CA Lyon, 1re ch. civ. B, 26 novembre 2019, n° 18-04497
LYON
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Résidence du Palais (SCI)
Défendeur :
Duguesclin Développement (SAS), Icade Promotion (SAS), C'est la Vie Properties (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Carrier
Conseillers :
Mme Papin, Valette
Avocat :
Me Desurmont
EXPOSÉ DE L'AFFAIRE
La société Duguesclin et Associés Montagne, filiale de la société Icade Promotion, et la société Vianova, se sont associées dans le cadre d'une opération de co promotion immobilière consistant à réhabiliter des bâtiments anciens et à y adjoindre une extension à vocation de résidence hôtelière et de résidence de services, et ont constitué à cette fin deux sociétés civiles immobilières, la SCI Résidence Services du Palais et la SCI Résidence du Palais initialement dénommée SCI Résidence Hôtel du Palais des Congrès.
Les logements créés dans ces bâtiments ont été vendus en l'état futur d'achèvement, par lot, sous le régime de la copropriété, dans le cadre du dispositif légal de défiscalisation permettant aux acquéreurs de bénéficier du régime fiscal de loueur en meublé à savoir : récupération de la TVA sur le prix d'achat du bien et réduction de l'impôt sur le revenu en rapport avec le montant de l'emprunt effectué pour acquérir le bien, la contrepartie étant l'obligation pour les acquéreurs de régulariser un bail commercial avec l'exploitant de la résidence et de meubler le logement.
La société Atrium Tourisme, retenue comme futur exploitant de la Résidence du Palais, s'est portée acquéreur des lots nécessaires à l'exploitation de la résidence et à la mise en œuvre des services offerts (accueil, bureau, restauration, salle de réception, réserve et lingerie).
L'exploitation de la résidence a commencé au deuxième trimestre 2008.
La société Atrium Tourisme a été placée en liquidation judiciaire par un jugement du tribunal de commerce de Perpignan en date du 1er juillet 2009. Par courrier du 9 juillet 2009, le liquidateur a informé les copropriétaires de la résiliation des baux conclus avec la société Atrium Tourisme.
Pour permettre la poursuite de l'exploitation de la résidence en dépit de la déconfiture de la société Atrium Tourisme, la Société Duguesclin Développement, autre filiale de la société Icade, s'est associée à une association dénommée Loisirs Coté Vacances pour créer au printemps 2010 une nouvelle entité d'exploitation, la SAS Les Résidences d'Epernay.
La SCI Résidence du Palais a confié la commercialisation des lots restants à plusieurs agents immobiliers parmi lesquels la société C'est la Vie Properties.
Le 3 novembre 2011, M. X Y D et Mme Z F épouse Y D ont conclu avec la SCI Résidence du Palais un contrat de réservation de deux lots n° 47 et 87 au prix de 106 200 HT, par l'intermédiaire de la société C'est la Vie Properties.
La vente a été régularisée par acte authentique du 20 mars 2012. Au terme de cet acte, le bail commercial signé le 11 mai 2010 par la SCI Résidence du Palais avec la société Les Résidences d'Epernay leur a été transféré.
Les lots qui avaient été achetés par la société Atrium Tourisme pour permettre l'exploitation de la résidence ont été vendus par le liquidateur à une société Amotour, le 21 décembre 2012.
Le 8 avril 2013, à l'occasion d'une réunion organisée à Epernay par M. G, directeur d'Icade et représentant de la société Duguesclin Développement, gérante de la SCI Résidence du Palais venderesse, et M. B, gérant de la société d'exploitation la SAS Résidences d'Epernay, M. G a informé les copropriétaires que l'exploitation de l'hôtel et de la résidence était déficitaire, que les loyers n'avaient été payés depuis le 1er avril 2010 qu'en raison d'apports en compte courant importants effectués par la société Icade à la société d'exploitation et qu'Icade n'entendait pas continuer à soutenir financièrement cette dernière, l'une des raisons du déséquilibre étant l'impossibilité d'exploiter le restaurant par suite de la cession des locaux, anciennement propriété de la société Atrium Tourisme, à la société AMOTOUR qui s'opposait à toute solution permettant l'exploitation du restaurant et des diverses annexes nécessaires au fonctionnement de la résidence.
Au mois de juillet 2013, la société Duguesclin Développement a cédé ses parts dans la SAS Résidences d'Epernay à son associé, l'association Loisirs Côté Vacances et a renoncé à son compte courant.
Le 24 septembre 2013, le tribunal de commerce de Montauban a ouvert une procédure de sauvegarde de la SAS Les Résidences d'Epernay. Cette procédure a été convertie en liquidation judiciaire le 22 mars 2014.
Dans le cadre de la procédure collective, deux investisseurs se sont associés pour reprendre les actifs de la Société Les Résidences d'Epernay et créer une nouvelle société d'exploitation : la SAS Les Demeures Champenoises.
Le 21 mai 2014, les époux Y D ont signé un bail commercial avec la SAS Les Demeures Champenoises.
Par actes d'huissier du 13 janvier 2015, M. X Y D et Mme Z F épouse Y D ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Lyon la SCI Résidence du Palais, la SAS Duguesclin Développement, la SAS Icade Promotion, auxquelles ils reprochaient un comportement dolosif, aux fins d'obtenir la résolution de la vente du 20 mars 2012 et la restitution du prix, subsidiairement des dommages et intérêts à hauteur de 109 070 .
Par acte du 13 mai 2015, la SCI Résidence du Palais, la SAS Duguesclin Développement, la SAS Icade Promotion ont fait appeler en intervention forcée la société C'est la Vie Properties.
Par jugement du 7 mai 2018, le tribunal a :
- annulé le contrat de vente du 20 mars 2012 conclu entre la SCI Résidence du Palais et les époux Y D portant sur un appartement et un parking,
- condamné la SCI Résidence du Palais à payer aux époux Y D la somme de 106 200 avec intérêts à compter de l'assignation du 13 janvier 2015, la somme de 5 000 au titre de leur préjudice moral et celle de 3 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- débouté les époux Y D du surplus de leurs demandes de dommages et intérêts,
- rejeté les demandes dirigées contre la SAS Duguesclin Développement, la SAS Icade Promotion et la société C'est la Vie Properties,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
- condamné la SCI Résidence du Palais aux dépens.
La SCI Résidence du Palais a interjeté appel à l'encontre des époux Y D et de la société C'est la Vie Properties.
Par acte d'huissier du 11 décembre 2018, les époux Y D ont interjeté appel provoqué à l'encontre de la SAS Duguesclin Développement et de la SAS Icade Promotion.
Au terme de conclusions notifiées le 4 juin 2019, la SCI Résidence du Palais, la SAS Duguesclin Développement, la SAS Icade Promotion demandent à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les époux Y D de leurs demandes dirigées contre les sociétés Icade Promotion et Duguesclin Développement,
- réformer le jugement en ce qu'il a annulé la vente, condamné la SCI Résidence du Palais à restituer le prix outre intérêts et à payer aux époux Y D la somme de 5 000 en réparation d'un préjudice moral, la somme de 3 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens,
- débouter les époux Y D de leurs demandes, subsidiairement,
- réformer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes dirigées contre la société C'est la Vie Properties,
- prononcer la nullité ou la résolution du contrat de bail commercial (sic),
- condamner les époux Y D à restituer à la SCI Résidence du Palais les biens acquis et la totalité des loyers perçus, outre intérêts au taux légal à compter du jour où ils ont été perçus avec capitalisation,
- ordonner la compensation entre les créances respectives des parties,
- dire que les époux Y D devront faire leur affaire des éventuelles conséquences fiscales résultant de l'annulation de la vente,
- condamner la société C'est la Vie Properties à relever et garantir la SCI Résidence du Palais de toute condamnation prononcée à son encontre,
- très subsidiairement, débouter les époux Y D de leur demande d'indemnisation provisionnelle,
- en tout état de cause, condamner qui de droit à leur payer la somme de 10 000 chacune sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens.
Au terme de conclusions notifiées le 21 mars 2019, les époux Y D demandent à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé l'annulation de la vente du 20 mars 2012,
- condamner in so l idum la SCI Résidence du Palais, la SAS Duguesclin Développement et la SAS Icade à leur payer la somme de 106 200 avec intérêts à compter du 20 mars 2012, date de la vente, et capitalisation des intérêts sur la base de l'article 1154 ancien du Code civil,
- débouter la SCI Résidence du Palais de sa demande de restitution des loyers, subsidiairement, dire qu'en application de l'article 549 du Code civil, la demande de restitution ne portera que sur les loyers postérieurs au 21 septembre 2018 date des conclusions d'appel présentant cette demande,
- condamner la SCI Résidence du Palais, la SAS Duguesclin Développement et la SAS Icade Promotion in solidum à leur rembourser les charges de copropriété, les taxes foncières, les cotisations d'assurance MRH, le tout avec intérêt au taux légal à compter de leur paiement et capitalisation des intérêts sur la base de l'article 1154 ancien du Code civil, subsidiairement,
- condamner in solidum la SCI Résidence du Palais, la SAS Duguesclin Développement et la SAS Icade à leur payer la somme de 125 091 en réparation du préjudice lié à la diminution du loyer et à la perte de valeur des biens, outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 13 janvier 2015 et capitalisation des intérêts, plus subsidiairement,
- ordonner une expertise aux frais avancés des sociétés Résidence du Palais, Duguesclin Développement et Icade avec pour mission de 'contrôler et valider le raisonnement tenu en pièce 35 pour le calcul du préjudice' et leur allouer une provision de 65 000 à valoir sur leur préjudice, en tout état de cause,
- condamner in solidum la SCI Résidence du Palais, la SAS Duguesclin Développement et la SAS Icade à leur payer la somme de 20 000 en réparation de leur préjudice moral, la somme de 9 600 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens, y compris les frais de publication au service de la publicité foncière, avec faculté de distraction au profit de Me Laffly.
Au terme de conclusions notifiées le 13 juin 2019, la société C'est la Vie Properties demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les sociétés SCI Résidences Du Palais, Icade Promotion et Duguesclin Développement de l'intégralité de leurs prétentions à son égard,
- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner in solidum les sociétés SCI Résidences Du Palais, Icade Promotion et Duguesclin Développement, ou qui mieux le devra, à lui payer la somme de 3 000 et celle de 5 000 au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,
- condamner " la même " aux dépens.
Motifs
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le dol
Les époux Y D font valoir :
- que l'ensemble des indications fournies dans la plaquette de présentation, dans le contrat de réservation et dans le contrat de vente devaient faire l'objet d'une étude et d'une vérification par le promoteur et le commercialisateur, tous deux professionnels de l'immobilier,
- que la rentabilité annoncée de l'investissement est en réalité trois fois inférieure à celle promise et que les sociétés Résidence du Palais, Duguesclin Développement et Icade Promotion qui ont la charge de la preuve ne justifient pas des études qui leur ont permis de bâtir l'équilibre économique du montage conseillé aux acquéreurs,
- qu'il appartenait aux sociétés Résidence du Palais, Duguesclin Développement et Icade Promotion de sécuriser le restaurant et les parties communes, éléments indispensables à l'exploitation, et donc de s'en porter acquéreur lorsque ces éléments ont été mis en vente par le liquidateur de la société Atrium Tourisme,
- que les vices inhérents à l'opération sont constitutifs d'un dol, que les sociétés Résidence du Palais, Duguesclin Développement et Icade Promotion savaient lors de la vente que le prix de vente des biens et les loyers étaient surévalués, que le restaurant et les parties communes allaient être achetées par un tiers et que les copropriétaires n'en auraient pas la maîtrise,
- que la SCI venderesse était également bailleresse et savait que le loyer versé était artificiel comme financé par les apports en compte courant d'Icade,
- que la société Icade savait que le " montage économique de l'exploitation " était largement " déséquilibré " ce dont en tant que de besoin atteste le courrier de M. A, président d'Icade Promotion en date du 24 septembre 2013, qui envisageait la possibilité de décoter le stock de lots restant à vendre de 50 % au moins,
- que la SCI Résidence du Palais a délibérément dissimulé aux acquéreurs les vices essentiels de l'opération qu'elle connaissait suite au dépôt de bilan de la société Atrium Tourisme,
- que la seule mention dans l'acte de vente d'un litige de copropriété ne saurait constituer une information loyale sur le potentiel de rentabilité de l'opération, sur les raisons du dépôt de bilan de la société Atrium et sur la teneur du protocole d'accord conclu avec les premiers investisseurs et qu'elle ne saurait faire la preuve de l'accomplissement du devoir d'information et de conseil du vendeur.
La SCI Résidence du Palais, la SAS Duguesclin Développement et la SAS Icade Promotion font valoir :
- que la SCI Résidence du Palais n'a rien pu dissimuler aux acquéreurs dès lors que ce n'est pas elle qui a commercialisé le bien, la prospection des clients et la présentation des biens et du dispositif fiscal ayant été faits par le commercialisateur,
- qu'elle n'a jamais cherché à tromper les acquéreurs et que son intention dolosive n'est pas démontrée,
- que l'acte de vente rappelle la procédure en cours à l'encontre de la société Amotour et précise que l'acquéreur s'oblige à en faire son affaire personnelle, de sorte que les acquéreurs ont été informés de la déconfiture du premier exploitant et de l'achat des parties communes (dont le restaurant) par la société Amotour, ce antérieurement à la réunion du 8 avril 2013,
- qu'elle ne saurait être tenue responsable du fait que les acquéreurs n'aient pas lu ou compris la mention insérée dans l'acte de vente, ni du fait que les acquéreurs auraient été représentés lors de la signature de l'acte,
- que l'échec de la société Atrium Tourisme ne signifiait pas que l'exploitation de la résidence ne pouvait pas être rentable, que le rapport E invoqué par les acquéreurs n'établit pas qu'au moment de la reprise par la société Les Résidences d'Epernay, l'exploitation dans les conditions présentées aux acquéreurs n'était pas viable,
- que le groupe Icade n'aurait jamais investi une somme de 3 242 999 pour soutenir l'exploitation de la résidence s'il n'avait pas cru en la possibilité à terme d'une exploitation rentable de la résidence et que c'est de bonne foi qu'il a participé à la création de la société Les Résidences d'Epernay et que la vente des appartements s'est poursuivie après la faillite de la société Atrium Tourisme,
- que la plaquette de commercialisation n'a pas de caractère contractuel, que le taux de rentabilité qui y est mentionné n'est pas garanti, qu'en outre la rentabilité n'est pas le motif principal de l'investissement qui permet une défiscalisation, que la rentabilité est par nature incertaine et aléatoire, qu'en l'espèce elle dépend de facteurs qui ne peuvent être maîtrisés à savoir l'occupation des appartements et le paiement des loyers, que le gain fiscal très important compense le risque lié à la rentabilité,
- que personne ne pouvait prévoir que la société Amotour n'exploiterait pas le restaurant et que la situation créée par cette société défie la logique.
Selon les articles 1109 et 1116 (devenus respectivement 1130 et 1137) du Code civil, le dol, erreur provoquée par des manœuvres frauduleuses, ne vicie le consentement d'une partie à un contrat que s'il a déterminant de son consentement et que, sans lui, cette partie n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes.
Constitue un dol par réticence le silence d'une partie dissimulant à son co contractant un fait qui, s'il avait été connu de lui, l'aurait empêché de contracter ou l'aurait amené à contracter à d'autres conditions.
C'est à celui qui invoque le dol de rapporter la preuve des manœuvres ou de la dissimulation dont il a été victime.
L'existence du dol s'apprécie au moment de la formation du contrat de sorte qu'il n'y a pas lieu de prendre en considération des événements ultérieurs.
Il appartient aux époux Y D qui invoquent une réticence dolosive de la part de la SCI Résidence du Palais de rapporter la preuve qu'à la seule fin de les déterminer à acquérir le bien litigieux, celle-ci les a trompés en leur dissimulant volontairement un fait avéré dont elle avait connaissance.
L'absence d'étude préalable ne permet pas de caractériser un dol.
Pas plus l'acte de vente que la plaquette publicitaire ne comportaient d'engagement garantissant un revenu locatif étant relevé que le bail signé par les acquéreurs prévoyait expressément l'hypothèse d'une défaillance du gestionnaire à la rubrique résolution du bail.
La preuve n'est en outre pas rapportée que cette plaquette aurait comporté des informations volontairement inexactes alors qu'à la date d'acquisition, le bail commercial était en cours et que la rentabilité indiquée correspondait au loyer contractuel.
L'absence d'information suffisante sur les aléas de l'opération ne caractérise pas un dol et le dol ne saurait être caractérisé par la prise de conscience tardive par les acquéreurs des risques locatifs que comportait l'achat du bien.
Contrairement à ce que soutiennent les époux Y D, il ne ressort pas du courrier de M. A, président d'Icade Promotion en date du 24 septembre 2013 la reconnaissance de ce que la venderesse savait à la date de signature du contrat qu'il n'existait aucune perspective de redressement, que les conditions d'exploitation mises en place suite à la défaillance de la société Atrium Tourisme n'étaient pas viables.
En effet, M. A indique qu'une décote de 50 % du stock restant à vendre avait été envisagée au regard des offres de reprise " plus ou moins sérieuses " à la moitié des loyers initialement prévus pour le remettre à un niveau compatible avec les loyers proposés mais que cet axe de réflexion avait été abandonné au regard de la solution de reprise proposée par les copropriétaires sur la base d'un plan de charges élaboré par eux avec un repreneur choisi par eux permettant le maintien des loyers à leur niveau antérieur, solution à laquelle le promoteur avait souscrit en acceptant d'accompagner les copropriétaires.
Il n'est pas non plus établi que la SCI Résidence du Palais ait mis en place ce dispositif afin de faire apparaître l'opération comme rentable tout en sachant que cette rentabilité apparente était provisoire et artificielle.
Aucun autre élément ne vient établir le bien fondé des allégations des acquéreurs, étant relevé que le rapport E dont ils se prévalent, analysant les causes des difficultés de l'exploitant, est postérieur à la vente et que la déconfiture de la société Atrium Tourisme, qui assurait la gestion de multiples résidences hôtelières et non pas celle de la seule Résidence du Palais, est dépourvue de valeur probante à cet égard.
Ne saurait caractériser un dol par réticence le fait de ne pas avoir mentionné l'échec de l'exploitation par la société Atrium Tourisme alors que rien n'établit que cet échec ait été en lien avec le fonctionnement de la résidence elle-même et qu'à la date de la vente l'exploitation était assurée par un nouveau gestionnaire.
Il n'est pas établi qu'à la date de la vente, la SCI Résidence du Palais savait que la société Amotour refuserait d'exploiter le restaurant.
Il ne saurait pas plus lui être reproché de ne pas avoir acquis les locaux communs vendus dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Atrium Tourisme dès lors que ceux-ci étaient vendus dans un lot constitué de l'ensemble des locaux acquis par cette dernière dans diverses résidences de tourisme et non pas dans la seule Résidence du Palais. Elle ne pouvait d'autre part pas imaginer que la société Amotour, acquéreur de ces biens, refuserait d'exploiter et se comporterait en marchand de biens.
L'intention dolosive imputée à la venderesse n'étant pas caractérisée, il convient de débouter les époux Y D de leur demande de nullité de la vente.
Sur le manquement à l'obligation précontractuelle d'information
Les époux Y D font valoir que la responsabilité des appelantes est engagée sur le fondement de l'article 1147 du Code civil et de l'article L. 111-1 du Code de la consommation, subsidiairement des SAS Duguesclin Développement et Icade Promotion sur le fondement de l'article 1382 du Code civil.
Selon l'article L. 111-1 du Code de la consommation dans sa version en vigueur à la date du contrat, tout professionnel vendeur de biens ou prestations de services doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service.
En matière de vente immobilière de placement, le promoteur vendeur du programme doit informer l'acquéreur des caractéristiques, y compris les moins favorables, du placement proposé ainsi que sur les risques qui lui sont associés et qui peuvent être le corollaire des avantages annoncés.
C'est au débiteur de l'obligation d'information d'apporter la preuve de son exécution.
En l'espèce, la plaquette distribuée par le promoteur fait apparaître que le programme est un succès du fait de la qualité du cadre et de la demande locative avec un taux d'occupation élevé, et comme un placement sûr et rentable à court terme en mentionnant un bail commercial courant jusqu'en 2020 et une rentabilité de 5 % du prix d'acquisition hors taxes.
La SCI Résidence du Palais ne démontre pas avoir avisé les acquéreurs du risque de non perception des loyers auquel ils se trouveraient exposés en cas de déconfiture du preneur à bail commercial que cette présentation faisait apparaître comme improbable à court terme alors que la rentabilité, si elle n'était pas le seul avantage procuré par l'investissement, constituait un des éléments déterminants de la décision de contracter.
Les mentions de l'acte authentique de vente relativement à une procédure en cours devant le tribunal de grande instance de Châlons-en-Champagne opposant la copropriété à Me Clement et à la société Amotour ne sauraient faire la preuve de l'accomplissement par la venderesse de son obligation précontractuelle d'information.
Le manquement imputé à la SCI Résidence du Palais est dès lors établi.
Sur les demandes dirigées contre les sociétés Icade Promotion et Duguesclin Développement
La lecture de l'acte de vente ne laisse aucunement apparaître la participation des sociétés Icade Promotion et Duguesclin Développement en qualité de parties à l'acte. Les époux Y D ne justifient pas avoir été à un moment en contact direct avec ces sociétés et ne démontrent aucun engagement pris par ces dernières à leur égard.
La preuve d'une faute de leur part ayant contribué à leur préjudice n'étant pas rapportée, c'est à bon droit que le premier juge a débouté les époux Y D de leurs demandes de ce chef.
Sur la demande de garantie de la SCI Résidence du Palais dirigée contre la société C'est la Vie Properties
La SCI Résidence du Palais fait valoir que les époux Y D n'ont eu aucun contact avec elle avant la signature du contrat de réservation, de sorte que le manquement au devoir d'information a été commis par le commercialisateur par l'intermédiaire duquel le contrat a été conclu.
La société C'est la Vie Properties fait valoir :
- qu'elle n'a pas commis de faute dans l'exécution de son mandat,
- qu'il s'agissait de vendre un produit clé en mains dans des conditions déterminées par le mandant,
- que la SCI Résidence du Palais est seule à l'origine des estimations et chiffres avancés dans le cadre de la vente, le mandat lui interdisant toute initiative à cet égard,
- qu'elle n'a rédigé aucun acte, le compromis et le bail commercial lui ayant été fournis par le mandant,
- qu'elle ne bénéficiait d'aucune liberté non plus s'agissant de la publicité faite autour du programme, et qu'elle n'avait pas pu présenter d'éléments divergents de ceux qui lui avaient été transmis,
- qu'aucun élément ne lui avait été fourni par le promoteur, qui ne s'était jamais ouvert des difficultés rencontrées dans la gestion de la résidence, lui permettant d'anticiper les événements qui allaient conduire à la mise en liquidation judiciaire de la SAS Les Résidences d'Epernay.
La société C'est la Vie Properties n'est pas l'auteur de la plaquette de commercialisation, ni des actes soumis à la signature des clients, fournis par le mandant.
Elle justifie que son mandat ne lui laissait aucune latitude sur la présentation du programme commercialisé, lui interdisant " de communiquer des renseignements inexacts ou évasifs, et conservent le souci constant de ne donner que des informations strictement conformes à la réalité et au contenu des documents qui lui ont été remis. "
Il appartenait en conséquence au promoteur qui avait ainsi " verrouillé " les conditions de commercialisations, de prévoir un document par lequel le client reconnaissait avoir bénéficié d'une information précontractuelle sur les risques présentés par l'investissement.
Il en résulte que le mandataire n'a pas commis de faute à l'égard du mandant et que la SCI Résidence du Palais doit être déboutée de son action en garantie.
Sur le préjudice des époux Y D
Le préjudice des époux Y D réside dans la non réalisation à court terme des avantages escomptés en matière de revenu de l'investissement. La cour trouve dans le dossier les éléments lui permettant de fixer ce préjudice par référence à la valeur d'un bien identique procurant un revenu inférieur de 50% à celui attendu.
Il convient en conséquence de faire droit à la demande des époux Y D à hauteur de la somme de 53 100 outre intérêts au taux légal à compter du 13 janvier 2015, date de l'assignation.
Dispositif
Par ces motifs LA COUR, Confirme le jugement déféré en ce qu'il a - rejeté les demandes dirigées contre la SAS Duguesclin Développement, la SAS Icade Promotion et la société C'est la Vie Properties, - condamné la SCI Résidence du Palais à payer aux époux Y D la somme de 3 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens ; Le réforme pour le surplus, Statuant à nouveau, Déboute les époux Y D de leur demande de nullité de la vente ; Dit que la SCI Résidence du Palais a manqué à son obligation précontractuelle d'information ; Condamne la SCI Résidence du Palais à payer à M. X Y D et Mme Z F épouse Y D la somme de 53 100 outre intérêts au taux légal à compter du 13 janvier 2015 ; Déboute M. X Y D et Mme Z F épouse Y D du surplus de leurs demandes ; Vu l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la SCI Résidence du Palais à payer à M. X Y D et Mme Z F épouse Y D, ensemble, et à la société C'est la Vie Properties la somme de 4 000 chacun en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; La condamne aux dépens avec faculté de distraction au profit des avocats de la cause qui en ont fait la demande.