Cass. com., 23 janvier 2019, n° 17-24.051
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
SCP Boullez, SCP Gadiou, Chevallier
LA COUR : - Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société JSA et M. X, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Comeprima, que sur le pourvoi incident de la société Benetton France commercial ; - Sur le moyen unique du pourvoi principal : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris 31 mai 2017), que la société Benetton France commercial (la société Benetton) a donné deux fonds de commerce en location-gérance à la société Comeprima ; que celle-ci n'ayant pas réglé des redevances, la société Benetton, après mise en demeure à cette fin, lui a notifié l'acquisition des clauses résolutoires qui y étaient stipulées ; que la société Comeprima ayant été mise en redressement judiciaire, la société Benetton a déclaré sa créance, qui a été admise au passif, et obtenu, par ordonnances du juge commissaire, la constatation de la résiliation des contrats ainsi que la restitution des locaux ; que la société Comeprima et son administrateur judiciaire ont assigné la société Benetton en annulation des contrats de location-gérance ; que la société Comeprima ayant été mise en liquidation judiciaire, la société JSA, prise en la personne de M. X, nommé liquidateur, a repris l'instance ;
Attendu que M. X, ès qualités, fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande alors, selon le moyen : 1°) que le contrat de location-gérance ne satisfaisant pas aux conditions légales, notamment celle tirée de l'exploitation personnelle du bailleur pendant deux ans avant la conclusion du contrat, est nul de nullité absolue ; que si une dispense peut être accordée, elle doit nécessairement être antérieure à la conclusion du contrat ; que cette obligation légale ne saurait donc être contournée par une clause prévoyant la signature du contrat sous condition suspensive d'obtention de cette dispense ; qu'en l'espèce, il était acquis aux débats que la dispense d'exploitation personnelle pendant deux années n'avait été accordée à la société Benetton que le 5 juillet 2007, soit postérieurement à la conclusion des contrats de location-gérance en date des 22 mai 2007 ; qu'en décidant pourtant que ces conventions devaient " être considérées comme valables ", motif pris de l'existence d'une condition suspensive quand une telle stipulation ne pouvait tenir en échec les règles imposées à peine de nullité absolue, la cour d'appel a violé les articles L. 144-3, L. 144-4 et L. 144-10 du Code de commerce ; 2°) que la condition suspensive, lorsqu'elle est réalisée, rétroagit au jour de la formation du contrat ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a déclaré valables les conventions de location-gérance litigieuses conclues au mépris des obligations légales, motif pris de l'existence d'une condition suspensive liée à l'obtention de la dispense d'exploitation, laquelle a été accordée le 5 juillet 2007 ; qu'en statuant de la sorte, quand la réalisation de la condition suspensive faisait rétroagir celle-ci à la date de la formation des contrats, soit le 22 mai 2007 de sorte que la dispense était postérieure à la conclusion des conventions litigieuses, la cour d'appel a, en toute hypothèse, violé les articles L. 144-3, L. 144-4 et L. 144-10 du Code de commerce, ensemble l'article 1179 du Code civil, dans sa version applicable à la cause ;
Mais attendu qu'ayant relevé, d'abord, que les parties avaient conclu les contrats de location-gérance litigieux sous la condition suspensive de l'obtention par la société Benetton d'une autorisation judiciaire la dispensant de la condition d'exploitation personnelle des fonds de commerce pendant au moins deux ans préalablement à leur mise en gérance, et, ensuite, que celles-ci avaient prévu, comme elles en avaient la faculté, que les contrats ne prendraient effet qu'à la date de la réalisation de la condition suspensive, laquelle était effectivement intervenue, la cour d'appel a pu en déduire que les contrats étaient valables ; que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident, qui est éventuel : rejette les pourvois.