CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 30 octobre 2019, n° 17-14440
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
EZ Metrology (Sté)
Défendeur :
G2 Metric (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Conseiller :
M. Gilles
Avocats :
Mes Guizard, Havet
FAITS ET PROCÉDURE
La société EZ Metrology est une société immatriculée aux Etats Unis d'Amérique, dans l'Etat du Michigan, spécialisée dans la métrologie dimensionnelle pour le secteur de l'industrie automobile.
La SAS G2 Métric est une filiale du groupe Latecoère et est également spécialisée dans la métrologie dimensionnelle.
La société EZ Metrology a développé et commercialisé un système compact, dit EZ Speed, qui permet de contrôler la vitesse de fermeture d'une porte d'automobile ; il peut équiper les lignes de montage des véhicules.
La société EZ Metrology a également développé un système pour les bureaux d'étude des constructeurs automobiles, dit EZ Slam, qui mesure les caractéristiques d'une porte de véhicule automobile et qui permet définir en peu de temps les standards de production. Par acte sous seings privés du 21 décembre 2012 les sociétés EZ Metrology et G2 Métric ont signé un contrat de distribution exclusive des produits EZ Metrology sur le territoire de quatre pays européens.
Par lettre du 24 septembre 2014, la société EZ Metrology a informé la société G2 Métric de son intention de procéder à la résiliation du contrat de distribution.
Par lettre du 27 octobre 2014, la société EZ Metrology a notifié à la société G2 Métric la résiliation du contrat à compter du 1erjanvier 2015.
Avant le terme du contrat, la société G2 Métric a passé des commandes auprès de la société EZ Metrology et lui a réglé des acomptes, à hauteur de 80 459,60 euros.
Le 13 février 2015, la société EZ Metrology a annulé toutes les commandes en cours passées par la société G2 Métric, en lui reprochant des inexécutions contractuelles.
Par acte du 3 février 2016, la société G2 Métric a assigné la société EZ Metrology devant le tribunal de commerce de Toulouse.
Par jugement du 23 février 2017, le tribunal de commerce de Toulouse s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Bordeaux.
Par jugement du 16 juin 2017, le tribunal de commerce de Bordeaux a :
- débouté la société G2 Métric SAS de sa demande indemnitaire au titre de la rupture des relations commerciales ;
- condamné la société EZ Metrology à payer à la société G2 Métric SAS une somme de 80 459,60 euros avec intérêts au taux légal à compter du 5 mars 2015 en remboursement des acomptes indûment retenus ;
- condamné la société G2 Métric SAS à payer à la société EZ Metrology une somme de 30 328,20 euros indûment retenue ;
- ordonné compensation entre les créances réciproques ;
- condamné la société EZ Metrology à payer à la société G2 Métric une indemnité de 30 000 euros au titre de la déloyauté de la résiliation ;
- débouté les sociétés G2 Métric SAS et EZ Metrology du surplus de leurs demandes ;
- ordonné l'exécution provisoire limitée à la somme de 50 131,40 euros ;
- condamné la société EZ Metrology à payer à la société G2 Métric la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamné la société EZ Metrology aux dépens.
Par dernières conclusions du 9 septembre 2019, la société EZ Metrology, appelante, demande à la cour de :
Vu les articles 1134, 1147 et 1382 anciens du Code civil,
Vu l'article L. 442-6-I-5° du Code de commerce,
Vu les pièces versées aux débats,
- déclarer recevable et bien fondée la société EZ Metrology en son appel,
- déclarer infondée la société G2 Métric en son appel incident, et la débouter de la totalité de ses demandes,
Par conséquent,
- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux en ce qu'il a débouté la société G2 Métric de ses demandes :
* de dommages et intérêts au titre de l'article L. 442-5° du Code de commerce pour prétendue rupture brutale de relations commerciales établies,
* de remboursement de la somme de 33 000 euros correspondant au prix d'acquisition du matériel de démonstration-suivi technique, demande à laquelle G2 Métric renonce en appel,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux pour le surplus,
Et statuant à nouveau :
- dire la société G2 Métric mal fondée en l'ensemble de ses demandes, fins, moyens et prétentions,
En conséquence,
- débouter la société G2 Métric de la totalité de ses demandes dirigées contre elle,
À titre reconventionnel,
- dire que la société G2 Métric a commis de graves manquements dans l'exécution du contrat et qu'elle est redevable de la somme de 62 928 euros au titre de factures impayées,
En conséquence,
- condamner la société G2 Métric à indemniser son préjudice matériel et de la condamner ainsi à lui payer la somme totale de 1 413 079 euros répartie comme suit :
* 408 984 euros au titre de sa perte de chance d'équiper les sites de production Daimler et Audi en Allemagne en 2014 et 2015,
* 1 004 095 euros au titre de sa perte de chance de générer des revenus de maintenance, développement et consulting auprès des clients même clients au cours des exercices 2016, 2017 et 2018,
- condamner la société G2 Métric à lui payer une somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice moral,
- condamner la société G2 Métric à payer à la société EZ Metrology la somme de 62 928 euros au titre des factures impayées, avec intérêts au taux légal à compter de la date des factures,
- ordonner en tant que de besoin la compensation des créances réciproques,
- condamner la société G2 Métric à lui payer une somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Par dernières conclusions du 16 septembre 2019, la société G2 Métric prie la cour de :
Vu les articles 1134, 1147 et 1382 du Code civil,
Vu l'article L. 442-6, I-5° du Code de commerce,
- déclarer la demande de la société G2 Métric recevable et bien fondée, et en conséquence :
- réformer le jugement entrepris en ses dispositions faisant grief à la société G2 Métric - in limine litis :
- écarter les pièces produites par la société EZ Metrology numérotées 41 à 48 et 50 et 51, libellées en langue étrangère sans production d'une traduction en langue française ;
- sur le fond :
1°) constater la faute de la société EZ Metrology dans le non-remboursement des acomptes versés malgré l'annulation des commandes ;
Par conséquent :
- condamner société EZ Metrology à lui payer une somme de 80 459,60 euros en remboursement des acomptes versés à la commande, avec intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 5 mars 2015 et confirmer le jugement dont appel sur ce point ;
- condamner société EZ Metrology à lui payer une somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour réticence abusive au remboursement des acomptes qu'elle a versés ;
2°) constater la faute de la société EZ Metrology dans l'annulation des commandes ;
Par conséquent :
- condamner société EZ Metrology à lui payer 76 302,65 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier subi du fait de l'annulation fautive des commandes ;
3°) dire que le délai de préavis de 3 mois imposé pour la résiliation du contrat est insuffisant, et que le préavis raisonnable aurait dû être de 6 mois,
Par conséquent :
- condamner société EZ Metrology à payer 28 946 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier subi du fait de la rupture brutale de la relation commerciale ;
4°) dire la résiliation du contrat est intervenue dans des circonstances déloyales et donc fautives,
Par conséquent :
- condamner société EZ Metrology à lui payer 231 568 euros en réparation du préjudice matériel subi et 50 000 euros en réparation du préjudice moral subi ;
5°) dire mal fondée la demande au titre du paiement des factures ;
6°) débouter la société EZ Metrology de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour les préjudices matériel et moral invoqués ; et plus généralement de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires aux présentes.
7°) condamner société EZ Metrology à lui payer 10 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
8°) condamner société EZ Metrology aux entiers dépens.
SUR CE, LA COUR
Sur les pièces contestées
Il est constant que les pièces numérotées 41 à 48 et 50 et 51 de la production de la société EZ Metrology sont libellées en langue étrangère sans que soit produite de traduction en langue française.
Il y a donc lieu d'écarter des débats ces pièces non traduites.
Le contrat litigieux de distribution des produits EZ Metrology a conféré à la SAS G2 Métric l'exclusivité pour la France, l'Allemagne, l'Angleterre et l'Espagne, la SAS G2 Métric disposant de filiales dans ces trois derniers pays. Le contrat a été signé le 21 décembre 2012 par Mme X pour la société EZ Metrology et M. Y, pour la SAS G2 Métric.
Cependant, la collaboration entre les parties avait commencé avant cette date puisqu'il est établi par différents courriels que :
- dès juillet 2012, M. Z, fondateur de la société EZ Metrology, avait donné des contacts à la SAS G2 Métric, pour approcher le client Mercedes-Daimler en Allemagne,
- en août 2012, M. Z avait obtenu, à l'occasion d'une démonstration chez BMW en Chine que cette filiale recommande les produits à BMW Allemagne, ce qui avait été répercuté à la SAS G2 Métric,
- en septembre 2012, la société EZ Metrology avait adressé à la SAS G2 Métric le contact noué avec Kiekert en Allemagne, en invitant la SAS G2 Métric à prendre le relai auprès de ce client potentiel,
- en octobre 2012, la SAS G2 Métric et la société EZ Metrology ont commencé d'arrêter ensemble les calendriers des démonstrations du système EZ Slam, la présence de M. Z étant systématiquement prévue.
S'agissant de l'Allemagne plus particulièrement, la collaboration entre la SAS G2 Métric, en la personne de M. W, et la société EZ Metrology (Mme X pour les aspects administratifs ou marketing et M. Z pour les aspects techniques) s'est poursuivie pour des visites de clients ou de prospects au long de 2013, en février, mars, août, octobre et décembre. Cette activité s'est poursuivie en 2014 jusqu'en juillet, sans heurt entre les parties.
S'agissant du contact avec Volvo Suède, il est établi que M. Z, d'origine belge, avait pris l'initiative de démarcher M. A, qui avait été ingénieur chez Volvo à Gand, mais qui avait entre-temps été muté en Chine et qui l'avait alors dirigé vers son successeur à Gand, M. B. Celui-ci s'est montré particulièrement intéressé par les produits d'EZ Metrology et, par courriel du 6 mars 2014, il a informé M. Z qu'il en avait parlé lors de la conférence téléphonique mensuelle des responsables des techniques de mesure des autres usines Volvo. Il a indiqué : " Ainsi, j'ai appris que quelqu'un fera une démonstration en Suède dans le courant de ce mois. Si cette personne laisse une aussi forte impression que vous chez nous, je suppose que les discussions pour l'achat d'un système démarreront rapidement ".
Dès le 6 mars 2014, Mme X a mentionné dans un courriel à M. Y (la SAS G2 Métric) qu'ils venaient d'apprendre par leur contact à Volvo en Suède que M. W avait contacté ce constructeur à propos du système EZ Slam ; Mme X a rappelé à cette occasion à M. Y : " La Suède ne fait pas partie de votre territoire, si tu veux on peut en discuter ".
En réponse à cette interpellation celui-ci a répondu, le lendemain :
" Effectivement, ce n'est pas W mais moi qui y suis allé la première fois et qui ai présenté le produit à Volvo. W y est allé car l'intérêt était fort. Pour ton information, nous avons créé G2 Metric Scandinavie basée à Göteborg. Quatre ingénieurs suédois ont été embauchés en janvier et Volvo est un client significatif pour nous en février.
Lors de nos rencontres et échanges de fin d'année (au cours desquels nous avons échangé sur le futur), seule la création d'un centre de maintenance a été mise en stand-by car vous souhaitiez pendre le temps de la réflexion.
Sur les autres points du renouvellement du contrat cela a été accepté, que nous soyons le distributeur Européen de l'ensemble de vos produits EZ était accepté.
J'en profite pour t'informer que nous avons fait une présentation de EZ Slam à Fiat à Turin et allons faire une démo début Avril ".
Cette réponse marque une divergence profonde entre les parties sur l'avenir de leur collaboration, en particulier sur l'étendue des territoires confiés à la société G2 Metric.
Par lettre du 24 septembre 2014, Mme X a écrit à M. Y que la société EZ Metrology avait l'intention de mettre fin au contrat de distribution dans sa forme alors actuelle, en expliquant que bien qu'EZ Metrology ait été satisfaite des résultats commerciaux de l'année 2013, la nature des produits nécessitait une révision de la stratégie de vente et de soutien. Il était précisé qu'EZ Metrology invitait à la discussion pour examiner le modèle de distribution pour pouvoir arriver à une solution qui valorise les qualités et capacités de chaque organisation dans le but commun de gagner de l'activité et des parts de marché.
M. Y a répondu à cette lettre par un courriel du 29 septembre 2014, adressé à Mme X et M. Z. A cette occasion il a :
- exprimé son accord sur l'objectif de mettre en place une communication réciproque permettant à chaque partenaire d'avoir une vision de ce que fait l'autre ;
- écrit : " Lors de ta dernière visite en juillet, je partageai ton point de vue : à savoir, nous devons augmenter notre niveau technique. Je te confirme qu'une solution a été trouvée et que son déploiement à commenc[é]. Nous avons nommé un ingénieur (C) d'un très bon niveau technique responsable des produits EZ Metrology. Il a reçu une information sur les produits semaine dernière, et je souhaiterai qu'il reçoive 3 à 4 jours de formation chez vous dans votre usine dans les délais courts (à partir du 20 octobre c'est quand vous voulez, mais ne tardons pas).
Notre pipeline d'ici la fin de l'année est le suivant :
EZ Slam : 3 systèmes avec une probabilité de 75 % (Volvo, Daimler),
EZ Speed 30 systèmes avec une probabilité de 90 % (Volvo, Daimler, VW, Renault BMW).
[...]
Pour finir, le point délicat qui cause tant de remous entre nous concerne principalement Volvo.
Cela ne sert à rien de polémiquer, mais Volvo nous informe qu'ils ont régulièrement la demande d'EZ Metrology d'avoir une vue, voire un transfert, des devis que nous leur avons envoyé (pour info le premier devis a été envoyé début mai, une mise à jour a été faite début juillet et la dernière version date du 12 septembre). La semaine dernière la personne de Volvo Gent nous a demandé de résoudre nos problèmes relationnels en interne et sans les mettre au milieu. Tu as eu des complaintes de leur part car ils ne recevaient pas les devis quand [ils] nous en demandaient. C'est assez compliqué et pénible à suivre, le plus simple est de se faire confiance mutuellement.
En attente de la formation de C, qui doit nous permettre de poursuivre notre relation sur le mode existant depuis le début, qui me paraît le plus [adéquat]. "
Un échange de courriel entre Mme X et M. D, de Audi AG (Allemagne), en date des 7 et 9 octobre 2014 établit qu'EZ Metrology ayant appris que ce client était mécontent du travail de la SAS G2 Métric, a tenté de le rassurer, mais que M. D lui a confirmé que sa société avait décidé de se désister de leur achat du système EZ Slam, en précisant : " Notre cocontractant est G2 Metric (M. S...). Nous n'avons plus eu de nouvelles de G2 Metric depuis juillet. Si nous ne recevons pas de message dans les prochains jours de la part de G2 Metric sur comment procéder pour retourner l'équipement, nous allons transmettre le dossier à notre département juridique. "
Par courriel du 3 novembre 2014, Mme X a expliqué à M. D que :
- la clientèle d'Audi étant très importante pour EZ Metrology, cela avait conduit à mettre fin à la relation commerciale avec le distributeur européen et à ouvrir des établissements pour l'Europe à Luxembourg ;
- EZ Metrology devait reconnaître que c'était la seule façon de travailler directement avec Audi, car des allers-retours avec un intermédiaire, la SAS G2 Métric, ayant une moindre connaissance de la technologie avait conduit Audi à une expérience désagréable avec l'équipement EZ Slam ;
- EZ Metrology, en compensation et pour assurer de nouvelles perspectives d'échanges, offrait à Audi 2 semaines gratuites de formation et d'assistance.
Malgré cela, Audi a persisté dans sa demande de restitution du matériel et de remboursement des sommes versées.
Par lettre du 27 octobre 2014, Mme X a confirmé à la SAS G2 Métric la résiliation du contrat de distribution a effet de la fin d'année 2014, en précisant qu'EZ Metrology avait décidé de créer sa propre filiale en Europe, permettant d'accroître la desserte locale et l'expertise technique sur son offre de produits.
Cette lettre marquait de manière claire la décision de la société EZ Metrology de ne pas retenir la SAS G2 Métric pour la distribution des produits dans les territoires européens jusqu'alors non visés par le contrat, sachant que les parties avaient un désaccord non résolu sur le fait que la SAS G2 Métric puisse intervenir hors zone sans accord préalable de la société EZ Metrology, comme cela avait été le cas, par exemple, en Suède. Également, la société EZ Metrology annonçait clairement qu'il lui fallait accroître l'expertise technique sur l'offre européenne de produit et qu'elle ne choisissait pas la SAS G2 Métric pour ce faire.
S'agissant de la durée du préavis, la cour considère qu'il résulte de ce qui précède, compte tenu de l'ancienneté des relations commerciales, évaluée par la SAS G2 Métric elle-même à deux ans, de la notoriété et de la spécificité des produits distribués, que le préavis de trois mois n'est nullement fautif en l'espèce. Les produits n'ont jamais été distribués sous la marque G2 Metric et nulle dépendance économique ne caractérise cette société.
Par conséquent, si le tribunal de commerce ne peut être approuvé d'avoir dit que la rupture était brutale, le jugement entrepris doit néanmoins être confirmé pour avoir débouté la SAS G2 Métric de sa demande fondée sur l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce.
La SAS G2 Métric sera donc déboutée de toute prétention au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies.
S'agissant de la demande de dommages-intérêts de la SAS G2 Métric pour résiliation intervenue dans des circonstances déloyales ou fautives, il résulte de l'analyse des faits ci-dessus que l'abus du droit de la société EZ Metrology n'est nullement démontré.
En particulier, la preuve n'est nullement rapportée que la société EZ Metrology aurait agi de manière maligne dans l'intention d'évincer la SAS G2 Métric afin de profiter de son réseau de distribution, ni que la société EZ Metrology aurait manqué à son obligation de bonne foi au stade de la rupture.
Il n'est pas démontré que la société EZ Metrology s'est elle-même rendue coupable de la violation de l'exclusivité conférée à la SAS G2 Métric en présentant directement son matériel chez les clients de celle-ci, et ce à l'insu de son distributeur.
Les équipements objets de la vente étant destinés à la conception et à la production d'automobiles, avec un nombre de clients limité par le petit nombre de constructeurs et d'usines de production d'automobiles, la nouvelle orientation stratégique de la société EZ Metrology, qui a choisi de ne plus s'appuyer sur la SAS G2 Métric mais d'établir une filiale en Europe, n'apparaît pas contraire aux intérêts de l'entreprise et nulle déloyauté dans la rupture n'est caractérisée en l'espèce.
L'exploitation par la société EZ Metrology des données sur les clients de la SAS G2 Métric n'apparaît pas fautive ni abusive.
Si M. Z a été présent dans les formations dispensées aux clients, ce fut avec l'accord manifeste de la SAS G2 Métric qui y a vu l'intérêt commercial de faire intervenir, pour la vente de produits particulièrement complexes, un de ses concepteurs en charge du développement des versions actualisées.
Il convient de rappeler que dès le mois de juillet 2014, la société EZ Metrology a convenu par écrit qu'elle avait besoin d'augmenter son niveau technique, proposant de faire former un de ses ingénieurs en octobre 2014 seulement, cette attitude s'accompagnant, cependant, d'une stratégie commerciale très conquérante, y compris pour des pays hors zone, ce que la société EZ Metrology était fondée à ne pas accepter, d'autant plus qu'eu égard à la nature des produits et conformément à la nécessité de soutenir avec les acquéreurs un dialogue technique au plus haut niveau de compétence technique, la SAS G2 Métric n'avait pas été en mesure de le faire à temps.
Alors que le contrat litigieux avait prévu, à l'article 3, que la SAS G2 Métric devait assurer la présence d'un personnel formé à l'utilisation des produits de la société EZ Metrology dans son équipe et que la première formation était assurée par cette société, le distributeur ayant ensuite la faculté de réaliser des formations en interne, il est établi, d'une part, que la formation prévue au contrat n'a jamais concerné le niveau expert, dont les clients ont eu pourtant nécessairement besoin au cours de la mise en œuvre du matériel et que, d'autre part, le niveau de formation de la SAS G2 Métric n'a jamais atteint le niveau expert, ce dont convient expressément la SAS G2 Métric.
L'acquisition par la SAS G2 Métric d'un niveau de formation expert n'a jamais fait l'objet d'un accord, en particulier pas avant le début de la tension, survenue le 6 mars 2014, concernant l'extension du périmètre de distribution confié à cette société.
C'est pourquoi, il ne peut pas être valablement reproché à la société EZ Metrology, au titre de la faute ou de l'abus de droit, de s'être imposée dans les formations auprès des clients ni d'être restée l'interlocuteur privilégié de Mercedes-Daimler après en avoir apporté le contact à la SAS G2 Métric.
Il ne peut être davantage reproché à la société EZ Metrology, au titre des manquements au contrat litigieux, de ne pas avoir voulu former la SAS G2 Métric à une compétence technique approfondie, ni d'avoir décidé qu'elle devait assurer elle-même les formations aux clients. Au reste, la SAS G2 Métric reconnaît expressément avoir accepté, dans l'intérêt commun, le fait que la société EZ Metrology ait la mainmise sur toutes les formations, schéma satisfaisant pour les clients dès lors, reconnaît-elle, que M. Z pouvait répondre à toutes leurs questions.
Il ne peut être non plus valablement reproché à la société EZ Metrology d'avoir manqué aux obligations du contrat à l'occasion des modalités de la rupture.
Après avoir été saisie par Daimler d'un incident technique dont M. Z a estimé qu'il aurait dû être purgé au stade de la formation sur le matériel livré, la société EZ Metrology a indiqué, par courriel du 20 janvier 2015, adressé à Daimler, que leur installation n'avait suivi aucune des procédures standards au niveau de l'installation, de la licence et de la formation.
Ce faisant, la société EZ Metrology qui a dû intervenir en urgence, n'a commis aucune faute ni manquement contractuel.
Au contraire, il est exact que dès lors que la commande de Daimler était du 31 octobre 2014, pour une livraison en toute fin d'année, il revenait à la SAS G2 Métric d'effectuer des diligences normales pour assurer la société EZ Metrology d'un suivi sans heurt de cette commande et de ses suites nécessaires, notamment en termes de formation et de mise en route du matériel. Or, la SAS G2 Métric a expliqué par courriel à la société EZ Metrology qu'eu égard à la date de livraison, la commande était faite pour le matériel nu. La SAS G2 Métric devait à la société EZ Metrology une information loyale à cet égard, au titre de ses obligations contractuelles découlant de la résiliation. Toutefois, en début janvier 2015 et contrairement à ce qu'elle avait fait croire à la société EZ Metrology en l'avisant de la commande Daimler, la SAS G2 Métric a assuré la formation pour ce client, alors qu'elle aurait dû s'abstenir et inviter le client à commander la formation directement auprès du fournisseur qui avait recouvré la distribution en Allemagne du fait de la résiliation.
Par courriel du 5 février 2015, Daimler a confirmé que la SAS G2 Métric ne l'avait pas averti du changement survenu avec la résiliation du contrat.
Il est également démontré que la SAS G2 Métric a procédé en fin d'année 2014 à une vente (au client Jaguar) en ayant annoncé des dates de livraisons non négociées avec la société EZ Metrology et en ayant reçu des commandes de formation qu'elle n'avait plus le droit d'honorer, ce sans prévenir la société EZ Metrology.
Les courriels ou lettres adressés par la société EZ Metrology aux clients en février 2015 ont fait état de la rupture de la relation contractuelle intervenue et du reproche adressé à la SAS G2 Métric de ne pas avoir averti que cette société n'interviendrait plus, ni des modalités pour une transition sans accroc, la société EZ Metrology expliquant en l'espèce à bon droit que cette attitude ne préservait pas les intérêts de sa marque ni ceux des clients.
La société EZ Metrology a annoncé à cette occasion avoir décidé d'interrompre l'ensemble des livraisons en attente passant par la SAS G2 Métric et a invité les clients à lui transférer directement les éventuels ordres d'achat.
Si la société EZ Metrology a exposé auprès des clients sa déception quant à l'attitude de la SAS G2 Métric, ce fut uniquement pour ménager son image, sans excès, et il n'est pas valablement soutenu que ce que la société EZ Metrology a écrit à cette occasion a été abusif, dénigrant ou déloyal.
Par conséquent, il ne peut être valablement reproché à la société EZ Metrology d'avoir notifié à la SAS G2 Métric, par courriel du 15 février 2015, que les présentations malhonnêtes de plan de formation, les manquements au sujet des ventes de formation, la fausse communication concernant les dates de livraison, une installation non professionnelle de l'EZ Slam et la non information des clients du fait de l'arrêt du contrat, avaient entraîné sa décision d'annuler les dernières commandes et livraisons, avec remboursement des acomptes et leur compensation avec les factures non réglées.
La société EZ Metrology n'a pas excédé à cette occasion le droit de se prévaloir de la résolution pour inexécution de l'accord intervenu entre les parties, s'agissant des modalités de résiliation du contrat de distribution.
Nulle faute de la société EZ Metrology n'est prouvée s'agissant de l'annulation des commandes.
Il est constant que les commandes annulées entraînent la restitution des acomptes versés par la SAS G2 Métric, dont le montant n'est pas contesté.
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a condamné la société EZ Metrology à payer à la SAS G2 Métric une somme de 80 459,60 euros à ce titre, outre intérêts au taux légal à compter du 5 mars 2015.
S'agissant des sommes réclamées par la société EZ Metrology au titre des factures impayées, il est constant que la SAS G2 Métric a retenu le paiement d'une facture de 30 328,20 euros correspondant à la commande qu'elle a passé pour Mercedes-Daimler le 31 octobre 2014.
Le jugement sera donc confirmé sur ce point.
S'agissant des factures de formation, qui sont toutes contestées dans leur principe, la cour retiendra que la société EZ Metrology ne rapporte pas la preuve d'être convenue avec la SAS G2 Métric, du temps où les relations étaient bonnes entre les parties, que le distributeur supporterait la charge du coût des formations dispensées aux clients, plutôt que les clients eux-mêmes.
Par conséquent, les factures du 16 avril 2013 et du 17 mars 2013, dont rien ne prouve qu'elles se rattachent à une obligation contractuelle acceptée par la SAS G2 Métric, ni à aucun manquement contractuel de cette société, ne peuvent être mises à sa charge.
En revanche, dès lors que les manquements contractuels de la SAS G2 Métric en cours de préavis ont causé, pour la société EZ Metrology, la nécessité d'intervenir auprès de clients, sans possibilité d'obtenir que ceux-ci prennent en charge la dépense, il est justifié, au rebours de ce que le jugement entrepris a retenu, de condamner la SAS G2 Métric à payer à la société EZ Metrology les sommes suivantes à titre de dommages-intérêts, la cour devant apprécier les montants alloués sans être pour autant liée par le montant des factures :
- 3 000 euros pour l'intervention d'une journée en janvier 2015, à la suite de l'incident chez Daimler déjà évoqué et imputable à la SAS G2 Métric ;
- 9 000 euros pour assurer la formation chez Mercedes Daimler à propos de laquelle la SAS G2 Métric avait faussement écrit à la société EZ Metrology qu'il n'y avait pas eu de commande à ce titre et pour laquelle la société EZ Metrology n'a pas pu facturer le client, à qui la SAS G2 Métric avait vendu la formation.
Les intérêts moratoires au taux légal ne seront pas dus à compter des factures, dès lors que l'indemnisation est liquidée par le présent arrêt.
A l'égard de ces dommages-intérêts, dès lors que le principe du préjudice de la société EZ Metrology est établi, le tribunal ne peut être approuvé d'avoir retenu, pour la débouter de toute demande, que les formations correspondant aux factures avaient été établies pour les besoins de la cause et, surtout, que les prestations fournies avaient largement concouru à l'entreprise de la société EZ Metrology dans sa recherche de la maîtrise technique de la clientèle développée par son distributeur la SAS G2 Métric.
Le jugement sera donc réformé sur ce point.
S'agissant de l'abus de droit reproché par la SAS G2 Métric à la société EZ Metrology pour la rétention des acomptes, il résulte de ce qui précède que, malgré l'erreur de la société EZ Metrology sur l'étendue de ses droits, nul abus de droit n'est caractérisé par la rétention des acomptes sur les commandes annulées.
La SAS G2 Métric sera donc déboutée de sa demande à ce titre, le jugement entrepris devant être réformé sur ce point.
S'agissant des demandes indemnitaires de la société EZ Metrology au titre de la perte de chance de s'implanter chez Audi et Daimler, il convient de rappeler que, dans le cadre du contrat de distribution, les clients de la SAS G2 Métric n'étaient pas ceux de la société EZ Metrology, si bien que celle-ci n'avait pas de droit acquis sur ces clients après résiliation du contrat et que la SAS G2 Métric était en droit de proposer des produits d'un autre fournisseur. La société EZ Metrology ne peut donc valablement soutenir que la perte des clients Audi et Daimler lui a causé un préjudice, en termes de perte de chance de réaliser une marge sur chiffre d'affaires.
Il ne peut être retenu non plus que les insuffisances de la SAS G2 Métric dans le suivi du client Audi, membre du groupe Volkswagen aient, par contagion, fait perdre une chance réelle de réaliser une marge sur chiffre d'affaires avec une autre marque de ce groupe.
En revanche, il est établi que l'attitude de la SAS G2 Métric, à l'occasion de la mise en œuvre des modalités de la rupture, a été déloyale et a porté atteinte à l'image de la société EZ Metrology auprès des constructeurs Daimler et Audi, ce qui compte tenu des relations entre les membres du groupe Volkswagen, s'est nécessairement étendu à d'autres marques de ce groupe.
Ce préjudice d'image peut être évalué par la cour à 40 000 euros, somme que la SAS G2 Métric sera condamnée à payer à la société EZ Metrology, au titre de la responsabilité contractuelle.
S'agissant des mesures accessoires, la SAS G2 Métric, qui succombe à titre principal, sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel et, en équité, versera à la société EZ Metrology une somme telle que précisée au dispositif du présent arrêt.
Par ces motifs : LA COUR, Ecarte les pièces non traduites de la société EZ Metrology, numérotées 41 à 48, 50 et 51, Réforme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a : - débouté la SAS G2 Métric de sa demande en rupture brutale de relations commerciales établies, - débouté la SAS G2 Métric de sa demande en remboursement d'une somme de 33 000 euros en compensation de l'acquisition du matériel de démonstration et du suivi technique, - condamné la société EZ Metrology à payer à la SAS G2 Métric une somme de 80 459,60 euros, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 5 mars 2015, au titre de la restitution des acomptes sur commandes annulées, - condamné la SAS G2 Métric à payer à la société EZ Metrology une somme de 30 328,20 euros au titre du solde impayé d'une commande pour Mercedes-Daimler, Statuant à nouveau sur les chefs réformés : Déboute la SAS G2 Métric de toute demande au titre de la rupture brutale de relations commerciales établies, Déboute la SAS G2 Métric au titre de ses demandes en dommages-intérêts au titre la résiliation dans des circonstances déloyales et fautives, Déboute la SAS G2 Métric de sa demande de dommages-intérêts pour faute de la société EZ Metrology dans l'annulation des commandes, Condamne la SAS G2 Métric à payer la société EZ Metrology, à titre de dommages-intérêts pour manquement aux obligations contractuelles au titre des factures de formation une somme de 12 000 euros, Déboute la SAS G2 Métric de sa demande au titre des dommages-intérêts pour résistance abusive, Déboute la société EZ Metrology de sa demande de réparation d'un préjudice matériel pour perte de chance, Condamne la SAS G2 Métric à payer à la société EZ Metrology une somme de 40 000 euros en compensation du préjudice d'image, Condamne la SAS G2 Métric à payer à la société EZ Metrology une somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Rejette toute autre demande, Condamne la SAS G2 Métric aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.