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Décisions

Cass. com., 3 juillet 2019, n° 17-18.681

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Garage Sylvestre (SARL)

Défendeur :

Automobiles Citroën (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Laporte

Avocat général :

M. Debacq

Avocats :

SCP Spinosi, Sureau, SCP Gatineau, Fattaccini

T. com. Paris, du 3 sept. 2015

3 septembre 2015

LA COUR : - Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Garage Sylvestre que sur le pourvoi incident relevé par la société Automobiles Citroën ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Automobiles Citroën (la société Citroën) a conclu, le 28 mai 2003, avec la société Garage Sylvestre (la société Sylvestre), un contrat de réparateur agréé pour une durée de cinq ans qui a été prorogée jusqu'au 31 mai 2011 ; que ce contrat stipulait que la société Sylvestre facturerait à la société Citroën le montant des opérations qu'elle aurait réalisées au titre de la garantie et qu'elle devrait, en contrepartie, conserver des documents concernant ces opérations pendant un certain délai, la société Citroën pouvant réaliser un audit sur celles-ci et obtenir, en cas de facturation indue, le remboursement des sommes versées et le paiement d'une indemnité ; que les parties ont conclu un second contrat de réparateur agréé à effet du 1er juin 2011 ; qu'un audit effectué en octobre 2011 sur des opérations réalisées en avril 2011 ayant révélé des interventions de garantie sur un véhicule qui avaient été facturées sans être exécutées, la société Citroën a résilié ce contrat à effet immédiat et assigné la société Sylvestre en restitution des sommes indûment facturées et en paiement de l'indemnité contractuelle ; que la société Sylvestre a demandé reconventionnellement des dommages-intérêts pour résiliation abusive du contrat et rupture brutale d'une relation commerciale établie ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal : - Attendu que la société Sylvestre fait grief à l'arrêt de faire droit à la demande de la société Citroën alors, selon le moyen, que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ; qu'en jugeant que les dispositions du contrat de réparateur agréé en date du 28 mai 2003 autorisaient la société Citroën à réaliser un audit en octobre 2011, lorsque ce contrat était expiré depuis mai 2011, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1134 du Code civil dans sa rédaction applicable à la cause ;

Mais attendu qu'ayant constaté qu'en vertu des stipulations de l'article III du premier contrat, qui avaient été reprises dans le second, la société Sylvestre avait l'obligation de conserver les documents relatifs aux opérations de garantie qu'elle avait réalisées et dont elle avait facturé le coût à la société Citroën pendant un délai de deux ans après leur exécution, tandis que la société Citroën disposait de la faculté d'effectuer, à tout moment, un audit des dossiers concernant ces opérations, la cour d'appel a pu en déduire que la société Citroën pouvait vérifier leur régularité jusqu'à l'expiration d'un délai de deux ans depuis leur réalisation, qui correspondait à la période de conservation des justificatifs les concernant, et qu'elle avait procédé à l'audit litigieux en respectant ces dispositions ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal : - Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le troisième moyen du pourvoi principal : - Vu l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ; - Attendu que pour rejeter la demande de dommages-intérêts de la société Sylvestre pour rupture brutale de la relation commerciale établie, l'arrêt retient que ce texte ne peut recevoir application puisque que celle-ci a informé la société Citroën, le 28 novembre 2011, de son intention de céder son fonds de commerce et que la société Citroën a résilié le contrat le 23 décembre 2011, de sorte que la cession du fonds de commerce mettait nécessairement un terme à la relation commerciale établie entre les parties ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'annonce, par la société Sylvestre, de son intention de céder son fonds de commerce n'avait pas fait perdre son caractère établi à la relation commerciale, qui avait seulement vocation à cesser à compter de la cession du fonds, ce dont il résultait que cette cession, intervenue le 5 avril 2012, n'avait pu ôter son caractère brutal à la rupture notifiée le 23 décembre 2011, sans préavis, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le quatrième moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche, et le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa quatrième branche, rédigés en termes similaires, réunis : - Vu l'article 1147 du Code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 et le principe de la réparation intégrale du préjudice ; - Attendu que pour condamner la société Citroën à réparer le préjudice de la société Sylvestre pour la perte de la qualité de réparateur agréé Citroën jusqu'à la vente de son fonds de commerce résultant du caractère fautif de la résiliation du contrat, l'arrêt retient qu'au vu des éléments comptables parcellaires produits par la société Sylvestre, ce préjudice est fixé à la somme de 30 000 euros ;

Qu'en statuant ainsi, alors que cette somme procédait d'une évaluation forfaitaire du montant du préjudice de la société Sylvestre, la cour d'appel a violé le texte et le principe susvisés ;

Par ces motifs et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs ; Casse et Annule, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de dommages-intérêts de la société Garage Sylvestre pour rupture brutale d'une relation commerciale établie et condamne la société Automobiles Citroën à lui payer la somme de 30 000 euros de dommages-intérêts pour résiliation fautive du contrat de réparateur agréé du 23 mars 2011, l'arrêt rendu le 27 mars 2017, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris autrement composée.