué le leur, et avril 2015, date à laquelle le nouveau véhicule leur a été livré alors que ces dates étaient clairement mentionnées et acceptées dans le bon de commande signé le 15 novembre 2014, n'ont repris aucune demande à ce titre dans le dispositif de leurs conclusions qui seul saisit la cour.

Le jugement ayant débouté les époux Z de l'ensemble de leurs demandes doit dont être confirmé.

L'exercice d'une action en justice ne dégénère en faute pouvant donner lieu à des dommages et intérêts que si le demandeur a agi avec intention de nuire, légèreté blâmable ou a commis une erreur équivalente au dol, tous faits insuffisamment caractérisés en l'espèce. Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté la Sarl Albi Camping-Car de sa demande en dommages intérêts pour procédure abusive.

Les dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent également être confirmées.

Les consorts Z, qui succombent, supporteront in solidum la charge des dépens d'appel.

L'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties.

Par ces motifs : LA COUR, Confirme le jugement rendu le 20 mars 2017 en toutes ses dispositions, Y ajoutant, Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties, Condamne M. B Z et Mme X A E Z, in solidum, aux dépens d'appel.