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Décisions

CA Montpellier, 2e ch., 5 novembre 2019, n° 17-00912

MONTPELLIER

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

JL Distribution (SARL)

Défendeur :

Chabot Delrieu Associés (SARL), Generali (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Prouzat

Conseillers :

Mmes Bourdon, Rochette

Avocats :

S : Mes Pepratx Negre, Lapassade, Pinet, Balzarini, Thevenot

T. com. Narbonne, du 20 déc. 2016

20 décembre 2016

FAITS, PROCEDURE - PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

L'EURL JL Distribution commercialise des vins tranquilles (vins non pétillants) et des vins mousseux et procède pour ce faire à leur mise en bouteille avec étiquetage.

Par bon de commande du 18 juillet 2012, la société Chabot Delrieu Associés (CDA), assurée auprès de la société d'assurances Generali, a vendu à la société JL Distribution une étiqueteuse adhésive automatique, modèle régionale, ayant une cadence jusqu'à 800 bouteilles par heure pour le vin effervescent et jusqu'à 1 500 bouteilles par heure pour le vin tranquille, comprenant divers postes (un convoyeur, un écran tactile, un distributeur mixte de coiffes et capsules, un poste de sertissage, un poste de pose étiquettes...) avec un réglage électrique, une cellule de repérage caméra à l'étiquetage (...) pour un montant total de 29 680 euros HT (hors reprise de l'ancienne machine) et forfaits de port, de mise en route et formation offerts.

La livraison a eu lieu le 13 décembre 2012 avec une facture, datée du même jour, et la reprise de l'ancienne machine (avec une déduction de la somme de 8 750 euros HT) a eu lieu le 16 décembre 2012.

Compte tenu de dysfonctionnements, la société JL Distribution a fait établir un procès-verbal de constat d'huissier de justice le 19 juin 2013 et mis en demeure la société CDA, par lettre recommandée avec avis de réception du 4 juillet 2013, " d'apporter les modifications nécessaires à la machine de sorte qu'elle soit en parfait état de fonctionnement ".

Saisi par acte d'huissier du 3 octobre 2013 délivré par la société JL Distribution, le président du tribunal de commerce de Narbonne a, par ordonnance de référé du 19 novembre 2013, prescrit une mesure d'expertise.

Monsieur E... F... a terminé son rapport d'expertise le 24 octobre 2014.

Saisi par acte d'huissier du 20 juillet 2015 délivré par la société JL Distribution aux fins de résolution de la vente, le tribunal de commerce de Narbonne a, par jugement du 20 décembre 2016, après avoir été désigné comme juridiction de renvoi par jugement du 14 décembre 2015 du tribunal de commerce de Carcassonne :

" - rejeté la demande en nullité du rapport d'expertise et déclaré le rapport d'expertise recevable,

- débouté l'EURL JL Distribution de ses demandes fondées sur le défaut de délivrance conforme,

- débouté l'EURL JL Distribution de ses demandes fondées sur la garantie des vices cachés de la société CDA,

- ordonné la résolution de la vente du 18 juillet 2012 passée entre l'EURL JL Distribution et la SARL

Chabot Darrieux Associés,

- ordonné suite à la résolution de la vente la restitution de la machine étiqueteuse adhésive automatique régionale à la SARL Chabot Delrieu Associés,

- dit que la SARL Chabot Delrieux Associés devra au plus vite reprendre possession de sa machine sur le site de l'EURL JL Distribution en prévenant le cessionnaire de son retrait 10 jours à l'avance,

- condamné la SARL Chabot Delrieu Associés au remboursement de 15 000 euros au titre des acomptes versés par l'EURL JL Distribution pour l'acquisition de la machine,

- condamné la SARL Chabot Delrieu Associés au remboursement de 10 465 euros au titre du prix de reprise de l'ancienne machine par la SARL Chabot Delrieu Associés lors de la vente du 18 juillet

2012,

- débouté l'EURL JL Distribution de ses demandes indemnitaires comme injustes et infondés,

- constaté que la garantie de la compagnie Generali ne peut être acquise pour couvrir l'action en résolution de vente,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- fait masse des dépens qui comprendront les frais d'expertise et seront supportés par moitié par l'EURL JL Distribution et la SARL Chabot Delrieu Associés "

Par déclaration reçue le 17 février 2017, la société JL Distribution a régulièrement relevé appel de ce jugement en vue de sa réformation.

Elle demande à la cour, en l'état de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 12 août 2019, de :

" - (...) dire que la SARL Chabot Delrieu Associés a manqué à son obligation de délivrance et de mise au point de la machine contractuellement prévue, laquelle mise au point constitue en outre, une obligation légale pour les machines complexes et une obligation de résultat, incombant au cédant,

- confirmer le jugement rendu (...)

- en ce qu'il a rejeté la demande en nullité du rapport d'expertise de la SARL Chabot Delrieu

Associés et déclaré le rapport d'expertise recevable ;

- en ce qu'il a ordonné la résolution de la vente du 18 juillet 2012 passée entre l'EURL JL

Distribution et la SARL Chabot Delrieu Associés ;

- en ce qu'il a ordonné, suite à la résolution judicaire de la vente, la restitution de la machine étiqueteuse adhésive automatique " Régionale " vendue le 18 juillet 2012 par la SARL Chabot

Delrieu Associés à l'EURL JL Distribution et dit que la SARL Chabot Delrieu Associés devra reprendre possession de sa machine, sur le site de l'EURL JL Distribution au plus vite, en prévenant le cessionnaire de son retrait, de 10 jours à l'avance ;

- en ce qu'il a condamné la SARL Chabot Delrieu Associés à lui verser les sommes suivantes :

a) 15 000 euros, correspondant au remboursement des acomptes versés pour l'acquisition de la machine neuve ;

b) 10 465 euros correspondant au prix de reprise de l'ancienne machine ;

- infirmer ledit jugement

- en ce qu'i1 a constaté que la SARL Chabot Delrieu Associés avait exécuté son obligation de délivrance conforme et de mise au point ;

- en ce qu'il a dit que la machine étiqueteuse adhésive automatique " Régionale " vendue par la

SARL Chabot Delrieu Associés à l'EURL JL Distribution le 18 juillet 2012 n'est pas entachée d'un vice caché la rendant impropre à sa destination ;

- en ce qu'il fait masse des dépens et les a fait supporter, de manière incompréhensible, pour moitié par l'EURL JL Distribution et la SARL CDA, et condamner cette dernière aux entiers dépens de première instance dont les frais d'expertise et constat d'huissier,

- en ce qu'il a considéré qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du

Code de procédure civile, au titre de la procédure devant les juridictions de première instance,

- en ce qu'il n'a octroyé aucune réparation à la société JL Distribution et condamner la SARL

Chabot Delrieu Associés à réparer les préjudices suivants :

- 22 091,82 euros au titre du remboursement de la machine de secours pour les vins effervescents le

26 septembre 2013 ;

- 20 594,60 euros au titre du gain manqué par la société JL Distribution correspondant à l'achat de la machine mixte le 21 décembre 2015 moins les acomptes versés ;

- 16 200 euros au titre de la baisse de cadence de la machine vendue ;

- 10 710 euros au titre du traitement des déchets produits par la machine vendue ;

- 2 693,87 euros au titre des frais bancaires supportés au titre de cette acquisition ;

- 6 279 euros au titre de la perte d'exploitation,

- 20 000 euros pour résistance abusive et mauvaise foi, le tout assorti des intérêts légaux, courant à compter de la mise en demeure du 4 juillet 2013 et capitalisation des intérêts au terme d'une année conformément à l'article 1343-2 du Code civil,

- condamner, au titre de la procédure en première instance, la SARL Chabot Delrieu Associés à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers et frais de justice, de première instance, dont les frais d'expertise et les frais de constat d'huissier, avec intérêts de droit depuis le jugement du tribunal de commerce de Narbonne le 20 décembre 2016 et capitalisation des intérêts,

- condamner, au titre de la procédure d'appel, la SARL Chabot Delrieu Associés au paiement à l'EURL JL Distribution de la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles conformément aux dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, et aux entiers dépens et frais de justice consécutifs à la procédure d'appel ;

- dire et juger que (....) le montant des sommes retenues par l'huissier (...) devra être supporté par la

SARL Chabot Delrieu associés en sus de l'application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- débouter la société Generali Assurance de ses demandes,

- la condamner à se porter garante des condamnations prononcées contre la société Chabot Delrieu

Associés pour manquement à son obligation de délivrance au titre de sa responsabilité civile après livraison (principal, intérêts, dépens et article 700 du Code de procédure civile),

- la condamner à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens avec distraction ".

Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que :

- la société CDA a été dans l'incapacité de faire la mise au point de la machine vendue,

- la machine présente de nombreux dysfonctionnements et subsidiairement, elle est impropre à son usage,

- l'expert judiciaire a écarté l'ensemble des arguments de la société CDA, notamment celui relatif au compresseur inadapté,

- le principe du contradictoire a été respecté concernant la réalisation de cette expertise, le rapport de l'expert étant fondé sur des éléments techniques et non pas sur le sondage qu'il a pu réaliser en annexe de son rapport (compte rendu du 1er août 2014 correspondant à un sondage de consommateurs sur l'aspect des bouteilles),

- outre la justification de ses préjudices, la procédure de sauvegarde ouverte le 30 novembre 2016 est en partie liée aux dysfonctionnements de la machine.

La SARL Chabot Delrieu Associés (CDA) sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 19 août 2019 :

" - (...) - réformer la décision dont appel en ce qu'elle a rejeté la demande de nullité du rapport d'expertise judiciaire et en conséquence, dire nul le rapport d'expertise judiciaire de Monsieur Gautreau et en tirer toutes les conséquences qui s'imposent,

- (...) à titre subsidiaire, confirmer la décision dont appel en ce qu'elle a débouté la société JL

Distribution de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- à titre infiniment subsidiaire, dire que la compagnie Generali devra la relever et garantir de toutes condamnations pécuniaires dans la limite du contrat,

- en toute hypothèse, prendre acte de l'exécution de la décision de première instance quant à la résolution de la vente et confirmer sur ce point la décision de première instance,

- confirmer la décision de première instance quant au rejet des demandes indemnitaires de la société

JL Distribution, comme injustes et infondées,

- condamner la société JL Distribution à lui payer :

- 15 000 euros de dommages et intérêts,

- 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens qui comprendront le coût de l'expertise judiciaire. "

Elle expose en substance que :

- le rapport d'expertise doit être annulé au regard de la partialité de l'expert, qui a, de façon non contradictoire, opéré des constatations auprès de tiers, visant à confirmer son avis non technique sur les prétendus dysfonctionnements,

- aucune non-conformité, ni aucun vice caché ne sont établis.

La SA Generali Assurances sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 5 juillet 2017 :

" - confirmer le jugement rendu (...) et en conséquence, dire et juger qu'elle est en droit de se prévaloir des exclusions et limitations de garantie, telles qu'elles résultent des conditions générales du contrat d'assurance,

- (...) dire et juger en conséquence que sont exclues de sa garantie toutes les réclamations présentées par l'EURL JL Distribution :

- au titre du remboursement de la machine de secours (22 091,82 euros),

- au titre de la baisse de cadence de la machine vendue (16 200 euros),

- au titre du traitement des déchets produits par la machine (10 710,00 euros),

- au titre des frais bancaires supportés par la société JL Distribution au titre de cette acquisition (2

693,87 euros),

- au titre du remboursement des acomptes versés pour l'achat de la machine (15 000 euros),

- au titre du prix de reprise de l'ancienne machine (l0 465,00 euros),

- constater en outre que la société JL Distribution ne justifie pas de la perte de gain et de la perte d'exploitation, qu'elle chiffre à 20 594,60 euros et 6 279 euros sans produire la moindre pièce comptable susceptible de prouver une perte de commandes et de chiffre d'affaires directement consécutive aux difficultés d'exploitation de la machine achetée auprès de la société CDA,

- débouter en conséquence l`EURL JL Distribution de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- débouter plus généralement les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamner la société JL Distribution au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article

700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens. "

Elle soutient que sa garantie ne pourrait jouer qu'au titre de la perte de gains manqués et de la perte d'exploitation, qui ne sont pas démontrées et forment une seule et même demande, si un défaut de délivrance de la chose vendue ou un vice caché étaient établis, ce qui n'est le cas.

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 3 septembre 2019.

MOTIFS de la DECISION :

- sur la nullité du rapport d'expertise judiciaire

Le sondage effectué par l'expert judiciaire, auprès de tiers sur l'aspect des bouteilles, postérieurement à l'accédit contradictoire du 31 juillet 2014, en violation du principe de la contradiction pour ne pas avoir informé les parties de ses diligences, ne constitue qu'une illustration, au demeurant superfétatoire, de ses propres constatations et conclusions techniques résultant d'opérations expertales contradictoires, de sorte qu'il ne remet pas en cause le respect de ce principe quant auxdites opérations d'expertise et que la demande de nullité sera rejetée.

Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

- sur les dysfonctionnements et défauts de la machine

La société JL Distribution sollicite la résolution de la vente pour non-respect de l'obligation de délivrance, qui ne se limite pas à la seule livraison du bien vendu et comprend également la mise au point du matériel et son adaptation aux besoins de l'acheteur, non-respect des obligations contractuelles du vendeur au regard des nombreux dysfonctionnements et subsidiairement, au titre de la garantie des vices cachés, la machine étant impropre à son usage.

La société CDA considère que la machine est conforme à la commande, sous réserve d'un réglage, étant précisé que le bon de commande précise simplement une cadence maximale et non minimale et que le personnel de la société JL Distribution n'était pas assez formé et qu'il n'y a pas de vice caché, l'expert n'ayant pas identifié la cause des défectuosités constatées (qui concernent la pression des vérins due à un compresseur inadapté qu'elle n'a pas fourni) tandis que la machine réalise un sertissage, un encapsulage et un étiquetage même si ceux-ci ne satisfont pas la société JL Distribution,

L'obligation de délivrance, prévue aux articles 1603 et 1604 à 1624 du Code civil, s'entend de la prise de possession du bien vendu par l'acquéreur et de la délivrance d'une chose conforme aux prévisions contractuelles.

La chose achetée doit correspondre aux spécifications convenues entre les parties ou aux caractéristiques convenues lors de la vente ; le vendeur est tenu de délivrer à l'acquéreur un bien conforme à la stipulation de l'acte de vente.

Lorsque la chose est complexe, la tradition réelle, qui caractérise la remise de la chose, ne suffit pas et la délivrance comprend la mise en place ou l'installation de la chose vendue.

La garantie des vices cachés, prévue par les articles 1603 et 1641 à 1649 du même Code, sanctionne le défaut inhérent à la chose vendue, qui la rend impropre à son usage et à sa destination normale.

Le rapport d'expertise judiciaire conclut que les dysfonctionnements dans le traitement des bouteilles concernent des défauts dans l'étiquetage (défauts de centrage, d'horizontalité de l'étiquetage, de repérage) et des défauts dans la pose du sertissage de la coiffe (plis, chiffonnage) et constate que la société CDA soutient pouvoir remédier au défaut de repérage, mais pas à celui concernant le sertissage de la coiffe. Il relève que ni la mise en service d'un autre compresseur, ni une pression constante comme lors des essais en cadence lente, n'ont résolu les défaillances contestées tandis que la formation du personnel, qui a été effectuée, n'a pas dispensé la société CDA de faire intervenir, dans le cadre d'une mise au point concrète et effective, un technicien spécialisé afin de procéder à plusieurs réglages, restés malgré tout, en partie, inopérants.

Il retient que lorsque la machine fonctionne normalement, celle-ci est conforme à la notice et aux attentes de la société JL Distribution, que toutefois, lorsque la cadence est lente, la machine génère un rebut de 30 % et que lorsque la cadence est normale, le rebut est d'environ 50 % avec des arrêts répétés de la machine et considère que le taux des bouteilles inexploitables grève considérablement une production continue.

Il en résulte que la machine permet l'usage pour lequel elle a été acquise, mais génère des déchets, dont le traitement (arrêt de la machine, remise en état des bouteilles) induit une perte de production sans, pour autant, contrevenir aux performances optimales annoncées de ladite machine.

Dès lors, aucune non-conformité de la chose vendue n'est caractérisée et l'action en garantie pour non-respect de l'obligation de délivrance ne pourra prospérer, le jugement étant confirmé de ce chef.

Les défauts ou dysfonctionnements, relevés par l'expert judiciaire, sont inhérents à la machine, celui-ci ayant écarté, après un essai réalisé le 16 juillet 2013, un quelconque rôle causal du compresseur et de la pression d'air dans les cellules pneumatiques de la machine, qu'au demeurant, la société JL Distribution ne pouvait discerner lors de la livraison, tandis que la société CDA reconnaît qu'elle ne peut pas faire fonctionner correctement la machine quant à la qualité de la pose de la coiffe. Ces défauts compromettent son utilisation, qui ne peut se faire sans interruption récurrente et étaient présents dès les premières utilisations (livraison en décembre 2012 et courriel émanant de la société JL Distribution signalant des dysfonctionnements datés du 22 février 2013), démontrant, ainsi, leur antériorité à la vente.

En conséquence, les défauts, qui affectent la machine constituant des vices cachés, la garantie des vices cachés constitue l'unique fondement possible de l'action de la société JL Distribution et la société CDA est tenue à garantie.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de la société JL Distribution fondée sur la garantie des vices cachés.

Conformément au choix de l'acquéreur, la vente de la machine sera résolue et en application de l'article 1644 du Code civil, il convient de constater que la machine a été restituée le 21 mars 2017 et que la société CDA a remboursé la somme de 15 000 euros perçue à titre d'acompte sur le prix de vente et celle de 10 465 euros au titre de la reprise de l'ancienne machine, le jugement étant confirmé de ces chefs.

En application de l'article 1645 du Code civil, l'acquéreur dispose d'une action en indemnisation du préjudice subi par le vice caché sous réserve de rapporter un lien de causalité entre ce dernier et le préjudice allégué.

Les préjudices découlant, directement, des défauts ci-dessus constatés consistent dans le coût du prêt souscrit pour l'acquisition de la machine défectueuse, soit 2 693,87 euros (intérêts et assurance du prêt), ainsi que son remplacement par une autre machine (machine Jazz acquise le 26 septembre 2013 pour les vins effervescents) pour le prix de 18 658 euros HT.

Les demandes de la société JL Distribution concernant l'indemnisation de la baisse de cadence (16 200 euros), l'indemnisation du traitement des déchets (10'710 euros) et la perte d'exploitation (6 279 euros) traduisent un seul et même préjudice au titre de ladite perte, pour laquelle la cour dispose d'éléments suffisants lui permettant d'en fixer le montant à hauteur de la somme de 10 000 euros.

Le gain manqué sollicité à hauteur de 20 594,60 euros correspond à l'achat d'une nouvelle machine (au prix de 47 516,40 euros TTC), déduction faite de l'acompte et du prix de l'ancienne machine remboursés. Toutefois, cet achat, traduisant le choix d'une machine plus onéreuse, ne découle pas directement de la résolution de la vente, mais de la seule volonté de la société JL Distribution, alors qu'au surplus, au cours de l'expertise, a été évoqué le coût relativement bas de la machine litigieuse, de sorte cette demande d'indemnisation sera rejetée.

La société JL Distribution ne justifie pas que les difficultés liées aux dysfonctionnements de la machine sont seules à l'origine de ses difficultés financières, ayant conduit à la demande d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, qui n'a été déposée que le 24 novembre 2016.

Elle ne démontre pas davantage que l'attitude de la société CDA soit le fruit de la malice, de la mauvaise foi ou le résultat d'une erreur grossière et qu'ayant dégénéré en abus, elle ait été source de préjudice ; sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive sera rejetée et le jugement sera confirmé de ce chef.

En conséquence, la société CDA sera condamnée à verser la somme de 31 351,78 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et capitalisation en application de l'article 1343- 2 du Code civil.

- sur la garantie de la société d'assurance

Contrairement à ce que soutient la société d'assurance Generali, la société Chabot Delrieu Associés comme la société JL Distribution sollicitent sa condamnation à garantir son assurée.

La police d'assurance n° AL927703, souscrite par la société CDA, exclut, notamment, la garantie du coût de remplacement du produit défectueux par un produit analogue non défectueux ainsi que les frais ayant pour objet le remboursement, le remplacement, la réparation, le parachèvement de l'installation des produits exécutés par la société CDA, qui se sont révélés défectueux y compris du fait d'une résolution du contrat qu'elle a conclu.

Elle exclut les dommages immatériels non consécutifs à un dommage matériel ou consécutifs à un dommage corporel ou matériel non garanti, résultant d'un vice, d'un défaut de conformité aux engagements contractuels (...) lorsque ce défaut ou non-conformité était prévisible ou manifeste au moment de la livraison ou occasionnés par la mise au point, le parachèvement, la réfection nécessaire pour atteindre les performances attendues par l'acquéreur lorsqu'au moment de la livraison ou à l'occasion de sa première utilisation, le produit livré se révèle non conforme à sa destination.

Ainsi la société d'assurance ne garantit ni le coût global de la machine initialement acquise, ni celui de la machine de remplacement.

En revanche, la perte d'exploitation de la société JL Distribution étant évaluée à la somme de 10 000 euros, la société d'assurance Generali devra garantir son assuré à ce titre dans le cadre d'une condamnation in solidum et le jugement sera infirmé de ce chef.

- sur les autres demandes

La société CDA, qui succombe dans ses demandes, ne pourra voir sa demande de dommages et intérêts visant à réparer un préjudice financier lié à la présente procédure (déplacements lors de l'expertise, frais de récupération de la machine) prospérer et elle sera condamnée in solidum avec son assureur aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire, le jugement étant infirmé de ce chef.

Au vu des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, la société CDA et la société d'assurance Generali Assurances seront condamnées in solidum à payer à la société JL Distribution la somme de 2 000 euros (en ce compris le coût des procès-verbaux de constat d'huissier, qui sont des frais irrépétibles) dans le cadre de la procédure d'appel sans qu'il y ait lieu d'infirmer sur ce point le jugement, qui est confirmé partiellement, tandis que leurs propres demandes sur ce fondement seront rejetées.

Enfin, le droit proportionnel, fixé par l'article A. 444-32 du Code de commerce (ancien article 10 du décret n° 96-1080 du 12 décembre 1996) reste à la charge du créancier, sauf lorsque la dette est due par un contrefacteur (article R. 444-55 du même Code) ou un professionnel (article R. 631-4 du Code de la consommation) sans qu'aucune autre dérogation ne soit prévue, la demande de la société JLD Distribution tendant à ce qu'il soit dérogé aux dispositions régissant la charge des frais d'huissier de justice sera donc rejetée.

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, Confirme le jugement du tribunal de commerce de Narbonne en date du 20 décembre 2016 en ce qu'il a : - rejeté la demande en nullité du rapport d'expertise, - débouté l'EURL JL Distribution de ses demandes fondées sur le défaut de délivrance conforme, - ordonné la résolution de la vente du 18 juillet 2012 passée entre l'EURL JL Distribution et la SARL Chabot Darrieux Associés, - ordonné suite à la résolution de la vente la restitution de la machine étiqueteuse adhésive automatique régionale à la SARL Chabot Delrieu Associés, - dit que la SARL Chabot Delrieux Associés devra au plus vite reprendre possession de sa machine sur le site de l'EURL JL Distribution en prévenant le cessionnaire de son retrait 10 jours à l'avance, - condamné la SARL Chabot Delrieu Associés au remboursement de 15 000 euros au titre des acomptes versés par l'EURL JL Distribution pour l'acquisition de la machine, - condamné la SARL Chabot Delrieu Associés au remboursement de 10 465 euros au titre du prix de reprise de l'ancienne machine par la SARL Chabot Delrieu Associés lors de la vente du 18 juillet 2012, - débouté l'EURL JL Distribution de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive, - dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du Code de procédure civile, Le réforme en ce qu'il a débouté l'EURL JL Distribution de ses demandes fondées sur la garantie des vices cachés et de ses demandes indemnitaires, à l'exception de la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive, constaté que la garantie de la société d'assurance Generali ne peut être acquise et fait masse des dépens avec un partage par moitié entre l'EURL JL Distribution et la SARL Chabot Delrieu Associés, Statuant à nouveau de ces chefs, Dit que la SARL Chabot Delrieu Associés est tenue de garantir la SARL JL Distribution au titre de la garantie des vices cachés de l'étiqueteuse adhésive automatique, modèle régionale, vendue le 18 juillet 2012, Constate qu'en exécution de la résolution de cette vente, l'étiqueteuse adhésive automatique, modèle régionale, a été restituée par la SARL JLD Distribution à la SARL Chabot Delrieu Associés, Constate qu'en exécution de la résolution de cette vente, la SARL Chabot Delrieu Associés a versé à la SARL JLD Distribution la somme de 25 465 euros en remboursement du prix d'achat, Condamne la SARL Chabot Delrieu Associés à payer à la SARL JLD Distribution à titre de dommages-intérêts la somme de 31 351,78 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et capitalisation conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du Code civil, Condamne in solidum la SARL Chabot Delrieu Associés et la SA Generali Assurances à payer à la SARL JLD Distribution à titre de dommages-intérêts la somme de 10'000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et capitalisation conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du Code civil, Rejette le surplus des demandes indemnitaires de la SARL JL Distribution formées à l'encontre de la SARL Chabot Delrieu et associés et de la SA Generali Assurances, Y ajoutant, Rejette la demande de dommages-intérêts formée par la SARL Chabot Delrieu et Associés, Condamne in solidum la SARL Chabot Delrieu Associés et la SA Generali Assurances à payer à la SARL JLD Distribution la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Rejette les autres demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, Rejette la demande de la SARL JLD Distribution relative à l'application de " l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 ", Condamne in solidum la SARL Chabot Delrieu Associés et la SA Generali Assurances aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.