Cass. com., 18 septembre 2019, n° 18-10.225
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
IGA éditions (SAS)
Défendeur :
Ciprés Assurances (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Rapporteur :
Mme Sudre
Avocat général :
Mme Beaudonnet
Avocats :
Me Le Prado, SCP Boutet, Hourdeaux
LA COUR : - Sur le moyen unique : - Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Ciprés assurances, ayant une activité de courtier en assurances, a, au cours de l'année 2008, regroupé ses services informatiques au sein d'une même entité, la société Ingénierie gestion appliquée services et éditions, devenue la société Tinqin France, puis la société IGA éditions, et conclu avec cette dernière, le 11 mars 2011, un contrat prévoyant la livraison d'une nouvelle solution informatique de gestion des produits de santé et prévoyance, en deux lots, en juillet 2012 et décembre 2013 ; que par lettre recommandée avec avis de réception du 16 janvier 2015, la société Ciprés assurances a mis fin à sa relation commerciale avec la société IGA éditions en raison d'un dépassement de budget et d'un retard dans la livraison ; que la société IGA éditions l'a assignée devant le tribunal de commerce de Nanterre, sur le fondement des articles 1134, 1147, 1149 et 1184 du Code civil, en paiement de dommages-intérêts au titre du préjudice subi du fait de la rupture unilatérale, brutale et infondée de la relation commerciale les liant ; que la société Ciprés assurances a soulevé une fin de non-recevoir, tirée du défaut de pouvoir juridictionnel de ce tribunal au profit de celui de Paris, en application de l'article L. 442-6, III, dans sa rédaction applicable à la cause et de l'article D. 442-3 du Code de commerce ;
Attendu que pour déclarer irrecevable la demande de dommages-intérêts formée par la société IGA éditions, l'arrêt relève que cette société prétendait, dans son assignation, avoir été victime d'une rupture unilatérale de leurs relations commerciales, opérée de mauvaise foi, sans raison légitime, de manière abusive et brutale par la société Ciprés assurances qui avait laissé se créer une confiance dans la poursuite d'un engagement, et en déduit que c'est à bon droit que les premiers juges ont constaté qu'ils étaient saisis d'une demande d'indemnisation fondée sur l'article L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce relevant du pouvoir juridictionnel du tribunal de commerce de Paris, juridiction spécialement désignée par l'article D. 442-3 du Code de commerce pour le ressort de la cour d'appel de Versailles ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, dans son assignation, la société IGA éditions avait fondé sa demande de dommages-intérêts sur les seules dispositions du droit commun de la responsabilité contractuelle et qu'elle avait précisé devant le tribunal qu'elle ne fondait pas sa demande d'indemnisation sur l'article L. 442-6 du Code de commerce, peu important ses allégations, inopérantes, renvoyant à la notion de rupture brutale d'une relation commerciale établie, la cour d'appel, qui a dénaturé les écritures de la société IGA éditions, a violé le principe susvisé ;
Par ces motifs : casse et annule, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée.