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Décisions

ADLC, 13 juin 2019, n° 19-DCC-113

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

Relative à la prise de contrôle conjoint par les sociétés Cosson et Ensis Groupe de la société Terzeo

ADLC n° 19-DCC-113

13 juin 2019

L'Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 6 mai 2019 relatif à la prise de contrôle conjoint par les sociétés Cosson et Ensis Groupe de la société Terzeo, formalisée par un protocole d'accord du 21 décembre 2018 ; Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Vu les éléments complémentaires transmis par les parties notifiantes au cours de l'instruction ;

Adopte la décision suivante :

I. Les entreprises concernées

1. Ensis Groupe (" Ensis ") est une société par actions simplifiée, dont le capital est détenu [confidentiel]. Outre la société Terzeo, cible de la présente opération, Ensis contrôle les sociétés suivantes : Clamens, principalement active dans la production de granulats secondaires par concassage de blocs de béton issus de la démolition, le recyclage de boues de béton et la valorisation de mâchefers *1 ; STPS, qui réalise principalement des travaux de pose de canalisations et de branchements pour les réseaux de gaz, d'électricité, d'eau et de chauffage et fournit les services accessoires à ces travaux ; Centrale du Plastique, qui effectue du négoce de matières plastiques ; et Canetud, qui est un bureau d'étude et de conseil auprès des entreprises.

2. Cosson est une filiale à 100 % de la société Colas IDFN, elle-même contrôlée par la société Colas (" Colas "), cotée sur Euronext Paris. Colas est ultimement contrôlée par le groupe Bouygues, lequel est actif dans les trois secteurs suivants : les médias (via la société TF1), les télécommunications (via la société Bouygues Télécom) et la construction, et plus particulièrement les bâtiments, les travaux de génie civil et l'énergie et les services (via la société Bouygues Construction), le développement de la propriété (via la société Bouygues Immobilier) et, enfin, les routes (via la société Colas). Cosson est plus spécifiquement active dans les travaux publics, le terrassement, la dépollution de sols, les centres d'enfouissement, le recyclage et le négoce de matériaux, la déchetterie professionnelle et la location de matériel.

3. Terzeo est une filiale à 100 % d'Ensis, qui, à ce jour, n'a pas d'activité sur les marchés. Créée au premier semestre 2013, elle a pour objet d'exploiter une plateforme de tri et de valorisation de terres issues de chantiers des bâtiments et travaux publics (" BTP "), associée à une installation de stockage de type " Installation de Stockage de Déchets Dangereux " (" ISDD ") située sur les communes limitrophes de Villenoy (77) et d'Isles-lès-Villenoy (77). Disposant jusqu'à présent d'un capital de 10 000 euros, Terzeo ne pourra débuter ses activités qu'après une augmentation de capital, objet de la présente opération, conformément à la demande de la préfecture de Seine-et-Marne dans le cadre de la délivrance d'un arrêté l'autorisant à exploiter ses installations.

II. L'opération

4. L'opération notifiée est formalisée par un protocole d'accord entre Ensis et Cosson en date du 21 décembre 2018, lequel prévoit l'entrée au capital de Terzeo de Cosson, jusqu'alors exclusivement détenue par Ensis, au travers d'une première augmentation de capital permettant à cette dernière d'en détenir [...] %, les [...] % restant étant conservés par Ensis. Si une seconde augmentation de capital de Terzeo est également prévue, [confidentiel], conformément au protocole d'accord précité.

5. L'opération consiste donc en le passage d'un contrôle exclusif de Terzeo à un contrôle conjoint exercé par Ensis et Cosson, avec maintien du contrôle de l'actionnaire historique. Ce type de changement de contrôle doit faire l'objet d'une appréciation particulière par l'Autorité de la concurrence, à la lumière de l'arrêt Austria Asphalt de la Cour de justice de l'Union européenne *2. Le test applicable en l'espèce est celui de la création d'une entreprise commune de plein exercice, tel qu'exposé aux paragraphes 55 et suivants des lignes directrices de l'Autorité de la concurrence (ci-après, " l'Autorité ") relatives au contrôle des concentrations.

6. En premier lieu, Cosson doit disposer, conjointement avec Ensis, d'un contrôle sur Terzeo. Ce point est prouvé par le projet de statuts annexé au protocole d'accord du 21 décembre 2018. En effet, Cosson et Ensis détiendront [confidentiel] % du capital et des droits de vote de Terzeo. Le projet de statuts prévoit que son président et son directeur de centre seront nommés, chacun pour une durée de trois ans renouvelables, en alternance par Cosson et Ensis, le premier président étant désigné par Cosson et le premier directeur de centre par Ensis. Il prévoit également qu'un comité de surveillance sera mis en place et compétent notamment pour la définition de la stratégie et la surveillance de la gestion de Terzeo, l'approbation du budget, des investissements significatifs ne figurant pas au budget, et toute décision d'embauche, recrutement ou licenciement dès lors que la rémunération dépasse un certain plafond. Ce comité, qui sera composé de quatre membres désignés à parité par Cosson et Ensis, ne pourra statuer qu'en présence de la totalité des membres désignés. Les décisions prises par ce comité seront votées à la majorité simple et, en cas de blocage sur un projet de décision importante (telles que celles énumérées ci-avant), une procédure de règlement des désaccords, dans laquelle aucun des associés ne disposera d'une voix prépondérante, prévoit l'examen de la situation conflictuelle au cours d'une réunion spécifique du comité de surveillance devant se tenir dans un délai de cinq jours ouvrés en vue de trouver une décision consensuelle, puis, le cas échéant le recours à un tiers départiteur si le désaccord persiste. Compte tenu de ces éléments, Cosson et Ensis détiendront un contrôle conjoint sur Terzeo.

7. Par ailleurs, Terzeo doit bénéficier de ressources suffisantes pour opérer de façon indépendante sur le marché au terme d'une phase de démarrage, prévu en 2020, lorsqu'elle débutera son activité en recevant et en traitant des terres polluées. À cette fin, Terzeo devra en particulier avoir préalablement obtenu une autorisation d'exploitation de la préfecture de Seine-et-Marne (77) et avoir bénéficié des investissements nécessaires à son activité. Selon le protocole d'accord, Terzeo disposera au-delà du terme de cette phase de démarrage d'une autonomie financière lui permettant de procéder à ses propres recrutements. Elle disposera ainsi d'un personnel d'encadrement qui se consacrera à ses activités quotidiennes et qui sera responsable de ses politiques tarifaires, commerciales et marketing.

8. Terzeo doit également disposer de ses propres ressources financières. À cet égard, elle bénéficiera d'un investissement [confidentiel] réalisé partiellement au travers d'une seconde augmentation de capital et via des financements bancaires ou intragroupes et sera rémunérée au titre de son activité commerciale. Par ailleurs, elle disposera des actifs essentiels à son activité, en particulier de l'outil industriel constitué par une plateforme de tri et de valorisation de terres issues de chantiers du BTP et une installation de stockage de type ISDD et une licence de savoir-faire l'autorisant à exploiter le procédé de valorisation des terres polluées qui sera utilisé dans ses installations.

9. De plus, Terzeo doit être autonome vis-à-vis de ses sociétés-mères. Or, au-delà du contrôle exercé par ses sociétés-mères et des compétences réservées au comité de surveillance conformément au protocole d'accord et au projet de statuts, ses actionnaires se limiteront à exercer un rôle d'assistance, lequel sera formalisé au moyen de conventions d'assistance, et limité à des aspects purement préparatoires ou d'appui administratif de l'activité de Terzeo. Par ailleurs, selon les parties notifiantes, après la phase de démarrage, Terzeo réalisera son chiffre d'affaires pour partie avec des tiers et pour partie avec ses sociétés-mères dans des conditions commerciales normales et, " que ce soit pour l'accueil de terres ou pour la vente de granulats, les relations entre Terzeo et ses mères (ou les sociétés qui appartiennent aux groupes de ses mères) seront véritablement de type commercial " *3. Par conséquent, les relations de vente ou d'achat avec ces dernières ne seront pas de nature à remettre en cause l'autonomie commerciale de Terzeo.

10. En outre, Terzeo sera active sur différents marchés dans la mesure où elle a pour objet l'exploitation de son outil industriel. Elle disposera également de la faculté de se réaliser des acquisitions et sera en mesure d'engager toutes les opérations de type industriel et commercial, notamment afin de favoriser la réalisation de son objet social.

11. Enfin, Terzeo, qui est constituée pour une durée de 99 ans, disposera notamment de la licence de savoir-faire qui lui est consentie pendant toute la durée d'exploitation et des autorisations administratives requises pour exploiter ses installations pendant 30 ans.

12. Il résulte de l'ensemble de ces éléments qu'à l'issue de l'opération Terzeo remplira tous les critères d'une entreprise commune de plein exercice, au sens du droit des concentrations.

13. En ce qu'elle se traduit par la prise de contrôle conjoint par les sociétés Cosson et Ensis Groupe de la société Terzeo qui remplit les critères d'une entreprise commune de plein exercice, l'opération notifiée constitue une concentration au sens de l'article L. 430-1 du code de commerce.

14. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d'affaires hors taxes total sur le plan mondial de plus de 150 millions d'euros (Bouygues : environ 33 milliards d'euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2017 ; Ensis : 50,9 millions d'euros pour le même exercice). Chacune de ces entreprises a réalisé en France un chiffre d'affaires supérieur à 50 millions d'euros (Bouygues : environ 21 milliards d'euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2017 ; Ensis : 50,9 millions d'euros pour le même exercice). Compte tenu de ces chiffres d'affaires, l'opération ne relève pas de la compétence de l'Union européenne. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l'article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatifs à la concentration économique.

III. Délimitation des marchés pertinents

15. À l'issue de l'opération, Terzeo sera active dans les secteurs de la collecte de terres polluées. Les terres polluées sont assimilables à des déchets. Au sens du code de l'environnement, un déchet peut être défini comme " tout résidu d'un processus de production, de transformation ou d'utilisation, toute substance, matériau, produit ou plus généralement tout bien meuble abandonné ou que son détenteur destine à l'abandon " *4. Les terres polluées, qui sont généralement issues de l'activité des opérateurs du BTP réalisant des travaux de terrassement ou des activités de réhabilitation de sites, industriels notamment, peuvent être assimilées à des résidus issus de processus de production ou de transformation et destinés à l'abandon. Il ressort d'ailleurs des orientations et éléments d'appréciation publiés par le ministère en charge des risques sanitaires liés à l'environnement, des déchets et des pollutions diffuses que " [l]es terres évacuées du site de leur excavation, qu'elles soient polluées ou non, prennent le statut de déchet " *5. Si les terres ne sont pas issues d'un site pollué, elles sont considérées comme des déchets inertes. Si elles contiennent des polluants, elles ont le statut de déchets non dangereux ou dangereux.

16. Par ailleurs, Terzeo produira, à partir de ces terres polluées préalablement collectées, des granulats. Les granulats sont des matériaux d'un diamètre de 0 à 150 millimètres. Ils peuvent être utilisés soit comme produits finis (pour le ballast des voies ferrées par exemple), soit comme matière première dans la production de matériaux de construction, tels que le béton prêt à l'emploi, les enrobés, la chaux et le ciment *6.

17. Compte tenu des activités respectives de Terzeo et de ses société-mères, la présente opération emporte des chevauchements d'activité dans le secteur de la collecte de terres polluées, dans lequel interviennent Terzeo et Cosson, ainsi que dans le secteur de la production de granulats, dans lequel sont actives l'ensemble des parties.

18. Sont également concernées par l'opération, au titre des effets verticaux, les activités de Colas, dans les secteurs des enrobés et des travaux routiers, qui se situent en aval du secteur de la production de granulats.

19. Enfin, les sociétés-mères étant deux producteurs de granulats, le risque de coordination de leur comportement concurrentiel sera examiné.

A. LES MARCHÉS DE SERVICE ET DE PRODUITS

1. LA COLLECTE DE TERRES POLLUÉES

20. Les autorités de concurrence considèrent que la gestion des déchets comprend deux étapes principales : la collecte et le traitement, ce dernier pouvant conduire soit à l'élimination du déchet (enfouissement ou incinération), soit à sa valorisation au sens large (matière ou énergie) *7.

21. Il existe autant de marchés de services que de grands types de déchets : les déchets dangereux ou déchets industriels spéciaux, les déchets non dangereux ou déchets banals et les déchets spécifiques *8.

22. Les terres polluées n'ont jamais fait l'objet d'une qualification par les autorités de concurrence au regard de cette délimitation des marchés de la collecte des déchets.

23. Toutefois, les autorités nationales de concurrence considèrent que les déchets spécifiques sont des déchets faisant l'objet de réglementations spéciales *9, tels que les D3E *10, les véhicules hors d'usage (" VHU ") ou l'amiante ou encore les déchets d'activités de soins à risque infectieux (" DASRI ") *11. Elles ont ainsi envisagé l'existence d'un marché distinct pour chaque catégorie de déchet spécifique, compte tenu des fortes différences de leurs caractéristiques physiques.

24. En l'espèce, les parties notifiantes considèrent que la collecte de terres polluées devrait être distinguée de la collecte d'autres types de déchets, la demande comme l'offre de collecte de terres polluées étant spécifiques *12. Du point de vue de la demande, les producteurs et les détenteurs de terres polluées doivent de se défaire des terres produites à l'occasion de leurs activités d'excavation ou de réhabilitation de sites polluées car, dans la majeure partie des cas, ces terres ne peuvent pas être réutilisées directement sur leurs chantiers. Or, les producteurs et les détenteurs de terres polluées sont, en application de l'article L. 541-2 du code de l'environnement, responsables de la gestion de leurs déchets jusqu'à leur élimination ou leur valorisation finale. En confiant leurs terres à un collecteur et en le rémunérant pour cette prestation de collecte, les producteurs et les détenteurs de terres polluées remplissent leur obligation légale.

25. Par ailleurs, en cas d'augmentation légère mais permanente des prix du service de collecte des terres polluées, les demandeurs ne pourraient pas se tourner vers d'autres services que ceux offerts par les collecteurs de terres polluées, puisque seuls ces derniers sont en mesure de permettre aux producteurs et détenteurs de terres polluées de se défaire de leurs terres. En effet, du point de vue de l'offre, la collecte de terres polluées requiert des moyens matériels, techniques et humains spécifiques et cette activité est sujette à certains régimes d'autorisation, en particulier l'autorisation de transport de produits dangereux ou non-dangereux et l'autorisation des installations du collecteur au titre de la réglementation des Installations Classées pour la Protection de l'Environnement.

26. Ainsi, à l'instar de l'amiante, les terres polluées peuvent être considérées comme étant un déchet spécifique.

27. L'analyse concurrentielle sera donc menée sur les marchés de la collecte de terres polluées.

2. LES GRANULATS

28. Les granulats peuvent être classés, en fonction de leur origine et de leur mode d'élaboration, en produits naturels, lorsqu'ils sont issus de roches meubles ou massives (les " granulats primaires "), et en produits artificiels lorsqu'ils proviennent du recyclage ou de la transformation de sous-produits de l'industrie (les " granulats secondaires ").

29. Dans une précédente décision, l'Autorité avait analysé les conséquences d'une concentration sur le marché des granulats primaires car une seule des parties à l'opération proposait des granulats secondaires et que ceux-ci ne représentaient, en 2008, qu'une part limitée dans l'ensemble de la production française de granulats *13. En outre, l'Autorité avait réalisé une analyse concurrentielle sur le marché global des granulats *14.

30. En l'espèce, même s'il apparaît que la part représentée par les granulats secondaires est désormais significative, particulièrement en Île-de-France où, en 2014, près d'un tiers des granulats produits étaient de type secondaire *15, l'analyse concurrentielle sera menée sur le segment des granulats primaires, où se chevauchent principalement les activités des parties. En tout état de cause, une analyse concurrentielle menée sur un marché global de la production de granulats ne modifie pas les conclusions de l'instruction.

3. LES ENROBÉS

31. Les enrobés sont des matériaux composites généralement utilisés dans la construction de revêtements routiers, de parkings et de pistes d'aéroport. Les enrobés sont généralement composés à 95 % de granulats et à 5 % de bitume. Il existe différents types d'enrobés : les enrobés à chaud, produits en chauffant le liant bitumeux, le " mastic asphalt " présentant une teneur en bitume supérieure à celle des enrobés à chaud, les enrobés tièdes, produits à une moindre température que les enrobés à chaud et les enrobés à froid, produits en émulsionnant le bitume dans de l'eau avant de le mélanger avec les granulats. Ces différents types d'enrobés sont toutefois produits dans les mêmes usines. La principale différence entre ces quatre types d'enrobés réside dans la distance maximale pouvant être parcourue entre leur lieu de production et leur lieu d'utilisation.

32. Les autorités de concurrence ont retenu l'existence d'un marché des enrobés distinct d'autres types de matériau de pavement *16. L'Autorité a en outre envisagé la possibilité d'une segmentation du marché des enrobés selon leurs modes de production (à partir de centrales fixes ou mobiles) *17.

33. En l'espèce, la question de la définition exacte du marché de la production d'enrobés peut être laissée ouverte, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurant inchangées, quelle que soit la délimitation retenue.

4. LES TRAVAUX ROUTIERS

34. La construction de routes est une spécialité de génie civil concernant toutes les infrastructures de circulation routière (autoroutes ou routes principales, aéroports, rues pavées, etc.). Les enrobés et le béton sont les matériaux de construction principalement utilisés pour la construction de routes. Les couches inférieures des routes (couches de fondation et de base) sont composées de granulats ou d'un mélange de ciment et de bitume, tandis que les couches de surface peuvent être composées d'enrobés.

35. Selon la pratique décisionnelle nationale *18, le marché des travaux routiers inclut la construction et l'entretien des routes. En effet, les travaux d'entretien de chaussées impliquant de faire appel aux mêmes corps de métiers que lors des travaux de construction, et les principaux opérateurs de travaux routiers proposent tant des services de construction que d'entretien des routes.

36. En outre, l'existence d'un marché distinct des travaux autoroutiers a été envisagée, dans la mesure où la construction de tronçons autoroutiers serait soumise à des contraintes techniques et de délais particulières *19.

37. En l'espèce, la question de la définition exacte du marché des travaux routiers peut être laissée ouverte, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurant inchangées, quelle que soit la délimitation retenue.

B. LES MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES

1. LA COLLECTE DE TERRES POLLUÉES

38. S'agissant des marchés de la collecte des déchets spécifiques, les autorités nationales de concurrence ont retenu une dimension départementale *20.

39. En l'espèce, selon les parties notifiantes, la délimitation géographique des marchés de la collecte de terres polluées est locale, compte tenu des caractéristiques de ce type de déchet. Il s'agit en effet d'un matériau pondéreux, volumineux et de faible valeur, avec d'importants coûts de transport qui limitent le rayon de leur collecte. Elles considèrent que la dimension géographique du marché de la collecte de terres polluées s'établirait ainsi au niveau départemental, voire régional.

40. En l'espèce, la question de la définition géographique des marchés de la collecte de terres polluées peut être laissée ouverte dans la mesure où les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurent inchangées, quelle que soit la délimitation retenue.

2. LES GRANULATS

41. Le marché géographique de la production de granulats est également structuré par ses coûts de transport. À l'instar des terres polluées, les granulats sont des produits pondéreux, volumineux et de faible valeur, pour lesquels les coûts de transport constituent une part importante du prix livré. Ainsi, les granulats d'une carrière sont généralement livrés à proximité de cette dernière. Le rayon de la zone de livraison d'une carrière varie toutefois selon le maillage des carrières sur le territoire national, mais également selon le réseau et les conditions de transport.

42. Les autorités de concurrence considèrent ainsi que le marché des granulats revêt une dimension locale *21. À l'occasion d'une précédente opération dans ce secteur, l'Autorité avait mené son analyse concurrentielle sur des zones de 40 kilomètres de rayon autour de chacun des sites de production de granulats de la cible, compte tenu de la répartition géographique des achats ou ventes de la plupart des demandeurs ou producteurs de granulats, mais également du maillage en carrières du territoire français *22.

43. Selon les parties notifiantes, les carrières qu'elles possèdent dans la zone où Terzeo est active ont un rayon d'action limité géographiquement (qu'il s'agisse des livraisons qu'elles effectuent ou de la localisation des clients qui viennent retirer les granulats à la carrière). Elles constatent notamment que les granulats produits au sein de la carrière CMJC située à Jouy-le-Châtel (77) sont majoritairement destinées au département de la Seine-et-Marne (77), le reste des granulats produits étant réparti entre les départements de l'Île-de-France, Yvelines (78) excepté, ou dans les départements limitrophes de la Seine-et-Marne (77), à savoir l'Aisne (02), la Marne (51) et l'Oise (60).

44. En l'espèce, conformément à la pratique décisionnelle de l'Autorité et compte tenu des éléments fournis par les parties notifiantes, l'analyse concurrentielle sera menée dans des zones géographiques correspondant à un rayon de 40 kilomètres autour du site de production de Terzeo.

3. LES ENROBÉS

45. Les enrobés sont des produits périssables, qui doivent être transportés dans des conteneurs chauffés spéciaux afin d'éviter leur durcissement avant leur livraison et leur utilisation. Plus leur température de pose est faible, plus les enrobés peuvent être transportés sur de longues distances. En tout état de cause, les distances parcourues sont limitées. Selon la pratique décisionnelle nationale *23, les marchés de la production d'enrobés ont une dimension locale correspondant à une zone de 40 kilomètres autour des centrales de production d'enrobés.

46. Il n'y a pas lieu de revenir sur cette définition géographique à l'occasion de l'examen de la présente opération.

4. LES TRAVAUX ROUTIERS

47. Les autorités de concurrence ont analysé les marchés de travaux routiers aux niveaux national et local *24. Cependant, dans une affaire où le marché des travaux routiers était uniquement concerné au titre des effets verticaux de l'opération entre les marchés des granulats et des travaux routiers, la cible n'étant pas présente sur ces derniers marchés, et où l'approvisionnement en granulats des opérateurs de travaux routiers se faisait localement en raison de l'importance des coûts de transports, l'Autorité avait considéré que les marchés des travaux routiers devaient être analysés au niveau départemental *25.

48. En l'espèce, Terzeo ne sera pas active sur les marchés des travaux routiers, ces marchés n'étant concernés par l'opération qu'au titre de l'activité de Colas en tant qu'opérateur de travaux routiers. Par conséquent, l'analyse concurrentielle sera menée au niveau du département de la Seine-et-Marne.

IV. Analyse concurrentielle

49. Compte tenu des activités respectives des parties, l'analyse des effets horizontaux de l'opération sera effectuée sur les marchés de la collecte de terres polluées et de la production de granulats (A).

50. L'opération est également susceptible d'entraîner des effets verticaux sur les marchés de la production d'enrobés et des travaux routiers, en sus des marchés de la production de granulats (B), ainsi qu'un risque de coordination des sociétés-mères de Terzeo sur les marchés sur lesquels elles sont simultanément actives (C).

A. ANALYSE DES EFFETS HORIZONTAUX

1. LA COLLECTE DE TERRES POLLUÉES

51. Seules Terzeo et sa société-mère Cosson seront simultanément actives sur le marché de la collecte de terres polluées, en Île-de-France. Leurs installations respectives sont situées sur les communes limitrophes de Villenoy (77) et Isles-lès-Villenoy (77) pour la première et à Louvres (95) pour la seconde.

52. Les parties notifiantes n'ont pas été en mesure d'estimer les parts de marché des différents opérateurs au niveau national, tout en soulignant que les parts de marché de Terzeo et de Cosson seraient, en tout état de cause, limitées. En effet, Cosson est un acteur de taille modeste au niveau national, tandis que Terzeo ne dispose que d'un seul site à partir duquel elle pourra opérer ses activités de collecte. Or, sur le marché de la collecte de terres polluées en France, il existe d'importants opérateurs, tels que les groupes Véolia et Suez, qui disposent de nombreuses installations.

53. Au niveau de l'Île-de-France, seule région où les activités des parties se chevauchent, la part de marché cumulée de Terzeo et de Cosson sera comprise, à l'issue de l'opération, entre [5-10]% (sur la base d'une estimation de la première année d'activité de Terzeo) et [5-10]% (sur la base d'une prévision à cinq ans de l'activité de Terzeo prenant en compte les données de marché de 2018) *26. Les parties resteront confrontées à de nombreux concurrents actifs en Île-de-France, en particulier les sociétés Veolia, Suez, Biogénie, Vinci et Solvalor.

54. Enfin, les activités des parties ne se chevauchent pas à l'échelon départemental, de sorte que l'opération n'y produira aucun effet sensible.

55. Compte tenu de ces éléments, l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur les marchés de la collecte de terres polluées.

2. LES GRANULATS

56. Le site de production de Terzeo est situé sur les communes de Villenoy et d'Isles-lès-Villenoy (77). Ses sociétés-mères (et les groupes auxquels elles appartiennent) exploitent également des sites de production de granulats dans une zone de 40 kilomètres autour du site de Terzeo. Cosson et d'autres filiales de Colas disposent de sites de production situés à Jouy-le-Chatel (77) *27, Bonneuil-sur-Marne (94) *28 et Louvres (95). Ensis, quant à elle, dispose de sites de productions à Villeparisis (77) et Trocy-en-Multien (77).

57. Sur le marché local de la production de granulats (tous types confondus), dont la taille totale est estimée à plus de 2,8 millions de tonnes par les parties *29, la part de marché détenue par Terzeo, à l'issue de l'opération, sera comprise entre [0-5] % (sur la base d'une estimation de la première année d'activité de Terzeo) et [0-5] % (sur la base d'une prévision à cinq ans de l'activité de Terzeo, prenant en compte les données de marché de 2018) *30. Au regard du pouvoir de marché global de l'entité économique formée avec les sociétés-mères (Colas et Ensis), la part de marché cumulée des parties sera comprise entre [30-40] % et [30-40] %.

58. Sur le segment de la production locale de granulats primaires, dont la taille totale est estimée à plus d'un million de tonnes par les parties notifiantes *31, la part de marché détenue par Terzeo, qui ne produira que des granulats de type primaires, sera comprise entre [5-10] % et [5-10] %. La part de marché cumulée des parties sera quant à elle comprise entre [20-30] % et [20-30] %.

59. Les parties feront face à de nombreux concurrents actifs dans la zone de 40 kilomètres autour du site de production de Terzeo, en particulier les sociétés Eurovia, Yprema, GSM, Cemex, Sablière de Meaux, SNB, RFM, A2C Granulats, Sifral, Lafarge et Syneos, qui ont produit individuellement entre 70 000 et 320 000 tonnes de granulats en 2018. En ce qui concerne les seuls granulats de type primaires, les sociétés GSM, Cemex, Sablière de Meaux, A2C Granulats et Lafarge ont produit individuellement entre 70 000 et 245 000 tonnes, en 2018, dans cette même zone.

60. Compte tenu de ces éléments, l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur les marchés de la production de granulats.

B. ANALYSE DES EFFETS VERTICAUX

61. Une concentration verticale peut restreindre la concurrence en rendant plus difficile l'accès aux marchés sur lesquels la nouvelle entité sera active, voire en évinçant potentiellement les concurrents ou en les pénalisant par une augmentation de leurs coûts. Ce verrouillage peut viser les marchés aval, lorsque l'entreprise intégrée refuse de vendre un intrant à ses concurrents en aval (verrouillage du marché des intrants), ou les marchés amont, lorsque la branche aval de l'entreprise intégrée refuse d'acheter les produits des fabricants actifs en amont et réduit ainsi leurs débouchés commerciaux (verrouillage de l'accès à la clientèle). Cependant, la pratique décisionnelle des autorités de concurrence écarte en principe les risques de verrouillage lorsque la part de l'entreprise issue de l'opération sur les marchés concernés ne dépasse pas 30 %.

62. Cosson fait partie d'un groupe déjà verticalement intégré dans la mesure où Colas regroupe différentes filiales opérant dans les secteurs suivants : concassage de blocs de bétons issus de l'activité de déconstruction et pouvant servir à la production de granulats de type secondaires (via la société Premys), production d'enrobés (via la société Colas IDFN, directement ou via sa filiale SPME), travaux routiers (via la société Colas IDFN) *32. Ensis, qui contrôlait exclusivement Terzeo avant l'opération, n'est présente ni en amont ni en aval des activités de Terzeo *33.

63. En l'espèce, Terzeo sera notamment active sur les marchés de la production de granulats. Compte tenu du fait que Colas est également active sur ces marchés en tant qu'acheteur, l'opération renforcera l'intégration verticale entre, d'une part, les activités de production de granulats de Terzeo et de Colas (via Cosson et d'autres filiales) et, d'autre part, les activités de production d'enrobés et les activités de travaux routiers de Colas (via la société Colas IDFN) *34.

64. Les granulats susceptibles d'être vendus par Terzeo et par Cosson et les autres filiales de Colas ne représenteront qu'une part cumulée limitée, inférieure à 30 % *35, du volume total de production de granulats dans la zone de 40 kilomètres autour de Terzeo. Par ailleurs, les parts de marché détenues par Colas sur les marchés aval sont inférieures à 30 %. Ainsi, Colas détenait une part de marché estimée à [20-30]% (en valeur) sur le marché aval de la production d'enrobés en 2017 *36 et à [10-20] %(en valeur) sur le marché aval des travaux routiers en 2018 *37.

65. Il résulte de ce qui précède que l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets verticaux sur l'ensemble de ces marchés.

C. ANALYSE DU RISQUE DE COORDINATION ENTRE LES SOCIÉTÉS-MÈRES

66. La création d'une entreprise commune est également susceptible d'inciter ses sociétés-mères à coordonner leurs activités sur les marchés sur lesquels elles restent simultanément présentes. Les lignes directrices précitées prévoient qu'un risque d'atteinte à la concurrence résultant de la coordination entre sociétés-mères peut être envisagé si elles restent simultanément présentes sur les mêmes marchés ou sur des marchés verticalement reliés à ceux sur lesquels l'entreprise commune opère. Une telle atteinte ne peut, en outre, être exclue a priori lorsque les sociétés-mères sont simultanément présentes sur un marché distinct de celui de l'entreprise commune, le contact multi-marché entre des entreprises étant également susceptible de faciliter la coordination de leurs comportements concurrentiels.

67. Conformément à la pratique décisionnelle de l'Autorité, exposée aux paragraphes 526 et suivants des lignes directrices précitées, le risque de coordination du comportement concurrentiel des sociétés-mères est analysé au regard de trois critères cumulatifs : l'existence d'un lien de causalité entre la création de l'entreprise commune et l'apparition du risque de coordination, le degré de vraisemblance de la coordination qui doit présenter un intérêt économique pour les sociétés-mères et l'effet sensible sur la concurrence de la coordination.

68. En l'espèce, les sociétés-mères de Terzeo opèrent simultanément sur les marchés locaux de la production de granulats, pour lesquels il convient d'examiner si l'opération n'est pas de nature à créer un risque de coordination entre leur comportement concurrentiel.

69. De pratique constante, les autorités de concurrence considèrent que l'activité de l'entreprise commune doit revêtir une importance essentielle pour les marchés sur lesquels les sociétés-mères sont actives afin d'établir un lien causal suffisant pour apprécier l'existence d'un risque de coordination du comportement concurrentiel des sociétés-mères et la création de l'entreprise commune. Cependant, il ne peut être exclu que, dans certains cas, d'autres facteurs puissent être à l'origine d'une interdépendance accrue entre les maisons-mères. L'Autorité a ainsi considéré, outre le facteur de proximité des marchés, d'autres facteurs tels que les liens financiers tissés dans le cadre de la création de la filiale entre les sociétés-mères ou le fait que les produits de l'entreprise commune soient un facteur de production essentiel dans l'activité des sociétés-mères sur plusieurs de leurs marchés, par exemple *38.

70. Du fait de leur caractère local, les marchés de la production de granulats, et en particulier le marché sur lequel opère Terzeo, sont peu susceptibles de revêtir une importance essentielle pour les sociétés-mères. En outre, l'activité de Terzeo n'est pas essentielle pour celles-ci, qui développent de nombreuses autres activités : le chiffre d'affaires de Terzeo *39 représentera ainsi moins de [0-5] % du chiffre d'affaires réalisé par Bouygues et moins de [10-20] % du chiffre d'affaires réalisé par Ensis en France *40. En considérant plus spécifiquement les activités franciliennes des sociétés-mères de Terzeo, le chiffre d'affaires de l'entreprise commune représentera moins de [0-5] % du chiffre d'affaires réalisé par Colas *41 et moins de [10-20] % du chiffre d'affaires réalisé par Ensis *42, en Île-de-France. Il convient également de noter que les granulats produits par Terzeo ne seront pas, en toute hypothèse, un facteur de production essentiel dans l'activité des sociétés-mères sur les marchés où elles se concurrencent.

71. Compte tenu des éléments qui précèdent et sans qu'il soit nécessaire d'analyser les autres critères dès lors que le lien de causalité entre la création de l'entreprise commune et le risque de coordination du comportement concurrentiel des sociétés-mères n'est pas établi, l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence sur les marchés concernés.

DÉCIDE

Article unique : L'opération notifiée sur le numéro 19-093 est autorisée.

NOTES

1 Les mâchefers sont les résidus solides issus de la combustion du charbon ou du coke dans les fours industriels ou de celle des déchets urbains dans les usines d'incinération.

2 Arrêt de la Cour (cinquième chambre), Austria Asphalt, affaire C-248/16, 7 septembre 2017.

3 Réponses des parties notifiantes au questionnaire du 17 avril 2019.

4 II de l'article L. 541-1 du code de l'environnement.

5 Modalités d'application de la nomenclature des installations classées pour le secteur de la gestion des déchets, ministère de la transition écologique et solidaire, 25 avril 2017.

6 Décision de l'Autorité n° 10-DCC-98 du 20 août 2010 relative à la prise de contrôle exclusif d'actifs du groupe Tarmac par la société Eurovia.

7 Décisions de l'Autorité n° 17-DCC-209 du 21 décembre 2017 relative à la création d'une entreprise commune par les sociétés La Poste et Suez RV France, n° 17-DCC-40 du 29 mars 2017 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Coved par la société Paprec Group, n° 16-DCC-71 du 17 mai 2016 relative à la prise de contrôle exclusif de la société SLG Recycling Finance par la société Derichebourg Environnement, n° 14-DCC-108 du 4 août 2014 relative à la prise de contrôle exclusif d'Esterra par Veolia propreté, n° 13-DCC-44 du 4 avril 2013 relative à la création d'une entreprise commune par les sociétés SNN et Recycling Invest et n° 10-DCC-114 du 10 septembre 2010 relative à la prise de contrôle exclusif de la société ISS Environnement par la société Paprec France, ainsi que la lettre du ministre C2007-168 du 23 janvier 2008 relative à une concentration dans le secteur de la gestion et du traitement des déchets et les décisions de la Commission européenne n° IV/M.916 du 5 juin 1997 Lyonnaise des Eaux / Suez et n° IV/M.1059 du 19 décembre 1997 Suez Lyonnaise des Eaux / BFI.

8 Id.

9 Décisions de l'Autorité n° 17-DCC-209 du 21 décembre 2017 relative à la création d'une entreprise commune par les sociétés La Poste et Suez RV France, n° 17-DCC-40 du 29 mars 2017 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Coved par la société Paprec Group, n° 13-DCC-44 du 4 avril 2013 relative à la création d'une entreprise commune par les sociétés SNN et Recycling Invest etlettre du ministre de l'économie, des finances et de l'emploi C2007-168 du 23 janvier 2008, aux conseils de la société Veolia Propreté SA, relative à une concentration dans le secteur de la gestion et traitement des déchets.

10 Les D3E sont des déchets issus des équipements fonctionnant grâce au courant électrique ou à un champ électromagnétique.

11 Décision de l'Autorité n° 18-D-17 du 20 septembre 2018 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de l'élimination des déchets d'activités de soins à risque infectieux en Corse.

12 Points 11 et suivants du formulaire de notification.

13 Décision de l'Autorité n° 10-DCC-98 du 20 août 2010 relative à la prise de contrôle exclusif d'actifs du groupe Tarmac par la société Eurovia.

14 Il peut toutefois être relevé l'existence d'une substituabilité imparfaite entre les différents types de granulats (alluvionnaires, éruptifs et calcaires). Ainsi, l'Autorité avait souligné, dans la décision n° 10-DCC-98 précitée, que les granulats se caractérisent en premier lieu par le fait que ce sont des matériaux très pondéreux et de faible valeur, dès lors les coûts de transport représentent une très forte part du prix total des granulats et que la plupart des clients basent essentiellement leur choix sur la distance entre la carrière et le lieu d'utilisation du granulat et non sur le type de roches. En outre la production de granulats alluvionnaires est de plus en plus réduite en France et, par ailleurs, des techniques de traitement des granulats ont été développées afin de conférer à des granulats alluvionnaires des propriétés physiques comparables à celles des granulats éruptifs et réciproquement. Néanmoins, ces techniques de traitement demeurent relativement coûteuses et, par ailleurs, le prix de vente varie de manière assez substantielle selon le type de granulats considérés, les granulats éruptifs étant généralement les plus coûteux. Enfin, les différences de caractéristiques physiques selon le type de granulats permettraient de répondre à des usages voire à des normes réglementaires spécifiques, telles que l'utilisation de granulats éruptifs pour les travaux routiers et notamment les couches de roulement. Dès lors, l'Autorité avait tenu compte de l'existence d'une substituabilité imparfaite entre les différents types de granulats, sans pour autant mener son analyse concurrentielle sur des marchés distincts.

15 En 2014, la production de granulats en Île-de-France équivalait à la somme des volumes suivants : 10,2 millions de tonnes de granulats naturels et 5,2 millions de tonnes de granulats recyclés. Source : Granulats en Île-de-France - Panorama régional, juin 2017, groupe de travail associant la Direction régionale et interdépartementale de l'environnement et de l'énergie et l'Unicem Île-de-France.

16 Décision de la Commission européenne COMP/M.5158 du 15 juillet 2008 Strabag/Kirchhof et lettre C2008-14 précitée.

17 Décision n° 10-DCC-98 précitée.

18 Décision n° 10-DCC-98 précitée, avis du Conseil de la concurrence n° 01-A-08 du 5 juin 2001 relatif à l'acquisition du groupe GTM par la société Vinci et lettres du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie C2006-03 aux conseils de la société Vinci, relative à une concentration dans le secteur des infrastructures autoroutières et C2008-14 précitée.

19 Décision n° 10-DCC-98 et lettres C2006-03 et C2008-14 précitées.

20 Décisions de l'Autorité n° 17-DCC-209 du 21 décembre 2017 relative à la création d'une entreprise commune par les sociétés La Poste et Suez RV France, n° 17-DCC-40 du 29 mars 2017 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Coved par la société Paprec Group, n° 13-DCC-44 du 4 avril 2013 relative à la création d'une entreprise commune par les sociétés SNN et Recycling Invest et lettre du ministre de l'économie, des finances et de l'emploi C2007-168 du 23 janvier 2008, aux conseils de la société Veolia Propreté SA, relative à une concentration dans le secteur de la gestion et traitement des déchets.

21 Voir notamment la décision n° 10-DCC-98 précitée, la lettre du ministre C2008-116 du 1er décembre 2008 relative à une concentration dans le secteur des travaux publics, du matériel routier et des équipements routiers et la décision de la Commission européenne COMP/M.4719 du 7 août 2007 Heidelberg Cement/Hanson.

22 Décision n° 10-DCC-98 précitée.

23 Id.

24 Voir notamment la décision n° 10-DCC-98 et la lettre C2008-14 précitées, et la décision de la Commission européenne COMP/M.5803 du 10 juin 2010 Eurovia/Tarmac.

25 Décision n° 10-DCC-98 précitée.

26 Selon les estimations des parties notifiantes, l'activité de collecte de terres polluées de Terzeo doit progresser de la manière suivante : [...] tonnes la première année, [...] tonnes la deuxième année, [...] tonnes la troisième année, [...] tonnes la quatrième année et [...] tonnes la cinquième année. En outre, la capacité de collecte de Terzeo ne pourra en toute hypothèse pas excéder à terme un volume de [...] tonnes (soit moins de [10-20] % du marché actuel) puisqu'il s'agit du volume maximal prévu par l'arrêté préfectoral autorisant Terzeo à exploiter ses installations.

27 Installations détenues à [40-50] % par Cosson et à [50-60] % par la société Sablière de Meaux.

28 Installations détenues [confidentiel] par la société MRB, une filiale de Colas IDFN, et la société SNB.

29 Estimation pour l'année 2018.

30 Selon les estimations des parties notifiantes, l'activité production de granulats (tous types) de Terzeo doit progresser de la manière suivante : [...] tonnes la première année, [...] tonnes la deuxième année, [...] tonnes la troisième année, [...] tonnes la quatrième année et [...] tonnes la cinquième année. En outre, la capacité production de granulats de Terzeo ne pourra pas excéder à terme un volume annuel de [...] tonnes.

31 Estimation pour l'année 2018.

32 Les autres activités exercées par les sociétés du groupe Bouygues ne sont pas susceptibles d'être considérées comme se situant en amont ou en aval des activités concernées. Elles ne sont pas non plus susceptibles de constituer des activités connexes. Enfin, Cosson ne produisait pas de granulats à partir des terres qu'elle collectait, Terzeo étant l'unique opérateur qui disposera de l'outil industriel adéquat à cette fin.

33 Les activités exercées par les différentes filiales d'Ensis ne sont pas susceptibles d'être considérées comme se situant en amont ou en aval des activités concernées. Elles ne sont pas non plus susceptibles de constituer des activités connexes.

34 En revanche, l'activité de concassage de blocs de bétons issus de l'activité de déconstruction et pouvant servir à la production de granulats de type secondaires de Colas (via la société Premys) n'est pas concernée au titre des liens verticaux puisque Terzeo ne produira que des granulats de type primaire.

35 Comme indiqué aux points 57 et 58 supra, dans la zone de 40 kilomètres autour du site de production de Terzeo et au regard des données pour 2018, les parties estiment que Terzeo produira entre [0-5] % et [0-5] % du volume total des granulats tous types et entre [5-10] % et [5-10] % du volume total des granulats primaires, tandis que Colas produiront entre [10-20] % et [10-20] % du volume total des granulats tous types et entre [5-10] % et [5-10] % du volume total des granulats primaires. La part de marché cumulée de Terzeo et de Colas sera ainsi inférieure à 20 %.

36 À savoir le marché de la production d'enrobés dans un rayon de 40 kilomètres autour du site de production d'enrobés de Colas, qui est situé à proximité de Terzeo, à Isles-lès-Villenoy (77). L'analyse est inchangée au regard des segmentations plus fines, la part de marché de la production d'enrobés à partir de centrales mobiles dans la même zone étant marginale et la part de marché de Colas restant sensiblement identiques à sa position sur le marché global de la production d'enrobés dans la zone.

37 À savoir le marché aval des travaux routiers en Seine-et-Marne, département dans lequel est situé le site de production de granulats de Terzeo. L'analyse est inchangée au regard des segmentations plus fines. Colas n'a pas réalisé de travaux autoroutiers en 2018. En outre, selon les parties notifiantes, la part représentée par les travaux autoroutiers dans le marché des travaux routiers en Seine-et-Marne est relativement faible et les positions des différents opérateurs restent sensiblement identiques en considérant uniquement le segment des travaux routiers hors autoroutes.

38 Voir notamment les lignes directrices précitées, paragraphes 527 et suivants et la pratique décisionnelle citée.

39 Selon les estimations des parties, Terzeo doit réaliser un chiffre d'affaires total de [...] euros lors de sa première année d'exercice (à savoir [...] euros pour ses activités de collecte de terres polluées, ainsi qu'un chiffre d'affaires de [...] euros pour ses activités de production de granulats) et un chiffre d'affaires total de [...] euros lors de sa cinquième année d'exercice (à savoir [...] euros pour ses activités de collecte de terres polluées, ainsi qu'un chiffre d'affaires de [...] euros pour ses activités de production de granulats .

40 Au regard des chiffres d'affaires respectifs de Bouygues et d'Ensis réalisés en 2017.

41 Selon les parties, le chiffre d'affaires réalisé par les différentes sociétés et agences de Colas situées en Île-de-France, en 2018, s'est élevé à [...] milliard d'euros (hors transactions intra-groupe).

42 Ensis réalise l'intégralité de son chiffre d'affaires en Île-de-France.