Cass. com., 25 septembre 2019, n° 17-22.035
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Finck
Défendeur :
Art et mascottes (Sté) , Theureaud (ès qual.)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Rapporteur :
Mme Kass-Danno
Avocats :
SCP Rousseau, Tapie, SARL Cabinet Briard
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un contrat de distribution exclusive a été conclu entre l'entreprise Edenya, prise en la personne de M. Finck, et la société Art et mascottes ; que, se prévalant d'un défaut de livraison des marchandises commandées et payées à l'entreprise Edenya, la société Art et mascottes l'a assignée aux fins de résolution du contrat à ses torts exclusifs et paiement de dommages-intérêts ;
Sur le second moyen : - Attendu que M. Finck fait grief à l'arrêt de dire que la résiliation du contrat de distribution exclusive conclu avec la société Art et mascottes lui est imputable et de rejeter sa demande de dommages-intérêts au titre de son préjudice commercial alors, selon le moyen : 1°) qu'excepté lorsqu'il fait application de la clause résolutoire, le juge ne peut prononcer la résiliation d'un contrat aux torts exclusifs de l'une des parties que lorsqu'il constate une inexécution grave des obligations lui incombant ; qu'en se bornant à retenir, pour juger que le contrat litigieux devait être résilié aux torts de M. Finck, que le défaut de livraison de près de 12 % des marchandises payées n'était pas anodin et ne pouvait que mettre la société Art et mascottes en difficulté vis-à-vis de ses clients, sans rechercher si cette inexécution partielle du contrat avait été concrètement d'une gravité suffisante pour que sa résolution soit prononcée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1184 ancien du Code civil ; 2°) que le contrat de distribution exclusive obligeait le distributeur à l'achat d'un minimum annuel de marchandises pendant les trois premières années ; qu'en se fondant, pour juger que le non-respect de cette obligation - pourtant de résultat - ne caractérisait pas un manquement contractuel de la société Art et mascottes, sur la circonstance, d'une part, que le chiffre d'affaires qu'elle avait réalisé en 2012 était très inférieur à celui réalisé par l'ancien distributeur en 2009, d'autre part, qu'elle se trouvait en difficulté du fait de la disparition de clients, du marché se rétrécissant et de la faiblesse des marges, bien que le contrat litigieux ne prévoyait pas la possibilité de réviser à la baisse la clause de quota en raison de difficultés économiques du distributeur, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de celui-ci violant ainsi l'article 1134 ancien du Code civil devenu l'article 1103 du Code civil ; 3°) que l'exception d'inexécution mise en œuvre par une partie au contrat n'est régulière que sous la condition qu'elle soit proportionnelle aux manquements de l'autre partie ; qu'en se fondant encore, pour juger que le non-respect de ses obligations d'achats minimum annuels par la société Art et mascottes résultait du retard de livraison des marchandises sans rechercher si l'inexécution par cette dernière de ses obligations était proportionnée aux manquements du fournisseur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1184 ancien du Code civil ; 4°) qu'une mise en demeure n'est pas nécessaire pour agir en résolution judiciaire du contrat ; qu'en se fondant encore, pour le débouter de sa demande tendant à la résolution judiciaire du contrat litigieux aux torts de la société Art et mascottes, sur la circonstance inopérante que M. Finck ne l'avait pas mise en demeure d'exécuter son obligation d'achats minimum annuels prévue au contrat, la cour d'appel a violé l'article 1184 du Code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant relevé que M. Finck n'avait pas été en mesure d'assurer la fabrication et la livraison de 12 % des marchandises qui lui avaient été payées, sans invoquer la force majeure, et que cela ne pouvait que mettre son cocontractant en difficulté vis-à-vis de ses clients, la cour d'appel qui, procédant à la recherche prétendument omise, invoquée par la première branche, a souverainement retenu que le manquement de M. Finck à son obligation de délivrance revêtait une importance telle que la demande de résolution était fondée, a légalement justifié sa décision ;
Attendu, en deuxième lieu, que, sous le couvert de griefs non fondés de dénaturation et de violation de la loi, le moyen, pris en ses deuxième et quatrième branches, ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des éléments de preuve qui leur étaient soumis ;
Et attendu, en dernier lieu, que la cour d'appel n'avait pas à effectuer la recherche invoquée par la troisième branche, qui ne lui était pas demandée ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen, qui est recevable : - Vu l'article 16, alinéa 3, du Code de procédure civile ; - Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;
Attendu que pour condamner M. Finck, à titre personnel, à payer à la société Art et mascottes, sous déduction de tout acompte qui lui aurait été versé de ce chef et dont il devrait justifier, la somme de 7 078 euros à titre d'indemnité compensatrice, le condamner à rembourser à la société Art et mascottes le prêt de 20 000 euros, dire que la résiliation du contrat de distribution exclusive conclu entre la société Art et mascottes et M. Finck, le 8 octobre 2011, était imputable à ce dernier et rejeter sa demande de dommages-intérêts au titre de son préjudice commercial, l'arrêt retient que l'entreprise Edenya n'est pas constituée sous forme de société et n'a pas de personnalité morale, que c'est en conséquence de manière tout à fait impropre que le tribunal de commerce a prononcé des condamnations à l'encontre de cette entreprise ;
Qu'en statuant ainsi, sans avoir invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen qu'elle relevait d'office, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Et vu l'article 624 du Code de procédure civile ; - Attendu que la cassation prononcée sur le premier moyen entraîne la cassation, par voie de conséquence, de l'arrêt en toutes ses dispositions, en ce qu'il statue à l'égard de M. Finck, à titre personnel ;
Par ces motifs : casse et annule, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 avril 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Besançon.