Livv
Décisions

Cass. 1re civ., 10 octobre 2019, n° 17-20.199

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Mangenot

Défendeur :

BNP Paribas Personal Finance (SA) , Campoy

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Batut

Rapporteur :

M. Avel

Avocats :

SCP Monod, Colin, Stoclet, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano

Nancy, 2e ch. civ., du 26 janv. 2017

26 janvier 2017

LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 janvier 2017), que, suivant offre de prêt du 15 avril 2009, la société BNP Paribas Personal Finance (la banque) a consenti à Mme Mangenot (l'emprunteur) un prêt libellé en francs suisses et remboursable en euros, en vue de financer l'acquisition d'un bien immobilier ; qu'invoquant l'irrégularité de la clause contractuelle relative à l'indexation du prêt sur la valeur du franc suisse ainsi qu'un manquement de la banque à son obligation d'information, l'emprunteur a assigné celle-ci aux fins de conversion en euros du prêt souscrit en francs suisses et en indemnisation ;

Attendu que l'emprunteur fait grief à l'arrêt de déclarer licite la clause d'indexation figurant au contrat de prêt et de rejeter ses demandes tendant à voir engager la responsabilité de la banque pour manquement à ses obligations d'information, de mise en garde et de conseil et pour pratiques commerciales trompeuses, ainsi que ses demandes en indemnisation de son préjudice, alors, selon le moyen, que le juge national est tenu d'examiner d'office le caractère abusif d'une clause contractuelle dès qu'il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet ; que, dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que, selon le contrat de prêt litigieux, toute dépréciation de l'euro par rapport au franc suisse avait pour conséquence d'augmenter le montant du capital restant dû et, ainsi, la durée d'amortissement du prêt, d'un délai maximum de cinq ans ; qu'en jugeant régulière la clause d'indexation et en rejetant les demandes en responsabilité et indemnisation formées par l'emprunteur, sans rechercher si le risque de change ne pesait pas exclusivement ou au moins principalement sur l'emprunteur et si, en conséquence, la clause litigieuse n'avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment du consommateur, la cour d'appel a violé l'article L. 132-1 du Code de la consommation, devenu l'article L. 212-1 du même Code ;

Mais attendu, d'une part, que, par arrêt du 20 septembre 2017, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que l'article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprété en ce sens que la notion d'" objet principal du contrat ", au sens de cette disposition, couvre une clause contractuelle insérée dans un contrat de prêt libellé en devise étrangère, n'ayant pas fait l'objet d'une négociation individuelle et selon laquelle le prêt doit être remboursé dans la même devise étrangère que celle dans laquelle il a été contracté, dès lors que cette clause fixe une prestation essentielle caractérisant ce contrat ; que, par conséquent, cette clause ne peut pas être considérée comme étant abusive, pour autant qu'elle soit rédigée de façon claire et compréhensible (arrêt Ruxandra Paula Andriciuc, C-186/16) ;

Attendu, d'autre part, que l'arrêt retient que l'emprunteur a expressément reconnu, aux termes du document intitulé "accusé de réception et acceptation de l'offre de crédit" revêtu de sa signature, avoir pris connaissance de l'offre de crédit et de ses annexes reçues le 18 avril 2009 et avoir été avisé que le crédit comportait des opérations de change pouvant avoir un impact sur son plan de remboursement ; qu'il en déduit que celui-ci a été informé clairement, précisément et complètement sur le risque de voir le coût total du crédit en euros, monnaie de paiement, augmenter par l'effet de l'allongement de la période de remboursement lié à une évolution défavorable du taux de change, et qu'il a eu, à la lecture de l'offre, une vision précise de ce que pourrait être la charge réelle de son crédit puisqu'il était indiqué que la durée pourrait être augmentée dans un plafond de cinq ans ;

Attendu qu'il en résulte que, même si la clause litigieuse portait sur l'objet principal du contrat, la cour d'appel, qui a fait ressortir qu'elle était rédigée en termes clairs et compréhensibles, n'était pas tenue de procéder à l'examen de son caractère éventuellement abusif ; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.