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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 10, 28 octobre 2019, n° 19/00823

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Alliance MJ (ès qual.), SED Exploitation (SARL)

Défendeur :

Orange (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Loos

Conseillers :

Mmes Castermans, Simon-Rossenthal

T. com. Paris, du 15 déc. 2014

15 décembre 2014

FAITS ET PROCÉDURE

La société SED exploitation, créée en 1997, filiale du groupe SED spécialisée dans l'installation et l'équipements d'antennes de télécommunication, a entretenu avec la société Orange des relations contractuelles.

Les relations sont devenues conflictuelles en 2003, la société SED Exploitation (la société SED), reprochant à la société Orange de ne pas respecter les délais de paiement contractuels.

Le 12 juillet 2004, ces sociétés ont conclu un accord transactionnel portant sur les modalités de paiement des sommes dues par la société Orange, puis, le 26 avril 2006, un contrat stipulant qu'en cas de litige relatif au contrat, les parties convenaient de se réunir dans les sept jours à compter de la réception d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception notifiant le litige, envoyée par la partie la plus diligente à l'autre partie, en vue de trouver une solution amiable et que si, au terme d'un délai d'un mois à compter de la date de la première réunion entre les parties, celles-ci ne parvenaient pas à se mettre d'accord sur une solution amiable, le litige pourrait alors être soumis par la partie la plus diligente aux tribunaux compétents de Paris auxquels les parties attribuaient exclusivement compétence.

La société SED a été placée en liquidation judiciaire courant 2008, Maître X et la société Alliance MJ étant désignés successivement liquidateur.

Maître X, ès qualités, a reproché à la société Orange de payer avec retard.

Par acte du 30 juillet 2010, Maître X, ès qualités, a assigné la société Orange en paiement de dommages-intérêts et d'une certaine somme au titre de l'exécution du protocole transactionnel. La société Orange a soulevé l'irrecevabilité de la demande pour défaut de mise en œuvre de la tentative préalable de règlement amiable prévue au contrat.

Par jugement du 9 avril 2013, le tribunal de commerce de Lyon s'est déclaré incompétent et a renvoyé l'affaire devant le tribunal de commerce de Paris.

Vu le jugement prononcé le 15 décembre 2014 par le tribunal de commerce de Paris qui a :

- dit Maître X ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL SED Exploitation recevable ;

- condamné la SA Orange venant aux droits de Orange France à régler à Maître X ès qualités de liquidateur judiciaire, la somme de 34 157,76 euros TTC, outre intérêts au taux légal depuis le 4 mai 2007 au titre de l'exécution du protocole transactionnel du 12 juillet 2004 ;

- condamné la SA Orange venant aux droits de Orange France à régler à Maître X ès qualités de liquidateur judiciaire la somme de 120 000 euros à titre de dommages et intérêts pour réparation du préjudice financier subi par les retards de paiement de factures ;

- débouté Maître X ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL SED Exploitation de ses autres demandes ;

- condamné la société Orange venant aux droits de Orange France à payer à Maître X ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL SED Exploitation la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement à charge pour Maître X ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL SED Exploitation de fournir une caution bancaire couvrant en cas d'exigibilité de leur remboursement éventuel toutes les sommes versées en exécution du présent jugement plus les intérêts éventuellement courus sur ces sommes ;

- condamné la société Orange aux dépens,

Vu l'arrêt prononcé le 17 février 2017 par la cour d'appel de paris qui a :

- infirmé le jugement entrepris,

Statuant à nouveau :

- Déclaré irrecevable en sa demande la Selarl Allliance MJ ès qualités de liquidateur judiciaire de la société SED Exploitation,

- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Fixé les dépens au passif de la société SED Exploitation,

Vu l'arrêt prononcé le 14 novembre 2018 par la chambre commerciale de la cour de cassation qui a cassé et annulé l'arrêt du 17 février 2017 en toutes ses dispositions et condamné la société Orange à verser à la société Alliance MJ, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société SED Exploitation,la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Vu la déclaration de saisine le 10 janvier 2019 de la Selarl Allliance MJ ès qualités de liquidateur judiciaire de la société SED Exploitation,

Vu les conclusions signifiées le 18 juin 2019 par la Selarl Alliance MJ venant aux droits de Maître X, mandataire judiciaire représentée par Maître Y, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société SED Exploitation, demanderesse à la saisine et appelante,

Vu les conclusions signifiées le 2 mai 2019 par la société Orange, défenderesse à la saisine et intimée,

La Selarl Alliance MJ venant aux droits de Maître X, mandataire judiciaire représentée par Maître Y, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société SED Exploitation, demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :

Infirmer partiellement le jugement rendu le 15 décembre 2014 par le tribunal de commerce de Paris ;

Et statuant à nouveau :

Vu les dispositions de l'article 122 du Code de procédure civile

Confirmer le jugement rendu le 15 décembre 2014 par le tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a déclaré recevables les demandes de Selarl Allliance MJ, venant aux droits de la Selarl MDP, es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL SED Exploitation, Juger que les relations commerciales entre les sociétés Orange et SED Exploitation n'étaient pas limitées au contrat n° 397366 régularisé entre les parties le 26 avril 2006, pour y être non seulement antérieures et postérieures, mais également plus variées que celles prescrites dans ledit contrat,

Rejeter en conséquence la demande d'irrecevabilité formulée par la société Orange s'agissant des demandes autres que celles fondées sur le protocole régularisé le 12 juillet 2004 de la Selarl Alliance MJ, venant aux droits de la Selarl MDP, es-qualité de liquidateur judiciaire de la société SED Exploitation,

Vu les dispositions des articles L. 442-6 I 5° du Code de commerce et 1382 du Code civil,

Déclarer la Selarl Allliance MJ, venant aux droits de la Selarl MDP, es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL SED Exploitation recevable et bien fondée en son appel du jugement rendu le 15 décembre 2014 par le tribunal de commerce de Paris,

Y faisant droit ;

A titre principal,

Condamner la société Orange à réparer le préjudice subi par la Selarl Allliance MJ, venant aux droits de la Selarl MDP, es-qualité, du fait de la rupture brutale des relations commerciales établies, pour un montant de 6 320 486,71 euros, à titre de dommages-intérêts,

Fixer à tout le moins un montant forfaitaire au paiement duquel la société Orange sera condamnée en réparation du préjudice subi par la Selarl Allliance MJ, venant aux droits de la Selarl MDP, es-qualité, du fait de la rupture brutale des relations commerciales établies,

Subsidiairement,

Désigner tel Expert judiciaire qui lui plaira, aux frais avancés de la société Orange, aux fins d'évaluer le préjudice subi par la société SED Exploitation du fait de la rupture brutale des relations commerciales établies par la société Orange,

Vu les dispositions des articles L. 441-6 et L. 442-6, I, 7° et L. 442-6 I 2° b, du Code de commerce,

Déclarer la Selarl Allliance MJ, venant aux droits de la Selarl MDP, ès qualité de liquidateur judiciaire de la SARL SED Exploitation recevable et bien fondée en son appel du jugement rendu le 15 décembre 2014 par le tribunal de commerce de Paris,

Y faisant droit ;

Condamner la société Orange régler à la Selarl Alliance MJ, venant aux droits de la Selarl MDP, ès qualité, la somme de 579 037,18 euros à titre de dommages-intérêts pour réparation du préjudice financier subi par les retards de paiement de factures,

Condamner la société Orange à régler à la Selarl Alliance MJ, venant aux droits de la Selarl MDP, es-qualité, la somme de 1 726 090,54 euros à titre de dommages-intérêts en réparation des conditions imposées à la société SED,

Exploitation et de l'abus de dépendance économique dont elle s'est rendue coupable,

Vu les dispositions des articles 1134, 1147, 2044 et suivants anciens du Code civil ;

Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Orange à régler à la Selarl Alliance MJ, venant aux droits de la Selarl MDP, es-qualité, la somme de 34 157,76 euros T.T.C outre intérêts au taux légal depuis le 4 mai 2007 au titre de l'exécution du protocole transactionnel du 12 juillet 2004,

En tout état de cause :

Débouter la société Orange de l'ensemble de ses demandes,

Vu les dispositions des articles 696 et 700 du Code de procédure civile ;

Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Orange à régler à la Selarl Alliance MJ, venant aux droits de la Selarl MDP, es-qualité, la somme de 20 000 euros au titre des frais irrépétibles,

Y ajoutant,

Condamner la société Orange à régler à la Selarl Alliance MJ, venant aux droits de la Selarl MDP, ès qualité, une somme supplémentaire de 15 000 euros au titre des frais irrépétibles,

Condamner la société Orange en tous les dépens d'instance distraits au profit de la SCP RBM,

Dire qu'à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la décision à intervenir et qu'en cas d'exécution par voie extra judiciaire, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire en application des dispositions des articles 10 et suivants du décret du 12 décembre 1996 seront supportées intégralement par la société Orange.

La société Orange demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :

Infirmer la décision du tribunal de commerce de Paris du 15 décembre 2014 en ce qu'il a déclaré recevable en son action la Selarl Alliance MJ, venant aux droits de Maître X, ès qualité, et a partiellement fait droit à ses prétentions

S'agissant des demandes de 1 726 090,54 euros + 579 037,18 euros + 6 320 486,71, euros sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce, dire et juger la Selarl Alliance MJ, venant aux droits de Maître X, ès qualité, irrecevable au sens de l'article 122 du Code de procédure civile et ce, sans régularisation possible, faute pour la société SED exploitation d'avoir mis en œuvre la procédure préalable de recherche amiable d'une solution au litige conformément à l'article 23 du contrat du 26 avril 2006, applicable y compris à la terminaison des relations commerciales nouées entre les Parties, lesquelles n'avaient aucun autre cadre que ledit contrat.

Sur le fond,

Réformer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 15 décembre 2014 en ce qu'il a alloué à la Selarl Alliance MJ, venant aux droits de Maître X ès qualité, les sommes de :

* 34 157,76 euros TTC, outre intérêts au taux légal depuis le 4 mai 2007, au titre de l'exécution du protocole transactionnel du 12 juillet 2004

* 120 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation d'un préjudice financier tiré d'un paiement tardif de factures au titre duquel un montant de 579 037,18 euros était réclamé

* 20 000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC.

Statuant à nouveau sur ces points :

Débouter la Selarl Alliance MJ, venant aux droits de Maître X ès qualité de sa demande de paiement de la somme de 34 157,76 euros TTC au titre de l'exécution du protocole transactionnel du 12 juillet 2004 faute de preuve de la créance alléguée,

Débouter la Selarl Alliance MJ, venant aux droits de Maître X, ès qualité de sa demande de paiement de la somme de 579 037,18 euros en réparation d'un préjudice financier tiré d'un paiement tardif de factures, en l'absence de preuve d'une action volontaire de Orange laquelle était confrontée en permanence à des facturations non conformes au contrat voire ne correspondant à aucune prestation commandée par Orange

Confirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 15 décembre 2014 en ce qu'il a débouté la Selarl Alliance MJ, venant aux droits de Maître X, ès qualité, de ses demandes de paiement des sommes de :

* 1 726 090,54 euros sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce (demande anciennement fondée sur l'article 1147 du Code civil et d'un montant de 1 726 090,54 euros " +TVA ") en l'absence de toute faute tant contractuelle que délictuelle de la société Orange ;

* 6 320 486,71 euros sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce en l'absence de toute rupture brutale de la relation commerciale ayant existé entre les parties imputables à la société Orange ;

Subsidiairement,

Si par extraordinaire la responsabilité de la société Orange était retenue à quelque titre que ce soit, rejeter la demande d'expertise judiciaire aux frais avancés de Orange formée par la Selarl Alliance MJ, venant aux droits de Maître X ès qualité, aucune mesure de cet ordre n'ayant vocation à suppléer sa carence dans la preuve de son préjudice de surcroît en l'absence d'une comptabilité fiable de la société SED Exploitation et limiter à l'euro symbolique l'indemnisation allouée à la Selarl Alliance MJ, venant aux droits de Maître X, ès qualité, en l'absence de tout préjudice objectivement établi.

En toute hypothèse,

Condamner la Selarl Alliance MJ, venant aux droits de Maître X, ès qualité, à payer à la société Orange venant aux droits de la société Orange France une somme de 20 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de Maître Z conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.

SUR CE,

a) Sur la recevabilité des demandes

Considérant que les parties ont conclu le 26 avril 2006, un contrat intitulé " Recherche et négociation et renégociation de sites de radiocommunication mobile " ; que l'article 23 de cette convention stipule : " En cas de litige relatif au présent contrat, les parties conviennent de se réunir dans les sept (7) jours à compter de la réception d'une lettre recommandée avec avis de réception notifiant le litige, envoyée par la partie la plus diligente à l'autre partie, en vue de trouver une solution amiable.

Si au terme d'un délai d'un (1) mois à compter de la date de la première réunion entre les parties, celles-ci ne parviennent pas à se mettre d'accord sur une solution amiable, le litige pourra alors être soumis par la partie la plus diligente aux tribunaux compétents de Paris auxquels les parties attribuent exclusivement compétence " ;

Considérant que, par courrier recommandé du 22 janvier 2007 envoyé à Orange par SED Exploitation faisant suite aux difficultés consécutives à l'arrêt brutal des commandes, SED Exploitation a invité Orange à se rapprocher de son service juridique pour prendre connaissance des dispositions du Code de commerce concernant la rupture des relations commerciales établies ; qu'ensuite, par courrier recommandé avec accusé de réception du 6 juillet 2011, le conseil de la société SED Exploitation a invité Orange dans ses locaux en vue de trouver une solution amiable au litige en application de l'article 23 du contrat commercial du 26 avril 2006 ; qu'était jointe à ce courrier l'assignation délivrée à Orange le 30 juillet 2010 de comparaître devant le tribunal de commerce de Lyon lequel se déclarera incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris ;

Considérant que la Selarl Alliance MJ représentée par Maître X-P., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société SED Exploitation expose qu'il résulte de l'arrêt de la Cour de cassation du 14 novembre 2018 que seules les demandes fondées sur le contrat du 26 avril 2006 sont irrecevables pour absence de mise en œuvre de la clause de conciliation amiable ; qu'elle poursuit en développant que dans le cadre du présent litige le contrat du 26 avril 2006 ne constitue aucunement le socle contractuel unique de la relation commerciale et n'est visé qu'à titre d'élément de preuve en vue de démontrer la responsabilité délictuelle de la société Orange conformément à l'article L. 442-6 du Code de commerce ; que la clause de conciliation préalable ne serait dès lors nullement applicable ; que les demandes fondées sur le protocole du 12 juillet 2004 seraient également recevables s'agissant d'un acte juridique distinct des contrats du 26 avril 2006 ;

Considérant que, selon la société Orange, Maître X devrait être déclaré irrecevable compte tenu de l'absence de mise en œuvre préalable de la procédure de conciliation concernant ses demandes portant sur l'exécution ou l'inexécution et/ou la rupture, brutale ou non, des relations commerciales développées entre les parties dans le cadre du contrat du 26 avril 2006, seul fondement des relations d'affaires entre les parties, et au titre desquelles sont réclamées les sommes de 2 064 404,29 euros + 579 037,18 euros + 6 320 486,71 euros soit un total de 8 963 928,18 euros ;

Considérant, ceci étant observé, que la clause prévue à l'article 23 du contrat du 26 avril 2006 dont les termes ont été ci-dessus rappelés présente un caractère obligatoire ; que son non-respect constitue une fin de non-recevoir lorsque celle-ci est soulevée ;

Considérant que le courrier recommandé adressé le 22 janvier 2007 à la société Orange par la société SED Exploitation l'invitant à se rapprocher de son service juridique pour prendre connaissance des dispositions du Code de commerce sur la rupture des relations commerciales établies ne respecte pas la clause de conciliation prévue à l'article 23 du contrat du 26 avril 2006 ; que de même le courrier recommandé adressé le 6 juillet 2011 par le conseil de la société SED Exploitation à la société Orange proposant une réunion en vue de trouver une solution amiable n'est pas conforme à l'article 23 puisque l'assignation en justice avait été délivrée dès le 30 juillet 2010 ;

Considérant qu'il se déduit de ce qui précède que la société Orange est bien fondée à opposer une fin de non-recevoir tirée de non-respect de la procédure de conciliation aux seules demandes se rapportant au contrat du 26 avril 2006 ;

Considérant que cette irrecevabilité portera sur les demandes de paiement de la somme de 579 037,18 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice financier subi par les retards de paiement des factures et de la somme de 1 726 090,54 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des conditions imposées à la société SED Exploitation et de l'abus de dépendance économique ; qu'en effet les parties ont établi un protocole transactionnel le 12 juillet 2004 dont l'article 3 se rapporte à l'indemnisation des frais financiers générés par les retards de paiement de factures ; qu'il y est mentionné que ces frais arrêtés au 30 juin 2004 porteront sur la somme de 141 007,69 euros HT ; qu'en conséquence les nouvelles demandes se rapportent nécessairement aux retards pris dans l'exécution de contrat qui a ensuite été signé le 26 avril 2006 et qui comporte la clause de conciliation dont le non-respect a été ci-dessus constaté ; que les documents versés par l'appelante ne permettent pas d'isoler d'éventuels retards de paiement sur la période du 1er juillet 2004, date de poursuite des contrats non inclus dans le périmètre du protocole d'accord du 12 juillet 2004 au 26 avril 2006, date de prise d'effet du contrat n° 39736666 ;

Considérant que cette même motivation conduit à déclarer irrecevable la demande d'indemnisation au titre de l'abus de dépendance économique puisque cette demande présente un fondement contractuel et ne peut porter ni sur la période antérieure au protocole du 12 juillet 2004 ni sur les manquements au contrat du 26 avril 2006 ; que dans ses écritures la société appelante vise les articles 6, 7 et 8 du contrat du 26 avril 2006 et expose que leur absence de respect par la société Orange caractérise " un abus manifeste de dépendance économique " ;

Considérant que les seules demandes de la société appelante non frappées d'irrecevabilité portent sur l'allocation de la somme de 34 157,76 euros au titre de l'exécution du protocole transactionnel du 12 juillet 2004 et sur la somme de 6 320 486,71 euros au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies ; qu'en effet cette demande fondée sur l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce présente un fondement délictuel et n'est pas limitée au seul contrat du 26 avril 2006 mais porte sur l'ensemble des relations contractuelles susceptibles entretenues par les parties ;

b) Sur la demande au titre au protocole du 12 juillet 2004

Considérant que la société appelante expose qu'au terme du protocole d'accord du 12 juillet 2004 la société Orange devait lui verser sous 30 jours la somme globale et forfaitaire de 528 745,30 euros TTC ; que, sans motifs légitimes, la somme de 28 560 euros HT (4 x 7 140 euros) soit 34 157,76 euros n'a pas été acquittée ;

Mais considérant que la société SED Exploitation n'a jamais émis la moindre contestation sur les modalités selon lesquelles la société Orange s'est libérée des sommes prévues dans le protocole ; que seule une lettre de son conseil datée du 04 mai 2007 soit presque trois années plus tard mentionne que les sommes dues n'auraient pas été intégralement acquittées ; que cette contestation non étayée doit être rejetée ;

c) Sur la rupture des relations contractuelles établies

Considérant que la société SED Exploitation expose avoir entretenu des relations commerciales avec la société Orange depuis plus de 11 années à la fois au titre de la recherche et négociation et au titre d'un contrats de travaux (contrat n° 312819) ; qu'elle n'a reçu aucun préavis concernant la rupture de ce dernier ; que concernant les contrats " recherche et négociation ", la société Orange justifierait d'un unique appel d'offre le 10 décembre 2007 ; que la société qui expose n'avoir jamais été personnellement avisée de la rupture des relations commerciales en décembre 2008 rappelle qu'elle se trouvait sous la dépendance économique de la société Orange soutient qu'elle aurait dû bénéficier d'un préavis d'au moins 3 ans et que son fonds de commerce a disparu du fait la rupture ;

Considérant que la société Orange expose que les conditions de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce ne sont pas réunies puisqu'elle procède par voie d'appel d'offre exclusive d'espérance de pérennité et que la société SED Exploitation y a participé le 10 décembre 2017 ; que le contrat du 26 avril 2006 ne comporte aucun engagement de volumes ni en terme de site ou de chiffre d'affaires; que la société SED exploitation n'a pas répondu à une proposition faite le 19 mars 2008 de prorogation du contrat du 26 avril 2006 pour une durée de une année ;

Considérant, ceci étant observé, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce dans sa rédaction applicable au litige que :

" I.-Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers :

(...)

5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels (...) ".

Considérant que les parties s'accordent pour fixer à l'année 2007 le début de leurs relations commerciales ; que la société SED Exploitation verse aux débats les contrats de recherche et de négociation de sites conclus le 18 juillet 2003 (contrat n° 030FI62) puis le 26 avril 2006 (contrat n° 397 366) ; que des contrats ont également porté sur des travaux d'aménagement de site (contrat 312819 comportant un avenant du 26 avril 2006) ; qu'il est également constant qu'à compter de 2008 la société Orange n'a plus passé aucune commande à la société SED Exploitation; que des relations contractuelles établies se sont ainsi poursuivies pendant 11 années ;

Considérant que la société Orange se prévaut d'un appel d'offre portant sur une " consultation travaux BSS civil works des sites mobiles d'Orange France " auquel la société SED Exploitation a participé et adressant un dossier réceptionné par la société Orange le 10 décembre 2007, la société SED Exploitation n'ayant pas été retenue ; que cette situation rend légitime la fin des relations contractuelles relatives aux prestations " travaux " ;

Considérant que, concernant la rupture des relations contractuelles pour la partie recherche de sites, que la société Orange verse aux débats un courrier recommandé daté du 19 mars 2008 dans lequel elle propose à la société SED Exploitation la reconduction pour une durée de une année du contrat n° 397366 relatif à " la recherche et négociation et renégociation des sites de radiocommunication mobile " ; que le 15 avril 2008 la société Orange a adressé pour signature à la société SED Exploitation deux exemplaires originaux du contrat renouvelé ; que cette dernière n'y a pas donné suite ; qu'en conséquence , par courrier daté du 4 décembre 2008, la société Orange a indiqué à l'administrateur judiciaire de la société SED Exploitation que cette dernière n'avait ni retourné ni signé la proposition de renouvellement et qu'elle se trouvait dès lors à l'origine de la rupture des relations commerciales ;

Considérant qu'il se déduit de ce qui précède que la société SED Exploitation qui en est à l'origine est mal fondée à reprocher à la société Orange la rupture de relations contractuelles établies.

Par ces motifs : LA COUR, Infirme le jugement déféré ; Statuant de nouveau : Dit la Selarl Alliance MJ venant aux droits de Maître X, mandataire judiciaire représentée par Maître Y, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société SED Exploitation irrecevable en ses demandes de paiement au titre du préjudice financier subi par les retards de paiement et pour abus de dépendance économique ; Déboute la Selarl Alliance MJ venant aux droits de Maître X, mandataire judiciaire représentée par Maître Y, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société SED Exploitation de ses demandes au titre du protocole du 12 juillet 2004 et pour rupture de relations commerciales établies ; Condamne la Selarl Alliance MJ venant aux droits de Maître X, mandataire judiciaire représentée par Maître Y, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société SED Exploitation à verser à la société Orange la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; Rejette toutes autres demandes ; Ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective et accorde à Maître Pascale F., avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.