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Décisions

CA Rennes, 3e ch. com., 2 juillet 2019, n° 16-07575

RENNES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Ambulance Matériels Secours (SAS), Ouest Médical Secours (SARL)

Défendeur :

Auto Ribeiro France (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Contamine

Conseiller :

M. Garet

Avocats :

Mes Lainaud, Nicod

T. com. Saint-Malo, du 26 juill. 2016

26 juillet 2016

FAITS ET PROCEDURE

La société Auto-Ribeiro France est la filiale française de la société Auto-Ribeiro, entreprise portugaise de carrosserie industrielle spécialisée dans la fabrication d'ambulances et autres véhicules de secours.

Au mois de septembre 2013, son directeur commercial, M. X, se rapprochait de M. Y, gérant de la société Ouest Médical Secours, elle-même spécialisée dans la vente d'ambulances et véhicules assimilés, pour discuter des conditions dans lesquelles celui-ci pourrait devenir l'agent commercial de la société Auto-Ribeiro France pour la distribution des véhicules de celle-ci dans le nord-ouest de la France.

Un projet de contrat d'agent commercial était alors proposé à M. Y qui, toutefois, ne le signait pas.

Pourtant et pour les besoins de cette collaboration, M. Y allait créer une autre structure, la société Ambulances Matériel Secours, qui, entre les mois d'octobre 2013 et septembre 2014, allait procéder à un certain nombre de ventes pour le compte de la société Auto-Ribeiro France, celle-ci lui versant en contrepartie des commissions d'agence.

A la fin du mois de septembre 2014, un contentieux allait survenir entre MM. Y et X, le premier reprochant au second des défaillances dans le suivi des ventes effectuées pour le compte de sa société, en particulier des retards dans la livraison des véhicules commandés, M. Y se plaignant d'avoir dû faire financer par la société Ambulances Matériel Secours la location de véhicules de remplacement au profit de clients mécontents du retard dans le traitement de leurs commandes.

Début octobre 2014, M. X faisait savoir à M. Y qu'il entendait récupérer le véhicule de démonstration qu'il lui avait confié pour promouvoir les produits de la société Auto-Ribeiro France.

M. Y lui répondait qu'il était disposé à rendre le véhicule, mais seulement lorsqu'il aurait été réglé du solde des commissions restant dues sur les ventes ainsi que des factures de location précédemment évoquées.

Contestant les sommes qui lui étaient réclamées, et considérant que M. Y ne pouvait pas se prévaloir d'un droit de rétention sur un véhicule qui ne lui appartenait pas, M. X saisissait le juge de l'exécution afin que la société Auto-Ribeiro France soit autorisée à saisir-appréhender le véhicule.

Par ordonnance du 24 novembre 2014, le juge de l'exécution ordonnait aux sociétés Ambulances Matériel Secours et Ouest Médical Secours de restituer le véhicule.

Les deux sociétés formaient alors opposition à l'ordonnance.

Par actes du 16 janvier 2016, la société Auto-Ribeiro France les faisait assigner toutes deux devant le tribunal de commerce de Saint Malo aux fins d'être autorisée à reprendre possession de son véhicule et ce, sous astreinte en cas d'obstruction des défenderesses, outre de les voir condamner au paiement de plusieurs factures émises à leur encontre.

Par conclusions du 7 avril 2016, les sociétés défenderesses demandaient au tribunal de déclarer la société Auto-Ribeiro France irrecevable et à tout le moins infondée en ses demandes et, à titre reconventionnel, de prononcer la résiliation du contrat d'agent commercial aux torts de la mandante, en conséquence de la condamner au paiement d'une indemnité de préavis et d'une indemnité de rupture, enfin de commissions et factures de location restantes dues à la société Ambulances Matériel Secours.

Par jugement du 26 juillet 2016, le tribunal :

- déclarait la société Auto-Ribeiro France recevable en ses demandes dirigées tant à l'encontre de la société Ambulances Matériel Secours que de la société Ouest Médical Secours ;

- leur ordonnait sous astreinte de restituer le véhicule à la société Auto-Ribeiro France et validait la procédure de saisie-appréhension diligentée par celle-ci ;

- décernait acte à la société Auto-Ribeiro France de ce qu'elle reconnaissait devoir un solde de commissions pour une somme de 6 000 ;

- condamnait la société Ouest Médical Secours à régler à la société Auto-Ribeiro France une somme de 3 862,16 en paiement de trois factures émises par celle-ci ;

- condamnait solidairement les sociétés défenderesses au paiement d'une somme de 26 582 en réparation du préjudice subi par la société Auto-Ribeiro France du fait de la rétention abusive de son véhicule ;

- ordonnait la compensation entre les créances réciproques ;

- déboutait les sociétés défenderesses de l'ensemble de leurs demandes et les condamnait solidairement au paiement d'une somme de 3 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 7 octobre 2016, les sociétés Ambulances Matériel Secours et Ouest Médical Secours interjetaient appel de cette décision.

Le jugement étant assorti de l'exécution provisoire, il était procédé :

- d'une part à la restitution du véhicule suivant constat d'huissier de justice en date du 27 septembre 2016,

- d'autre part à la saisie-attribution des sommes mises à la charge des défenderesses suivant acte du 15 septembre 2016 et ce, après application de la compensation ordonnée par le tribunal.

Les dernières conclusions des appelantes étaient notifiées le 18 septembre 2017, celles de l'intimée le 23 février 2017.

La clôture de la mise en état était prononcée par ordonnance du 2 mai 2019.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Les sociétés Ambulances Matériel Secours et Ouest Médical Secours demandent à la cour d'infirmer le jugement déféré et, statuant à nouveau, de :

- déclarer la société Auto-Ribeiro France irrecevable pour défaut de qualité à agir ;

- déclarer toutes ses demandes infondées et l'en débouter ;

- ordonner la résiliation judiciaire du contrat d'agent commercial souscrit entre les sociétés Auto-Ribeiro France et Ambulances Matériel Secours ;

- condamner la société Auto-Ribeiro France à payer à la société Ambulances Matériel Secours :

* la somme de 10 142,44 au titre des factures de location,

* la somme de 38 200 au titre du préjudice financier,

* la somme de 6 600 au titre de l'indemnité de préavis,

* la somme de 26 640 au titre de l'indemnité de rupture,

* la somme de 16 170 au titre des commissions non réglées,

* la somme de 2 000 à titre d'indemnité pour procédure abusive,

* la somme de 3 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamner la société Auto-Ribeiro France aux entiers dépens.

Au contraire, la société Auto-Ribeiro France conclut à la confirmation pure et simple du jugement déféré, au débouté de l'ensemble des demandes formées par les sociétés Ambulances Matériel Secours et Ouest Médical Secours, enfin à leur condamnation solidaire au paiement d'une somme de 5 000 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel ainsi qu'en tous les dépens à recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du même Code.

MOTIFS DE LA DECISION

I - Sur la recevabilité de l'action intentée par la société Auto-Ribeiro France :

Pour contester cette recevabilité, les sociétés Ambulances Matériel Secours et Ouest Médical Secours font valoir qu'il n'est pas justifié que le président de la société Auto-Ribeiro ait donné autorisation à son directeur général, M. X, pour engager une action en justice.

Cependant et ainsi que l'intimée le fait justement observer :

- si l'article L. 227-6 du Code de commerce, relatif au mode de fonctionnement des sociétés par actions simplifiées (ce qu'est la société Auto-Ribeiro France), prévoit que la société est représentée à l'égard des tiers par son président, pour autant il dispose également que les statuts de la société peuvent prévoir les conditions dans lesquelles une ou plusieurs personnes autres que le président, portant le titre de directeur général ou de directeur général délégué, peuvent exercer les pouvoirs confiés au président ;

- qu'en l'espèce, les statuts de la société Auto-Ribeiro France prévoient expressément que le directeur général, fonction occupée par M. X, " a le pouvoir pour représenter la société à l'égard des tiers " dans tous les actes de la vie sociale, à l'exception seulement d'une liste énumérant les actes pour lesquels aucune délégation n'est possible ;

- que les actions en justice ne figurent pas dans cette liste d'actes que le directeur général de la société Auto-Ribeiro France ne pourrait accomplir lui-même.

Il en résulte que M. X avait qualité pour intenter une action en justice au nom de la société Auto-Ribeiro.

L'exception d'irrecevabilité sera donc rejetée.

II - Sur la recevabilité de l'action en ce qu'elle est dirigée à l'encontre de la société Ouest Médical Secours :

Cette appelante affirme qu'elle n'est pas concernée par cette procédure dès lors qu'elle-même ne s'est jamais vu confier le véhicule dont la société Auto-Ribeiro France a réclamé la restitution.

Cependant et ainsi que l'intimée le fait justement observer :

- les deux sociétés Ambulances Matériel Secours et Ouest Médical Secours ont le même siège social et le même lieu d'exploitation, <adresse>, enfin le même gérant en la personne de M. Y ;

- que M. Y a utilisé alternativement les deux raisons sociales, tant pour s'adresser à la société Auto-Ribeiro France que pour émettre des factures à l'encontre de celle-ci ;

- qu'en réalité, c'est M. Y qui, en sa qualité de gérant des deux sociétés, détenait le véhicule et qui, pour refuser de le restituer, invoquait les créances prétendues de l'une ou l'autre de ses deux sociétés.

Dans ces conditions, c'est à juste titre que le tribunal a considéré que la société Ouest Médical Secours avait été à bon droit appelée à la cause, au même titre que la société Ambulances Matériel Secours, pour répondre de la rétention du véhicule.

III - Sur les demandes en paiement formées par la société Ambulances Matériel Secours :

A - Sur l'existence d'un contrat d'agent commercial :

Ni la société Auto-Ribeiro France ni la société Ambulances Matériel Secours ne contestent l'existence d'un contrat d'agent commercial qui les a unies pendant une année, d'octobre 2013 à septembre 2014.

A cet égard, il est sans importance, pour la caractérisation de ce contrat de mandat, qu'il n'ait jamais été formellement signé par la société Ambulances Matériel Secours, la preuve d'un accord des parties sur les termes du mandat pouvant être rapportée par tous moyens, notamment par l'aveu judiciaire de la société Auto-Ribeiro France qui reconnaît l'existence du mandat de même que la réalité des commissions qu'elle a réglées à sa mandataire pour la somme totale non contestée de 26 640 au titre de la période précitée.

B - Sur les circonstances de la rupture :

Au vu des pièces versées aux débats, il apparaît qu'aucune des parties n'a jamais clairement manifesté son intention de rompre le contrat qui les unissait :

- ni la société Ambulances Matériel Secours qui, dans aucun des courriers et messages qu'elle a adressés à sa mandante au cours de l'automne 2014, n'a même évoqué la perspective d'une rupture à venir, la mandataire s'étant bornée à réclamer le paiement de ses commissions et factures de location ;

- ni la société Auto-Ribeiro France qui, quant à elle, s'est bornée à réclamer la restitution de son véhicule, sans jamais avoir évoqué avec son interlocutrice la rupture de leurs relations commerciales.

Dans ces conditions, la cour constatera la rupture du contrat d'agent commercial, mais s'abstiendra d'en imputer la responsabilité à l'une ou à l'autre des parties.

C - Sur la demande formée au titre de l'indemnité de préavis :

L'article L. 134-11 du Code de commerce dispose notamment que :

- lorsque le contrat d'agence est à durée indéterminée, chacune des parties peut y mettre fin moyennant un préavis ;

- la durée de ce préavis est d'un mois pour la première année du contrat ;

- que ces dispositions ne s'appliquent pas lorsque le contrat prend fin en raison d'une faute grave de l'une des parties ou de la survenance d'un cas de force majeure.

En l'occurrence, il n'est pas justifié par la société Auto-Ribeiro France d'une faute grave qu'aurait commise la société Ambulance Matériel Secours ni d'un cas de force majeure qui aurait pu justifier la rupture du contrat sans préavis, la cour observant à cet égard que la rétention du véhicule de la mandante, même abusive, n'est pas la cause de la rupture, mais la conséquence de celle-ci, la mandataire ayant en effet prétendu retenir le véhicule en garantie du paiement de ses propres créances.

La société Auto-Ribeiro France était donc débitrice d'un préavis d'un mois au profit de sa mandataire, et non de trois mois comme invoqué sans justification par la société Ambulances Matériel Secours, et ce, à proportion de la durée du contrat d'agent commercial qui n'a pas excédé une année.

Aucune déchéance de ce droit ne saurait être utilement invoquée par la mandante, étant en effet rappelé que l'article L. 134-12, qui prévoit la perte du droit à réparation en l'absence de toute réclamation de la mandataire dans le délai d'un an suivant la cessation du contrat, ne s'applique qu'à l'indemnité de rupture, et non à l'indemnité de préavis.

En conséquence et eu égard à la perception d'un commissionnement moyen de 2 220 par mois au titre de la période d'octobre 2013 à septembre 2014 (26 640 / 12), la société Auto-Ribeiro France sera condamnée à payer à la société Ambulances Matériel Secours une indemnité de préavis de 2 220, le jugement déféré devant être infirmé en ce qu'il a débouté la mandataire de cette demande.

D - Sur la demande formée au titre de l'indemnité de rupture :

La société Ambulance Matériels Secours réclame à ce titre une indemnité de 26.640 en réparation d'un préjudice qu'elle évalue à une perte de douze mois de commissionnement.

Cependant, c'est à bon droit que pour s'y opposer, la société Auto-Ribeiro France fait valoir que cette demande se heurte à la déchéance de l'article L. 134-12 qui prévoit en effet que si l'agent commercial a droit, en cas de cessation de ses relations avec son mandant, à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi, il perd ce droit s'il n'a pas notifié au mandant, dans le délai d'un an courant à compter de la cessation du contrat, qu'il entend le faire valoir.

A cet égard, il est constant que ce délai commence à courir à compter de l'extinction effective des relations contractuelles, soit en l'occurrence à compter du 7 octobre 2014, puisque c'est à cette époque que les sociétés Auto-Ribeiro France et Ambulances Matériels Secours ont cessé toute relation commerciale, leurs échanges s'étant dès lors limités à des réclamations réciproques purement contentieuses; par ailleurs, il est établi que plus aucun mandat de vente n'a été conclu pour le compte de la société Auto-Ribeiro France à partir de cette époque.

Or, ce n'est qu'aux termes de ses conclusions de première instance, déposées devant le tribunal de commerce le 7 avril 2016, que pour la première fois, la société Ambulance Matériel Secours a réclamé à la société Auto-Ribeiro France le paiement d'une indemnité de rupture ; en effet, aucun des messages et courriers adressés par la mandataire à son ex-mandante au cours de l'automne 2014 ne fait état d'une quelconque réclamation à ce titre, la société Ambulances Matériel Secours s'étant bornée à lui réclamer le paiement d'un solde de commissions ainsi que de factures de location.

Dès lors, le droit à indemnité de rupture étant irrémédiablement perdu, le jugement déféré ne pourra qu'être confirmé en ce qu'il a débouté la société Ambulances Matériel Secours de toute demande à ce titre.

E - Sur le solde des commissions :

La société Ambulances Matériel Secours réclame le paiement d'une somme totale de 10 142,44 TTC correspondant à cinq commissions :

- une somme de 3 000 TTC afférente à la facture F 14151002 du 6 octobre 2014, d'ailleurs non contestée par la société Auto-Ribeiro France, déjà prise en compte par le jugement déféré et déjà compensée dans le cadre de la saisie-attribution pratiquée en exécution provisoire dudit jugement;

- une somme de 3 000 TTC afférente à la facture F 14151003 du 6 octobre 2014, également non contestée par la société Auto-Ribeiro France, déjà prise en compte par le jugement déféré et compensée dans le cadre de cette saisie-attribution ;

- une somme de 400 TTC afférente à une facture F 13140901 du 12 septembre 2014 ; contestée par la société Auto-Ribeiro France et reposant sur une facture qui n'est pas versée aux débats, cette réclamation sera rejetée ;

- une somme de 742,44 TTC afférente à une facture F 14151001 du 6 octobre 2014 qui est versée aux débats et qui a pour objet une commission réclamée au titre d'une vente dont la réalité n'est pas déniée par la société Auto-Ribeiro France, laquelle se borne à en contester le mode de calcul sans en proposer un autre ; dès lors, justifiée dans son principe comme dans son montant, cette commission sera validée et mise à la charge de la société Auto-Ribeiro France ;

- une somme de 3 000 afférente à une vente dite " Inter-Med " dont, selon l'appelante, la société Auto-Ribeiro France aurait refusé d'honorer la commande ; cependant et en l'absence de tout justificatif de cette créance, étant observé que la société Ambulances matériel Secours ne produit ni bon de commande ni facture, celle-ci sera déboutée de sa demande en paiement.

En conséquence, la société Auto-Ribeiro France sera condamnée au paiement d'une somme de 6.742,44 pour solde des commissions restant dues à la société Ambulances Matériel Secours, la décision déférée devant être infirmée en ce sens.

F - Sur la demande formée au titre du " préjudice financier " :

La société Ambulances Matériel Secours réclame encore une somme de 38 200 TTC correspondant, selon elle, aux commissions auxquelles elle aurait pu prétendre si sa mandataire n'avait pas " empêché la signature de nombreuses affaires ".

Ce préjudice ne reposant que sur les seules allégations de l'appelante et n'étant étayé par aucune pièce justificative si ce n'est sur les pièces n° 12 et 21 émanant de la société elle-même et, par là même dépourvues de valeur probante, la société Ambulances Matériel Secours sera déboutée de sa demande.

G - Sur la demande formée au titre des factures de location :

La société Ambulances Matériel Secours demande à ce titre la condamnation de la société Auto-Ribeiro France à lui payer une somme totale de 16 170 correspondant aux factures de location qu'elle dit avoir acquittées pour mettre à la disposition de ses clients des véhicules en remplacement de ceux qui, commandés auprès de sa mandataire, ont été livrés avec retard.

Cependant, faute de production des factures que la société Ambulances Matériel Secours aurait effectivement acquittées à ce titre, il y a lieu de la débouter de sa demande de remboursement.

IV - Sur les demandes formées par la société Auto-Ribeiro France :

A - Sur la demande de dommages-intérêts pour rétention abusive de son véhicule :

La société Auto-Ribeiro France demande la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné solidairement les sociétés Ouest Médical Secours et Ambulances Matériel Secours à lui payer une somme de 26 582 à titre de dommages-intérêts pour rétention abusive du véhicule de démonstration qui leur avait été confié.

A cette fin, la société Auto-Ribeiro France fait valoir que les deux sociétés ne disposaient d'aucun droit de rétention sur un véhicule qui ne leur appartenait pas, alors au surplus que les créances dont elles se prévalaient, en l'occurrence des commissions sur ventes, n'étaient pas encore devenues exigibles.

Au-delà de ce débat sur l'exigibilité des commissions, la cour observe que le statut légal d'agent commercial ne confère au mandataire aucun droit de rétention sur les objets qui lui sont confiés par le mandant à titre de dépôt ; de même, les relations contractuelles ayant existé entre les sociétés Auto-Ribeiro France et Ambulances Matériel Secours n'ont pas non plus prévu un tel droit.

Les sociétés Ouest Médical Secours et Ambulances Matériel Secours ont donc commis une faute lorsqu'elles ont refusé de restituer le véhicule réclamé par la société Auto-Ribeiro France qui en était propriétaire.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont autorisé la société Auto-Ribeiro France à en reprendre possession.

S'agissant du montant des dommages-intérêts auxquels la société Auto-Ribeiro France peut prétendre, la cour constate, au vu des pièces versées aux débats :

- que le véhicule a été acheté et aménagé au mois de juillet 2014 pour un prix total de 53 164 ;

- qu'il s'agissait alors d'un véhicule neuf de marque Mercedes Sprinter ;

- qu'il a été utilisé régulièrement et à titre de démonstration par ses dépositaires jusqu'au mois d'octobre 2014 ;

- qu'il a été restitué le 20 septembre 2016 en " excellent état apparent " et affichant 4.378 kilomètres au compteur ainsi qu'il résulte des mentions du procès-verbal d'huissier de justice établi à cette date ;

- qu'ainsi, et dans la mesure où le véhicule n'a pratiquement pas été utilisé pendant ses deux années de rétention indue, le préjudice subi par la société Auto-Ribeiro France se limite à la seule dépréciation consécutive au changement de millésime du véhicule.

En l'espèce et au vu des éléments du dossier, la cour estimera cette dépréciation à un tiers du prix initial, et non à 50 % comme les premiers juges l'ont eux-mêmes estimée.

En conséquence, les sociétés Ouest Médical Secours et Ambulances Matériel Secours seront solidairement condamnées à payer à la société Auto-Ribeiro France une indemnité de 17 721 en réparation de son préjudice.

B - Sur la demande formée à l'encontre de la société Ouest Médical Secours seule au titre de factures impayées :

La société Auto-Ribeiro France demande à la cour de confirmer le jugement dans son intégralité.

Or, entre autres dispositions, ce jugement a condamné la société Ouest Médical Secours au paiement d'une somme totale de 3 862,16 au titre des factures émises par la société Auto-Ribeiro France sous les numéros F1311040058, F1311040096 et F13040099, les premiers juges ayant justifié leur décision par le fait que " cette demande [n'était] pas contestée par le défendeur dans ses écritures ".

Aujour'hui, les appelantes demandent à la cour de déclarer " non fondées " les demandes dirigées à l'encontre de la société Ouest Médical Secours.

Dès lors, c'est à la société Auto-Ribeiro France qu'il appartient de rapporter la preuve de sa créance.

Or, celle-ci ne produit que deux des trois factures émises à l'ordre de la société Ouest Médical Secours, celle numérotée F1311040096 faisant défaut.

En conséquence et au vu des seules pièces versées aux débats, la société Ouest Médical Secours sera condamnée au paiement de la seule somme de 2 362,16 TTC (1 832,88 + 529,28 ), la société Auto-Ribeiro France devant être déboutée du surplus de sa demande.

V - Sur les autres demandes :

La procédure intentée par la société Auto-Ribeiro France n'étant pas abusive puisqu'il a été accueilli favorablement dans sa majeure partie, la demande de dommages-intérêts formée à ce titre par les sociétés Ouest Médical Secours et Ambulances Matériel Secours sera rejetée.

La société Auto-Ribeiro France sollicitant la confirmation du jugement déféré, celui-ci sera également confirmé en ce qu'il a ordonné la compensation entre les créances réciproques.

Parties globalement perdantes, les sociétés Ouest Médical Secours et Ambulances Matériel Secours seront condamnées au paiement d'une somme de 3.000 au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel, cette condamnation devant s'ajouter à celle de même montant prononcée en première instance.

Enfin, les sociétés Ouest Médical Secours et Ambulances Matériel Secours supporteront solidairement les entiers dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Par ces motifs, LA COUR : Confirme le jugement déféré en ce qu'il a : Déclaré la société Auto-Ribeiro France recevable en ses demandes dirigées à l'encontre des sociétés Ouest Médical Secours et Ambulances Matériel Secours ; Autorisé la société Auto-Ribeiro France à reprendre possession de son véhicule ; Décerné acte à la société Auto-Ribeiro France qu'elle reconnaissait devoir à la société Ambulances Matériel Secours une somme de 6 000 au titre de commissions sur ventes ; Ordonné la compensation entre les créances réciproques ; Condamné solidairement les sociétés Ouest Médical Secours et Ambulances Matériel Secours à payer à la société Auto-Ribeiro France une somme de 3 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; L'infirmant pour le surplus de ses dispositions, statuant à nouveau et y ajoutant : Condamne la société Auto-Ribeiro France à payer à la société Ambulances Matériel Secours une somme de 2 200 à titre d'indemnité de préavis de rupture du contrat d'agent commercial ainsi qu'une somme de 742,44 TTC au titre de la facture F 14151001 du 6 octobre 2014 ; Condamne solidairement les sociétés Ouest Médical Secours et Ambulances Matériel Secours à payer à la société Auto-Ribeiro France une somme de 17 721 à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par celle-ci du fait de la rétention abusive de son véhicule ; Condamne la société Ouest Médical Secours à payer à la société Auto-Ribeiro France une somme de 2 362,16 TTC en règlement de factures demeurées impayées ; Condamne solidairement les sociétés Ouest Médical Secours et Ambulances Matériel Secours à payer à la société Auto-Ribeiro France une somme de 3 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel ; Déboute chacune des parties du surplus de leurs demandes ; Condamne solidairement les sociétés Ouest Médical Secours et Ambulances Matériel Secours aux entiers dépens de première instance et d'appel et dit qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.