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Décisions

CA Douai, 3e ch., 24 octobre 2019, n° 18-03212

DOUAI

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Décathlon (Sté)

Défendeur :

MSA Alpes Vaucluse (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Château

Conseillers :

M. Pety, Mme Lamotte

TGI Lille, du 26 avr. 2018

26 avril 2018

Exposé du litige

Thibault V., né le 29 avril 2002, a présenté une réaction cutanée au niveau de la zone de contact des protège tibias de marque Kipsta PRT F350 Orange, acquis le 3 septembre 2013 au sein du magasin Décathlon Le Pontet Avignon Nord, ce qui a conduit son père, M. Dominique V., a prendre contact avec la société Décathlon au mois de janvier 2014.

Après plusieurs échanges de mails et de courriers et la réalisation de différentes analyses, M. Dominique V. et Mme Nathalie V. (ci-après les époux V.), agissant tant en leur nom personnel qu'en leur qualité de représentants légaux de leur fils mineur, Thibault V., ont fait assigner, par acte du 11 juin 2014, la société Décathlon devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Lille aux fins d'expertise médicale de leur fils et d'expertise technique.

Selon ordonnance du 12 août 2014, le juge des référés du tribunal de grande instance de Lille a fait droit à leur demande et désigné le docteur F. pour y procéder.

Selon ordonnance du 8 septembre 2014, le juge chargé du contrôle des expertises du tribunal de grande instance de Lille a désigné le docteur C. en remplacement du docteur F. pour la réalisation de l'expertise.

Selon ordonnance du 5 novembre 2014, le juge chargé du contrôle des expertises du tribunal de grande instance de Lille a désigné le docteur F. en remplacement du docteur C. pour la réalisation de l'expertise.

Le docteur F., après s'être adjoint les services d'un sapiteur, le docteur D., a déposé son rapport définitif le 29 septembre 2016.

Suivant actes du 22 décembre 2016 et du 10 janvier 2017, les époux V., agissant tant en leur nom personnel qu'en leur qualité de représentants légaux de leur fils mineur, Thibault V., ont fait assigner la société Décathlon et la Mutuelle MSA Alpes Vaucluse (ci-après la MSA) devant le tribunal de grande instance Lille aux fins de voir mis en œuvre la responsabilité du vendeur et d'indemnisation de leur préjudice.

Selon jugement du 26 avril 2018, le tribunal de grande instance Lille a :

- dit que la société Décathlon engage sa responsabilité en raison de la défectuosité des protège tibias de marque Kipsta modèle F350 de couleur orange,

- condamné la société Décathlon à payer à Thibault V., représenté par les époux V., les sommes suivantes en réparation de son préjudice corporel :

• 3 051,58 euros au titre des frais divers,

• 1 820 euros au titre de l'assistance tierce personne temporaire,

• 1 050 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,

• 3 000 euros au titre des souffrances endurées,

• 1 500 euros au titre du préjudice esthétique temporaire,

• 16 229,52 euros au titre des dépenses de santé futures restant à charge,

• 3 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,

• 500 euros au titre du préjudice d'agrément,

• 1 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent,

- condamné la société Décathlon à payer à la MSA les sommes suivantes :

• 872,26 euros au titre des prestations servies à la victime,

• 290,92 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion,

- condamné la société Décathlon aux dépens, en ce compris les frais de référé et d'expertise judiciaire, et à payer au titre des frais non répétibles les sommes suivantes :

• 3 500 euros à Thibault V., représenté par ses parents, ainsi qu'aux époux V.,

• 800 euros à la MSA.

Par déclaration du 5 juin 2018, la société Décathlon a relevé appel de l'ensemble des chefs du dispositif du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Lille le 26 avril 2018, et ce dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas critiquées.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 4 janvier 2019, la société Décathlon demande à la cour, au visa des articles 1245 et suivants du Code civil, anciennement 1386-1 et suivants, d'infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

- dit que la société Décathlon engage sa responsabilité en raison de la défectuosité des protège tibias de marque Kipsta modèle F350 de couleur orange,

- condamné la société Décathlon à payer à Thibault V., représenté par les époux V., les sommes suivantes en réparation de son préjudice corporel :

• 3 051,58 euros au titre des frais divers,

• 1 820 euros au titre de l'assistance tierce personne temporaire,

• 1 050 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,

• 3 000 euros au titre des souffrances endurées,

• 1 500 euros au titre du préjudice esthétique temporaire,

• 16 229,52 euros au titre des dépenses de santé futures restant à charge,

• 3 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,

• 500 euros au titre du préjudice d'agrément,

• 1 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent,

- condamné la société Décathlon à payer à la MSA les sommes suivantes :

• 872,26 euros au titre des prestations servies à la victime,

• 290,92 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion,

- condamné la société Décathlon aux dépens, en ce compris les frais de référé et d'expertise judiciaire, et à payer au titre des frais non répétibles les sommes suivantes :

• 3 500 euros à Thibault V., représenté par ses parents, ainsi qu'aux époux V.,

• 800 euros à la MSA,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes.

Elle demande ensuite à la cour de statuer à nouveau sur les points réformés et de :

- à titre principal, infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et :

• dire que les conditions pour engager sa responsabilité au titre de la responsabilité des produits défectueux dans le cadre de la vente de protège tibias de marque Kipsta utilisés par Thibault V. ne sont ni réunies, ni démontrées,

• par conséquent, dire n'avoir lieu à aucune indemnisation du préjudice subi ni remboursements des débours exposés,

• débouter les époux V. et la MSA de l'intégralité de leurs demandes,

- à titre subsidiaire, si par exceptionnel sa responsabilité était retenue,

• à titre principal, dire que le préjudice subi par Thibault V. et ses parents ne peut dépasser une durée de 5 jours et infirmer par conséquent le jugement dont appel,

• à titre subsidiaire, infirmer le jugement en ce qu'il a :

* accordée une somme de 872,76 euros à la MSA au titre des dépenses de santé restées à charge, somme qui n'est pas en lien avec le port des protège tibias Kipsta,

* accordé une somme de 16 229,52 euros au titre des dépenses de santé futures, le préjudice n'étant pas caractérisé,

- en tout état de cause,

• condamner, d'une part, les époux V., et, d'autre part, la MSA au versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel,

• débouter la MSA de son appel incident,

• débouter les époux V. et la MSA de leurs demandes en ce que ni le caractère défectueux, ni le lien du préjudice allégué avec l'utilisation des protège tibias Décathlon, ni le quantum du préjudice subi n'est établi.

Au soutien de ses prétentions, la société Décathlon expose que le rapport d'expertise judiciaire est critiquable et qu'il ne peut servir de fondement à sa condamnation au titre de la responsabilité des produits défectueux. Elle souligne que la charge de la preuve des produits défectueux pèse sur les demandeurs, et le rapport d'expertise, bien que critiquable, conclut en précisant que 'le cas rapporté ne permet pas de conclure à une dangerosité du produit. Il y a eu une réaction individuelle qui a été la seule préoccupation de l'expert'. Elle met ensuite en avant les circonstances suivantes :

• l'utilisation d'autres équipements sportifs (chaussure et gants) qui ont provoqué une réaction allergique,

• l'achat le 13 janvier 2014 d'une autre paire de protège tibias qui a été portée par Thibault V. après l'arrêt du port des protège tibias Kipsta, lesdits protège tibias acquis étant de marque Adidas, et précision faite que cet élément n'avait pas été porté à sa connaissance.

La société Décathlon critique ensuite le raisonnement tenu par l'expert judiciaire en ce que :

• le constat sur photographie d'une réaction allergique au niveau de la surface de contact des protège tibia n'est pas un élément suffisant pour incriminer les protège tibias qu'elle vend,

• la pathologie de Thibault V. a continué de progresser sur l'ensemble du corps malgré l'arrêt du port des protège tibias Décathlon,

• la seule photographie produite datait du 4 juin 2014 avant la première réunion d'expertise, soit 5 mois après l'arrêt du port des protège tibias de sa marque et alors qu'une autre paire de protège tibias de marque Adidas a été portée,

• Thibault V. a également porté des gants de football et des semelles qui ont provoqué une réaction allergique comme le montre le compte rendu de consultation au CHRU de Montpellier en date du 4 septembre 2014,

• cette réaction allergique aux gants de football et aux semelles de basket n'est pas mentionnée par l'expert judiciaire.

Elle en conclut qu'il ne peut être établi aucune corrélation entre la réaction cutanée constatée sur les zones de contact des protège tibias et la réaction cutanée constatée sur le reste du corps, notamment les mains et les pieds.

Sur les conséquences du port du protège tibias de marque Adidas, elle souligne que :

• M. V. les a achetés le 13 janvier 2014 dans un de ses magasins,

• contrairement à ce qu'il prétend, ces protège tibias ne sont pas hypoallergéniques,

• Thibault V. a arrêté la pratique du football en avril/mai 2014, de sorte qu'il a nécessairement porté des protège tibias postérieurement à janvier 2014.

Elle en conclut qu'aucun lien de causalité n'est établi de manière certaine avec ses protège tibias et que l'expert, loin de tirer les conséquences de ces incohérences, s'est contenté d'évoquer des zones d'ombres.

Sur les mesures d'investigations menées par le CHRU de Montpellier, elle souligne qu'en dépit des affirmations des experts selon laquelle le protège tibia incriminé contient de l'acétophénone azine, elle ne dispose pas des éléments permettant de confirmer cette affirmation, notamment le résultat des analyses qui ont été faites. Sur l'article scientifique du docteur Raison P., elle met en avant le fait qu'il est incomplet puisque son auteur n'avait pas connaissance de ce que l'enfant avait porté des gants et une autre paire de protège tibias, ce qui confirme l'absence de preuve de l'imputabilité de la réaction allergique au port de ses protège tibias. Elle souligne également le fait que l'expert judiciaire n'a pu obtenir les résultats du laboratoire mandaté par le CHRU de Montpellier. Elle en conclut qu'aucun document ne permet de justifier de la présence de l'acétophénone azine dans les protège tibias.

Sur l'absence d'explications quant à la réactivation allergique et son développement sur l'ensemble du corps de l'enfant malgré l'arrêt des protège tibias incriminés, elle précise qu'elle s'est produite en mai 2014 et que rien ne l'explique. Elle ajoute qu'à cette date, les protège tibias n'étaient plus portés et que l'enfant présentait un terrain allergique plurifactoriel, le rappel étant fait que celui-ci a porté d'autres équipements.

Elle soutient ensuite que Thibault V. présentait un état antérieur et des prédispositions, celui-ci ayant notamment fait une réaction allergique suite à un maquillage appliqué durant l'été. Elle précise que l'enfant a mal supporté son traitement par corticoïde et qu'il n'est pas exclu qu'il soit allergique à plusieurs composants, ce qui expliquerait le développement de sa réaction. Elle ajoute également que le port de ses protège tibias ne peut entraîner la réaction allergique sur tout le corps de l'enfant. Elle précise enfin que l'acétophénone azine ne se trouve que dans les mousses EVA, de sorte que l'utilisation de produits hypoallergéniques et de produits en coton est inutile. Elle en conclut que les conseils des experts sur cette utilisation démontrent en eux-mêmes que ses protège tibias ne sont pas à l'origine de la réaction.

Elle fait ensuite valoir que les conditions posées par les articles 1245 et suivants du Code civil ne sont pas remplies. Elle expose que :

• les époux V. ne démontrent pas le défaut du produit vendu en ce qu'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre ;

Elle explique que le seul constat d'une réaction allergique ne permet pas de considérer que le produit est défectueux. Elle souligne qu'il faut que le produit présente un défaut interne, un défaut de fabrication ou de conception. Elle ajoute que la simple implication du produit dans la réalisation du dommage ne suffit pas à démontrer son caractère défectueux.

Elle souligne encore que l'acétophénone azine n'est pas une substance allergène, et quand bien même 4 personnes ont pu présenter une réaction en Europe, cela ne démontre pas qu'elle avait connaissance d'un tel risque.

Elle soutient aussi qu'une réaction individuelle ne permet pas de considérer que le produit est défectueux, Thibault V. étant juste hypersensible à l'acétophénone azine.

• il n'existe pas de défaut d'information de sa part ;

Elle soutient que pour démontrer un manquement à un devoir d'information de sa part, il faut qu'elle ait ou devait, en l'état des connaissances scientifiques, avoir connaissance d'un tel risque, et que ce risque constitue un danger anormal. Or, selon la notice des protège tibias, elle précise qu'ils sont composés à 100 % de mousse EVA. Elle explique, d'une part, que le risque lié à la présence de l'acétophénone azine ne peut être considéré comme un danger anormal ou excessif, et rappelle, d'autre part, que l'acétophénone azine, n'entre pas dans le process de fabrication. Elle soutient qu'elle ne pouvait pas raisonnablement prévoir une telle réaction de l'acétophénone azine sur Thibault V., car cette substance n'est pas dangereuse et parce que l'enfant y est hypersensible. Elle avance qu'il n'est pas possible, contrairement à ce qu'ont fait les premiers juges, de tirer de l'envoi d'un questionnaire aux époux V., élément faisant partie intégrante du processus habituel en cas de réclamation client, la connaissance par elle du risque allergique de ses protège tibias.

• il existe des causes d'exonération de sa responsabilité ;

Elle soutient que l'état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où le produit a été mis en circulation, n'a pas permis de déceler l'existence du défaut, et que compte tenu des circonstances, il faut considérer que le défaut ayant causé le dommage n'existait pas au moment où le produit a été mis en circulation par elle ou que ce défaut est né postérieurement. Elle s'appuie à ce titre sur l'article du docteur Raison P. du 23 février 2016 faisant état d'un nouvel allergène identifié dans l'EVA.

• le lien de causalité entre le défaut et le dommage allégué n'est pas démontré ;

Elle rappelle que Thibault V. a porté d'autres équipements sportifs et d'autres protège tibias, d'une marque différente. Elle souligne que le seul dommage qui serait en lien avec ses protège tibias serait une allergie qui a duré 5 jours. Elle indique que selon l'article du docteur Raison P., c'est le port des protège tibias Adidas en mai 2014 qui a justifié l'hospitalisation, et non le port de ses protège tibias, de sorte que la généralisation de l'éruption ne peut être lié au port des protège tibias Kipsta.

• le dommage subi n'est pas démontré ;

Elle soutient que le préjudice décrit dans le rapport d'expertise judiciaire est celui lié à l'allergie de Thibault V. et non celui imputable à ses protège tibias.

Si sa responsabilité devait être retenue, elle fait valoir que le dommage subi par Thibault V. ne peut résulter qu'en des symptômes qui ont duré 5 jours, de sorte que les intimés doivent être déboutés de leur demande de confirmation du jugement entrepris. Elle critique enfin les sommes allouées au titre des dépenses de santé actuelles et des dépenses de santé futures.

Dans leurs dernières conclusions notifiées le 29 novembre 2018, les époux V., agissant tant en leur nom personnel qu'ès qualités, demandent à la cour, au visa des articles 1245 (1386-1 ancien) et suivants du Code civil, de :

• confirmer le jugement dont appel :

- en ce qu'il a dit que la société Décathlon engage sa responsabilité en raison de la défectuosité des protège tibias de marque kipsta modèle F350,

- en toutes ses dispositions concernant l'indemnisation des différents préjudices subis par Thibault V.,

- en ce qu'il a condamné la société Décathlon aux dépens comprenant les frais de référé et d'expertise judiciaire, et à leur payer la somme de 3 500 euros au titre des frais non répétibles,

• condamner la société Décathlon aux dépens et à lui payer la somme de 5 000 euros au titre des frais non répétibles,

• dire l'arrêt à intervenir commun aux organismes sociaux appelés en la cause.

Au soutien de leurs prétentions, les époux V., agissant tant en leur nom personnel qu'ès qualites, font valoir que les critiques de la société Décathlon sur le rapport d'expertise judiciaire ne sont pas fondées et doivent être écartées.

Ils exposent ensuite que la responsabilité des produits défectueux est une responsabilité de plein droit du fabriquant qui ne peut s'en exonérer que dans des conditions strictes. Ils rappellent que la preuve du caractère défectueux peut résulter de présomptions graves, précises et concordantes. Ils ajoutent que la preuve peut aussi se faire par exclusion lorsqu'aucune autre cause que celle qui est avancée ne permet d'expliquer le dommage.

Ils avancent qu'aucune allergie ou autre lésion cutanée n'avait été constatée sur le corps ou une partie du corps de Thibault V. jusqu'au port des protège tibias litigieux, précision faite qu'il a fait un usage normal de ceux-ci et en application des règles élémentaires d'hygiène. Puis, ils expliquent que dans un courrier du 21 janvier 2014, le docteur S. a relevé que Thibault V. présentait une éruption urticarienne au niveau de la face antérieure des tibias, de sorte que c'est rapidement que Thibault V. a montré des signes allergiques au niveau de la zone de port des protège tibias. Ils soutiennent aussi qu'au vu du premier compte-rendu de consultation du 4 septembre 2014 et de la seconde consultation du 29 avril 2015, les substances contenues dans les protège tibias litigieux sont bien en lien direct avec les lésions subies par Thibault V..

Ils font encore valoir que le cas de Thibault V. n'est pas isolé, ce dont il résulte que sa réaction n'est pas isolée. Ils soutiennent que la réaction fortement allergique de leur enfant est due à la présence de l'acétophénone azine, qui est une substance allergène présente dans les mousses de copolymères. Ils s'appuient pour cela sur un article du 4 décembre 2017 et précisent que l'acétophénone azine a été incriminée dans la survenue sévère de réactions allergiques cutanées généralisées chez plusieurs sujets ayant utilisé les protège tibias.

Sur le lien de causalité entre la défectuosité des protège tibias et le préjudice, ils expliquent que sur la base de présomptions graves, précises et concordantes, l'expert judiciaire a objectivé un rapport de causalité entre la pathologie de Thibault V. avec l'utilisation des protège tibias, celui-ci étant exclusif, déterminant et ni additif à un état antérieur.

Ils sollicitent la confirmation sur l'évaluation du préjudice subi par leur fils. Sur les dépenses de santé futures, ils rappellent que les crèmes topiques émollientes sont restées entièrement à leur charge.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 15 février 2019, la MSA demande à la cour de :

• de confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

- dit que la société Décathlon engage sa responsabilité en raison de la défectuosité des protège tibias de marque Kipsta modèle F350 de couleur orange,

- condamné la société Décathlon à payer à Thibault V., représenté par les époux V., certaines sommes en réparation de son préjudice corporel :

- condamné la société Décathlon à payer à la MSA la somme de 872,26 euros au titre des prestations servies à la victime,

- condamné la société Décathlon à payer au titre des frais non répétibles

3 500 euros à Thibault V., représenté par ses parents, ainsi qu'aux époux V., et 800 euros à la MSA,

• débouter la société Décathlon de ses demandes,

• infirmer le jugement dont appel en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'indemnisation des autres préjudices,

Statuant à nouveau,

• condamner la société Décathlon à lui payer la somme de 4 281,38 euros au titre des frais futurs,

• condamner la société Décathlon à lui payer la somme de 1 527,17 euros au titre des frais médicaux et pharmaceutiques,

• condamner la société Décathlon à lui payer la somme de 1 080 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion,

• condamner la société Décathlon aux dépens de première instance et d'appel et lui verser la somme de 1 000 euros au titre des frais non répétibles.

La MSA expose au soutien de ses prétentions que Thibault V., au moment où il a présenté des rougeurs et des brûlures parfaitement délimitées aux zones couvertes par les protège tibias, était ayant droit de ses parents affiliés auprès d'elle, ce dont il résulte qu'elle a prise en charge cet accident au titre du risque maladie.

Sur la responsabilité de la société Décathlon au titre des produits défectueux, elle soutient que celle-ci est incontestable. Elle explique que les protège tibias Décathlon sont à l'origine des lésions dermatologiques de Thibault V., celui-ci n'ayant jamais manifesté de lésions dermatologiques avant d'avoir porté ces protège tibias. Elle souligne que Thibault V. joue au football depuis l'âge de 4 ans et qu'il avait porté à plusieurs reprises des protège tibias sans avoir présenté de réaction allergène. Elle s'appuie ensuite sur les comptes rendus du docteur Raison P. pour souligner que si Thibault V. présente des réactions allergiques à d'autres équipements sportifs, il existe un caractère réactionnel fortement positif aux protège tibias en comparaison avec celui des gants et semelles de baskets. Elle en conclut que les substances contenues dans les protège tibias litigieux, notamment l'acétophénone azine, sont en lien direct avec les lésions subies par l'enfant. Elle précise que plusieurs personnes ont fait état de problèmes allergiques rencontrés par leur enfant lors du port des protège tibias litigieux. Elle rappelle que quand bien même l'expert a relevé des zones d'ombre, la preuve du caractère défectueux d'un produit peut être rapportée par des présomptions graves, précises et concordantes. Elle conclut que les protège tibias Kipsta présentaient un défaut de sécurité manifeste à l'origine des lésions et réactions dermatologiques de l'enfant.

Sur le lien de causalité entre la défectuosité des protège tibias et les préjudices déterminés, elle fait valoir que l'expert judiciaire a retenu un rapport de causalité entre la pathologie de l'enfant et l'utilisation des protège tibias. Elle souligne que cette causalité a été déterminée sur la base de présomptions précises et concordantes et qu'elle a été exclusive, déterminante, mais qu'elle n'est pas additive à un état antérieur. Elle précise que les observations du docteur Raison P. vont dans le même sens.

Sur son appel incident, elle produit une attestation d'imputabilité qui atteste que le détail des frais de soins a été étudié par son médecin conseil afin de n'en retenir que les prestations en nature strictement liées au seul accident en cause.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 21 mai 2019.

Motifs

A titre liminaire sur la critique du rapport d'expertise judiciaire par la société Décathlon, la cour rappelle, d'une part, qu'aux termes des articles 16 et 132 du Code de procédure civile, tout rapport peut valoir à titre de preuve, dès lors qu'il est régulièrement versé au débat et soumis à la libre discussion contradictoire des parties, d'autre part, qu'en vertu de l'article 246 du Code de procédure civile le juge n'est pas lié par les constatations ou conclusions du technicien et reste seul compétent pour apprécier leurs incidences, au plan juridique, quant à l'existence de la responsabilité alléguée, à la nature et à l'étendue du dommage indemnisable.

De surcroît, la société Décathlon, qui a eu connaissance des résultats de l'expertise judiciaire, au regard notamment des 2 pré-rapports déposés, a eu la possibilité d'en discuter les conclusions, ce qu'elle a fait par la formulation de 7 dires.

1. Sur la responsabilité de la société Décathlon du fait des produits défectueux

En application de l'article 1386-1 du Code civil, devenu l'article 1245 depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu'il soit ou non lié par un contrat avec la victime.

Selon l'article 1386-4 du même Code, devenu l'article 1245-3 depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131, un produit est défectueux lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre ; dans l'appréciation de la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, il doit être tenu compte de toutes les circonstances et notamment de la présentation du produit, de l'usage qui peut en être raisonnablement attendu et du moment de sa mise en circulation ; un produit ne peut être considéré comme défectueux par le seul fait qu'un autre, plus perfectionné, a été mis postérieurement en circulation.

Sur la participation des protège tibias Kipsta F350 au dommage et leur caractère défectueux

Si la responsabilité du fait des produits défectueux requiert, aux termes de l'article 1386-9, devenu l'article 1245-8 à compter de l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131, que le demandeur prouve le dommage, le défaut et le lien de causalité entre le défaut et le dommage, la participation du produit à la survenance du dommage est un préalable implicite, nécessaire à l'exclusion éventuelle d'autres causes possibles au dommage, pour la recherche de la défectuosité du produit et du rôle causal de cette défectuosité dans le dommage subi, sans pour autant que sa simple implication dans la réalisation du dommage suffise à établir son défaut au sens de l'article 1386-4, devenu 1245-3 précité, ni le lien de causalité entre ce défaut et le dommage

En l'espèce, il est établi que Thibault V. a utilisé des protège tibias de marque Kipsta PRT F350 Orange, achetés le 3 septembre 2013 au sein du magasin Décathlon Le Pontet Avignon Nord, et qu'à la suite de leur utilisation de la fin du mois de novembre 2013 au 10 janvier 2014, il a présenté une réaction cutanée localisée sur la face antérieure tibiale des deux jambes, soit la zone de contact entre les tibias et les protège tibias, cette circonstance ressortant notamment de l'échange de mails entre M. V. et la société Décathlon les 14 et 21 janvier 2014, du questionnaire rempli par M. V. le 14 janvier 2014, ou encore du courrier adressé à M. V. par la société Décathlon le 14 février 2014.

S'il est établi que la réaction cutanée de Thibault V. ne s'est pas résorbée après l'arrêt du port des protège tibias de marque Kipsta PRT F350 Orange en janvier 2014, qu'elle s'est aggravée en dépit d'un changement de protection et le port de nouveaux équipements sportifs, comme cela résulte notamment de l'échange de mails du 6, 8 et 9 avril 2014, du courrier adressé par la société Décathlon à M. V. le 16 avril 2014, des mails du 4 juin 2014 ou encore de l'échange de mail du 18 et 21 juin 2014, ainsi que du rapport d'expertise judiciaire qui indique " une extension très rapide de l'évolutivité pathologique de l'atteinte dermatologique " (page 9/41), il n'est pas sérieusement contestable que les protège tibias de marque Kipsta PRT F350 Orange ont participé à la survenance du dommage subi par Thibault V..

Si la seule implication d'un produit dans la réalisation d'un dommage ne suffit pas établir son défaut au sens des articles 1386-1 et suivants, devenus 1245 et suivants depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131, il est établi que la preuve du caractère défectueux du produit peut être rapportée par des présomptions, pourvu qu'elles soient graves, précises et concordantes.

Le produit est défectueux lorsqu'il risque de porter atteinte à la santé, l'intégrité physique ou psychique des individus, ou bien de provoquer la destruction ou la dégradation des biens.

Le défaut du produit peut être lié à sa conception ou sa fabrication, peu importe qu'il soit à l'origine de dommages individuels ou sériels, étant précisé que la sécurité à laquelle l'on peut légitimement s'attendre doit être appréciée en tenant compte notamment de la destination, des caractéristiques et des propriétés objectives du produit en cause, ainsi que des spécificités du groupe des utilisateurs auxquels ce produit est destiné.

De surcroît, le défaut du produit peut résulter de sa présentation ou d'une information insuffisante sur les conditions de son utilisation, ses indications ou les risques encourus par l'utilisateur du produit.

En l'espèce, la société Décathlon verse aux débats un courrier en date du 14 février 2014 qu'elle a adressé à M. V. ; la lecture de cette pièce renseigne la cour de ce que l'analyse du produit a révélé " des traces d'une substance potentiellement allergisante, le Diphenylmethane Diisocyanate (MDI), CAS : 101-68-8 ", ce qu'a également relevé le docteur Raison P. dans son courrier du 4 septembre 2014 (page 13/41 du rapport d'expertise judiciaire ; pièce n° 36 de l'appelante).

Dans ce même courrier du 4 septembre 2014, le docteur Raison P. a conclu (page 13/41 du rapport d'expertise judiciaire ; pièce n° 36 de l'appelante) :

" Par contre, les patch-tests avec des raclures de protège tibias neufs et usagés de la même marque étaient fortement positifs, qu'ils soient testés dans l'eau, l'alcool et l'acétone : 2+ à 48h, 3+ à 72h. De même les patch-tests avec des raclures de semelles de baskets de couleur bleue et de couleur noire étaient également positifs : 1+ à 48 et 72h. Nous avons eu également des patch-tests positifs avec les raclures de gants de foot, que ce soit la partie orange ou la partie noire, 1+ à 72h dans les trois excipients.

En conclusion, le bilan dermato-allergologique a retrouvé des sensibilisations de contact à l'Abitol, à l'huile de térébenthine, au Peroxyde de Benzoyle, ces trois tests étant faiblement positif (1+) ce qui contraste avec le caractère fortement positif des patch-tests avec les protège tibias et à un moindre degré les gants et les semelles de baskets qui sont tous a priori à base de mousse d'éthylène vinyle acétate (EVA) colorée ".

La cour relève que ce courrier du 4 septembre 2014 indique un résultat négatif à 48 et 72h pour les tests épicutanés avec la batterie isocyantaes qui comporte le Diphenylmethane Diisocyanate, seule substance détectée à l'état de traces par la société Décathlon dans la mousse EVA noire de contact des protège tibias et pouvant donner lieu une allergie de contact.

Le compte rendu du 2 mars 2015 du docteur Rayson P. (consultation du 10 février 2015) indique : " J'ai revu en consultation le jeune Thibault V. (...) pour de nouvelles explorations allergologiques concernant son eczéma sévère à des protège tibias, mais aussi à un moindre degré à des gants de foot et des semelles de baskets (...) Par contre, nous avons testé de nouvelles raclures d'une partie des protège-tibias, c'est-à-dire la mousse blanche qui n'est pas en contact direct de la peau, mais qui se situe entre la coque rigide et la mousse noire au contact de la peau (qui était positive lors des précédents tests). Thibault y a réagi de manière extrêmement forte (réactions à 3+ à 48 et 72h) " (pages 14 et 15/41 du rapport d'expertise judiciaire).

Le compte rendu du 29 avril 2015 du docteur Raison P. (consultation du 21 avril 2015) précise : " Le jeune Thibault V. a été revu en consultation de dermato-allergologie pour des explorations complémentaires concernant ses réactions d'allergie de contact sévère à des équipements sportifs notamment à des protège-tibias. Une des substances détectées lors de l'analyse chimique réalisée par un laboratoire mandaté pour cette analyse est l'acétophénone azine.

Pour Thibault les résultats ont montré de fortes réactions que ce soit avec l'acétophénone azine testée dans l'eau ou l'acétone (2+ à 48h et 72h) ; mais aussi à 0,1 % dans l'eau (1 +), 0,1 % dans l'acétone à 2+, 0,01 % dans l'acétone à 1+ et douteux à la dilution de 0,0001 % dans l'acétone. Les patch-tests réalisés avec les mêmes dilutions dans l'eau et l'acétone chez le père de Thibault sont strictement négatifs à 48h ou à 72h.

Thibault est donc fortement allergique à cette substance " (page 15/41 du rapport d'expertise judiciaire).

La cour relève au surplus que Thibault V. a bénéficié d'une consultation auprès du docteur B., le 19 mai 2014, lequel a notamment écrit : " Je vous remercie d'hospitaliser cet enfant qui présente un eczéma aigu au niveau des deux tibias au décours de la mise en contact de protège-tibias (DÉCATHLON), avec une généralisation des lésions eczémateuses après l'éviction de ces protège-tibias " (page 10/41 du rapport d'expertise judiciaire).

A titre surabondant, il est produit par la société Décathlon un courrier du 16 avril 2014 dans lequel elle relève qu'il est anormal que la réaction de Thibault V., qui semble être de type allergique, perdure aussi longtemps après un traitement à base d'antihistaminiques et de corticoïdes et ce malgré l'arrêt du port du protège tibia Kipsta depuis plusieurs mois ; elle émet dans ce courrier plusieurs hypothèses quant à la cause de la réaction allergique de Thibault V., et cite notamment la mousse du protège tibia.

Au paragraphe discussion du rapport d'expertise judiciaire, l'expert a noté que l'intéressé est fortement allergique à l'acétophone azine, substance identifiée par le laboratoire mandaté (page 21/41), précision faite que cette substance a été identifiée dans la mousse EVA des protège tibias.

En réponse aux dires de la société Décathlon, l'expert judiciaire a indiqué que " le cas rapporté ne permet pas de conclure à une dangerosité du produit. Il y a eu une réaction individuelle qui a été la seule préoccupation de l'expert " (page 35/41 du rapport d'expertise judiciaire) ; pour autant, la seule circonstance que l'expert n'ait pas conclu à la dangerosité du produit ne permet pas d'exclure l'absence de défectuosité de celui-ci.

Les époux V. produisent aux débats des témoignages écrits sur le site internet de l'enseigne Décathlon par des utilisateurs des protège tibias de marque Kipsta F350 :

• " selon Hugo " qui a témoigné le 19 avril 2012 : " mon fils a déclaré des plaques rouges sur les tibias dues au matériau qui se trouve derrière le protège tibia (thio urée) produit allergène de l'avis des dermatologues. Il s'agit donc d'une réaction d'eczéma qui se soigne aux corticoïdes. D'autres mamans ont posté sur des forums concernant ces problèmes je ne suis donc pas un cas isolé mais je m'insurge contre l'utilisation de ce produit chez les enfants ! Améliorer cette partie en contact avec la peau me semble indispensable ! " ;

Le chef de produit football-Kipsta a notamment répondu : " Merci pour votre remontée d'information. Je suis désolé des problèmes rencontrés par votre fils. Pour votre information, les protège tibias sont soumis à des tests exigeants aussi bien en termes de ... Ces tests sont effectués par des organismes indépendants ".

• " selon Christophe " qui a témoigné le 20 avril 2012 : " avec ce modèle, dès la première utilisation, des plaques rouges sont apparues sur le tibia et réapparaissent à chaque utilisation " ;

Le chef de produit football-Kipsta a notamment répondu : " Les protège tibia sont soumis à des tests aussi bien sur le plan de la protection que sur le plan allergique. Ces tests sont effectués par des organismes indépendants ".

• " selon Julien ", qui a témoigné le 24 mars 2014 d'après la mention manuscrite portée sur le document : " ce protège tibias provoque de l'eczéma sur mes jambes " ;

Le chef de produit football-Kipsta a notamment répondu : " Pouvez-vous me communiquer vos coordonnées afin que je puisse vous contacter pour avoir ... ".

• " selon Eric ", qui a témoigné le 27 mai 2014 : " mon fils a eu des allergies sur les 2 tibias, rougeurs et boutons à cause de la " mousse Evea " à chaque fois qu'il les porte à l'entraînement, la réaction s'amplifiant dans la durée... Les mousses causent donc chez des enfants à la peau sensible ce genre de désagrément " ;

Le chef de produit football-Kipsta a notamment répondu : " Je vous remercie pour ce retour. Sachez que nous accordons une grande importance à la sécurité et au bienêtre de non utilisateurs c'est pourquoi je souhaite traiter votre remontée en priorité. Afin de bien comprendre ce qui a pu occasionner cette réaction pouvez-vous me communiquer vos coordonnées téléphoniques en mail privé afin que je vous recontacte à votre convenance ".

• " selon Jacqueline ", qui a témoigné le 26 juin 2014 : " mes 2 fils ont porté toute la saison de foot ces protège tibias ils ont eu des boutons et des plaques rouges au contact des protège tibias. Ces plaques se sont transformées en eczéma géant avec consultation médicale et antibiotiques " ;

Le chef de produit football-Kipsta a notamment répondu : " Pouvez-vous me communiquer vos coordonnées afin que je puisse prendre contact avec vous "

La société Décathlon produit également la traduction française des deux premières pages d'un article scientifique intitulé " Acétophénone azine : un nouvel allergène responsable de la dermatite de contact sévère provenant des protège tibias " ; cet article coécrit notamment par le docteur Raison P. comprend une synthèse avec les éléments suivants :

" Contexte. La dermatite de contact résultant de l'utilisation de protège tibias est généralement provoquée par des composants en caoutchouc, des colorants, du peroxyde de benzoyle ou des résines de formaldéhyde.

Objectifs. Etudier et identifier un nouvel allergène dans les protège tibias, responsable d'une dermatite de contact sévère chez un footballeur.

Méthodes. Une chromatographie en phase liquide à haute performance (HPLC) d'échantillons de protège-tibias a été effectuée. Le garçon a fait l'objet d'un test épicutané avec des morceaux de protège-tibias et de l'acétophénone azine, une substance chimique identifiée par HPLC dans la mousse des protège tibias.

Résultats. La HPLC a identifié l'acétophénone azine à des concentrations d'environ

20 g/g dans les échantillons de protège-tibias. Les tests épicutanés ont donné des réactions fortement positives aux fragments de protège-tibias et à l'acétophénone azine jusqu'à 0,001 % dans l'acétone, alors que l'acétophénone et le sulfate d'hydrazine étaient tous deux négatifs. Vingt témoins étaient négatifs pour l'acétophénone azine à 0,01 % dans l'acétone.

Conclusions. L'acétophénone azine est un nouvel allergène puissant dans les protège-tibias, et plus généralement d'autres équipements de sport à base d'EVA. Elle peut être utilisée comme biocide, mais cela doit être confirmée. D'autres investigations sont nécessaires pour comprendre des facteurs tels que l'exposition, les schémas de réaction croisée, le métabolisme et la préparation optimale du test épicutané ".

Est encore versé par les époux V. un article du 4 décembre 2017, intitulé " Des chaussures de sport et protège tibias responsables d'une allergie sévère ", paru dans un blog, dont il résulte que plusieurs personnes, 1 adulte et 3 enfants, ont présenté une éruption cutanée localisée au contact d'une mousse synthétique en EVA qui s'est ensuite généralisée à tout le corps, précision faite que les cas des 3 enfants rapportés par l'auteur ont été décrits par le docteur Raison P. et que cela inclut nécessairement Thibault V..

La société Décathlon produit devant la cour la notice d'utilisation et l'étiquette des protège tibias de marque Kipsta F350 lesquelles précisent qu'ils sont composés pour la mousse à " 100 % EVA ".

Enfin, la notice d'utilisation et l'étiquette des protège tibias de marque Kipsta F350 versées par la société Décathlon, si elles contiennent des informations sur le choix de la taille de la protection, sur des précautions d'utilisation, sur l'entretien et le stockage, sur la composition du produit avec la précision que les protège tibias ne contiennent ni colorants azoiques, ni colorants cancérigènes, ni formaldéhyde, ni cadmium, sur des conseils d'utilisation, la cour observe qu'elles ne contiennent aucune mise en garde sur un possible risque d'allergie alors même que ces protège tibias sont notamment destinés à des mineurs s'adonnant à la pratique régulière du football, lesquels s'attendent dès lors à pouvoir les utiliser sans subir d'effets indésirables de type 'dermatite de contact'.

En l'état de l'ensemble de ces constatations et énonciations, il existe des présomptions graves, précises et concordantes permettant d'établir que les protège tibias Kipsta F350 composés de mousse 100 % EVA, utilisés par Thibault V., sont affectés d'un défaut en ce qu'ils n'offrent, au regard du risque de développement d'une dermatite de contact, ni la sécurité sanitaire ni la sécurité physique à laquelle l'utilisateur de cet équipement de football peut légitimement s'attendre.

Sont en outre dépourvus de la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre les protège tibias Kipsta F350, dont la société Décathlon, dans sa notice d'utilisation et l'étiquette, n'a pas attiré l'attention sur les risques d'allergie de contact présentés par l'utilisation du produit et les précautions à prendre.

Sur l'exonération de responsabilité invoquée par la société Décathlon

La société Décathlon invoque le bénéfice de causes d'exonération prévues par l'article 1386-11 du Code civil, devenu 1245-10 depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131, soit en l'espèce les causes d'exonération suivantes :

(2°) que compte tenu des circonstances, il y a lieu d'estimer que le défaut ayant causé le dommage n'existait pas au moment où le produit a été mis en circulation par lui ou que ce défaut est né postérieurement ;

(4°) que l'état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où il a mis le produit en circulation, n'a pas permis de déceler l'existence du défaut.

La date de mise en circulation du produit qui a causé le dommage s'entend, dans le cas de produits fabriqués en série, comme en l'espèce les protège tibias Kipsta F350, de la date de commercialisation du lot dont il faisait partie.

Sur l'exonération pour défaut postérieur à la mise en circulation, la société Décathlon soutient dans ses écritures que " composé à 100 % d'EVA, il est constant que les molécules d'Acétophénone Azine n'existaient pas au moment de sa mise en circulation ".

Pour autant, la société Décathlon ne verse au débat aucun élément de preuve objectif de nature à prouver ses allégations, celle-ci se bornant au contraire à affirmer sans aucunement le démontrer que les molécules d'acétophénone azine n'existaient pas antérieurement à la mise en circulation et que ce défaut est apparu postérieurement.

Sur l'exonération pour risque de développement, il appartient à la société Décathlon d'établir que l'état objectif des connaissances techniques et scientifiques, en ce compris son niveau le plus avancé, au moment de la mise en circulation du produit en cause, ne permettait pas de déceler le défaut de celui-ci.

S'il n'est pas contestable qu'à la suite de l'étude menée par le docteur Raison P., celle-ci a mis en évidence un nouvel allergène constitué par l'acétophénone azine, identifié dans l'EVA, comme cela résulte de son article accepté pour publication le 23 février 2016, il résulte des témoignages versés aux débats par les époux V. que dès le mois d'avril 2012, des utilisateurs des protège tibias Kipsta F350 ont fait part de plaques rouges sur la zone de contact entre les tibias et les protège tibias, l'un d'entre eux évoquant même un produit allergène de l'avis des dermatologues et une réaction d'eczéma soignée aux corticoïdes, ce qui aurait dû conduire la société Décathlon à procéder des investigations sur la réalité du risque signalé, et, à tout le moins, à en informer les utilisateurs dans la notice d'utilisation et l'étiquette du produit, et non simplement répondre, comme elle l'a fait, que ses protège tibias sont soumis à des tests " exigeants " sur le plan allergique, réalisés par des organismes indépendants.

De ces éléments, il résulte que l'état des connaissances techniques et scientifiques, au moment de la mise en circulation des protège tibias Kipsta F350 utilisés par Thibault V. fin 2013, début 2014, permettait de déceler l'existence d'un défaut, constitué par un risque allergique, de ceux-ci, et d'en informer les utilisateurs par des mentions sur la notice d'utilisation et l'étiquette du produit.

Il s'ensuit que la société Décathlon n'est pas fondée à invoquer une exonération de responsabilité au titre du dommage subi par Thibault V..

Sur le dommage et le lien de causalité entre le dommage et les protège tibias Kipsta F350

S'il est constant que l'action en responsabilité du fait d'un produit défectueux exige la preuve du dommage et du lien de causalité entre le défaut et le dommage, une telle preuve peut résulter de présomptions, pourvu qu'elles soient graves, précises et concordantes.

Dans son rapport, l'expert judiciaire a notamment rappelé les circonstances et établi la chronologie suivante (pages 8/41 et suivantes et pages 18 et 19/41) :

• selon les allégations des époux V., les manifestations cliniques inaugurales seraient apparues au début de l'année 2014 sous l'aspect de lésions dermatologiques érythémateuses, suintantes, très bien limitées, siégeant, aux faces antérieures tibiales ;

• les 16 et 18 janvier 2014, Thibault V. a bénéficié de 2 consultations auprès du docteur S., médecin généraliste, qui a rédigé, le 21 janvier 2014, un courrier à l'intention d'un médecin spécialiste dermatologue ;

• au contexte de cette époque, Thibault V. fait état au niveau lésionnel d'une difficile tolérance fonctionnelle avec le ressenti d'un prurit important, essentiellement nocturne ; malgré l'abandon de l'utilisation des protège tibias, Thibault V. et ses parents précisent une extension très rapide de l'évolutivité pathologique de l'atteinte dermatologique ;

• les 24 janvier et 7 février 2014, Thibault V. a bénéficié de 2 consultations auprès du docteur E., spécialiste dermatologue ;

• le 13 février 2014, Thibault V. a bénéficié d'une consultation hospitalière avec le docteur B., praticien hospitalier ;

• le 7 mai 2014, Thibault V. a de nouveau bénéficié d'une consultation spécialisée dermatologique avec le docteur E. ;

• Thibault V. a bénéficié d'une nouvelle consultation auprès du docteur B. le 19 mai 2014, lequel a notamment écrit : " Je vous remercie d'hospitaliser cet enfant qui présente un eczéma aigu au niveau des deux tibias au décours de la mise en contact de protège-tibias (DÉCATHLON), avec une généralisation des lésions eczémateuses après l'éviction de ces protège-tibias (...) Actuellement, il présente un eczéma fissuraire des plantes et des paumes, avec desquamation et lésions infiltrées au niveau des tibias, eczéma du dos et du torse et dos et deux (mot non déchiffrable) ".

• Thibault V. a été hospitalisé les 20 et 21 mai 2014 ; au cours de cette hospitalisation, une biopsie a été réalisée, le commentaire de cet examen mentionnant notamment au titre des renseignements cliniques : " Eruption eczématiforme. Eruption eczématiforme généralisée évoluant depuis 5 mois, atypique " ; un praticien hospitalier a également rédigé un courrier le 21 mai 2014 :

" Motif de l'admission : Eczéma résistant profus ayant débuté il y a 4 mois par un eczéma de contact aux membres supérieurs (sic). Antécédents : Pas d'antécédent particulier. Pas d'allergie. Histoire de la maladie : un eczéma de contact évoluant depuis janvier 2014 suite à des protège tibias et localisé aux membres inférieurs. Une extension progressive au reste du corps (...) Examens à l'admission dans le service : (...) On retrouve des lésions eczématiformes diffuses des membres inférieurs et supérieurs et du tronc avec une atteinte prédominante et très desquamante au niveau des paumes et des plantes. Pas d'atteinte du visage ni des organes génitaux externes. Xérose cutanée diffuse. Pas de lésion surinfectée. Le reste de l'examen est sans particularité ".

• le 4 juillet 2014, Thibault V. a bénéficié d'une consultation dermatologique au CHRU de Montpellier avec le docteur Raison P. qui a détaillé ses constations cliniques dans un courrier du 4 septembre 2014 qui précise notamment :

" J'ai revu en consultation de dermato-allergologie le jeune Thibault V. (...) pour exploration d'un eczéma. Comme vous le savez, cet eczéma est survenu sur la face antérieure des jambes en janvier 2014 en regard de protège-tibias pour pratiquer le football. Par la suite, cet eczéma initialement localisé s'est généralisé en l'espace de 3 mois épargnant seulement le visage avec notamment une atteinte palmo plantaire sévère prenant un aspect de kératodermie érythémato-squameuse et fissuraire (... ) Par la suite, cet eczéma s'est amélioré avec disparition de l'éruption eczématiforme diffuse mais persistance de la kératodermie surtout plantaire (...) Lorsque je l'ai vu en consultation, en dehors de la kératodermie palmo-plantaire avec atteinte unguéale, il persistait des lésions hyper-pigmentées post-inflammatoire au niveau du dos et des membres inférieurs " ; elle relève également le caractère fortement positif des patch-tests avec les protège tibias et à un moindre degré avec les gants et les semelles de baskets qui sont tous a priori à base d'EVA ;

• dans ses courriers du 2 mars et du 29 avril 2015, le docteur Raison P. précise qu'elle a revu en consultation le jeune Thibault V. pour de nouvelles explorations allergologiques concernant son eczéma sévère à des protège-tibia, mais aussi à un moindre degré à des gants de foot et des semelles de baskets (consultation du 10 février 2015), ou pour des explorations complémentaires concernant ses réactions d'allergie de contact sévère à des équipements sportifs, notamment à des protège tibias (consultation du 21 avril 2015).

L'expert judiciaire a également relevé que Thibault V. dit avoir interrompu la pratique du football au contexte de l'apparition des premiers signes cliniques de l'atteinte plantaire en avril/mai 2014 (page 14/41 du rapport) et que celui-ci décrit une récente et notable amélioration clinique avec, selon ses allégations et celles de ses parents, une régression quasi inespérée mais durable des lésions cutanées à partir du 13 août 2014.

Compte tenu de la chronologie d'apparition de l'atteinte eczémateuse dont a été victime Thibault V., tel que décrite par l'expert judiciaire, par rapport à l'utilisation des protège tibias Kipsta FR350, la société Décathlon ne peut sérieusement prétendre, sur la seule base du questionnaire rempli par M. V., que 'le seul dommage qui serait en lien avec le port de ses protège tibias est 'une allergie qui a duré 5 jours et qui n'a fait l'objet d'aucun examen médical'.

Ensuite, si dans le " questionnaire en cas de réaction cutanée à un produit vendu par une des enseignes du groupe Oxylane ", M. V. a effectivement répondu, le 14 janvier 2014, à la question " Durée des symptômes " par " avec traitement 5 jours ", force est de constater que cette réponse est manifestement contredite, d'une part, par l'échange de mails du 6 et du 8 avril 2014 produit par la société Décathlon dans lequel M. V. indique qu'à " ce jour c'est descendu sur c'est pied c'est vraiment très gênant pour lui " et M. A. répond que " la réaction cutanée de votre fils ne s'est toujours pas résorbée depuis l'arrêt du port des protège tibias en janvier 2014 malgré un traitement à base d'antihistaminiques (ZYRTEC) et de corticoïdes (NERISONE en crème) ", que " la réaction réapparaît avec le port d'autres protège tibias et ce quel que soit la marque. Je note aussi que la réaction s'est étendue au niveau de la voute plantaire. Le cuir chevelu et la région rétroauriculaire aurait été aussi atteinte ", et d'autre part, par le courrier du 16 avril 2014 adressé par le service qualité du groupe Oxylane à M. V. dans lequel il est écrit qu'il est anormal que la réaction de Thibault V., qui semble être de type allergique, perdure aussi longtemps après un traitement à base d'antihistaminiques et de corticoïdes et ce malgré l'arrêt du port du protège tibia Kipsta depuis plusieurs mois.

La cour note encore que dans un courrier du 16 avril 2014 adressé à M. V., le service qualité du groupe Oxylane évoque plusieurs hypothèses quant à la cause de la réaction allergique de Thibault V., notamment la mousse du protège tibia.

Aux paragraphes " discussion " et " conclusion - réponses aux questions de la mission " du rapport d'expertise judiciaire, il ressort les éléments suivants (pages 20/41 et suivantes) :

• les manifestations cutanées sont apparues au début de l'année 2014 avec des lésions dermatologiques érythémateuses suintantes très bien limitées siégeant aux faces antérieures tibiales, donc sur une zone de contact avec le protège tibia ; le caractère suintant est en faveur d'une réaction eczématiforme et peut faire évoquer une allergie de contact ;

• il faut cependant noter une aggravation ultérieure malgré l'arrêt de l'utilisation des protège tibias ;

• il faut donc éliminer la possibilité d'une allergie de contact surajouté vis-à-vis d'autres topiques locaux ou médicamenteux possiblement utilisés,

• " sur la primauté de la clinique corrélée l'analyse des informations para-cliniques, la réaction cutanée avec des lésions dermatologiques érythémateuses suintantes très bien limitées siégeant aux faces antérieures tibiales, donc sur une zone de contact avec le protège-tibia, permet d'affirmer qu'il y a une causalité exclusive de sensibilisation allergique de l'intéressé par l'acétophénone azine inclus dans la composition des protège-tibias ",

• " la causalité n'a pas été additive à un état antérieur ni cliniquement ni biologiquement révélé ", " ni même cliniquement latent ",

• " la responsabilité du protège tibia a été déterminante dans la survenue des manifestations cutanées en regard des zones d'applications des protège-tibias. En effet, les patch-tests étaient positifs ++ à J2 et +++ à J3 pour la mousse noire du protège tibia neuf. La lessive ne peut en aucun cas être responsable des manifestations observées au niveau de la zone des protège-tibias " ;

• 'la pathologie du demandeur est liée par un rapport de causalité avec l'utilisation des protège tibias vendus par la société Décathlon',

• cette causalité 'a été exclusive'.

En réponse aux dires de la société Décathlon, l'expert judiciaire a notamment indiqué que :

• " L'expert prend en considération l'évocation de " zones d'ombre " et, en absence de contradiction apportée par la partie mise en cause, il ne pourra pas apporter une réponse en termes de causalité exclusive " (page 35/41 du rapport d'expertise judiciaire) ;

• " La possible mise en cause d'autres équipements que ceux vendus par la société Décathlon au déclenchement du processus pathologique a été relevée avec insistance par l'avocat de la partie mise en cause. Ce sont les " zones d'ombre ". Une évaluation de leur responsabilité impliquerait que les firmes productrices soient appelées à la procédure judiciaire. Comme l'utilisation de ces équipements n'a pas été formellement prouvée, l'expert ne demande pas au magistrat une extension des mises en cause. Mais il en soumet l'éventualité au magistrat " (page 36/41 du rapport d'expertise judiciaire) ;

• " sur la primauté de la clinique corrélée l'analyse des informations para-cliniques, la réaction cutanée avec des lésions dermatologiques érythémateuses suintantes très bien limitées siégeant aux faces antérieures tibiales, donc sur une zone de contact avec le protège-tibia, permet d'affirmer qu'il y a une causalité exclusive de sensibilisation allergique de l'intéressé par l'acétophénone azine inclus dans la composition des protège-tibias ", " en concédant que :

- " la partie demandeuse n'a pas participé à la certitude d'une information documentaire exhaustive,

- persistent effectivement des zones d'ombre évoqués par la partie mise en cause sans que la partie demandeuse n'y ait apporté de réponses " (page 36/41 du rapport d'expertise judiciaire).

• " l'avocat indique que l'inertie des demandeurs ne peut être imputée à la société Décathlon. L'expert reprend cette assertion en précisant que cette inertie a été préjudiciable à la qualité du débat contradictoire. L'expert n'a pas été soutenu par la partie demanderesse dans l'opportunité d'une investigation exhaustive telle que demandée par la partie défenderesse. Sans pièces nouvelles complémentaires, je peux acter ne pas être en possession des résultats du laboratoire mandaté par le CHRU de Montpellier, résultats qui n'ont pu faire l'objet d'aucun débat contradictoire. Le raisonnement ne tient pas compte des photos. Il est clinique. Des clichés ont été montrés par la partie demandeuse lors de la première réunion d'expertise. L'expert ne les a pas considérés comme des éléments de preuve. Concernant la possible mise en cause d'autres équipements que ceux vendus par la société Décathlon au déclenchement du processus pathologique, point relevé avec insistance par l'avocat de la partie mise en cause. Ce sont les " zones d'ombre ". RAPPEL : une évaluation de leur responsabilité impliquerait que les firmes productrices soient appelées à la procédure judiciaire. Comme l'utilisation de ces équipements n'a pas été formellement prouvée, l'expert ne demande pas au magistrat une extension des mises en cause. Mais il en soumet l'éventualité au magistrat " (page 41/41 du rapport d'expertise judiciaire).

En l'état de l'ensemble de ces constatations et énonciations, la cour ne peut qu'observer la convergence entre l'apparition de la réaction cutanée siégeant aux faces antérieures tibiales en janvier 2014 après l'utilisation des protège tibias Kipsta FR350 par Thibault V., puis la forte évolutivité de sa pathologie dermatologique jusqu'à la régression des lésions cutanées à compter du mois d'août 2014 et les appréciations de l'expert judiciaire qui conclut à l'existence d'un lien de causalité entre la pathologie de Thibault V. et l'utilisation des protège tibias Kipsta FR350 vendus par la société Décathlon, fondée sur l'analyse clinique et para-clinique des informations documentaires qui lui ont été fournies par les parties.

Si d'autres équipements sportifs ont été mis en cause par la société Décathlon, il doit , en premier lieu, être rappelé le caractère fortement positif des patch-tests avec les protège tibias litigieux et à un moindre degré avec les gants et les semelles de baskets, en deuxième lieu, être relevé que dès le mail du 8 avril 2014, la société Décathlon est informée de l'utilisation d'autres protège tibias, acquis dans un de ses magasins le 13 janvier 2014, ce qui ne l'empêche pas dans son courrier du 16 avril 2014 adressé à M. V. d'émettre comme hypothèse quant à la cause de la réaction allergique de Thibault V. la mousse des protège tibias, et en troisième lieu, être précisé que l'utilisation de ces équipements n'a pas été, selon l'expert judiciaire, formellement prouvée.

Surabondamment, la cour constate que le médecin conseil de la MSA, dans son " mémoire dossier d'imputabilité " du 25 juin 2018, a noté après, avoir analysé certains passages du rapport d'expertise judiciaire, que " l'expert confirme bien l'imputabilité des protèges tibias à la survenue des lésions tibiales " et que " Thibault V. a développé une sensibilisation allergique générale quel que soit la partie du corps " et qu'enfin, " tous les soins effectués jusqu'à la date de consolidation sont imputables à la réaction allergique initiale ".

L'ensemble des éléments sus-énoncés constitue donc des présomptions graves, précises et concordantes suffisantes pour constituer la preuve d'un lien de causalité entre l'utilisation par Thibault V. des protège tibias Kipsta FR350 et sa réaction cutanée.

En conséquence, le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société Décathlon en raison de la défectuosité des protège tibias de marque Kipsta modèle F350 de couleur orange.

2. Sur l'indemnisation du préjudice de Thibault V.

L'expert judiciaire, qui souligne que la pathologie de Thibault V. n'a pas été additive à un état antérieur, ni révélé, ni même cliniquement latent, a procédé à l'évaluation du préjudice de Thibault V. en retenant les seules incidences de sa réaction cutanée liée à l'utilisation des protège tibias Kipsta FR350, la cour relevant en ce sens qu'il y a eu, selon l'expert judiciaire, " en relation certaine, directe et exclusive avec la pathologie en lien avec l'utilisation des protège tibias, la contrainte pour Thibault V. d'interrompre totalement et/ou partiellement ses activités habituelles " et que la date de consolidation a été " déterminée au 29 août 2015, au lendemain de la date de réalisation du dernier bilan d'investigation allergologique au corollaire d'un examen clinique réalisé au contexte de la réunion d'expertise et d'une absence de preuve d'évolutivité clinique pathologique ultérieure ".

La société Décathlon est dès lors mal fondée à soutenir que l'évaluation du préjudice ne peut pas être faite sur la base du rapport d'expertise judiciaire.

La cour rappelle ensuite qu'au vu des motifs précédemment énoncés, la société Décathlon ne peut sérieusement prétendre en s'appuyant sur le questionnaire rempli par M. V. que le préjudice de Thibault V. se limite à une période 5 jours.

Sur ce, la cour observe que les époux V. es qualitès demandent la confirmation du jugement dont appel quant à l'évaluation du préjudice subi par leur fils.

Il résulte ensuite des écritures de la société Décathlon et de celles de la MSA contenant appel incident que seuls sont discutés devant la cour les postes de préjudice suivants : les dépenses de santé, frais médicaux et pharmaceutiques, et les dépenses de santé futures.

Le jugement dont appel sera en conséquence confirmé sur les chefs de dispositifs suivants :

• 3 051,58 euros au titre des frais divers,

• 1 820 euros au titre de l'assistance tierce personne temporaire,

• 1 050 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,

• 3 000 euros au titre des souffrances endurées,

• 1 500 euros au titre du préjudice esthétique temporaire,

• 3 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,

• 500 euros au titre du préjudice d'agrément,

• 1 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent.

Seules seront examinées les dispositions suivantes du dispositif du jugement dont appel :

• 872,76 euros aux titres des dépenses de santé prises en charge par l'organisme social,

• 16 229,52 euros au titre des dépenses de santé futures restant à charge,

• déboute les parties du surplus de leurs demandes.

La cour constate à titre surabondant qu'il n'est pas contesté que la MSA est l'organisme de sécurité sociale, ce dont il résulte qu'elle a versé des prestations non seulement au titre du régime obligatoire, mais aussi au titre du régime complémentaire.

Sur les dépenses de santé actuelles

Les dépenses de santé actuelles sont les frais médicaux et pharmaceutiques exposés avant la consolidation de victime ; elles incluent non seulement les frais restés à la charge effective de la victime mais aussi les frais payés par des tiers, les frais d'hospitalisation et tous les frais paramédicaux.

La société Décathlon conteste la décision des premiers juges en ce que ceux-ci l'ont condamné à payer à la MSA la somme de 872,76 euros au titre des frais d'hospitalisation des 20 et 21 mai 2014 ; elle considère que cette hospitalisation est liée à une réaction allergique liée au port d'autres protège tibias de marque Adidas et d'autres équipements.

La MSA sollicite la confirmation du jugement dont appel sur les frais d'hospitalisation ; elle demande à la cour d'y ajouter des frais médicaux et pharmaceutiques de 776,57 euros pour le régime obligatoire et 750,60 pour le régime complémentaire.

Sur ce, s'agissant des frais d'hospitalisation, la MSA verse au débat :

• un relevé des dépenses pour Thibault V. faisant apparaître des frais d'hospitalisation avant consolidation d'un montant de 872,76 euros,

• un descriptif des frais engagés indiquant une hospitalisation dans un établissement public de santé, en pédiatrie au CH d'Avignon, du 20 au 21 mai 2014, les frais étant de 872,76 euros,

• un détail des frais avant consolidation mentionnant une prestation 'pédiatrie' au CH d'Avignon du 20 au 21 mai 2014 pour un coût de 872,76 euros.

Si la société Décathlon réfute l'imputabilité de cette hospitalisation au port de ses protège tibias Kipsta, la cour observe, en premier lieu, que l'expert judiciaire a procédé à l'évaluation du préjudice de Thibault V. en retenant les seules incidences de sa réaction cutanée liée à l'utilisation des protège tibias Kipsta FR350, et second lieu, que l'expert judiciaire a indiqué au titre du déficit fonctionnel temporaire subi par Thibault V. qu'il y a eu " en relation certaine, directe et exclusive avec la pathologie en lien avec l'utilisation des protège tibias, la contrainte pour Thibault V. d'interrompre totalement et/ou partiellement ses activités habituelles, déterminant un déficit fonctionnel temporaire qui a été total du 19 au 21 mai 2014 au contexte d'une période d'hospitalisation ".

L'expert judiciaire note également que " les soins qui ont été prodigués avant la détermination de la consolidation ont été décrits aux pages du présent rapport, tous en imputabilité directe et certaine avec la réaction allergique développée " (page 23/41).

Il en résulte que l'hospitalisation de Thibault V. les 20 et 21 mai est en relation causale avec la réaction cutanée de ce dernier.

S'agissant ensuite des frais médicaux et pharmaceutiques, la cour constate que " la MSA a retiré de ses demandes en appel les sommes relatives aux frais d'appareillage et de prothèse " (page 15 de ses écritures).

La MSA verse au débat une attestation d'imputabilité du 20 juin 2018 de son médecin conseil relevant au titre des frais médicaux et pharmaceutiques à hauteur de 1 527,17 euros, des frais de dermatologie, de laboratoire d'analyse, de médecine générale, de pharmacie et d'autres spécialités.

Le détail des sommes versées fait apparaître :

• au titre du régime obligatoire : des frais de pharmacie à hauteur de 269,79 euros, des frais d'autres spécialités à hauteur de 285,94 euros, des frais de dermato-vénérologie à hauteur de 64,40 euros, des frais de laboratoire polyvalent à hauteur de 20,74 euros, des frais de médecine générale à hauteur de 135,70 euros, soit la somme de 776,57 euros ;

• au titre du régime complémentaire : des frais de pharmacie à hauteur de 418,33 euros, des frais d'autres spécialités à hauteur de 168,55 euros, des frais de dermato-vénérologie à hauteur de 87,60 euros, des frais de laboratoire polyvalent à hauteur de 13,82 euros, des frais de médecine générale à hauteur de 62,30 euros, soit la somme de 750,60 euros ;

• soit une somme de 1 527,17 euros

Compte tenu des motifs sus-énoncés, il n'est pas sérieusement contestable que ces frais médicaux et pharmaceutiques à hauteur de 1 527,17 euros sont relation causale avec la réaction cutanée de Thibault V..

En conséquence, le jugement dont appel sera infirmé en ce qu'il a condamné la société Décathlon à payer à la MSA la somme de 872,76 euros au titre des prestations servies à la victime.

La société Décathlon sera condamnée à payer à la MSA la somme de 2 399,93 euros au titre des dépenses de santé actuelles, soit 872,76 euros au titre des frais d'hospitalisation et 1 527,17 euros au titre des frais médicaux et pharmaceutiques.

Sur les dépenses de santé futures

Il s'agit des frais médicaux et pharmaceutiques, non seulement les frais restés à la charge effective de la victime, mais aussi les frais payés par des tiers, les frais d'hospitalisation, et tous les frais paramédicaux, même occasionnels mais médicalement prévisibles, rendus nécessaires par l'état pathologique de la victime après la consolidation.

Les premiers juges ont évalué les dépenses de santé futures restées à charge de la victime à la somme de 16 229,52 euros.

La société Décathlon conclut à l'infirmation ; elle précise quant à l'appel incident de la MSA que ses demandes ne sont nullement justifiées que ce soit pour les frais de crème ou les frais d'orthèse plantaire.

Les époux V. concluent à la confirmation du jugement.

La MSA expose qu'elle a pris en charge des frais de crème, des frais d'orthèse plantaire et des consultations de médecin généraliste.

Sur ce, l'expert judiciaire a précisé que (page 25/41) " des fournitures complémentaires et des soins postérieurs à la consolidation sont à prévoir " à type de :

• applications régulières de topiques cosmétologiques émollients et adaptations de précautions vestimentaires,

• au contexte de l'habillement de la vie quotidienne, la contrainte du port de semelles orthopédiques en cuir dans toutes les chaussures, la toilette quotidienne avec l'utilisation de produits cosmétologiques hypoallergéniques.

Il a également indiqué (page 24/41) que des soins postérieurs à la consolidation sont nécessaires, à savoir " applications régulières de crèmes topiques émollientes ".

Il a cependant précisé (page 25/41) que des appareillages ne sont pas à prévoir.

Il a fixé la date de consolidation au 29 août 2015.

La cour rappelant que l'expert judiciaire a procédé à l'évaluation du préjudice de Thibault V. en retenant les seules incidences de sa réaction cutanée liée à l'utilisation des protège tibias Kipsta FR350, il n'est en conséquence pas sérieusement contestable que celui-ci aura besoin à compter de la consolidation de crèmes dermatologiques.

Il est ensuite constant qu'une orthèse est un appareillage qui compense une fonction absente ou déficitaire, assiste une structure articulaire ou musculaire, stabilise un segment corporel pendant une phase de réadaptation ou de repos, ce que ne conteste d'ailleurs pas la MSA qui verse un document relatif au prix et au descriptif d'une orthèse plantaire (sa pièce n° 10), lequel indique " Orthèses et prothèses externes. Orthèses (ex-petit appareillage). Orthèses plantaires, au-dessus du 37 (...) L'orthèse plantaire orthopédique est destinée à corriger la statique défectueuse du pied ou une anomalie du relief plantaire (...) ", et une liste des produits et prestations (sa pièce n° 20), qui précise notamment pour l'orthèse plantaire qu'il s'agit d'un " appareillage plantaire " " normalement bilatéral même s'il existe un déséquilibre statique ".

Or, l'expert judiciaire ayant indiqué que des appareillages ne sont pas à envisager, la MSA est mal fondée à demander à la cour le remboursement de frais exposés pour des orthèses plantaires qui constituent à l'évidence un appareillage et non des semelles orthopédiques comme elle le prétend.

Sur les frais de médecine générale, la cour observe que les époux V. versent une pièce n° 17 intitulée frais de pharmacie dont il ressort que certaines crèmes cosmétologiques ou dermatologiques ont été délivrées sur prescriptions médicales, ce dont il résulte nécessairement que Thibault V. aura besoin de consultations médicales auprès d'un médecin généraliste pour la délivrance de topiques cosmétologiques émollients.

En conséquence, seront uniquement pris en compte pour l'évaluation des dépenses de santé futures les frais nécessaires pour l'achat de topiques cosmétologiques émollients et les frais de consultation de médecine générale.

S'il convient en principe de distinguer les arrérages échus des arrérages à échoir, la cour observe que les époux V. se bornent à demander la confirmation du jugement, tandis que la MSA ne formule une demande qu'au titre des arrérages à échoir des frais de santé futurs qu'elle devra exposer.

Sur les frais liés à l'achat de topiques cosmétologiques émollients, il ressort de la pièce n° 17 des époux V. que le coût moyen d'achat d'une crème dermatologique ou cosmétologique est de 13,50 euros.

Si l'expert a indiqué que Thibault V. devra appliquer régulièrement des crèmes topiques émollientes, il ne donne pour autant aucune précision sur la fréquence d'application desdites crèmes.

Les époux V. ne fournissent également aucun élément sur la fréquence d'achat des crèmes topiques émollientes nécessaires aux soins de leur fils.

En conséquence, il convient de retenir, comme le propose la MSA, la nécessité d'acheter un tube de crème topique émolliente par mois (page 12 de ses écritures et sa pièce n° 10).

Il en résulte un coût annuel de 162 euros.

Il sera ensuite fait application du barème de capitalisation 2018 de la Gazette du palais, celui-ci étant plus adapté à assurer les modalités pour le futur de la réparation intégrale du dommage actuel et certain de Thibault V. sans perte ni profit.

Thibault V. étant né le 29 avril 2002, il sera retenu un euro de rente viagère pour un homme de 17 ans de 52,256.

Il en résulte un coût de 8 465,47 euros (162 euros x 52,256) pour l'avenir.

Sur la prise en charge partielle par la MSA des frais liés à l'achat de topiques cosmétologiques émollients, il ressort des pièces versées par celle-ci, qu'elle devra prendre en charge des frais futurs pour l'achat mensuel d'un tube de crème à hauteur de 3,15 euros, soit un coût annuel de 37,80 euros.

Il en résulte pour la MSA un coût de 1 975,28 euros (37,80 euros x 52,256) pour l'avenir.

En conséquence, il reste à la charge des époux V. es qualitès la somme de 6 490,19 euros au titre des dépenses de santé futures.

Enfin, s'agissant des frais de médecine générale, ceux-ci devront être évalués pour l'avenir comme suit :

• 25 euros (coût d'une consultation) x 2 (consultations par an) = 50 euros,

• 50 euros x 52,256 euros = 2 512,80 euros.

Soit un coût de 2 512,80 euros pris en charge par la MSA.

Les dépenses de santé futures prises en charge par l'organisme social s'élèvent donc à la somme de 4 488,08 euros ; la MSA limitant sa demande à la somme de 4 281,38 euros, il y sera fait droit.

En conséquence, le jugement dont appel sera infirmé en ce qu'il a condamné la société Décathlon à payer la somme de 16 229,52 aux époux V. es qualitès et débouté la MSA de sa demande à ce titre.

3. Sur les demandes annexes

Il n'y a pas lieu de déclarer l'arrêt opposable à la MSA, celle-ci étant partie à la procédure.

Sur l'indemnité forfaitaire de gestion

S'agissant d'une créance dont le principe et le montant sont de droit, la société Décathlon sera condamnée à payer à la MSA une indemnité forfaitaire de gestion de 1 080 euros.

Le jugement dont appel sera infirmé en ce qu'il a limité le montant de celle-ci à la somme de 290,92 euros.

Sur les dépens et les frais non répétibles

Le sens du présent arrêt commande de confirmer le jugement dont appel sur ses dispositions relatives aux dépens et aux frais non répétibles.

La société Décathlon qui succombe au principal et dans l'essentiel pour ses demandes subsidiaires sera condamnée aux dépens d'appel et à payer au titre des frais non répétibles d'appel, en considération de l'équité, la somme de 2 500 euros aux époux V. tant en leur nom personnel qu'ès qualites, et la somme de 1 200 euros à la MSA.

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement, Confirme le jugement rendu le 26 avril 2018 par le tribunal de grande instance de Lille SAUF en ce qu'il a : - condamné la société Décathlon à payer à Thibault V., représenté par les époux V., la somme suivante en réparation de son préjudice corporel : • 16 229,52 euros au titre des dépenses de santé futures restant à charge, - condamné la société Décathlon a payer à la Mutuelle MSA Alpes Vaucluse les sommes suivantes : • 872,26 euros au titre des prestations servies à la victime, • 290,92 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, - débouté la Mutuelle MSA Alpes Vaucluse du surplus de ses demandes, et Statuant à nouveau de ces seuls chefs infirmes, Condamne la société Décathlon à payer à Thibault V., représenté par M. Dominique V. et Mme Nathalie V., la somme suivante en réparation de son préjudice corporel : • 6 490,19 euros au titre des dépenses de santé futures restant à charge, Condamne la société Décathlon à payer à la Mutuelle MSA Alpes Vaucluse : • la somme de 2 399,93 euros au titre des dépenses de santé actuelles pris en charge, correspondant aux sommes de 872,76 euros au titre des frais d'hospitalisation et de 1 527,17 euros au titre des frais médicaux et pharmaceutiques, • la somme de 4 281,38 euros, au titre des dépenses de santé futures pris en charge, • la somme de 1 080 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, Dit que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter du présent arrêt, Y Ajoutant, Déboute les parties de leurs autres demandes, Condamne la société Décathlon aux dépens d'appel et à payer au titre des frais non répétibles d'appel la somme de 2 500 euros à M. Dominique V. et Mme Nathalie V., ainsi qu'à Thibault V., représenté par M. Dominique V. et Mme Nathalie V., et la somme de 1 200 euros à la Mutuelle MSA Alpes Vaucluse.