CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 30 octobre 2019, n° 17-16517
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
F.C Import (SARL), Auchan France (Sté)
Défendeur :
Mac Moda (SARL), F.C Import (SARL), Auchan France (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Dallery
Conseillers :
Mme Hermant, M. Gilles
Avocats :
Mes Cardenas, Etevenard, Berthier Rohou, Henry
FAITS ET PROCÉDURE
La société FC Import a pour activité la revente de divers produits sur le territoire français.
La société Auchan Hypermarchés (anciennement dénommée la société " Auchan France ") appartient au groupe Auchan, enseigne spécialisée dans la grande distribution.
La société Mac Moda a pour activité l'importation de différents produits majoritairement en provenance de Chine.
En 2014, la société FC Import s'est rapprochée de la société Auchan France en vue de lui fournir des produits " Looms " (petits élastiques multicolores servant à la confection de bracelets).
En juin 2014, elle a livré ces produits à plusieurs magasins Auchan.
Par lettre recommandée du 19 août 2014, la société Auchan France a mis en demeure la société FC Import de répondre concernant les quantités de produits vendus et de récupérer ses produits non conformes à la réglementation en vigueur sous quinzaine.
Par lettre du 16 octobre 2014, la société FC Import a mis en demeure la société Auchan France de régler la somme de 444 031,30 euros au titre du solde des factures impayées.
Le même jour, la société Auchan France a réglé la somme de 193 842,14 euros au titre des marchandises revendues.
Par lettre du 26 décembre 2014, la société FC Import a contesté le préjudice invoqué par la société Auchan France, lui indiquant que " la résolution ou la résiliation du contrat ne peut être prononcée qu'en cas de manquement grave à l'obligation de délivrance conforme ce qui ne serait en tout état de cause pas le cas en l'espèce ".
Par lettre du 5 janvier 2015, la société Auchan a invité la société FC Import à reprendre les produits non conformes.
Par actes du 8 juin 2015 remis à Auchan France et du 5 juin 2015 remis à la société Mac Moda, la société FC Import a assigné ces dernières devant le tribunal de commerce de Bobigny sur le fondement des articles 1603 et suivants du Code civil et 1184 du Code civil, pour obtenir condamnation à paiement du solde de ses marchandises.
Par jugement du 18 juillet 2017, ce tribunal a :
- reçu la société FC Import en ses demandes à l'encontre de la société Auchan France et de la société Mac Moda, les a dits mal fondées, et l'en a débouté,
- prononcé la résolution de la vente de " looms " de juin 2014,
- autorisé la société Auchan France à détruire l'intégralité des marchandises litigieuses, telles que localisées selon l'état présenté le 15 juin 2016 dans les 90 jours de la signification du présent jugement, sauf à FC Import à venir les chercher à ses frais dans l'intervalle,
- reçu partiellement la société Auchan France en ses demandes reconventionnelles,
Condamné la société FC Import à payer à la société Auchan France la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- débouté la société Auchan France de sa demande au titre d'une procédure abusive,
- condamné la société FC Import à payer à la société Auchan France la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et a Débouté la société Mac Moda de sa demande à ce titre,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamné la société FC Import aux dépens,
- liquidé les dépens à recouvrer par le Greffe à la somme de 105,84 euros TTC (dont TVA : 17,64 euros).
Par déclaration du 19 Août 2017, la société FC Importa interjeté appel de ce jugement.
Vu les dernières conclusions de la société FC Import, déposées et notifiées le 18 juin 2019, par lesquelles il est demandé à la Cour de :
A titre principal
- constater que la société Auchan France n'a jamais formulé de demande en nullité des ventes en litige sur le fondement d'un vice du consentement au cours de la première instance et a le cas échéant confirmé les actes allégués de nullité relative
- constater que le premier juge a statué ultra petita en prononçant la nullité des ventes sur le fondement du dol et de surcroît sur le fondement d'un moyen de droit que le tribunal (i) n'était pas autorisé à soulever d'office et (ii) a soulevé d'office en violation du " principe du contradictoire "
- constater que la société Auchan France ne rapporte pas la preuve (i) de l'origine des marchandises qu'elle affirme détenir et (ii) du défaut de conformité allégué
- constater que le jugement est mal fondé en ce qu'il a retenu une faute et a mis à la charge de la défenderesse des sommes en conséquence et sans justification
En conséquence,
- infirmer le jugement en toutes ses dispositions
Et statuant à nouveau,
- dire irrecevable la demande de la société Auchan France présentée en appel aux fins d'obtenir la résolution des ventes sur le fondement du dol
- condamner la société Auchan France à payer la somme de 239 517,54 euros à la société FC Import au titre du solde impayé des marchandises majorée de trois fois le taux d'intérêt légal à compter du 16 octobre 2014, date de mise en demeure
- condamner la société Auchan France à payer la somme de 35 927,63 euros à la société FC Import correspondant à la clause pénale stipulée
A titre subsidiaire
- condamner la société Mac Moda à garantir la société FC Import du préjudice qu'elle subirait au titre du prétendu défaut de conformité allégué par la société Auchan France et ce compris toutes les condamnations au titre des frais de procédure outre le paiement à FC Import de la somme de 239 517,54 euros majorée des intérêts selon les modalités précitées et 35 927,63 euros correspondant au préjudice lié à l'absence d'application de la clause pénale dans les rapports avec Auchan France.
En tout état de cause
- condamner les sociétés Auchan France et Mac Moda in solidum à payer à FC Import la somme de 35 000 euros au titre de ses frais irrépétibles
- condamner les sociétés Auchan France et Mac Moda in solidum aux entiers dépens de l'instance dont recouvrement direct pourra être opéré par l'avocat constitué.
Vu les dernières conclusions de la société Auchan France, de venue Auchan Hypermarchés, déposées et notifiées le 26 juin 2018 par lesquelles il est demandé à la Cour de :
Vu l'Ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
Vu les dispositions des articles 1116 ; 1610 ; 1183 ; 1184 ; 1146 ; 1147 ; 1149 ; 1150 ; 1151 du Code civil ;
Vu les dispositions des articles L. 111-6 ; L. 212-1 ; L. 213-1 ; L. 214-1 ; L. 214-2 du Code de la consommation ;
Vu les dispositions de l'article 131-13 du Code pénal ;
- déclarer la société Auchan Hypermarchés recevable en son appel ;
A titre principal
- confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a :
* dit que la société FC Import a commis un dol au préjudice de la société Auchan Hypermarchés ;
- infirmer le jugement attaqué pour :
- prononcer la nullité des ventes de produits looms passées entre la société FC Import et Auchan Hypermarchés correspondant aux marchandises litigieuses selon l'état des stocks produit aux débats et représentant la somme totale de 189 772,35 euros ;
A titre subsidiaire
- infirmer le jugement attaqué pour :
* constater la non-conformité des produits livrés par la société FC Import à la société Auchan Hypermarchés ;
* dire que cette non-conformité justifie leur retrait de la vente par la société Auchan Hypermarchés ;
* dire que cette non-conformité justifie l'exception d'inexécution opposée par Auchan Hypermarchés pour refuser de régler les factures correspondantes ;
* prononcer la résolution des ventes de produits looms passées entre la société FC Import et Auchan Hypermarchés correspondant aux marchandises litigieuses selon l'état des stocks produit aux débats et représentant la somme totale de 189 772,35 euros ;
En tout état de cause
- confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a :
* dit que la société Auchan Hypermarchés a en conséquence subi divers chefs de préjudices ;
- infirmer le jugement attaqué pour :
* condamner à FC Import :
. À établir des avoirs correspondants aux factures des produits non conformes en stock dans les magasins Auchan Hypermarchés selon l'état produit aux débats et représentant la somme totale de 189 772,35 euros ;
. À reprendre à ses frais et sans délai les produits non conformes en stock dans les magasins Auchan Hypermarchés litigieuses selon l'état produit aux débats et représentant la somme totale de 189 772,35 euros ;
* dire qu'à défaut de reprise par FC Import des produits non conformes en stock dans les magasins Auchan dans les 2 mois suivants la signification de l'arrêt à intervenir, Auchan Hypermarchés sera libre d'en disposer comme bon lui semble, y compris de les mettre au rebut.
* condamner la société FC Import à payer à la société Auchan Hypermarchés la somme de 10 000 euros pour procédure abusive ;
* condamner la société FC Import à payer à la société Auchan Hypermarchés la somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêts pour l'ensemble des préjudices consécutifs à la violation de son obligation contractuelle d'avoir à délivrer des produits conformes à la réglementation en vigueur ;
* condamner la société FC Import à payer à la société Auchan Hypermarchés la somme de 450 euros en remboursement des frais d'établissement du constat du 5 février 2016 ;
* condamner la société FC Import à payer à la société Auchan Hypermarchés les frais engagés auprès de Bureau Veritas sur production de justificatif ;
En tout état de cause
- confirmer le jugement attaqué pour le surplus.
- rejeter l'intégralité des prétentions plus amples et contraires formulées à l'encontre de la société Auchan Hypermarchés par la société FC Import ;
- condamner la société FC Import à verser à la société Auchan Hypermarchés, la somme de 35.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
- condamner la même aux entiers dépens de l'instance, en ce compris ceux de première instance distraits au profit de Maître Etevenard.
Vu les dernières conclusions de la société Mac Moda, intimée, déposées et notifiées le 19 janvier 2018 par lesquelles il est demandé à la Cour de :
- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Bobigny en date du 18 juillet 2017 en ce qu'il a débouté la société FC Import de ses demandes à l'encontre de la société Mac Moda ;
- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Bobigny en date du 18 juillet 2017 en ce qu'il a débouté la société Mac Moda de sa demande de condamnation de la société FC Import sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Par conséquent :
- condamner la société FC Import à verser à la société Mac Moda la somme totale de 8 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamner la société FC Import aux dépens.
SUR CE, LA COUR
Sur l'excès de pouvoir commis par le premier juge
FC Import soutient que le tribunal a annulé la vente pour cause de dol ce qui ne lui était pas demandé, au mépris de l'article 5 du Code de procédure civile et a soulevé un moyen de droit d'office tiré du dol sans avoir qualité pour ce faire Elle ajoute que le tribunal a violé le principe de la contradiction énoncé à l'article 16 du Code de procédure civile en ne l'invitant pas à présenter ses observations sur ce moyen de droit.
La société Auchan France estime que le tribunal, qui a prononcé la résolution de la vente, a statué conformément aux règles posées par le Code de procédure civile, l'article 12 donnant le pouvoir, voire le devoir au juge de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, de donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.
Aux termes de son dispositif, le tribunal a prononcé la résolution de la vente de " looms " de juin 2014. Dès lors, FC Import soutient à tort que le tribunal aurait annulé la vente pour cause de dol, statuant ainsi ultra petita et en violation du principe de la contradiction. Le moyen pris de l'excès de pouvoir commis par le premier juge est infondé étant observé de surcroît que FC Import n'en tire aucune conséquence sur la validité de la décision entreprise dont elle se borne à solliciter l'infirmation.
Sur l'irrecevabilité des demandes formées à titre principal par la société Auchan France
La société FC Import soutient sur le fondement de l'article 564 du Code de procédure civile que la prétention tendant à la nullité des contrats au stade de leur formation invoquée par la société Auchan France sur le fondement du dol revêt un caractère nouveau dès lors que cette dernière s'était exclusivement prévalue en première instance de la prétendue mauvaise exécution des contrats pour soulever une exception d'inexécution. Elle en déduit que la société Auchan France a reconnu la validité des contrats à leur stade de formation et a en conséquence renoncé à invoquer la nullité relative en connaissance de cause.
Aux termes des dispositions de l'article 564 du Code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou la révélation d'un fait.
La prétention n'est pas nouvelle si elle tend aux mêmes fins que celle soumise au premier juge, même si son fondement juridique est différent.
En l'espèce, la société Auchan sollicite en cause d'appel le prononcé de la nullité des ventes de produits looms.
Cette demande tendant aux mêmes fins que celle tendant à la résolution des contrats de vente, à savoir, l'anéantissement du contrat, elle n'est pas nouvelle et est en conséquence recevable.
Sur la nullité des ventes de produits looms passées entre la société FC Import et Auchan Hypermarchés
La société FC Import soutient que les conditions de l'article 1116 du Code civil, relatives à la preuve du dol ne sont pas réunies.
Ainsi, elle nie s'être rendue coupable de manœuvres dolosives, s'agissant de l'utilisation malencontreuse par un ancien employé de la société FC Import d'un numéro de référencement de la société TB Stock qui a commis une erreur en la désignant comme " filiale " alors qu'il s'agissait d'un partenaire commercial commun de Auchan France.
Concernant l'élément intentionnel, la société FC Import fait valoir que la société Auchan France ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle aurait eu l'intention de la tromper, d'autant qu'au cours du mois de juin 2014, la société FC Import a vendu directement à des magasins Auchan des marchandises sans bénéficier de référencement.
Enfin, elle soutient que le fait qu'elle ait été ou non référencée au sein de la centrale d'achat d'Auchan France n'a eu aucune influence sur la conclusion des contrats de vente litigieux.
La preuve de manœuvres dolosives n'est pas rapportée à l'appui de la demande de nullité du contrat pour cause de dol. En effet, il n'est pas établi que l'erreur commise par la société FC Import en indiquant qu'elle était une filiale de la société TB Stock ait été faite volontairement, dans l'intention de tromper la société Auchan.
Dès lors, la société Auchan doit être déboutée de sa demande de nullité des ventes pour cause de dol.
Sur la résolution du contrat de vente
La société Auchan Hypermarchés soutient que la société FC Import a manqué à son obligation de délivrance au regard de la non-conformité des produits livrés, ce qui a justifié leur retrait de la vente et son refus de payer les factures. Elle ajoute que les procédures mises en place pour vérifier la conformité des produits auprès de ses fournisseurs référencés n'ont pu être suivies du fait de l'usurpation par la société FC Import du Code fournisseur de la société TB Stock. Elle demande en conséquence, sur le fondement des articles 1610, 1183 et 1184 anciens du Code civil, de prononcer la résolution des ventes de produits looms correspondant aux marchandises litigieuses selon l'état des stocks produit aux débats et représentant la somme de 189 772,35 euros
Elle fait état d'aveux extrajudiciaires de FC Import réitérés judiciairement qui font pleinement foi au sens des articles 1354 et 1356 du Code civil s'agissant de la non-conformité des produits livrés.
La société FC Import fait valoir que :
- le rapport du Bureau Veritas, non contradictoire, ne peut à lui seul tenir lieu de preuve des défauts de produits qu'elle a vendus ;
- aucun élément visuel relatif aux stocks des marchandises que la société Auchan détiendrait et qu'elle lui aurait livrées n'est versé aux débats ;
- si l'exécution de l'obligation de livraison des marchandises lui incombe, la preuve de la mauvaise exécution de l'obligation de délivrance conforme est à la charge de la société Auchan France qui échoue à démontrer que les marchandises sont effectivement celles qu'elle lui vendues ainsi que le défaut de conformité allégué.
La société Auchan produit un courriel interne du 4 juillet 2014 (sa pièce 4) par lequel elle faisait part d'un problème de conformité d'un produit en ces termes :
" Suite à un contrôle de l'administration dans le magasin de Auchan V2, nous vous demandons de retirer immédiatement de la vente les produits LOOMS des fournisseurs FC Import et TB Stock.
Ces produits n'ont pas été validés par la centrale. Ils sont non conformes en marquage (pas de gencod, absence texte français).
Les Codes sont locaux et concernent une trentaine de magasins.
(...) "
Si le rapport du Bureau Veritas des 27 et 2 août 2014 (pièces 13.1 et 13.2 de Auchan) dont il résulte la non-conformité des marquages du produit à la réglementation (absence de nom et d'adresse du fabricant ou de l'importateur, pas de numéro de lot et pas de marquage CE sur l'un des deux emballages) n'est pas contradictoire, il n'en demeure pas moins que FC Import a reconnu les défauts de marquage de ses produits ainsi qu'il résulte de son courriel du 6 juillet 2014 (pièce 6 d'Auchan) en ces termes :
" Z nous excuser pour cette erreur, effectivement nous nous sommes aperçus que sur un arrivage de 24 colis le fabricant a oublié d'imprimer le-ce et autres logos obligatoires. "
Et de son courriel du 12 septembre 2014 (pièce 15 d'Auchan) en ces termes :
" Il est vrai que les produits selon la deuxième expertise comportent certaines anomalies comme le gencod, le lieu d'importation, la désignation du produit en français, mais je ne les prendrai pas en considération dans ce litige nous opposant, car tout ceci aurait pu être corrigé sans le moindre souci et avec grand plaisir par la société FC Import, si toutefois vous aviez pris la peine de nous en avertir de suite !
(....)
C'est pourquoi, simplement en prenant contact avec nous, dès lors que vous aviez constaté un quelconque problème, nous aurions agi au plus vite en vous expédiant des étiquettes nécessaires aux normes souhaitées ".
Il résulte à suffisance de l'ensemble de ces éléments que le défaut de conformité de la marchandise livrée par FC Import à Auchan France, pour défaut de marquage, est établi, étant observé que ces produits n'ont pas été validés par la centrale d'achat Auchan, ce que cette société explique (ses pièces 8 et 9), sans être contredite, par l'utilisation par FC Import du Code fournisseur (IFLS) de la société TB Stock, avec laquelle elle est dépourvue de lien. A cet égard, si FC Import conteste l'existence de manœuvres, elle fait état de l'utilisation malencontreuse par un ancien employé de la société FC Import d'un numéro de référencement d'Auchan France, qui appartenait à un tiers, la société TB Stock, en désignant par erreur cette dernière comme " filiale " alors qu'il s'agissait d'un partenaire commercial commun.
Par ailleurs, la société Auchan qui produit, outre un tableau récapitulatif de la somme à régler à FC Import, un état des stocks à reprendre et la localisation de ces stocks (ses pièces 16,17 , 17 Bis et 31), un procès-verbal de constat d'huissier du 5 février 2016 (sa pièce 25) duquel il résulte que sur le site de Fontenay-Sous-Bois, sur 13 palettes sont entreposés des cartons fermés contenant des bracelets ou bagues looms, interdits à la vente, fabriqués en Chine, que chaque carton porte une référence, que chaque palette de cartons porte une référence et l'indication de la quantité, que le total des quantités et son chiffrage sont détaillés dans le listing annexé et que l'huissier a procédé à l'ouverture de plusieurs cartons choisis au hasard sur chaque palette, justifie à suffisance du stock des marchandises qui lui ont été livrées par la société FC Import pour un montant de 189 772,35 euros, celle-ci ne produisant aucun élément contraire.
Dès lors, étant établi que le stock de produits litigieux en possession des magasins Auchan s'élève à la somme de 189 772,35 euros, la résolution de la vente au titre de ces produits doit être prononcée, le défaut de marquage conforme, dans la mesure où il contrevient à la réglementation en vigueur et empêche la vente des marchandises livrées par FC Import, présentant un caractère de gravité suffisant à cet égard.
La demande de la société Auchan tendant à voir condamner FC Import à établir des avoirs correspondant aux factures des produits non conformes en stock représentant la somme de 189 772,35 euros n'apparaît pas justifiée, n'étant pas établie et la société Auchan ne prétendant pas d'ailleurs en avoir payé le prix puisqu'elle s'est acquittée du prix des marchandises vendues qui ne sont pas en cause.
Cette demande est rejetée au regard de la résolution de la vente prononcée au titre des marchandises non conformes à hauteur de ce montant.
En revanche, il y a lieu de faire droit à la demande tendant à voir condamner la société FC Import à reprendre à ses frais et sans délai les produits non conformes en stock dans les magasins Auchan Hypermarchés selon l'état produit aux débats (pièce 17 de la société Auchan) et représentant la somme totale de 189 772,35 euros.
Il y a lieu de dire qu'à défaut de reprise par FC Import des produits non conformes en stock dans les magasins Auchan (pièces 17 et 31) dans les 2 mois suivants la signification de l'arrêt à intervenir, selon la localisation des stocks (pièces 17 Biset 32), Auchan sera autorisée à les détruire.
Sur le préjudice subi par la société Auchan Hypermarchés
La société FC Import soutient que la société Auchan France n'a versé aucun élément de preuve au soutien de l'existence et quantum de son préjudice subi au titre de la nécessité d'avoir entrepris des travaux administratifs manuels onéreux découlant de l'absence de Code IFLS de la société FC Import.
En outre, elle reproche au tribunal d'avoir excédé ses pouvoirs et d'avoir mis a sa charge des obligations qui ne lui incombaient pas, de sorte que sa responsabilité pour ne pas avoir " participé, comme elle y avait été invitée par le juge, à une recherche collaborative de la meilleure manière d'exploiter la valeur résiduelle des produits litigieux localisés dans les magasins d'Auchan et - avoir laissé - à cette dernière la totalité de la charge de travail aboutissant à l'état récapitulatif présenté à l'audition du 15 juin 2017. " a été engagée à tort. Quant au préjudice, elle affirme que le tribunal ne justifie ni d'un de causalité avec la faute qu'il ne retient ni de son existence ou de son étendue.
La société Auchan Hypermarchés estime que la société FC Import s'est rendue coupable de dol et n'a pas rempli son obligation de délivrance et doit être en conséquence condamnée sur le fondement des articles 1146 et suivants anciens du Code civil, au titre de l'ensemble des frais et coûts qu'elle a dû supporter depuis l'origine de ce litige, notamment au titre de la perte de marge liée à la privation de la vente de looms, des recherches effectuées pour reconstituer les commandes, les livraisons, les reventes et les stocks des produits litigieux, du coût des analyses au Bureau Veritas, du coût du procès-verbal de constat d'huissier, du coût de stockage des lots depuis plus de 3 ans.
Au regard de l'erreur commise par la société FC Import quant au numéro IFLS utilisé et de la non-conformité des produits livrés, Auchan Hypermarchés est fondée à demander réparation du préjudice subi non réparé par la résolution de la vente prononcée.
La cour relève que les frais engagés notamment au titre du temps passé au titre des recherches effectuées pour reconstituer les commandes, les livraisons, les reventes et les stocks des produits litigieux, le suivi du contentieux depuis 3 ans, le coût des analyses du Bureau Veritas, le coût de la signification de sa lettre recommandée avec accusé de réception du 29 août 2014, et le coût du procès-verbal de constat d'huissier, qu'Auchan sollicite également par une demande spécifique, constituent des frais irrépétibles.
Elle dispose néanmoins d'éléments suffisants pour évaluer le préjudice direct subi par Auchan, notamment au titre de la perte de marge liée à la privation de la vente de looms, de la désorganisation des ventes, gestion des linéaires, du coût de stockage des lots depuis plus de 3 ans, à la somme de 10 000 euros.
La demande en paiement de la somme de 450 euros en remboursement à Auchan des frais de constat du 5 février 2016 et celle au titre du coût de l'expertise Bureau Veritas, font partie des frais irrépétibles alloués ci-après.
Sur la procédure abusive
La société Auchan Hypermarchés estime qu'en interjetant appel de la décision la société FC Import a agi abusivement. Elle fait valoir en ce sens que la société FC Import a fait preuve de mauvaise foi dès l'origine du litige en ce qu'elle a tout d'abord donné son accord pour que les produits non conformes lui soient retournés pour ensuite demeurer taisante pendant près de 6 mois avant de l'assigner devant le tribunal de commerce de Bobigny aux fins de la voir condamnée à lui régler l'intégralité des produits litigieux. Elle poursuit en ajoutant que la société FC Import a objectivement refusé de participer à une recherche de solution sur demande du juge pour solliciter, in extremis, sans aucun autre motif, autre que dilatoire, un délai pour formuler une offre transactionnelle.
Cependant la preuve de l'abus par la société FC Import de son droit d'ester en justice, n'est pas rapportée à l'appui de la demande de dommages intérêts présentée par la société Auchan.
Cette demande est rejetée et le jugement confirmé de ce chef.
Sur les demandes à l'encontre de la société Mac Moda
La société FC Import expose que la société Mac Moda est le vendeur initial des marchandises en litige et aucune clause limitative de responsabilité n'a été stipulée. Par conséquent, compte tenu de son obligation de livraison conforme, la société Mac Moda devra la garantir de toute perte sur ces contrats avec la société Auchan France, s'agissant d'une chaîne translative de propriété.
La société Mac Moda rétorque que son implication dans le litige opposant FC Import à Auchan France n'est pas démontrée puisque la preuve de la provenance des produits incriminés n'est pas rapportée. Elle fait valoir en ce sens que la société FC Import s'est fournie en produits " Loom " auprès de multiples importateurs au cours de l'année 2014. Elle ajoute n'avoir vendu que 146 176 produits " Loom ", toutes catégories de produits confondues, à la société FC Import alors que cette dernière en a revendu une quantité deux fois plus importante à la société Auchan France. En outre, elle dit que les marchandises vendues à la société FC Import à cette même période n'étaient pas destinées à la société Auchan France mais à la société Carrefour.
Par ailleurs, elle soutient que la société FC Import avait une obligation de contrôle des produits avant leur vente en application de la Directive n° 2009/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 juin 2009 ainsi que du décret n° 2010-166 du 22 février 2010.
FC Import ne démontrant pas que les produits Looms litigieux auraient été acquis auprès de Mac Moda, la seule production (sa pièce 5) de factures de Mac Moda émises entre le 27 février 2014 et le 4 juillet 2014 portant la mention " boîte élastique et accessoire " ou/et " élastique " ou/et " élastique et accessoire " étant insuffisante à cet égard, elle ne peut qu'être déboutée des demandes présentées à l'encontre de cette dernière.
Sur l'article 700 du Code de procédure civile
La société FC Import qui succombe, est déboutée de ses demandes au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et est condamnée, sur ce fondement, à payer la somme de 15 000 euros à la société Auchan France, en sus de la somme allouée à ce titre par le tribunal, ainsi que celle de 5 000 euros à la société Mac Moda, le jugement étant infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de cette dernière.
Par ces motifs LA COUR, Confirme le jugement sauf en ce qu'il a : - autorisé la société Auchan France à détruire l'intégralité des marchandises litigieuses, telles que localisées selon l'état présenté le 15 juin 2016 dans les 90 jours de la signification du présent jugement, sauf à FC Import à venir les chercher à ses frais dans l'intervalle, - condamné la société FC Import à payer à la société Auchan France la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts, - débouté la société Mac Moda de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant, Déclare la société Auchan Hypermarchés recevable mais non fondée en sa demande tendant à voir prononcer la nullité des ventes de produits looms pour cause de dol ; la Déboute de sa demande de ce chef ; la Déboute de sa demande tendant à voir condamner FC Import à établir des avoirs correspondant aux factures des produits non conformes en stock dans les magasins Auchan Hypermarchés ; Condamne la société FC Import à reprendre à ses frais et sans délai les produits non conformes en stock dans les magasins Auchan Hypermarchés selon l'état produit aux débats (pièce 17 de la société Auchan) et représentant la somme totale de 189 772,35 euros, selon la localisation des stocks (pièces 17 Bis et 32) ; Dit qu'à défaut de reprise par FC Import de ces produits dans les magasins Auchan dans les 2 mois suivants la signification de l'arrêt à intervenir la société Auchan Hypermarchés sera autorisée à les détruire ; Condamne la société FC Import à verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages intérêts à la société Auchan Hypermarchés ; Déboute la société FC Import de ses demandes dirigées contre la société Mac Moda ; la Condamne aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct dans les termes de l'article 699 du Code de procédure civile et à payer à la société Auchan France la somme de 15 000 euros et celle de 5 000 euros à la société Mac Moda au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; Rejette toute autre demande.