CA Versailles, 3e ch., 24 octobre 2019, n° 18-04197
VERSAILLES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Défendeur :
FCA France (SAS), Pont Neuf Automobiles (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Boisselet
Conseillers :
Mmes Bazet, Derniaux
Avocats :
Mes Quetand-Finet, Gazagnes, Liccioni
FAITS ET PROCÉDURE
Suivant facture en date du 15 février 2013, Mme X a acquis auprès de la SAS Pont Neuf Auto (la société PNA) un véhicule de marque Alfa Romeo modèle Mito 0.9 Twinair 85 CH Distinctive, présentant 15 kilomètres au compteur, au prix de 14 000 euros.
Par courriel du 17 février 2015, le père de l'acheteuse a écrit à la société PNA que suite au blocage de la direction assistée du véhicule en plein virage sur une autoroute, sa fille ne voulait plus conduire la voiture et demandait en conséquence l'attribution d'un véhicule neuf.
Par courriel du 20 février 2015, un représentant de la société PNA répondait que le constructeur avait refusé d'accéder à la demande de remplacement par un véhicule neuf, que le véhicule avait une vétusté de deux ans et demi mais que cependant, il acceptait de prendre en charge à titre commercial 100 % de la remise en état. Il ajoutait que la société PNA quant à elle lui offrait de remplacer le véhicule par une voiture équivalente en valeur vénale.
Dans un courrier du 25 février 2015 adressé à Mme X, la société Fiat France, constructeur, lui confirmait sa proposition de prise en charge des frais de remise en état de la direction assistée du véhicule, pièce et main d'œuvre, précisant qu'il s'agissait d'un geste purement commercial.
Par lettre du 2 mars 2015, Mme X a mis en demeure la société PNA de reprendre le véhicule atteint d'un vice caché et de lui restituer le prix.
Elle a par la suite saisi son assureur de protection juridique qui a missionné en qualité d'expert amiable le cabinet Aera Expertise Automobile lequel, en la personne de M. Y, a rendu un rapport le 25 mai 2015, dans lequel il conclut que : " Le véhicule présente un désordre fugitif sur le système électrique d'assistance de la direction. Ce désordre sur les colonnes de direction est connu dans le réseau après-vente. Une prise en charge intégrale de réparation a été proposée par le constructeur à Mme X pour solutionner le litige. Mme X refuse cette proposition et ne souhaite pas faire reprendre son véhicule. Elle souhaite uniquement une annulation de la vente. A notre sens, la responsabilité civile de Fiat Auto France est engagée en tant que constructeur. Le désordre est connu et fait l'objet de prise en charge en après-vente par le constructeur ".
Les 29 février et 16 mars 2016, Mme X a fait assigner la société PNA et la société Fiat Auto France devant le tribunal de grande instance de Versailles en résolution de la vente.
Par jugement du 15 mai 2018, la juridiction a débouté Mme X de ses demandes au titre de la garantie des vices cachés, l'a condamnée aux dépens et au paiement à la SAS Pont Neuf Auto de la somme de 1 500 euros et à la société FCA France de celle de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, et a dit n'y avoir lieu de prononcer l'exécution provisoire.
Mme X a interjeté appel de cette décision et, aux termes de conclusions du 14 septembre 2018, demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de :
Rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions présentées par les intimées,
Constater que le constructeur Fiat France et le Garage Pont Neuf Auto ne pouvaient, en leur qualité de professionnel de l'automobile, ignorer la déficience sur la direction du véhicule vendu
Constater que les désordres affectant le véhicule étaient présents au jour de la vente et le rendent impropre à l'usage auquel le destine son propriétaire
Constater que ces défauts constituent des vices cachés au sens de l'article 1641du Code civil
En conséquence, ordonner la résolution de la vente
Condamner in solidum le constructeur Fiat France et Pont Neuf Auto à lui payer la somme de 14 000 euros, et ce avec intérêts de droit à compter de la vente soit le 15 février 2015,
Les condamner in solidum à lui payer les sommes de 12 946,96 euros au titre du préjudice subi tel que décrit dans ses conclusions, 10 000 euros au titre du préjudice moral et 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, avec intérêts de droit à compter de l'assignation,
Les condamner " conjointement et solidairement " aux entiers dépens avec recouvrement direct.
Par conclusions du 13 décembre 2018, la société Pont Neuf Automobiles demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et :
À titre principal :
Juger que Mme X ne rapporte pas la preuve que le véhicule qu'elle a acquis auprès de la société PNA était atteint d'un vice caché ou d'un défaut de conformité le rendant impropre à sa destination
En conséquence, la débouter de toutes les demandes qu'elle forme à son encontre,
À titre subsidiaire :
Juger que Mme X ne rapporte pas la preuve des préjudices qu'elle dit subir
Rejeter les demandes d'indemnisation formées par Mme X ou les réduire à de plus justes proportions
Constater que la société FCA France est exclusivement responsable de l'éventuelle défectuosité atteignant le véhicule
En conséquence : condamner la société FCA France à la relever et garantir de toutes les condamnations qui pourraient être mises à sa charge, en ce compris celles relatives à la restitution intégrale du prix de vente du véhicule
Ordonner en conséquence la restitution du véhicule Alfa Romeo Mito n° de série ZAR 95500001200414 à la société FCA France
Condamner la société FCA France à lui verser une somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice commercial
Si par extraordinaire la cour devait considérer qu'elle ne peut être relevée et garantie par la société FCA France en ce qui concerne la restitution du prix de vente :
Juger que l'action rédhibitoire relative à la garantie des vices cachés lui appartient également en ce qu'elle a acquis le véhicule litigieux auprès de la société FCA France
En conséquence : prononcer la résolution de la vente intervenue entre la société PNA et la société FCA France, en juin 2012 en application de la garantie des vices cachés,
Condamner la société FCA France à lui verser la somme de 16 262,77 euros qui correspond au prix d'achat du véhicule
Ordonner en conséquence la restitution du véhicule Alfa Romeo Mito n° de série ZAR 95500001200414 à la société FCA France
Condamner en tout état de cause, la société FCA France à la garantir de toutes les condamnations qui pourraient être mises à sa charge à l'égard de Mme K..., sur le fondement de la garantie des vices cachés ou d'un défaut de conformité
En tout état de cause :
Condamner Mme X ou qui mieux le devra entre elle et la société FCA France à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Aux termes de conclusions du 13 mars 2019, la société FCA France demande à la cour de :
A titre principal :
Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions en ce qu'il a débouté Mme X de toutes ses demandes au titre de la garantie légale des vices cachés,
En conséquence, débouter la société Pont Neuf Automobiles de sa demande en garantie à son encontre
A titre subsidiaire :
Juger que les demandes indemnitaires de Mme X ne sont pas justifiées,
En conséquence, débouter Mme X de ses demandes, fins et prétentions à ce titre,
Juger que la société Pont Neuf Automobiles est mal fondée à solliciter sa garantie au titre de la restitution du prix de vente du véhicule issue de l'action rédhibitoire exercée par Mme X, juger que la société Pont Neuf Automobiles ne rapporte pas la preuve d'un vice caché,
En conséquence, débouter la société Pont Neuf Automobiles de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions en ce qu'elles sont dirigées à son encontre.
A titre infiniment subsidiaire :
Si par extraordinaire, " le tribunal " devait considérer que l'action rédhibitoire de la société Pont Neuf Automobiles était fondée et devait en conséquence prononcer la résolution de la vente intervenue entre la société Pont Neuf Automobiles et la société FCA France,
Dire que la société FCA France ne saurait être tenue au paiement d'une somme supérieure au prix qu'elle a perçu, soit la somme de 13 298,60 euros HT,
Ordonner la restitution du véhicule Alfa Romeo Mito n° de série ZAR 95500001200414 à la société FCA France.
En tout état de cause :
Condamner tout succombant à lui verser une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamner tout succombant aux entiers dépens de l'instance avec recouvrement direct.
Pour l'exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions notifiées aux dates mentionnées ci-dessus, conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 13 juin 2019.
SUR QUOI LA COUR
Le tribunal a observé qu'au soutien de son action, Mme X s'appuyait uniquement sur deux documents desquels il ne ressortait pas que le désordre allégué serait tellement grave qu'il porterait atteinte à l'usage auquel le véhicule est destiné, et en particulier à sa conduite :
En effet, le diagnostic effectué par la société PNA porte seulement indication de la nécessité de remplacer la colonne de direction électrique pour un montant total de 1 224,76 euros. Aucun autre élément résultant de cet écrit ne permet de mesurer la gravité de ce désordre ;
Quant au rapport de l'expert amiable, il mentionne l'existence d'un désordre qualifié de " fugitif " sur le système électrique d'assistance de la direction mais ne comporte aucune description de la nature exacte de ce désordre, ni de son degré de gravité, se contentant d'indiquer qu'il s'agit d'un désordre " connu dans le réseau après-vente ".
Le tribunal a indiqué que l'expert avait ajouté qu'à son sens, la responsabilité civile de Fiat Auto France était engagée en tant que constructeur et relevé qu'il n'appartenait pas à un technicien de qualifier juridiquement ses constatations.
Les premiers juges ont relevé qu'il ne saurait se déduire de cette seule phrase qu'il a considéré que la responsabilité civile serait engagée au titre de la garantie des vices cachés.
Enfin, le tribunal a observé que si Mme X affirmait dans ses écritures que le véhicule était immobilisé depuis l'incident du 10 février 2015, elle ne versait aux débats aucun élément de nature à démontrer la réalité de cette immobilisation.
Les premiers juges ont conclu que Mme X ne rapportait pas la preuve de la gravité du désordre rendant la chose impropre à son usage et l'a déboutée de ses demandes fondées sur la garantie des vices cachés et de celles subséquentes.
Dans ses écritures l'appelante ne développe aucun moyen nouveau par rapport à ceux déjà exposés en première instance. Les extraits de forum de discussion sur internet qui émanent de personnes non identifiées ne sont évidemment pas susceptibles de pallier sa carence dans l'administration de la preuve qui lui incombe.
C'est aux termes de justes motifs que la cour adopte sans réserve que Mme X a été déboutée de ses demandes.
A ces justes motifs la cour ajoutera que l'expert amiable qui a testé le véhicule n'a constaté aucun désordre, ce qui l'a conduit vraisemblablement à évoquer un désordre " fugitif ", et qu'ainsi que l'a indiqué la société PNA, le seul dysfonctionnement du système d'assistance électrique n'entraîne aucune dangerosité, le véhicule se comportant alors comme ceux qui sont dépourvus de conduite assistée, en sorte que la gravité du vice allégué n'est pas établie.
Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.
Mme X versera une somme de 2 000 euros à chacune des sociétés intimées au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
Par ces motifs LA COUR, statuant contradictoirement ; Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions. Y ajoutant : Condamne Mme X à payer à la société Pont Neuf Automobiles la somme de 2 000 euros et à la société FCA France la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile. Condamne Mme X aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.