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Décisions

CA Bourges, ch. civ., 24 octobre 2019, n° 18-01177

BOURGES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

BNP Paribas Personal Finance (Sté)

Défendeur :

Bally MJ (Selarl)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Sarrazin

Conseillers :

M. Perinetti, Mme Ciabrini

Avocats :

Mes Provost, Habib,

TI Châteauroux, du 14 août 2018

14 août 2018

Exposé :

Suivant bon de commande en date du 14 septembre 2011, Monsieur D... E... et Madame F... C... épouse E... ont demandé la pose d'un dispositif photovoltaïque à la société Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France, depuis placée en liquidation judiciaire et représentée par son liquidateur la Selarl Bally. Selon offre préalable du même jour, ils ont souscrit auprès de BNP Paribas Personal Finance un crédit affecté d'un montant de 22 500 remboursable en 180 mensualités au taux nominal de 5,75%. Le financement a été accordé par la banque le 26 septembre 2011 et l'attestation de fin de travaux signée par les époux E... le 30 septembre 2011, de sorte que les fonds ont été débloqués au profit de l'entreprise.

Par acte d'huissier en date du 2 mai 2017, les époux E... ont assigné devant le tribunal d'instance de Châteauroux BNP Paribas Personal Finance et la Selarl Bally ès qualité de liquidateur de la société Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France aux fins notamment d'annulation des contrats de vente et de crédit.

Par jugement en date du 14 août 2018, le tribunal d'instance de Châteauroux a :

- déclaré recevable l'action intentée par Monsieur D... E... et Madame F... C... épouse E... à l'encontre de la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Banque Solfea ;

- rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Banque Solfea et se déclare compétent pour connaître du présent litige ;

- prononcé la nullité du contrat de fourniture et de vente conclu le 14 septembre 2011entre Monsieur D... E... et la SAS Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France ;

- dit que Monsieur D... E... tiendra à disposition de la SCP Moyrand-Bally ès qualité de liquidateur de la SAS Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France l'ensemble des matériels installés par cette société à son domicile, à charge pour celle-ci de venir les récupérer et de procéder à la remise en état de la toiture aux frais de la SAS Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France dans les deux mois suivant la signification du présent jugement ;

- précisé que passé ce délai, Monsieur D... E... pourra disposer desdits matériels comme bon lui semblera ;

- constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté souscrit le 14 septembre 2011 par Monsieur D... E... et Madame F... C... épouse E... auprès de la SA Banque Solfea ;

- dit que la SA Banque Solfea a commis, lors du déblocage des fonds, une faute la privant de son droit à remboursement du capital prêté ;

- condamné en conséquence la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Banque Solfea à payer à Monsieur D... E... et Madame F... C... épouse E... la somme de 14 153 au titre de la restitution des règlements effectués par les emprunteurs en exécution du contrat de prêt (arrêtés à la date du 30 juillet 2018), avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

- condamné la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Banque Solfea à payer à Monsieur D... E... et Madame F... C... épouse E... la somme de 2 000 en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- rejeté toutes demandes autres ou plus amples formées par les parties ;

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision ;

- condamné la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Banque Solfea aux dépens de l'instance.

Le tribunal écarte tout d'abord la compétence du tribunal de commerce, les époux E... n'ayant pas la qualité de commerçant et le contrat, qui vise les dispositions du Code de la consommation et prévoit un bordereau de rétractation, prévoyant expressément la compétence du tribunal d'instance. De plus, au visa des articles 122 du CPC et 2224 du Code civil, il considère que l'action des demandeurs n'est pas prescrite, l'action quinquennale trouvant son point de départ à la date de raccordement et de mise en service de l'installation, date permettant aux acquéreurs de s'assurer du bon fonctionnement de l'installation. Ensuite, au visa de l'article L. 121-23 du Code de la consommation, il prononce la nullité du contrat de vente en raison des nombreux manquements du bon de commande (Absence de précision quant à la livraison, la répartition du prix de vente, la marque et le modèle du matériel...), et considère, au regard de l'article 1338 du Code civil, qu'à aucun moment, les époux E... n'ont manifesté une volonté non équivoque de couvrir les irrégularités du bon de commande de sorte que leur absence d'opposition à l'installation et la signature de l'attestation de fin de travaux ne permettent pas de considérer qu'ils aient renoncé implicitement à se prévaloir de la nullité du contrat. Ainsi, la nullité du contrat principal ayant été prononcée, le contrat de crédit affecté est nul de plein droit conformément à l'article L. 311-32 du Code de la consommation, mais la banque, qui a débloqué les fonds sans procéder à aucune vérification préalable, l'attestation de fin de travaux signée seulement 16 jours après le bon de commande comportant une anomalie manifeste car contradictoire au bon de commande, a commis une faute, de sorte qu'elle doit être privée de sa créance de restitution des fonds prêtés. Enfin, au visa de l'article 1165 du Code civil, le tribunal considère que les frais de remise en état du toit ne sont pas une conséquence de la nullité du contrat de crédit et ne peuvent donc être mis à la charge de la banque, de même que des éventuels préjudices économiques et de jouissance.

La SA BNP Paribas Personal Finance a interjeté appel de ce jugement le 12 septembre 2018 sauf en ce qu'il a dit que Monsieur D... E... tiendra à disposition de la SCP Moyrand-Bally ès qualité de liquidateur de la SAS Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France l'ensemble des matériels installés par cette société à son domicile, à charge pour celle-ci de venir les récupérer et de procéder à la remise en état de la toiture aux frais de la SAS Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France dans les deux mois suivant la signification du présent jugement et précisé que passé ce délai, Monsieur D... E... pourra disposer desdits matériels comme bon lui semblera.

Dans ses dernières conclusions signifiées les 19 et 28 février 2019, elle demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris ;

- juger irrecevables pour cause de prescription les demandes formulées par Monsieur et Madame E... ;

- juger que les contrats de par leur objet ne sont pas soumis aux dispositions du Code de la consommation ;

- débouter les époux E... de l'intégralité de leurs demandes ;

Subsidiairement, en cas de recevabilité des demandes et d'application des dispositions du Code de la consommation ;

- juger n'y avoir lieu à prononcer l'annulation du contrat principal de vente et l'annulation du contrat de crédit ;

- débouter les époux E... de l'intégralité de leurs demandes ;

Subsidiairement, en cas d'annulation des contrats, par adoption ou substitution de motifs :

- juger que les époux E... sont prescrits à soulever les fautes invoquées contre la banque, que la BNP Paribas Personal Finance n'a commis aucune faute et qu'en tout état de cause les époux E... ne démontrent pas l'existence d'un préjudice et d'un lien de causalité ;

- condamner solidairement Monsieur D... E... et Madame F... C... épouse E... à rembourser à BNP Paribas Personal Finance la somme de 22 500 , outre les intérêts légaux à compter de la mise à disposition des fonds, sous déduction des échéances versées ;

- débouter Monsieur et Madame E... de toute autre demande ;

En tout état de cause,

- juger n'y avoir lieu à condamner BNP Paribas Personal Finance au paiement de dommages et intérêts au titre de la remise en état de la toiture, le préjudice de jouissance, moral et financier ;

- condamner solidairement Monsieur D... E... et Madame F... C... épouse E... à payer à BNP Paribas Personal Finance une indemnité de 1 500 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

Elle fait valoir que :

- s'agissant de la nullité pour vice de forme et notamment, concernant les dispositions relatives au démarchage, la jurisprudence a très récemment confirmé que le point de départ du délai de prescription était la signature de l'acte lui-même, d'autant que les dispositions du Code de la consommation, concernant les exigences formelles en cas de démarchage, sont précisément reproduites dans les conditions générales du contrat ;

- les emprunteurs ont nécessairement eu conscience du caractère définitif des contrats signés lors de l'installation des matériels et donc de la signature de l'attestation de fin de travaux, soit le 30 septembre 2011, de sorte que la demande fondée sur l'existence d'un dol est prescrite, d'autant que cette demande a été soulevée postérieurement à l'assignation ;

- la demande visant à voir prononcer la nullité du contrat de crédit, de façon isolée, sur le fondement des dispositions des articles L. 311-13 et L. 311-35 du Code de la consommation est prescrite, ces dispositions prévoyant un délai de 7 jours au prêteur à compter de l'acceptation de l'offre par les emprunteurs, pour notifier l'agrément des emprunteurs ;

- les emprunteurs avaient connaissance des irrégularités du bon de commande dès sa signature, dès lors que les dispositions applicables étaient reproduites au verso, mais aussi du déblocage de fonds alors que l'installation n'était pas terminée ;

- la production d'énergie électrique photovoltaïque, dès lors qu'elle est revendue à un tiers en tout ou partie relève de " l'entreprise de manufactures " ou de la " fourniture " au sens des dispositions des articles L. 110-1 et L. 110-2 du Code de commerce, le crédit lié en étant l'accessoire et donc également acte de commerce, de sorte que, en faisant le choix de la revente intégrale de l'électricité produite à ERDF, les intimés exercent des actes de commerce à titre habituel, ce qui justifie que les dispositions du Code de la consommation n'aient pas à s'appliquer ;

- il importe peu de connaître sur le bon de commande le nombre de panneaux, leur surface et leur poids, dès lors que l'installation totale correspond à la puissance souhaitée, d'autant que les caractéristiques plus précises de l'installation sont indiquées sur la plaquette du vendeur reçue par les époux E..., avant la conclusion du contrat ;

- l'article L. 121-23 du Code de la consommation prévoit uniquement que doit figurer sur le bon de commande le prix global à payer, et non le prix de chaque composant et le bon de commande précise les informations relatives au crédit ;

- la Cour de cassation est venue préciser qu'en cas de non-respect des dispositions de l'article L. 121-23 du Code de la consommation, la sanction est la nullité relative du contrat de vente, nullité susceptible de confirmation en cas d'exécution volontaire du contrat conformément aux dispositions de l'article 1338 du Code civil ;

- les intimés ne prouvent pas l'existence d'un dol au moment de la conclusion du contrat, d'autant que le vendeur ne peut aucunement s'engager sur le délai de raccordement ni sur le prix de revente de l'électricité, de même qu'il n'est nullement démontré une nécessité impérative de changer l'onduleur au bout de 5 ans, d'autant que le prêteur, tiers dans les relations commerciales entre le vendeur et les emprunteurs, ne dispose pas de copie des éléments qui auraient été remis à ces derniers lors de la souscription ;

- le fait que la plaquette fasse référence à un autofinancement n'est pas à lui seul de nature à démontrer l'existence d'un dol de la part du vendeur, dès lors qu'il s'agit justement d'une plaquette commerciale généralisée qui ne prend pas en compte le cas précis des intimés ;

- l'obligation du vendeur consistant en la livraison, la pose et la mise en service d'une installation photovoltaïque a été réalisée et les intimés ne démontrent pas qu'ils auraient indiqué au prêteur, après réception de son accord, qu'ils ne souhaitaient plus bénéficier du crédit ;

- l'annulation du contrat de prêt emporte l'obligation pour l'emprunteur de restituer les fonds prêtés au prêteur et l'obligation pour le prêteur de rembourser les sommes versées par l'emprunteur et la banque n'a commis aucune faute, l'organisme prêteur étant fondé à verser les fonds au vendeur au vu d'un document signé par l'emprunteur, sans avoir à exiger une " attestation de fin de travaux " ou un " procès-verbal de réception " et n'ayant pas à opérer des vérifications sur le raccordement effectif au réseau, dès lors qu'il ne finançait pas ces prestations ;

- le prêteur n'est pas tenu de conseiller les emprunteurs sur l'efficacité juridique d'un contrat auquel il est tiers, d'autant que s'agissant d'une nullité relative, susceptible de régularisation, l'emprunteur est libre de demander l'exécution du contrat et de renoncer à se prévaloir des conséquences de cette irrégularité ;

- l'article L. 341-2 du Code monétaire et financier dispose que les règles concernant le démarchage bancaire ou financier ne s'appliquent pas aux démarches effectuées pour le compte d'un établissement de crédit, en vue de proposer un contrat de financement de biens ou de prestations de services dans le cadre d'un crédit affecté ;

- le prêteur n'est pas tenu à un devoir de conseil sur cet engagement et la preuve n'est pas rapportée que le prêteur aurait été informé, avant d'accepter d'accorder le financement, soit avant septembre 2011, des manœuvres du vendeur ;

- l'appelante verse aux débats la fiche de renseignement ainsi que les pièces justificatives démontrant que le prêteur s'est bien renseigné quant à la solvabilité des emprunteurs, de sorte qu'aucune faute ne peut être reprochée au prêteur ;

- même si les fonds avaient été débloqués par le prêteur uniquement après mise en service de l'installation, le préjudice quant à la rentabilité de l'investissement aurait toujours existé, alors même qu'aucune faute dans le déblocage des fonds ne pourrait être retenue.

Dans leurs dernières conclusions signifiées le 25 janvier et le 14 juin 2019, les époux E... demandent à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté les époux E... de leurs demandes d'indemnisation au titre du préjudice financier et moral, d'indemnisation au titre de la dépose des panneaux et la remise en état du toit, d'indemnisation au titre du remboursement du devis pour la dépose des panneaux et la remise en état du toit, et d'une partie de sa demande d'indemnisation au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- débouter la société BNP Paribas Personal Finance de l'intégralité de ses demandes ;

- juger que la BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la Banque Solfea a commis des fautes personnelles engageant sa responsabilité à l'égard de Monsieur et Madame E... ;

- juger que la BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la Banque Solfea ne pourra se prévaloir des effets de l'annulation à l'égard des emprunteurs ;

- ordonner le remboursement par la BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la Banque Solfea de l'intégralité des sommes qui lui ont été versées par Monsieur et Madame E..., et ce jusqu'au jour du jugement à intervenir, outre les mensualités postérieures acquittées, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

A titre subsidiaire :

- condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la Banque Solfea à verser aux époux E..., la somme de 15 500 , sauf à parfaire, à titre de dommage et intérêts, au titre de leur préjudice de perte de chance de ne pas contracter.

En tout etat de cause,

- condamner la BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la Banque Solfea à verser à Monsieur et Madame E... la somme de 5 000 au titre de leur préjudice financier et du trouble de jouissance et de 3 000 au titre de leur préjudice moral ;

- condamner la BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la Banque Solfea au paiement de la somme de 2 160 au titre du devis de désinstallation,

- condamner la BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la Banque Solfea à payer à Monsieur et Madame E... la somme de 3 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et au paiement des entiers dépens.

Ils font valoir que :

- en vertu des articles L. 311-52 du Code de la consommation et R. 221-39 du Code de l'organisation judiciaire, le tribunal d'instance est exclusivement compétent pour tous les litiges concernant les opérations de crédit soumises au Code de la consommation, y compris lorsque le crédit est accessoire à un contrat principal, pour statuer sur le sort du contrat principal, les deux contrats étant interdépendants ;

- l'appelante a elle-même indiqué que le contrat de crédit était " lié à une vente ", sous-entendu une vente à domicile et, dans ce contrat, il est fait exclusivement référence aux dispositions des articles L. 311-1 et suivants du Code de la consommation, qui revêt ainsi toutes les caractéristiques d'une offre soumise aux dispositions du même Code, à l'instar du bordereau de rétractation, exclusivement réservé aux consommateurs ;

- les intimés n'ont pas la qualité de commerçants, n'exercent pas d'actes de commerce à titre habituel, ont été démarchés à leur domicile, le contrat de prêt ne comporte aucune disposition expresse et non équivoque que le prêt a une destination professionnelle et l'installation des panneaux est faite dans un immeuble à usage d'habitation ;

- le point de départ du délai de prescription doit être fixé à la date à laquelle la personne intéressée a connaissance des faits qui lui permettent d'agir, c'est à dire au jour de la manifestation du " dommage ", ou à la date à laquelle il a été révélé à la " victime ", de sorte que la date de connaissance par les intimés des nullités affectant les contrats ne peut être fixée au plus tôt qu'au 3 mai 2013, date de l'établissement de la première facture de vente à EDF de l'électricité produite par leur installation, leur permettant de constater un rendement inférieur à celui escompté ;

- aux termes de l'article 1144 du Code civil, le dol a pour conséquence de reporter le point de départ du délai de prescription au jour où les cocontractants découvrent la tromperie dont ils sont victimes ;

- le 12 novembre 2014, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l'encontre de la société Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France et les intimés n'adressent à l'encontre de cette société aucune demande de paiement de sommes d'argent, de sorte que leur action est parfaitement recevable aux termes de l'article L. 621-40-1 du Code de commerce ;

- le bon de commande ne respecte pas les prescriptions à peine de nullité de l'article L. 121-23 du Code de commerce (absence de descriptif complet de l'installation, du nom de l'établissement de crédit, du détail du coût de l'installation, des modalités de financement, non-respect des dispositions concernant le droit de rétractation) ;

- la nullité du contrat conclu avec la société Groupe Solaire de France est établie eu égard au dol qui vicie le consentement des intimés, l'article L. 111-1 du Code de la consommation mettant à la charge du vendeur professionnel de biens ou prestataires de services, l'obligation de fournir au consommateur, avant la signature du contrat, toute information susceptible de l'intéresser sur les caractéristiques du bien, produit, ou service: ainsi, certaines informations essentielles pourtant déterminantes de leur consentement ont été omises, les intimés ayant conclu le contrat sans savoir, notamment, que des frais supplémentaires seraient à leur charge et que l'opération économique dans laquelle ils entraient n'était absolument pas autofinancée comme présentée, ni rentable ;

- ni le contrat en cause, ni aucun élément remis ou communiqué dans le cadre de l'opération ne contient d'information concernant le délai de raccordement, l'assurance obligatoire à souscrire en cas d'acquisition de tels matériels, la location obligatoire d'un compteur de production auprès de la société EDF sur 20 ans, la durée de vie des matériels et notamment, celle de l'onduleur électrique ;

- la société Groupe Solaire de France n'a jamais été mandatée par la société GDF Suez ou EDF pour procéder à de quelconques relevés, ni à un quelconque diagnostic énergétique, EDF n'ayant aucun partenariat avec aucune société installatrice de panneaux photovoltaïques ;

- si la cause de l'obligation des intimés était bien le transfert de propriété des panneaux photovoltaïques et de l'ensemble du matériel, ainsi que la prestation de service prévue, en revanche la cause du contrat de vente lui-même consiste dans l'autofinancement qui a été le mobile déterminant, c'est-à-dire en l'absence duquel les intimés ne se seraient pas engagés, si l'autofinancement n'avait pas existé : or, cet autofinancement dans un premier temps, puis la rentabilité de l'installation quelques années plus tard, sont en réalité inatteignables, de sorte que le contrat est dépourvu de cause au sens des articles 1108 et 1131 anciens du Code civil ;

- si le contrat principal est nul, alors le contrat de crédit également, d'autant que le délai légal prévu aux articles L. 311-13 et -35 du Code de la consommation n'a pas été respecté ; 9

- en l'espèce, les intimés n'ont jamais apposé de signature en dessous de la mention par laquelle ils déclareraient donner leur accord et reconnaissent avoir pris connaissance des articles L. 121-21 et L. 121-26 du Code de la consommation applicables lors de la vente à domicile et avoir reçu l'exemplaire du contrat doté d'un formulaire détachable de rétractation, et selon la Cour de cassation, même si cela avait été le cas, cela ne permet pas de prouver qu'il y a eu connaissance du vice affectant l'acte nul et l'intention de la réparer, de sorte que rien ne permet de prouver que les époux E... avaient eu connaissance des vices affectant le bon de commande ;

- il est de jurisprudence constante que la simple reproduction des articles du Code de la consommation ne peut suffire à affirmer que le consommateur a eu, de manière effective, connaissance des vices dont le contrat était entaché ;

- il appartenait à la banque de contrôler la régularité du bon de commande et en acceptant de financer le projet photovoltaïque sans émettre la moindre réserve, elle a commis une faute, cette faute la privant de sa créance de restitution du capital emprunté et de justifier qu'en sa qualité de prescripteur, la société Groupe Solaire de France et son agent intervenu chez les intimés, étaient régulièrement répertoriés et remplissaient pour ce dernier, ses obligations de formation continue conformément aux articles L. 546-1 du Code monétaire et financier et L. 311-8 et D. 311-4-3 du Code de la consommation ;

- elle avait connaissance des pratiques dolosives de ces sociétés installatrices qui vantent l'avantage d'un autofinancement afin de récupérer les fonds libérés par elle et elle n'a pas respecté son obligation de conseil et de vigilance, renforcée par l'obligation de mise en garde qui impose à la banque d'éclairer son client consommateur profane quant au caractère illusoire des rendements promis et de consentir des emprunts adaptés à la situation financière de ses clients, d'autant qu'elle ne produit pas la fiche d'information précontractuelle européenne normalisée ;

- il résulte d'une jurisprudence constante que le prêteur qui délivre les fonds au vendeur sans s'assurer que celui-ci a exécuté son obligation commet une faute qui le prive de sa créance de restitution, de même que la banque ne peut se prévaloir d'une attestation de livraison qui ne présume aucunement de l'exécution totale et complète du contrat de vente et de prestation de service ;

- dès lors que le liquidateur judiciaire de la société installatrice n'interviendra pas pour la dépose du matériel et la remise en état de la toiture, les intimés vont donc être contraints de faire démonter à leurs frais l'installation, et de remettre leur toiture en état, les panneaux n'étant d'aucune utilité ;

- ils subissent également un important préjudice financier causé par la société Solfea, étant contraints de rembourser les échéances du crédit et ont dû renoncer à différents projets personnels ;

- les intimés, victimes de manœuvres frauduleuses, ont également subi un important préjudice moral qu'il convient de réparer car ils ont été contraints de subir les désagréments liés à la réalisation d'importants travaux pour une installation solaire aussi inutile qu'inesthétique, avec l'angoisse d'avoir à supporter de très longues années le remboursement d'un crédit ruineux.

La Selarl Bally n'a ni constitué avocat ni conclu.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 juillet 2019.

Sur quoi :

I) sur l'application des dispositions du Code de la consommation :

Il doit être rappelé que la société BNP Paribas Personal Finance conclut au caractère inapplicable des dispositions du Code de la consommation, en faisant principalement observer que l'installation photovoltaïque dont s'agit avait pour objet la revente intégrale de l'électricité produite à ERDF, de sorte que la production d'énergie électrique photovoltaïque, dès lors qu'elle est revendue à un tiers en tout ou partie, relève de l'entreprise de manufactures ou de la fourniture au sens des dispositions des articles L. 110 - 1 et L. 110 - 2 du Code de commerce et que le crédit lié, qui en est l'accessoire, constitue également un acte de commerce.

Il convient de rappeler que les articles L. 311-1 et suivants du Code de la consommation, en leur rédaction alors applicable, définissent l'emprunteur, au sens de ce chapitre, comme toute personne qui est en relation avec un prêteur dans le cadre d'opérations de crédit, à l'exclusion de celles qui sont destinées à financer les besoins d'une activité professionnelle.

Cette notion se rapproche de celle de consommateur donnée par l'article préliminaire du Code de la consommation et permettant de définir le champ d'application des contrats conclus à distance et hors établissements et à l'exercice du droit de rétractation spécifique à ce type de contrat.

Aux termes de l'article L. 110-1 1° du Code de commerce, est réputé être un acte de commerce tout achat de biens meubles pour les revendre, soit en nature, soit après les avoir travaillés et mis en œuvre.

La BNP Paribas Personal Finance invoque, à titre de décision de principe sur cette question, un arrêt rendu le 25 février 2016 par la première chambre cvile de la cour de cassation, ainsi libellé : " Attendu que, pour accueillir cette exception, après avoir relevé que le dossier fourni par la société X indiquait que la production d'électricité revendue à la société ERDF par Mme A... permettrait de couvrir les mensualités du crédit souscrit par cette dernière, l'arrêt retient que la vente d'énergie constitue un acte de commerce et que le tribunal de commerce est compétent pour connaître des actes préparatoires nécessaires, comme l'achat et le financement de l'opération, qui sont des actes commerciaux par accessoire ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si l'installation photovoltaïque litigieuse n'était pas principalement destinée à un usage personnel, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ".

La BNP Paribas Personal Finance croit pouvoir l'interpréter en ce sens que le juge du fond doit uniquement vérifier si l'énergie produite est entièrement ou partiellement revendue, invoquant à l'appui de cette interprétation de nombreuses décisions de cour d'appel retenant ce critère, alors qu'il doit seulement rechercher la destination principale de l'installation, sans se baser nécessairement sur la proportion d'électricité vendue.

Ainsi, dans une décision rendue le 27 juin 2018, la cour de cassation a rejeté le moyen du pourvoi formé par une société de crédit qui reprochait au juge d'appel de n'avoir pas recherché, pour se prononcer sur l'exception d'incompétence soulevée, si l'électricité produite par l'installation photovoltaïque litigieuse acquise par les emprunteurs n'était pas destinée à être revendue dans sa totalité, de sorte qu'elle n'était pas principalement destinée à un usage personnel des emprunteurs. Pour considérer que la cour d'appel avait procédé à la recherche prétendument omise et légalement justifié sa décision au regard des dispositions de l'article L. 110-1 1° du Code de commerce, la cour de cassation retient que l'arrêt relève que l'opération projetée par les emprunteurs ne visait pas à effectuer uniquement un simple acte de commerce par nature, mais tendait également, par la livraison et l'installation d'une éolienne domestique ou kit aérogénérateur, à effectuer des économies d'énergie pour leur compte personnel, que l'objet du contrat était l'achat de panneaux photovoltaïques, non pas pour les revendre, mais dans le but de produire de l'électricité, qu'il n'était, par ailleurs, pas établi que les emprunteurs, tous deux retraités, accompliraient des actes de commerce dont ils feraient leur profession habituelle ni que l'éventuelle revente de l'électricité produite entrerait dans le champ de leur activité professionnelle commerciale, que le contrat de crédit ne prévoyait aucunement une destination professionnelle du crédit et que le bon de commande faisait expressément référence au fait que l'opération était assujettie aux dispositions relatives au crédit d'impôt pour les dépenses relatives à l'équipement de l'habitation principale.

Ainsi d'autres cours d'appel (cf notamment Orléans dont la jurisprudence est constante depuis 2016) prennent notamment en compte, sans s'arrêter à la proportion d'électricité vendue, le défaut de stipulation relative à une destination professionnelle du prêt, l'absence d'intention de faire un usage professionnel de l'installation financée mais au contraire celle d'équiper l'immeuble d'une installation écologique lui apportant une plus-value tout en finançant tout ou partie de cet achat par la revente de l'énergie produite par les panneaux photovoltaïques.

La convention signée le 27 juin 2012 entre EDF et les époux E..., à l'instar des conventions signées avec la plupart des producteurs d'énergie photovoltaïque, exclut que ce dernier puisse conserver tout ou partie de l'électricité produite pour ses besoins personnels, laquelle sera donc envoyée en sa totalité sur le réseau, tandis que ce même producteur sera tenu d'acheter à EDF l'électricité nécessaire à sa consommation personnelle (pièce numéro 7 du dossier des intimés : " la nature de l'exploitation est : vente en totalité "). Il ne saurait donc être déduit aucune conséquence de l'éventuelle revente intégrale par les époux E... de l'électricité produite à EDF puisque cette circonstance leur est imposée, sauf à priver tous les particuliers devenus producteurs d'électricité à l'occasion d'une opération réalisée dans le cadre d'un démarchage à domicile et financée au moyen d'un prêt de la protection accordée habituellement par le Code de la consommation.

La cour observe que le " contrat de crédit affecté prêt photovoltaïque + " conclu par Monsieur et Madame E... (pièce numéro 3 de leur dossier) prévoit expressément dans le paragraphe III intitulé " litiges " que " le tribunal d'instance connaît des litiges nés du présent contrat " et que le " bon de commande " (pièce numéro 2) se réfère expressément aux dispositions du Code de la consommation et comporte, d'ailleurs, un " bordereau de rétractation détachable " mis à la disposition du client conformément aux articles L. 121 - 21 et suivants de ce même Code.

Par ailleurs, la destination professionnelle du prêt affecté ne résulte aucunement des dispositions de ce contrat, alors même qu'il est constant que les panneaux photovoltaïques ont fait l'objet d'une installation sur le toit de la maison d'habitation appartenant aux intimés.

En dernier lieu, il sera observé que les époux E... exercent respectivement les professions de moniteur éducateur et mécanicienne maroquinier et n'ont pas la qualité de commerçants, que les seuls actes susceptibles de revêtir un caractère commercial par nature ou par accessoire sont le contrat de vente d'électricité, dont l'exécution et la facturation ne requièrent aucune intervention de leur part, le contrat d'acquisition et de pose de l'installation photovoltaïque et le contrat de prêt destiné à son financement, tous deux signés à l'occasion d'un démarchage à domicile, et que de tels actes ne sauraient caractériser une activité commerciale ou même professionnelle, mais s'inscrivent dans le projet de réduire les dépenses énergétiques par l'installation de quelques panneaux photovoltaïques sur le propre toit de leur habitation.

L'installation photovoltaïque financée au moyen du prêt souscrit par les époux E... est donc principalement destinée à un usage personnel des emprunteurs.

Il doit être ajouté qu'en raison de l'autonomie existant entre le droit contractuel de la consommation et le droit fiscal, la circonstance alléguée par l'appelante selon laquelle les particuliers producteurs d'énergie sont imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux conformément à l'article 34 du Code général des impôts, de même que la référence à la décision rendue le 20 juin 2013 par la CJUE, apparaissent inopérantes en l'espèce.

En conséquence, c'est à juste titre que le premier juge a considéré qu'il y avait lieu de retenir l'application des dispositions du Code de la consommation dans le cadre du présent litige.

II) sur la prescription invoquée par la société BNP Paribas Personal Finance :

La banque soutient à cet égard que les demandes de Monsieur et Madame E... seraient irrecevables en raison de la prescription encourue et fait grief à la décision entreprise d'avoir retenu que ce n'est qu'à compter du raccordement ou de la mise en service de l'installation qu'ils auraient connu ou auraient dû connaître les faits leur permettant d'exercer leur action en nullité.

Il convient de rappeler que selon l'article 2224 du Code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par 5 ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Monsieur et Madame E... fondent, en premier lieu, leur demande d'annulation du contrat souscrit auprès du Groupe Solaire de France sur le non-respect des dispositions impératives du Code de la consommation, dont il a été indiqué supra qu'elles étaient applicables au présent litige. À cet égard, les intimés invoquent le non-respect des mentions obligatoires devant figurer sur le bon de commande selon les dispositions de l'article L. 121-23 ancien du Code de la consommation - en l'occurrence l'absence de désignation précise de la nature et des caractéristiques des marchandises ou objets offerts ou services proposés, l'absence des conditions d'exécution du contrat et des délais de livraison des panneaux, l'absence d'indication du nom de l'établissement de crédit, des modalités de financement et du détail du coût de l'installation ainsi que le non-respect des dispositions concernant le droit de rétractation. Il convient, cependant, de considérer que Monsieur et Madame E..., qui ne démontrent pas avoir été dans l'impossibilité d'agir, ont connu ou à tout le moins auraient dû connaître les faits permettant d'exercer leur action en nullité pour ce motif dès la signature du contrat de vente en date du 14 septembre 2011, dès lors que les signataires du contrat étaient à même de constater par eux-mêmes l'éventuelle non-conformité alléguée lors de la signature de l'acte.

Il en résulte nécessairement que, contrairement à ce qui a été retenu par le premier juge, l'action formée par assignation du 2 mai 2017 par Monsieur et Madame E... au titre de la méconnaissance des dispositions du Code de la consommation et tendant à la nullité du contrat principal du 14 septembre 2011 se trouve atteinte par la prescription quinquennale.

En second lieu, les intimés concluent à la nullité du contrat principal et à l'annulation subséquente du contrat de crédit affecté en faisant valoir que leur consentement a été vicié par dol au sens des dispositions de l'article 1109 du Code civil selon lequel " il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol ".

Il convient de rappeler que selon l'article 1144 du Code civil, le délai de l'action en nullité ne court, en cas d'erreur ou de dol, que du jour où ils ont été découverts et, en cas de violence, que du jour où elle a cessé.

Il y a lieu en conséquence de considérer que Monsieur et Madame E... n'ont eu connaissance des éléments qu'ils invoquent à l'appui de leur demande d'annulation du contrat pour cause de dol qu'au jour où ils ont reçu les premiers revenus énergétiques, c'est-à-dire en l'espèce le 3 mai 2013, date d'établissement de la première facture de production.

En conséquence, l'action en nullité pour cause de dol engagée dans les 5 ans de cette dernière date ne se trouve pas atteinte par la prescription quinquennale, ainsi que cela a été pertinemment retenu par le premier juge ; il en est de même s'agissant de la demande de nullité du contrat principal pour absence de cause.

III) sur le bien-fondé de la demande de Monsieur et Madame E... tendant à l'annulation du contrat principal :

Conformément à ce qui précède, il y a lieu d'examiner le bien-fondé des demandes des intimés sur le seul fondement du dol dont ils soutiennent avoir fait l'objet ainsi que sur l'absence de cause du contrat.

Selon l'article 1116 ancien du Code civil, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas, et doit être prouvé. S'appropriant la jurisprudence dégagée sous l'empire du texte ancien, l'article 1137 nouveau précise que constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.

Monsieur et Madame E... soutiennent en substance que la société Groupe Solaire de France ne les a pas informés que le projet n'était pas autofinancé et qu'ils n'ont obtenu aucun élément d'information concernant le délai de raccordement, l'assurance obligatoire à souscrire en cas d'acquisition de tels matériels, la location obligatoire d'un compteur de production auprès d'EDF sur 20 ans ainsi que la durée de vie des matériels et notamment de l'onduleur électrique.

Ils reprochent par ailleurs à la société Groupe Solaire de France d'avoir sciemment fait état de partenariats mensongers pour pénétrer dans leur maison d'habitation et de leur avoir présenté de manière fallacieuse la rentabilité de l'installation.

Cependant, outre que la documentation commerciale et technique qui a été remise aux époux E... dans le cadre du démarchage à leur domicile et dont ils se prévalent pour tenter d'établir l'existence d'un dol à d'autres égards, est complète et leur permettait de connaître les caractéristiques essentielles de l'installation vendue, le manquement invoqué a été d'autant moins déterminant de leur consentement qu'ils ont persisté à poursuivre l'exécution du contrat après avoir reçu la facture mentionnant les principales caractéristiques de l'installation vendue.

En deuxième lieu, les époux E... soutiennent que le dol résulterait de l'absence d'information concernant le délai de raccordement, l'assurance obligatoire souscrite en cas d'acquisition de tels matériels, la location obligatoire d'un compteur de production durant vingt ans et la durée de vie des matériels et notamment celle de l'onduleur, la nécessité de procéder à la désinstallation des matériels et à la remise de la toiture dans son état initial à l'issue de l'exploitation.

Cependant, BNP Paribas Personal Finance fait observer, à juste titre, que le raccordement étant l'œuvre d'ERDF, le cocontractant principal ne peut donner de délai précis relativement à l'exécution de cette prestation qui ne dépend pas de lui. Il doit être souligné, en outre, que les époux E... ne précisent pas en quoi la durée de raccordement peut avoir un caractère déterminant de leur consentement, ni quelle a été la durée effective du délai de raccordement de leur installation.

BNP Paribas Personal Finance soutient encore, de manière pertinente, que le prix de revente de l'électricité, largement subventionné, est fixé par les pouvoirs publics et que le cocontractant ne peut donc s'engager sur un quelconque prix, sauf à prendre le risque, lourd de conséquences pour son équilibre financier, d'être contractuellement tenu de garantir ce prix.

Selon les explications et pièces fournies par les parties, il n'est pas établi que la durée de vie moyenne d'un onduleur serait de cinq ans seulement ainsi que cela est soutenu par Monsieur et Madame E.... Il n'est donc pas démontré que le silence qu'aurait gardé le cocontractant principal sur le coût de ce remplacement tout au long de la période d'exploitation, à supposer encore qu'un tel silence eût été gardé, aurait eu un caractère déterminant du consentement de ces derniers. Par ailleurs, les intimés ne justifient aucunement que le coût de la location obligatoire d'un compteur de production auprès de la société EDF serait d'un montant tel qu'il puisse être déterminant de leur consentement à une telle installation.

Enfin, si on peut admettre que le coût de désinstallation des matériels et de remise en état de la toiture à l'issue de la période d'exploitation n'est pas négligeable, il n'est pas établi que la période d'exploitation serait limitée à 20 ans, de sorte que ce coût doit être relativisé. En outre, les époux E..., à qui incombe la charge de la preuve, n'établissent pas que leur cocontractant aurait gardé le silence à ce sujet. D'autre part, les époux E... font valoir que la société Groupe Solaire de France a fait état d'un partenariat illusoire avec GDF Suez ou EDF pour les mettre en confiance et les inciter à signer le bon de commande et que l'utilisation de cette image a été déterminante de leur consentement.

Cependant, l'examen tant du bon de commande que de la plaquette commerciale ne fait nullement état d'un partenariat avec EDF, mais exclusivement avec GDF Suez. Ce dernier partenariat, qui figure uniquement sur la plaquette et non sur le bon de commande, est justifié par la commercialisation d'un chauffe-eau solaire dénommé Clipsol GDF Suez, ainsi que cela est soutenu à juste titre par la société BNP Paribas Personal Finance. Il y est fait expressément référence dans la page introductive à la commercialisation de ce chauffe-eau solaire et en aucune manière dans celle relative à la commercialisation du solaire photovoltaïque. Il ne peut donc être sérieusement soutenu que ce partenariat affiché avec GDF Suez d'une part était fallacieux et d'autre part aurait pu être déterminant du consentement des intimés.

En quatrième lieu, les époux E... prétendent que les agissements dolosifs sont caractérisés par la présentation fallacieuse de la rentabilité de l'installation dont la puissance exprimée en watts-crêtes correspond à une capacité de production maximale, alors que le rendement est conditionné par la situation météorologique future, une durée de vie de l'installation ne dépassant pas 20 ans et à la fixation du prix de revente de l'électricité.

Cependant, les intimés n'expliquent pas en quoi la mention d'une puissance exprimée en watts-crêtes correspondant à une capacité de production maximale participerait d'une présentation fallacieuse de la rentabilité de l'installation, alors qu'il s'agit là d'une simple caractéristique technique objective de tous les panneaux photovoltaïques figurant sur le marché. Il ne résulte, en tout état de cause, d'aucun élément du dossier que l'entreprise se serait engagée vis-à-vis des intimés à un certain seuil de rentabilité qui n'aurait pas été atteint, étant à cet égard observé que le calcul du retour sur investissement dépend d'éléments aléatoires échappant à cette société, tel que le prix de l'énergie revendue ou encore l'existence de dispositions fiscales.

Il doit être relevé, enfin, que Monsieur et Madame E... ne peuvent utilement soutenir que leur signature du contrat le 14 septembre 2011 ne leur permettait pas de s'apercevoir qu'ils s'engageaient immédiatement, et qu'il se serait agi d'une simple demande de postulation à un programme, alors même que le détail des prestations était indiqué ainsi que son prix global, et que figurait, sur le document signé, un formulaire détachable en vue de l'exercice éventuel du droit de rétractation.

En conséquence de ce qui précède, la demande de Monsieur et Madame E... fondée sur l'existence de manœuvres dolosives ne peut qu'être rejetée.

Les intimés concluent, par ailleurs, à la nullité du contrat principal pour absence de cause en application des dispositions de l'article 1108 du Code civil qui requiert, pour la validité d'une convention, " une cause licite dans l'obligation " ainsi que sur les dispositions de l'article 1131 du même Code dans sa rédaction applicable aux faits de la cause.

Ils soutiennent, en particulier, que si la cause de leur obligation était bien le transfert de propriété des panneaux photovoltaïques et de l'ensemble du matériel, ainsi que la prestation de service prévu, la cause du contrat de vente lui-même consiste dans l'autofinancement qui a été le mobile déterminant, soutenant que la centrale photovoltaïque étant " des plus ruineuses ", l'utilité du contrat apparaît totalement dérisoire.

Toutefois, la cause du contrat souscrit par Monsieur et Madame E... réside dans l'obligation du vendeur à qui incombaient la livraison, la pose et la mise en service d'une installation photovoltaïque, ce qui a été réalisé selon les pièces du dossier, de sorte que les intimés ne sont pas fondés à exciper d'une telle absence de cause pour solliciter l'annulation du contrat principal.

IV) sur la demande de Monsieur et Madame E... relative à la nullité du contrat de crédit affecté :

Selon l'article L. 311-32 du Code de la consommation, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé. En l'absence de nullité du contrat principal pour dol ou violation du formalisme exigé en matière de démarchage à domicile, le contrat de crédit affecté n'encourt aucune annulation par application des dispositions précitées.

À titre subsidiaire, Monsieur et Madame E... invoquent les dispositions des articles L. 311-35 et L. 311-13 du Code de la consommation, dans leur rédaction en vigueur au jour de la conclusion du contrat, selon lesquelles le contrat accepté par l'emprunteur ne devient parfait qu'à la double condition que ledit emprunteur n'ait pas usé de sa faculté de rétractation et que le prêteur ait fait connaître à l'emprunteur sa décision d'accorder le crédit, dans un délai de 7 jours.

Il convient toutefois de rappeler que ce texte, après avoir indiqué que " l'agrément de la personne de l'emprunteur est réputé refusé si, à l'expiration de ce délai, la décision d'accorder le crédit n'a pas été portée à la connaissance de l'intéressé " ajoute que " l'agrément de la personne de l'emprunteur parvenu à sa connaissance après l'expiration de ce délai reste néanmoins valable si celui-ci entend toujours bénéficier du crédit, la mise à disposition des fonds au-delà du délai de 7 jours mentionné à l'article L. 311-14 vaut agrément de l'emprunteur par le prêteur ".

Or les intimés ne rapportent pas la preuve qu'ils auraient indiqué au prêteur, après réception de son accord, qu'ils ne souhaitaient plus bénéficier du crédit, laissant, au contraire, le vendeur procéder à l'installation et remboursant les échéances du crédit.

En conséquence, la demande de Monsieur et Madame E... tendant à l'annulation du contrat de crédit ne pourra qu'être rejetée.

V) Sur les conséquences de l'absence de nullité du contrat principal et du contrat de crédit affecté :

Les demandes de nullité du contrat principal et du contrat de crédit affecté ayant été rejetées, les époux E... doivent procéder au remboursement des sommes empruntées, selon l'échéancier contractuellement prévu, sans pouvoir opposer au prêteur une faute de nature à le priver de sa créance de restitution et résultant, en premier lieu, du défaut de vérification de la validité du contrat principal puisque, par hypothèse, ce dernier ne peut être considéré comme nul.

De même, en second lieu, en présence d'un contrat principal et d'un contrat de crédit affecté dont la validité a été reconnue, les époux E... ne sauraient se soustraire à l'exécution de leurs obligations contractuelles au motif que l'appelante ne justifierait pas de l'accréditation du vendeur à distribuer le crédit ou encore de la formation ou de la capacité du démarcheur.

Les époux E... ne peuvent opposer au prêteur la faute qu'il aurait commise, en troisième lieu, en s'associant au dol commis par son prescripteur, la société Nouvelle Régie des Jonctions des Énergies de France, alors que le dol a été écarté comme cause de nullité du contrat principal et que, par voie de conséquence, le contrat de crédit est lui-même valide.

En quatrième lieu, et s'agissant du manquement allégué à des obligations de surveillance, de vigilance, de conseil et de mise en garde, la cour observe qu'il n'appartient pas au prêteur, qui n'a aucune compétence en la matière et ne peut s'immiscer dans la formation du contrat principal, d'informer l'emprunteur des risques concernant la rentabilité de l'opération financée, étant surabondamment observé que le dol tenant à la rentabilité de l'opération a été écarté.

Les époux E... se bornent encore à faire état d'un manquement théorique au devoir de mise en garde au regard de leurs capacités financières, sans préciser concrètement en quoi la banque aurait manqué à ce devoir, étant là encore observé surabondamment que le prêteur produit la fiche de solvabilité signée par les emprunteurs faisant apparaître des revenus mensuels de 3 200 euros et des charges de 364,26 euros, ce qui porte l'endettement global des emprunteurs à environ 18 % de leurs ressources, soit un ratio parfaitement acceptable.

Il sera en outre observé qu'en signant l'offre préalable, Monsieur et Madame E... ont expressément reconnu avoir reçu la Fiche d'Information Pré Contractuelle Normalisée prévue aux articles L. 311-6 et R. 311-3 du Code de la consommation.

Les époux E... ne peuvent pas davantage, pour faire obstacle à la restitution des fonds prêtés, opposer au prêteur une faute qu'il aurait commise, en cinquième lieu, dans la libération des fonds et consistant en une absence de vérification de l'accomplissement effectif et complet de la prestation financée. En effet, si la jurisprudence déduit de l'article L. 311-31 du Code de la consommation, selon lequel les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation, qu'en l'absence même de nullité demandée du contrat principal, l'emprunteur peut théoriquement se prévaloir des dispositions de ce texte pour s'opposer au remboursement du capital emprunté, c'est sous réserve que la preuve de l'exécution complète du contrat principal ne soit pas autrement rapportée.

Or, il est établi, en l'occurrence, que les époux E... ont conclu le 27 juin 2012, avec EDF, un contrat d'achat de l'énergie électrique produite par leur installation photovoltaïque ayant pris effet au 3 mai 2012 et que cette installation est productive d'électricité pour avoir donné lieu au moins à des facturations annuelles.

Ainsi, il est constant que la prestation promise par la société Nouvelle Régie des Jonctions des Énergies de France a nécessairement été exécutée de manière parfaite et complète, de sorte que les dispositions de l'article L. 311-31 ne sauraient être invoquées par les emprunteurs pour se soustraire à l'obligation de remboursement du capital emprunté.

En conséquence, les époux E... non seulement ne peuvent opposer au prêteur la privation du droit de demander le remboursement du capital prêté, mais encore ne peuvent solliciter le remboursement des échéances payées en exécution d'un contrat dont la nullité a été écartée.

Les contrats ayant été déclarés valides, les époux E... ne peuvent davantage demander le paiement d'une somme de 15 500 euros à titre de dommages-intérêts pour perte de chance de ne pas contracter, d'une autre somme de 2 160 euros au titre des frais de remise en état de la toiture, d'une somme de 5 000 euros au titre de leur préjudice financier et des troubles de jouissance et d'une dernière somme de 3 000 euros au titre de leur préjudice moral.

Les époux E... succombant en l'ensemble de leurs prétentions supporteront les dépens de première instance et d'appel.

L'équité ne commande pas de faire application en la cause des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs : LA COUR, - Infirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société BNP Paribas Personal Finance et déclaré recevable l'action de Monsieur et Madame E... tendant à l'annulation du contrat du 14 septembre 2011 pour dol et absence de cause ; Et, statuant à nouveau sur les chefs réformés, - Déboute Monsieur et Madame E... de l'intégralité de leurs demandes ; - Déboute la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande formée en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; - Rejette toutes autres demandes, plus amples ou contraires ; - Dit que Monsieur et Madame E... seront tenus aux entiers dépens de première instance et d'appel.