CA Caen, 2e ch. civ. et com., 14 novembre 2019, n° 17-03867
CAEN
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
CED (SARL)
Défendeur :
FCA France (SA), Divinor-Groupe Aubin Mercedez-Benz (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Briand
Conseillers :
Mmes Heijmeijer, Gouarin
Avocats :
Mes Leclerc, Pajeot, Gazagnes, SCP Chapron-Lanièce
FAITS ET PROCÉDURE
Le 14 mars 2014, la SARL CED a fait l'acquisition auprès de la SAS Divinor (concessionnaire Mercedes-Benz) d'un véhicule d'occasion de marque Fiat, modèle Scudo, immatriculé CF-001-WT, pour un montant de 13 800 HT.
Le 6 avril 2015, le véhicule s'est trouvé immobilisé suite à un calage moteur et a été confié au garage Meynard à Saint-Lunaire.
Le 21 septembre 2015, la société CED, par l'intermédiaire de sa protection juridique, a fait diligenter une expertise amiable confiée à Monsieur Guillaume Gadbois du Cabinet Gillet et Associés, lequel, suite à la réunion organisée le 21 septembre 2015, a chiffré les travaux de remplacement du moteur et des injecteurs à la somme de 9 269,32 TTC.
Par mail du 17 décembre 2015, la société FCA France, constructeur, a indiqué à l'expert qu'elle entendait participer commercialement au remplacement du moteur en finançant les pièces à hauteur de 4 500 HT.
Par courrier du 20 janvier 2016, la société Divinor a informé de son refus de prendre en charge les travaux de réparation.
Par acte du 13 octobre 2016, la société CED a fait assigner la société Divinor devant le tribunal de commerce de Caen aux fins de résolution de la vente du véhicule, de remboursement du prix et d'indemnisation de ses préjudices.
Par acte du 16 décembre 2016, la société Divinor a mis en cause la société FCA France, en sa qualité de constructeur du véhicule, afin qu'elle soit condamnée à la garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre.
Par jugement du 22 novembre 2017, le tribunal de commerce de Caen a :
- joint les deux instances,
- débouté la société CED de l'ensemble de ses demandes,
- débouté la société Divinor de l'ensemble de ses demandes,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile,
- fait masse des entiers dépens et dit qu'ils seront supportés à parts égales entre chaque partie, y compris les frais de greffe s'élevant à la somme de 94,08.
La société CED a relevé appel de cette décision par déclaration du 21 décembre 2017.
Dans ses conclusions en date du 20 juillet 2018, la société CED demande à la cour de :
- vu les articles 1104, 1641 et suivants du Code civil,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Caen le 22 novembre 2017,
- rejeter l'appel incident de la société Divinor,
- et au contraire, ordonner la résolution de la vente du véhicule de marque Fiat Scudo,
- condamner la société Divinor solidairement avec la société FCA France à régler à la société CED la somme de 13 800 HT,
- dire que la restitution du véhicule se fera aux frais de la société Divinor une fois que la somme de 13 800 HT aura été restituée,
- condamner la société Divinor solidairement avec la société FCA France à payer à la société CED la somme de 4 064,30, outre les échéances de 52 par mois, versées au titre de l'assurance jusqu'au jugement à intervenir,
- en toute hypothèse, débouter les sociétés FCA France et Divinor de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- condamner la société Divinor solidairement avec la société FCA France à payer à la société CED la somme de 2 000 en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Dans ses conclusions en date du 1er juin 2018, la société Divinor demande à la cour de :
- vu les articles 1134 et 1641 et suivants du Code civil,
- débouter purement et simplement la société CED de l'ensemble de ses demandes,
- constater que la société CED ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un vice caché antérieur à la vente,
- subsidiairement, et pour le cas où la cour considérerait que cette preuve est rapportée, accueillir la société Divinor dans son appel incident et dire et juger que la société CED n'établit pas l'existence d'un préjudice distinct de la résolution qu'elle sollicite,
- dire et juger que la société FCA France devra garantir intégralement la société Divinor de toutes demandes portées à son encontre,
- dire que la société FCA France devra garantir, non seulement les condamnations au titre de dommages et intérêts, et autres frais et accessoires, mais également le remboursement du prix de vente qui pourrait être mis à la charge de la société Divinor pour le cas où la résolution serait ordonnée,
- donner acte à la société Divinor de ce que, en ce cas, elle remettra le véhicule de marque Fiat Scudo,
- condamner tout succombant au paiement de la somme de 4 000 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens.
Par conclusions en date du 25 mai 2018, la société FCA France demande à la cour de :
- la recevoir en ses conclusions, y faisant droit,
- vu l'article 1641 du Code civil,
- dire et juger que la société CED ne démontre pas l'existence d'un vice caché affectant le véhicule litigieux,
- dire et juger que la société Divinor ne démontre pas non plus l'existence d'un vice caché affectant le véhicule litigieux qui aurait préexisté à la vente de ce dernier par la société FCA France,
- en conséquence, confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Caen le 22 novembre 2017 en ce qu'il a débouté la société CED et la société Divinor de l'ensemble de leurs demandes,
- à titre subsidiaire, débouter purement et simplement la société CED de sa demande tendant à voir les sociétés FCA France et Divinor condamnées solidairement à lui verser la somme de 4 064,30, outre les échéances de 52 par mois versées au titre de l'assurance jusqu'à l'arrêt à intervenir,
- en tout état de cause, condamner toute partie succombante à verser à la société FCA France la somme de 4 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner toute partie succombante aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 15 mai 2019.
MOTIFS
- Sur l'existence d'un vice caché
L'article 1641 du Code civil dispose que le vendeur est tenu de la garantie des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avaient connus.
Il appartient donc à celui qui invoque le vice caché de démontrer l'existence d'un défaut inhérent à la chose vendue dont il n'avait pas connaissance, qui en compromet l'usage et qui est antérieur à la vente.
En l'espèce, il ressort du dossier que, le véhicule litigieux a parcouru 18 000 Km avant de tomber en panne le 06-04-2015, soit un an après son acquisition.
Le moteur été démonté et le garage dépositaire a conclu à la nécessité de procéder à son remplacement.
Une expertise amiable a été diligentée à la demande de la société propriétaire dans le cadre de son contrat d'assurance protection juridique.
L'expert Dadbois a organisé une réunion le 21-09-2015 à laquelle participaient, M. X, chef d'atelier de la société Divinor, et M. Y, expert automobile mandaté par la venderesse.
La société FCA n'était toutefois ni présente ni représentée.
Le caractère contradictoire du rapport établi le 28-01-2016 est contesté par les intimées qui soutiennent, sans être contredites, n'avoir pas été destinataires des correspondances échangées, des analyses effectuées (carburant) ni des conclusions du rapport, étant précisé que les annexes listées à la fin du rapport ne sont pas jointes dans l'exemplaire du rapport figurant en pièce 6 de l'appelante.
Si le juge ne peut refuser d'examiner une pièce régulièrement versée aux débats et soumise à la discussion contradictoire, il ne peut fonder sa décision exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties.
Il est constant que l'appelante ne produit aucune autre élément à l'appui de sa demande de résolution de la vente.
Au surplus, l'expertise, si elle permet de confirmer l'existence de désordres affectant les pistons du moteur, qu'elle qualifie d'avarie anormale au regard de l'entretien rigoureusement suivi par le vendeur et par l'acheteur, ne donne aucune explication sur la cause de ces désordres.
Elle n'explique pas plus son affirmation excluant tout défaut d'utilisation.
Ce document est ainsi insuffisant pour retenir l'existence d'un vice caché antérieur à la vente.
Le geste commercial de la société FCA qui a offert de prendre en charge le coût du moteur, à l'exclusion de la main d'œuvre, ne saurait valoir reconnaissance de responsabilité.
De même, le courrier de la SAS Divinor en date du 20-01-2016 ne saurait valoir reconnaissance d'une quelconque responsabilité, le terme de vice caché étant employé au regard de l'offre du constructeur qui acceptait la prise en charge du moteur.
Le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté la SARL CED de ses demandes.
- Sur les frais et dépens
L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Partie succombante, la SARL CED supportera la charge des dépens de l'appel.
Par ces motifs : Statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions. Y ajoutant, Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du Code de procédure civile. Condamne la SARL CED aux dépens de l'appel.