CA Rennes, 2e ch., 6 septembre 2019, n° 16-03093
RENNES
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Volkswagen Group France (Sté)
Défendeur :
Allianz IARD (SA), Garage Beyou (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Christien
Conseillers :
M. Pothier, Mme Gelot Barbier
Avocats :
Mes Azincourt, Vogel, Graïc, Depasse, Bellaiche
EXPOSÉ DU LITIGE
Le 10 mai 2011, M. Y B a fait l'acquisition auprès de la société Garage Beyou d'un véhicule neuf de marque Volkswagen, type Transporter, moyennant le prix de 28 885 euros.
Le 30 septembre 2011, le véhicule, qui avait parcouru environ 5 000 kms, a été entièrement détruit dans un incendie alors qu'il était stationné au domicile de M. B, sous un auvent. L'incendie a également endommagé un bâtiment attenant.
L'expertise amiable organisée par le Cabinet Gillet à la demande de la société Allianz Iard, assureur de M. B, n'ayant pas permis d'identifier la cause de l'incendie, ce dernier et son assureur ont sollicité et obtenu en référé la désignation d'un expert, suivant ordonnance du 9 février 2012.
L'expert désigné, M. X, a déposé son rapport le 12 septembre 2012 après s'être adjoint les services de M. C Z, expert automobile.
En réparation du sinistre, M. B a perçu de son assureur une somme totale de 107 869,39 euros.
Par acte du 11 février 2014, M. B et la société Allianz ont fait assigner la société Volkswagen group France (ci-après la société Volkswagen), importateur du véhicule, et la société Garage Beyou devant le tribunal de grande instance de Saint Brieuc aux fins d'obtenir, pour le premier, un complément d'indemnisation et, pour l'assureur, le remboursement des sommes versées à son assuré.
Par jugement du 29 mars 2016, le tribunal a :
- déclaré recevable l'action de la société Allianz et de M. B,
- condamné in solidum la société Volkswagen et la société Garage Beyou à payer à la société Allianz la somme de 24 170 euros au titre du sinistre automobile et la somme de 83 699,39 euros au titre du sinistre habitation,
- condamné in solidum la société Volkswagen et la société Garage Beyou à payer à M. B la somme de 33 076,04 euros au titre de la part de son préjudice non indemnisée par son assureur,
- condamné in solidum la société Volkswagen et la société Garage Beyou aux dépens,
- condamné in solidum la société Volkswagen et la société Garage Beyou à payer à la société Allianz la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné in solidum la société Volkswagen et la société Garage Beyou à payer à M. B la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné la société Volkswagen à garantir intégralement la société Garage Beyou au titre des condamnations ci-dessus,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
La société Volkswagen a relevé appel de cette décision le 22 avril 2016 et demande à la cour de :
Vu les articles 1386-1 et suivants du Code civil,
Vu l'article 1641 du Code civil
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- constater que la société Volkswagen group France (R. C.S. de Soissons n° 832 277 370) vient aux droits de la société Volkswagen group France (R. C.S. de Soissons n° 602 025 538) suite à l'opération d'apport partiel d'actif intervenue,
- constater, dire et juger que l'expertise amiable n'a révélé aucun défaut qui serait imputable au véhicule lui-même,
- constater, dire et juger que le rapport d'expertise judiciaire de l'expert X ne retient l'existence d'aucun défaut qui serait inhérent au véhicule volkswagen Transporter,
- constater, dire et juger que l'expert judiciaire M. X retient comme possibles une cause criminelle et une cause accidentelle,
- constater dire et juger qu'il n'existe pas de présomptions concordantes établissant un prétendu caractère défectueux du véhicule,
- constater, dire et juger qu'aucun défaut qui serait inhérent au véhicule au sens des articles 1386-1 et suivants du Code civil n'est établi au cas d'espèce,
- constater, dire et juger que les conditions d'application de la responsabilité du fait des produits défectueux ne sont pas réunies au cas d'espèce,
- constater, dire et juger qu'en l'absence de démonstration de l'existence d'un vice caché qui serait inhérent au véhicule, les conditions d'application de la garantie légale des vices cachés ne sont pas réunies,
- constater, dire et juger que l'absence de mesure conservatoire prise par M. B et son assureur suite à l'expertise amiable lui est inopposable,
- constater, dire et juger que la destruction des éléments de preuve depuis l'introduction de la procédure lui est inopposable et exclut toute garantie de sa part,
- constater, dire et juger que les préjudices subis par M. B et la société Allianz ne lui sont pas imputables et ne sont fondés ni dans leur principe, ni dans leur montant,
- constater, dire et juger que la société Allianz ne démontre pas avoir indemnisé M. A conformément à la police d'assurance souscrite,
- constater, dire et juger que la société Allianz ne bénéficie d'aucune subrogation conventionnelle,
En conséquence,
- débouter la société Allianz de toutes ses demandes dirigées à son encontre,
- débouter M. B de toutes ses demandes dirigées à son encontre,
- infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
- débouter toutes parties de toutes demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre,
Subsidiairement, si la cour entrait en voie de condamnation à son encontre,
- constater, dire et juger que les sommes réclamées pour l'indemnisation du préjudice professionnel de M. B doivent être calculées hors taxes,
- condamner solidairement M. B et la société Allianz à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la partie succombante aux entiers dépens, de référé, d'instance et d'appel, dont distraction au profit de la Selarl Olive Azincourt en application de l'article 699 du Code de procédure civile.
Selon leurs dernières conclusions, M. B et la société Allianz demandent à la cour de :
Vu les articles 143 et 144 du Code de procédure civile
Vu les anciens articles 1386-1b anciens et suivants du Code civil (désormais 1245 et suivants du Code civil)
Vu les articles 1641 et suivants du Code civil
Vu les articles 1250 du Code civil et L. 121-12 du Code des assurances
- débouter la société Volkswagen et la société Garage Beyou de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :
- déclaré recevable leur action, condamné in solidum la société Volkswagen et la société Garage Beyou à payer à la société Allianz la somme de 24 170 euros au titre du sinistre automobile et la somme de 83 699,39 euros au titre du sinistre habitation,
- recevoir M. B en son appel incident,
- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a fixé son préjudice non indemnisé à la somme de 33 076,04 euros,
En conséquence,
- condamner in solidum la société Volkswagen et la société Garage Beyou à payer à M. B la somme de 39 131,04 euros au titre de la part de son préjudice non indemnisée par son assureur,
- condamner la société Garage Beyou et la société Volkswagen à payer in solidum à la société Allianz d'une part et M. B d'autre part la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel,
- confirmer le jugement dont appel pour le surplus,
- condamner les mêmes aux entiers dépens.
Selon ses dernières écritures, la société Garage Beyou conclut aux fins de voir :
Vu les articles 1386-1 et suivants du Code civil
Vu les articles 1641 et suivants du Code civil
Vu l'article 146 du Code de procédure civile,
Sur la responsabilité du fait des produits défectueux,
- confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que M. B et son assureur la société Allianz ne formaient pas de demande à son encontre sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux,
A titre subsidiaire,
- dire et juger qu'elle n'est pas producteur du véhicule litigieux au sens des dispositions des articles 1386-1 et suivants du Code civil,
En conséquence,
- déclarer irrecevable toute demande dirigée à son encontre sur le fondement des articles 1386-1 et suivants du Code civil,
Sur la garantie des vices cachés,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à indemniser M. B et la société Allianz au titre de la garantie des vices cachés,
Statuant à nouveau :
- dire et juger que M. B et la société Allianz ne démontrent pas l'existence d'un vice caché, inhérent au véhicule, antérieur à la vente et le rendant impropre à sa destination,
- dire et juger que M. B et la société Allianz ne démontrent pas qu'un vice caché du véhicule serait à l'origine de l'incendie survenu le 30 septembre 2011,
En conséquence,
- débouter M. B et la société Allianz et tous requérant, de toutes ses demandes, fins et conclusions à son encontre,
Sur l'expertise judiciaire,
- confirmer le jugement en ce qu'il a considéré l'expertise judiciaire sans objet,
A titre subsidiaire :
- rejeter la demande d'expertise judiciaire,
Sur la garantie de la société Volkswagen,
- dire et juger que l'appel de la société Volkswagen ne porte pas sur la garantie intégrale de la société Garage Beyou,
- constater le caractère définitif et irrévocable de la garantie intégrale de la société Garage Beyou par la société Volkswagen pour l'ensemble des condamnations prononcées,
- en tant que de besoin, confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Volkswagen à la relever et la garantir de l'ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,
En toute hypothèse,
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. B de ses demandes au titre de la non réalisation des travaux à hauteur de 500 euros par mois et de l'incidence du sinistre sur son état de santé,
- condamner tout succombant au paiement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner tout succombant aux entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées pour la société Volkswagen le 7 mai 2019, pour M. B et la société Allianz le 3 mai 2019, et pour la société Garage Beyou le 26 mars 2019, l'ordonnance de clôture ayant été rendue à l'audience.
EXPOSÉ DES MOTIFS
A titre liminaire, il n'y a pas lieu d'examiner la prétention de la société Garage Beyou tendant à voir confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que M. B et son assureur la société Allianz ne formaient pas de demande à son encontre sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux dès lors, que contrairement à ce qui est soutenu, le tribunal n'a pas statué sur cette question mais a souligné à l'inverse qu'elle était sans objet après avoir relevé que les demandes formées contre le garage Beyou étaient uniquement fondées sur les articles 1641 et suivants du Code civil.
Les prétentions de la société Garage Beyou relatives à l'expertise judiciaire sont pareillement sans objet dans la mesure où M. B et la société Allianz n'ont pas repris en cause d'appel la demande d'expertise qu'ils avaient présentée à titre subsidiaire devant le tribunal.
SUR LA RESPONSABILITÉ DU FAIT DES PRODUITS DÉFECTUEUX :
Aux termes de l'article 1386-1 devenu 1245 du Code civil, le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu'il soit ou non lié par un contrat avec la victime.
L'article 1386-4 devenu 1245-3 du même Code précise qu'un produit est défectueux lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre.
Ainsi que le rappelle à juste titre le tribunal, le régime de la preuve en matière de responsabilité du fait des produits défectueux est fixé par les articles 1386-9 à 1386-11 devenus 1245-8 à 1245-10 du Code civil qui prévoient notamment, d'une part, que le demandeur supporte la charge de prouver le dommage, le défaut et le lien de causalité entre le défaut et le dommage et, d'autre part, que le producteur est responsable de plein droit à moins qu'il ne démontre l'existence de l'une des cinq causes d'exonération énumérées à l'article 1386-11.
Il incombe par conséquent en premier lieu au demandeur d'établir, outre que le dommage est imputable au produit incriminé, que celui-ci est défectueux.
Pour retenir la responsabilité de la société Volkswagen sur le fondement des textes susvisés, le premier juge a considéré que les constatations de l'expert, les circonstances du sinistre et les témoignages recueillis en cours d'expertise constituaient un faisceau d'indices graves et concordants en faveur d'un incendie trouvant son origine dans un défaut de sécurité du véhicule.
La société Volkswagen fait valoir que, contrairement à ce qui a été jugé par le tribunal, les conditions d'application de l'article 1386-1 ancien du Code civil ne sont pas réunies ; que ni l'article 1386-9 ancien du même Code, selon lequel il incombe au demandeur de rapporter la preuve du défaut, ni l'article 4 de la directive du 25 juillet 1985 dont ce texte est issu ne prévoient la possibilité de se contenter de présomptions ; que dans le cas présent, la preuve d'un quelconque défaut du véhicule à l'origine de l'incendie n'est pas rapportée.
Concernant le mode de preuve admissible, il résulte d'un arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 21 juin 2017, que l'appelante verse elle-même aux débats, qu'en l'absence de preuve certaine issue de données scientifiques, le demandeur peut recourir à des indices graves, précis et concordants afin d'établir la preuve de la défectuosité du produit et du lien de causalité entre cette défectuosité et le dommage.
Rien ne permet d'affirmer, ainsi que la société Volkswagen le soutient, que cette décision - qui répondait à une question préjudicielle de la Cour de cassation relative à l'interprétation de l'article 4 de la directive 85/374/CEE du Conseil, transposé à l'article 1386-9 devenu 1245-8 du Code civil - doit être limitée au domaine particulier des produits de santé dans lequel elle a été rendue.
Il s'ensuit que, sans méconnaître le régime probatoire prévu par l'article 1386-9 ancien du Code civil, le demandeur à l'action en responsabilité du fait d'un produit défectueux doit pouvoir recourir à des présomptions de fait ou faisceau d'indices, dont il appartient au juge d'apprécier la valeur et la force probante, lorsque la preuve scientifique du défaut et de son lien de causalité avec le dommage est impossible à rapporter.
Le premier juge sera donc approuvé en ce qu'il a énoncé que si la preuve de la défectuosité ne peut résulter de la seule implication du produit dans le dommage, elle peut en revanche être rapportée par des présomptions de fait, sauf à souligner que ces éléments factuels doivent être graves, précis et concordants.
En l'espèce, il est constant que l'expertise judiciaire n'a pas permis d'identifier de façon certaine l'origine de l'incendie et que différentes causes possibles ont été examinées.
Au regard des circonstances du sinistre, des conditions météorologiques, des témoignages recueillis auprès de deux voisines et des pompiers, ainsi que de ses propres constatations, l'expert a cependant pu déterminer que le départ de feu se situait dans la zone de stationnement du véhicule, sous l'auvent, et plus précisément à l'avant gauche du véhicule.
Pour autant, il n'a pas conclu que le point de départ de feu était localisé dans le véhicule. M. X indique à cet égard qu'il n'a pas été possible de déterminer " si ce départ provenait du capot moteur, de l'habitacle ou du sol de l'auvent lui-même ".
Par ailleurs, les différents experts qui se sont succédé n'ont pas constaté la moindre anomalie ou dysfonctionnement affectant le véhicule.
Ainsi que l'appelante le fait justement valoir, aucune défaillance des éléments électriques du véhicule n'a été décelée lors de la réunion d'expertise amiable du 3 novembre 2011 organisée par le Cabinet Gillet. Le procès-verbal d'expertise signé par les experts des parties évoque en outre la possibilité d'une cause extérieure au véhicule : " Le point de départ ne se situerait pas dans le compartiment moteur. Reste à définir des points susceptibles de départ de feu dans l'environnement proche (bâtiments) ".
M. C Z, expert automobile désigné en qualité de sapiteur avec pour mission de " dire si l'origine de l'incendie peut être due au véhicule ", confirme la localisation du départ de feu à l'avant gauche du véhicule et l'impossibilité de déterminer la cause de ce départ de feu. Il conclut également à l'absence d'élément de preuve pouvant justifier que l'incendie trouve son origine dans un dysfonctionnement du système électrique.
Il convient de souligner que le sapiteur n'émet aucune autre hypothèse susceptible d'impliquer l'un quelconque des organes du véhicule et, sur ce point, la société Garage Beyou fait justement observer que dans un véhicule, seul le système électrique constitue une énergie d'activation pouvant être à l'origine d'un incendie.
S'il est exact que l'heure de départ de feu coïncide avec l'horaire de disjonction automatique des circuits électriques du véhicule, soit dans la demi-heure suivant l'arrêt du moteur par M. B, aucune des pièces versées aux débats ne permet toutefois d'en déduire, ainsi que l'a fait le tribunal, qu'un " départ de feu dans le moteur aurait pu faire disjoncter le circuit électrique dans un temps très proche ". Au demeurant, cette hypothèse n'explique pas ce qui aurait pu provoquer un départ de feu dans le moteur.
Surtout, M. X indique clairement que si la coïncidence horaire lui est apparue initialement pertinente, et a d'ailleurs justifié le recours à un sapiteur, le rapport de ce dernier qui " élimine catégoriquement un départ de feu consécutif à un dysfonctionnement du véhicule lui-même et de ses équipements " l'a conduit en définitive à écarter la possibilité d'un incendie spontané dans le véhicule (pages 11 et 19 du rapport).
Il n'est donc pas établi, à ce stade, que l'origine du sinistre se situe dans l'un des organes du véhicule et l'expert indique explicitement, en conclusion de son rapport, que l'incendie pourrait avoir été causé par un produit déposé dans l'habitacle du véhicule ou stocké à l'extérieur, sous l'auvent.
Cette incertitude quant à la localisation exacte du départ de feu explique que d'autres causes extérieures ont été envisagées au cours des opérations d'expertises amiable et judiciaire, et que deux d'entre elles, invoquées à nouveau en cause d'appel par la société Volkswagen, ont donné lieu à de longs développements tant dans le rapport de M. X que dans le jugement attaqué.
Il a été suggéré, en effet, qu'outre l'hypothèse d'un dysfonctionnement dans le véhicule, qui ne peut être exclue catégoriquement compte tenu de l'incertitude susmentionnée, l'incendie aurait pu avoir été provoqué par un acte de malveillance ou par l'inflammation d'un produit stocké sous l'auvent ou dans l'habitacle.
Selon les énonciations du rapport d'expertise, l'hypothèse d'un acte malveillant n'a pas été retenue par la gendarmerie et aucune trace d'engin incendiaire n'a été retrouvée sur place. Toutefois, cette explication ne peut être totalement écartée, et l'expert la retient d'ailleurs en conclusion de son rapport, dès lors que, d'une part, M. X a constaté qu'une intrusion par le jardin de la voisine était possible nonobstant la présence d'une clôture et, d'autre part, la veille du sinistre, M. B avait eu une altercation avec un tiers au sujet de ses chiens.
L'hypothèse de l'inflammation d'un produit entreposé sous l'auvent ou dans l'habitacle, également retenue par l'expert, est confortée par deux éléments :
- compte tenu de son activité professionnelle, M. B, artisan couvreur, utilisait divers produits inflammables, voire très inflammables selon M. X, comme l'acétone, le benzène, le toluène, le méthanol, l'éthanol, le dichloroéthane, le xylène, l'essence, dont le point éclair est précisé dans le rapport d'expertise, ainsi que de très nombreux solvants de peintures, des colles, dégraissants, ...
- les conditions météorologiques, vérifiées par l'expert, étaient favorables à une activation par énergie solaire, avec une journée ensoleillée et chaude (près de 30°) et un vent du Sud soufflant fortement à 43 km/h.
Si aucun des produits mentionnés ci-dessus n'a été retrouvé lors des réunions d'expertise, M. X explique que des déplacements significatifs d'objets ont été effectués par les pompiers, pour des raisons de sécurité, mais également par la suite. Il précise que la configuration des lieux lors de son intervention n'était plus la même qu'au moment de la réunion d'expertise amiable du 3 novembre 2011, ainsi qu'il a pu le constater sur les photographies jointes au rapport de la société CEAMT, expert assistant la société Volkswagen (page 11 du rapport).
L'expert émet donc des doutes quant à l'emplacement précis de ces produits inflammables, tant dans le véhicule que sous l'auvent et dans les alvéoles du bâtiment principal (pages 12 et 20 du rapport).
Le premier juge a néanmoins écarté cette hypothèse au motif qu'elle était contredite par les constatations de l'expert et par les témoignages des voisines et des pompiers.
Ainsi, il considère que si des produits inflammables avaient été stockés dans le véhicule, le feu aurait dû se déclarer à l'arrière de celui-ci et non à l'avant gauche comme établi à l'issue des opérations d'expertise.
Cet argument repose cependant sur le postulat que M. B déposait nécessairement ses produits à l'arrière du véhicule. Or, rien ne permet d'affirmer qu'au moment de l'incendie, aucun produit inflammable ne se trouvait à l'avant du véhicule.
Par ailleurs, s'il est effectivement peu vraisemblable que M. B se soit garé sur des bidons de produits chimiques, ainsi que le fait observer le tribunal, il ne peut être exclu, en revanche, que des produits aient été entreposés à proximité immédiate du véhicule, côté gauche.
Enfin, après avoir relevé que l'auvent était dédié au stationnement du véhicule et était entièrement ouvert sur les quatre façades, le tribunal indique qu'il serait surprenant que M. B en ait fait le lieu de stockage des produits nécessaires à son activité alors qu'il disposait d'un préau et d'un bâtiment plus adapté à cet usage.
Mais s'il est exact que l'auvent reposait sur quatre poteaux en bois et était entièrement ouvert sur les quatre façades, le rapport d'expertise précise que " toutefois, la façade Ouest jouxte la façade Est du bâtiment principal " et que la couverture de l'auvent vient, côté Ouest, en débord jusqu'à la couverture en ardoises du bâtiment principal (page 14). Il ne serait donc pas anormal que des produits ou matériels divers aient été entreposés sous l'auvent, près de la façade Est du bâtiment principal.
En outre, la description des lieux par l'expert, utilement complétée par un croquis annexé au rapport, permet de constater que lorsque le véhicule est stationné sous l'auvent, avec l'avant dirigé vers le Nord (page 9 du rapport), son côté gauche longe la façade Est du bâtiment principal.
Dans ces conditions, l'expert a pu estimer, en conclusion de ses opérations, que " compte tenu de la chaleur, du soleil et du vent, une inflammation de produits inflammables stockés sous l'auvent ou dans l'habitacle sous l'effet du soleil peut être envisagée, tout comme la possibilité d'un geste malveillant de tiers ".
Dès lors et contrairement à ce qui a été jugé en première instance, il ne peut être déduit des différents éléments versés aux débats que l'hypothèse d'un embrasement dans le compartiment moteur du véhicule, qui n'est corroborée ni par les constatations effectuées sur ce véhicule ni même par la localisation du départ de feu, est plus vraisemblable que les hypothèses fondées sur une origine de l'incendie extérieure au véhicule.
Il résulte des développements qui précèdent que les indices factuels invoqués par M. B et la société Allianz ne constituent pas des présomptions graves, précises et concordantes de nature à établir le caractère défectueux du véhicule Volkswagen.
La preuve d'un défaut affectant ce véhicule n'étant pas rapportée, les demandes dirigées contre la société Volkswagen ne peuvent prospérer.
Le jugement sera donc infirmé sur ce point.
SUR LA GARANTIE DES VICES CACHÉS :
Comme indiqué précédemment, l'origine de l'incendie n'a pas pu être déterminée et l'existence d'un défaut dont aurait été atteint le véhicule Volkswagen vendu à M. B par la société Garage Beyou n'est pas établie, même par présomptions.
Il s'ensuit que les demandes de M. B et de la société Allianz fondées sur les dispositions de l'article 1641 du Code civil ne peuvent être que rejetées.
Le jugement dont appel sera par conséquent infirmé en ce qu'il a condamné la société Garage Beyou au paiement de diverses indemnités.
SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES :
La responsabilité de la société Volkswagen et la garantie de la société Garage Beyou ayant été écartées, les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens doivent être infirmées.
M. B et la société Allianz succombant en leurs prétentions supporteront les dépens de première instance et d'appel.
Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles qu'elles ont exposés.
Par ces motifs, LA COUR, Infirme le jugement rendu le 29 mars 2016 par le tribunal de grande instance de Saint Brieuc en toutes ses dispositions, Statuant à nouveau, Déboute M. Y B et la société Allianz de toutes leurs prétentions, Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne M. Y B et la société Allianz aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile par l'avocat qui en a fait la demande, Rejette toutes demandes plus amples ou contraires.