CA Pau, 2e ch. sect. 1, 6 décembre 2019, n° 18-00327
PAU
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
BNP Paribas Personal Finance (SA)
Défendeur :
Rhône Technical Services (Sasu), Selarl Jérôme Allais (ès qual.), Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France (SAS), Selarl Bally MJ (ès qual.)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Salmeron
Conseillers :
MM. Darracq, Magnon
Avocats :
Mes Bordenave, Dubois, Duffau
FAITS PROCEDURE PRETENTIONS et MOYENS DES PARTIES
Le 26 mars 2012, les époux X ont signé avec la société (SAS) Nouvelle régie des jonctions des énergies de France (NRJEF), exploitant sous l'enseigne " groupe solaire de France ", dans le cadre d'un démarchage à domicile, un bon de commande concernant la fourniture et l'installation de 16 panneaux photovoltaïques en toiture pour un prix de 22 500 euros TTC.
Cette opération a été entièrement financée au moyen d'un crédit affecté souscrit le 26 mars 2012 auprès de la société Sygma banque, aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas personal finance (BNP PPF), remboursable en 180 mensualités de 221,70 euros, au taux annuel de 5,28 %.
Un certificat d'exécution de la prestation et de demande de déblocage des fonds, signé par M. X, a été remis au prêteur.
Le 16 mai 2012, le prêteur a avisé les époux X que les fonds avaient été versés au prestataire et les prélèvements des échéances du prêt mis en place.
Courant 2013, les époux X devaient constater que le prix annuel de vente d'énergie à EDF ne couvrait pas le montant annuel du crédit contrairement à la promesse d'autofinancement et à la garantie de rendement de l'installation pendant 25 ans donnée par le prestataire.
Vainement, les époux X ont relancé la société NRJEF qui devait faire l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire prononcé le 12 novembre 2014 par le tribunal de commerce de Bobigny, la Selarl Bally MJ étant désignée en qualité de liquidateur judiciaire.
Les époux X ont cessé de rembourser le prêt.
Le 14 décembre 2015, dans le cadre d'un nouveau démarchage à domicile, les époux X ont signé avec la société (sasu) Rhône technical services (RTS) un nouveau bon de commande concernant la pose et la fourniture de 8 panneaux photovoltaïques supplémentaires sur la toiture, pour un prix de 19 500 euros TTC, censés pallier le défaut de rendement de leur installation.
Le 13 janvier 2016, pour financer cette opération, les époux X ont souscrit un crédit affecté auprès de la société BNP PPF, sous l'enseigne commerciale Cetelem, remboursable en 156 mensualités de 197,93 euros, au taux annuel de 5,65 %.
Un procès-verbal de fin de travaux au 29 janvier 2016, et une demande de déblocage des fonds en date du 28 janvier 2016, signés par M. X, ont été remis au prêteur.
Parallèlement, la société BNP PPF a invité les époux X à signer une nouvelle offre de prêt de 20 400 euros en les invitant à virer les fonds entre les mains de l'agence Cetelem, ce qu'ils ont fait.
Entre-temps, la société RTS ne s'est plus manifestée auprès des époux X alors que la seconde centrale n'avait pas été raccordée au réseau d'électricité EDF comme s'y était engagé le prestataire.
Leurs démarchages auprès du prestataire et du prêteur étant restées vaines, les époux X ont cessé de rembourser le second prêt.
Suivant exploits des 14, 15 et 19 septembre 2016, les époux X ont fait assigner par devant le tribunal d'instance de Pau la société BNP PPF, la société RTS et la Selarl Bally en qualité de liquidateur de la société NRJEF en annulation ou résolution des bons de commande et des crédits affectés, sur le fondement des dispositions du Code de la consommation relatives au démarchage à domicile et au crédit affecté.
La Selarl Bally MJ n'a pas comparu ni été représentée.
Par jugement réputé contradictoire du 14 décembre 2017, auquel il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens initiaux des parties, le tribunal a :
- déclaré les époux X recevables en leur action
- prononcé la nullité du contrat de vente et de fourniture de service conclu le 26 mars 2012 entre les époux X et la société NRJEF
- dit nul le contrat de crédit conclu le 26 mars 2012 entre les époux X et la société BNP PPF, venant aux droits de la société Sygma banque
- condamné la société BNP PPF à rembourser aux époux X l'intégralité des sommes remboursées au titre du contrat de prêt du 26 mars 2012
- dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du jugement en application de l'article 1231-7 du Code civil
- fixé la créance de la société BNP PPF au passif de la société NRJEF à la somme de 22 500 euros
- condamné la Selarl Bally MJ ès qualités à faire procéder aux frais de la liquidation judiciaire à l'enlèvement de l'ensemble du matériel et à la remise à l'état initial de la toiture, dans les trois mois suivants la signification du jugement, à défaut d'exécution dans ce délai, elle sera condamnée à une astreinte de 25 euros par jour de retard courant jusqu'à exécution parfaite de remise en état de la toiture
- débouté les époux X de leur demande de remboursement du coût du raccordement de la première centrale photovoltaïque au réseau d'électricité
- prononcé la résolution du contrat d'équipement conclu entre les époux X et la société RTS en raison des multiples défaillances contractuelles de cette dernière qui ont fait obstacle à la mise en service du matériel vendu
- prononcé la résolution du contrat de prêt conclu entre les époux X et Cetelem le 13 janvier 2016
- condamné la société BNP PPF, venant aux droits de Cetelem, à rembourser aux époux X la somme de 890,98 euros au titre des échéances payées, à parfaire au jour de l'exécution du jugement
- dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du jugement en application de l'article 1231-7 du Code civil
- condamné la société RTS à faire procéder à ses frais à l'enlèvement du matériel et à la remise à l'état initial de la toiture, dans les trois mois suivants la signification du jugement, à défaut d'exécution dans ce délai, elle sera condamnée à une astreinte de 25 euros par jour de retard courant jusqu'à exécution parfaite de remise en état de la toiture
- dit que si la Selarl Bally MJ en qualité de liquidateur de la société NRJEF et la société RTS n'ont pas démonté et enlevé le matériel et procédé à la remise en état de la toiture à l'issue d'une année suivant la signification du jugement, elles seront réputées avoir abandonné l'entière propriété des centrales photovoltaïques qui seraient alors transférées aux époux X
- débouté les époux X de leurs demandes tendant à voir la société BNP PPF privée de ses droits à restitution des fonds réglés à la société NRJEF et à la société RTS
- débouté les époux X de leur demande de fixation d'un préjudice complémentaire au remboursement des échéances sur les prêts du 26 mars 2012 et le 14 décembre 2015
- constaté que la société BNP PPF indique exclure de ses demandes le paiement du prêt Cetelem octroyé le 29 janvier 2016 à hauteur de 20 400 euros
- enjoint à la société BNP PPF de faire procéder à la radiation du chacun des époux X du FICP, sous astreinte de 30 euros par jour de retard courant à compter de la signification du jugement
- condamné in solidum la Selarl Bally MJ ès qualités, la société RTS et la société BNP PPF aux dépens et à payer aux époux X une indemnité de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par déclaration au greffe faite le 26 janvier 2018, la société BNP PPF a relevé appel de certaines dispositions de ce jugement.
Pendant le délibéré du jugement, la société RTS a fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire en date du 4 octobre 2017 prononcé par le tribunal de commerce de Lyon et désignant Me Y en qualité de liquidateur.
La société BNP PPF a fait signifier la déclaration d'appel et ses conclusions remises au greffe le 25 avril 2018 :
- le 7 décembre 2018 à Me Y ès qualités, à personne
- le 6 décembre 2018 à la Selarl Bally ès qualités, à personne
Les époux X ont fait signifier aux parties défaillantes leurs dernières conclusions remises au greffe le 12 septembre 2018 :
- 12 septembre 2019 à la Selarl Bally ès qualités, à personne
- le 13 septembre 2019 à la Selarl Jérôme Allais, désigné liquidateur de la société RTS, en remplacement de Me Y, à personne.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 18 septembre 2019.
Vu les dernières conclusions notifiées le 25 avril 2018 et signifiées aux parties défaillantes les 7 décembre 2018 et 6 décembre 2018 par la société BNP PPF qui a demandé à la cour, au visa des articles 9 du Code de procédure civile, 1315 du Code civil, 1134, 1147, 1184 et 1338 du Code civil, L. 311-32 et L. 311-33 du Code de la consommation, de :
- infirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a jugé qu'elle n'avait commis aucune faute dans l'exécution des contrats de prêt accessoires aux contrats principaux dès lors que le prêteur a pu valablement libérer les fonds sur la foi des attestations d'achèvement de travaux signés par les emprunteurs et sans avoir à procéder à plus amples investigations personnelles
- dire qu'elle est recevable à soulever le moyen tiré de la confirmation des causes de nullité des contrats principaux dès lors qu'au visa de l'article 31 du Code de procédure civile, elle a intérêt à voir juger conformes ces contrats dont la validité conditionne celle des prêts octroyés en application de l'article L. 311-32 du Code de la consommation
- dire qu'à supposer démontrées des causes de nullité du contrat de prestation et fourniture conclu avec la société NRJEF, les époux X ont couvert ces nullités en exécutant volontairement et spontanément le contrat, en réceptionnant sans réserve ni grief les travaux et prestations accomplies qu'ils ont déclarés comme pleinement achevés au prêteur, en faisant procéder au raccordement après installation puis en souscrivant le contrat de rachat d'électricité, en percevant des revenus après cette production énergétique, puis en exécutant le contrat de prêt pendant près de 5 ans sans aucune contestation ni contre le prestataire ni contre le prêteur
- dire que tout éventuel dol du prestataire NRJEF relatif au rendement de l'installation photovoltaïque a été couvert par la commande et installation de panneaux photovoltaïques complémentaires pour pallier le déficit de rendement non conforme aux promesses du prestataire, près de quatre ans après la mise en service de la première installation
- en conséquence, débouter les époux X de leur demande de nullité ou de résolution des contrats du 26 mars 2012
- à titre reconventionnel, les condamner à lui payer la somme de 22 409,81 euros restant due sur déchéance du terme
- à titre subsidiaire, dans l'hypothèse d'une nullité ou résolution des contrats principaux, dire qu'elle ne peut être privée de son droit à restitution du capital mis à la disposition des emprunteurs
- condamner en conséquence, les époux X à lui payer :
- au titre du prêt du 26 mars 2012, la somme de 14 618, 44 euros déduction déjà faite des échéances versées pour 7 981,56 euros
- au titre du prêt du 13 janvier 2016, la somme de 19 296,14 euros déduction déjà faite des échéances versées pour 203,86 euros
- dire, en application des dispositions de l'article L. 311-33 du Code de la consommation, que les sociétés NRJEF et RTS garantiront les époux X de ces condamnations
- en toute hypothèse, condamner les époux X à lui payer une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile
Vu les dernières conclusions notifiées le 12 septembre 2019 et signifiées aux parties défaillantes les 12 septembre 2019 et 13 septembre 2019 par les époux X qui ont demandé à la cour de confirmer le jugement déféré et condamner l'appelante à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
MOTIFS
1 - Sur la procédure
L'article 472 du Code de procédure civile dispose que si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.
En l'espèce, il résulte des actes de la procédure suivie en appel, ci-avant exposés, que la déclaration d'appel et les conclusions des parties constituées ont été régulièrement signifiées aux liquidateurs de la société NRJEF et RTS, à leur personne.
La cour paraissant régulièrement saisie, le présent arrêt sera donc réputé contradictoire.
2 - Sur l'objet de l'appel
L'appel formé par la BNP PPF tend exclusivement à remettre en cause les dispositions du jugement ayant :
- dénié à la banque le droit, pour défaut de qualité, d'agir en défense à la demande de nullité du contrat de fourniture et de prestation conclu le 26 mars 2012 avec la société NRJEF
- annulé ledit contrat, et par voie de conséquence, le prêt affecté souscrit le 26 mars 2012
- condamné la banque à restituer aux époux X les mensualités réglées au titre des deux prêts, et ce faisant, implicitement écarté la demande de remboursement du capital prêté, au titre des deux prêts, alors même que dans ses motifs le premier juge avait exclu toute faute de la banque dans la libération des fonds prêtés
La cour observe que si les époux X demandent la confirmation du jugement, alors même qu'ils sont déboutés de leur demande tendant à voir dire que la banque est privée du droit à restitution, cette apparente incohérence tient à la contradiction interne du jugement dont le dispositif n'a pas statué sur la demande de restitution du capital et condamné la banque à restituer les échéances réglées, donnant ainsi satisfaction aux prétentions des époux X.
En l'absence d'appel incident ou principal, les autres dispositions concernant les sociétés NRJEF et RTS, sous réserve du sort du contrat de fourniture et prestations du 26 mars 2012, n'ont pas été dévolues à la connaissance de la cour. Elles sont donc définitives.
Il convient donc d'examiner les prétentions des parties dans les limites de l'appel formé par la société BNP PPF.
3 - Sur la nullité du contrat de fourniture et prestations du 26 mars 2012 et le sort du crédit affecté
S'agissant de la qualité du prêteur à agir en défense à l'action en nullité du contrat principal auquel il n'est pas partie, il résulte des dispositions de L. 311-32 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable aux actes de la cause, instituant une interdépendance entre le contrat principal et le contrat de crédit affecté au financement du contrat principal, que la nullité ou la résolution du premier entraînant de plein droit l'anéantissement du second.
Par conséquent, le prêteur, quoique non partie au contrat principal, a intérêt et qualité à s'opposer à la demande en nullité dudit contrat dont la survie est une condition de l'existence de la créance dont il poursuit le recouvrement.
Sur le fond, le premier juge a exactement caractérisé les graves et multiples irrégularités affectant le bon de commande du 26 mars 2012, au regard de la législation sur le démarchage à domicile et notamment de l'article L. 121-23 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable au bon de commande litigieux : aucun nom du démarcheur (le nom du prestataire figure bien au bas de la dernière page du bon de commande), aucune précision des caractéristiques techniques et commerciales des panneaux photovoltaïques, du mode de pose, aucune précision des conditions d'exécution du contrat, des délais d'exécution, des démarches administratives, un formulaire de rétractation dont le découpage amputerait certaines parties du bon de commande, mention d'une " garantie de rendement à hauteur de 90 % pendant 25 ans " sans aucune précision du sens et du contenu de cette garantie, le démarcheur ayant remis une feuille manuscrite volante détaillant les calculs sur le rendement de l'installation et l'autofinancement de l'opération.
Relevant également que le prestataire avait fait signer aux époux X, en même temps que le bon de commande, un certificat de fin de travaux non daté, et analysant l'ensemble des procédés commerciaux utilisés par le prestataire en des manœuvres dolosives, le premier juge a annulé le contrat principal sur le fondement du dol en application de l'article 1116 du Code civil, dans sa version antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.
L'intimé a conclu à la confirmation de cette annulation tandis que l'appelante ne conteste pas sérieusement les différentes causes de nullité du contrat principal, parfaitement établies, mais soutient que, s'agissant de nullités relatives, les époux X les ont ratifiées :
- au titre des irrégularités du bon de commande : en exécutant volontairement et spontanément le contrat, en réceptionnant sans réserve ni grief les travaux et prestations accomplies qu'ils ont déclarés comme pleinement achevés au prêteur, en faisant procéder au raccordement après installation puis en souscrivant le contrat de rachat d'électricité, en percevant des revenus après cette production énergétique, puis en exécutant le contrat de prêt pendant près de 5 ans sans aucune contestation ni contre le prestataire ni contre le prêteur
- au titre du dol, par la commande et installation de panneaux photovoltaïques complémentaires pour pallier le déficit de rendement non conforme aux promesses du prestataire, près de quatre ans après la mise en service de la première installation
Mais en droit, il résulte des dispositions de l'article 1338 du Code civil, dans sa version antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, que la confirmation d'un acte nul exige à la fois la connaissance du vice l'affectant et l'intention de le réparer.
En l'espèce, il ne peut se déduire de leur comportement tel que décrit par l'appelant, que les époux X auraient entendu, à un moment quelconque, renoncer à se prévaloir des causes de nullité de leur engagement en confirmant celui-ci alors que, consommateurs profanes, ils se sont soumis à l'engrenage contractuel mis en place par le prestataire dont les procédés déloyaux, qui les avaient déterminés à s'engager, se sont révélés dans toute leur ampleur dommageable au moment de la réception de la première facture de vente d'électricité, caractérisant la non-conformité de l'installation.
Dans ce contexte, l'acquisition de 8 panneaux photovoltaïques supplémentaires auprès d'un autre prestataire, destinés à pallier le sous-rendement des panneaux installés, loin de valoir ratification du dol subi, tend seulement à réparer les conséquences dommageables de celui-ci.
Par conséquent, les faits invoqués par l'appelante sont impropres à caractériser une connaissance par les époux X des causes de nullité du contrat et l'intention de ceux-ci de réparer le contrat nul.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a annulé le contrat de fourniture et de prestation signé le 26 mars 2012, et, par voie de conséquence, annulé le prêt affecté signé le même jour.
4 - Sur la restitution du capital prêté au titre des deux prêts
L'article L. 311-31 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable aux actes de la cause, dispose que les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation ; en cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, elles prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d'interruption de celle-ci. Le vendeur ou le prestataire de services doit conserver une copie du contrat de crédit et le présenter sur leur demande aux agents chargés du contrôle.
Il résulte donc des articles L. 311-31 et L. 311-32 du Code de la consommation précités que le prêteur qui commet une faute lors de la libération des fonds, ne peut prétendre au remboursement du capital prêté.
Et, commet une faute, le prêteur qui verse les fonds :
- sans vérifier, préalablement, que le bon de commande était conforme aux dispositions légales régissant le démarchage à domicile ou sans procéder, préalablement, auprès du vendeur et des emprunteurs, aux vérifications qui lui auraient permis de constater que le contrat de démarchage à domicile était affecté d'une cause de nullité.
- sans s'assurer de l'exécution complète du contrat principal.
Il convient de rechercher si le prêteur a commis une faute lors de la remise des fonds à la société NRJEF et à la société RTS.
4 - 1 - Sur le prêt souscrit le 26 mars 2012
La société Sygma banque, aux droits de laquelle vient la société BNP PPF, ne pouvait pas ne pas relever les graves irrégularités flagrantes, précédemment exposées, qui affectaient le bon de commande signé le 26 mars 2012 au détriment des époux X privés des informations essentielles concernant l'objet, les conditions d'exécution et les garanties de rendement du contrat.
En libérant les fonds entre les mains de la société NRJEF, sans procéder à des vérifications complémentaires en dépit de l'irrégularité manifeste du bon de commande qui viciait l'opération commerciale qu'elle finançait et dont l'exécution a été défectueuse au préjudice des époux X en raison de la non-conformité contractuelle de l'installation, la société Sygma banque a commis une faute qui la prive de tout droit à restitution du capital.
4 - 2 - Sur le prêt souscrit le 13 janvier 2016
Il a été définitivement jugé que le contrat de fourniture et de prestation signé le 14 décembre 2015 était résolu pour inexécution fautive du contrat imputable à la société RTS qui a livré une installation incomplète (absence d'ondulateur) et n'a pas procédé aux démarches administratives et techniques nécessaires au raccordement de l'installation au réseau EDF.
La société BNP PPF, et non Cetelem qui n'est qu'un nom commercial du prêteur, a commis une double faute en libérant les fonds entre les mains de la société RTS.
En premier lieu, le bon de commande est encore affecté de graves irrégularités concernant notamment les caractéristiques commerciales et techniques des panneaux photovoltaïques, les délais d'exécution, la garantie de rendement, viciant l'opération commerciale. En s'abstenant de vérifier la conformité du bon de commande à la législation protectrice du consommateur démarché au détriment des époux X qui ont acquis une installation qui ne fonctionne pas, la banque a commis une faute la privant de son droit à restitution du capital prêté.
En second lieu, le procès-verbal de fin de travaux au 29 janvier 2016, qui ne fait aucune référence à la prestation réalisée, et la demande de libération des fonds du 28 janvier 2016, au vu de laquelle la banque a libéré les fonds, qui constate un délai de livraison des travaux, rend invraisemblable l'exécution à cette date de la prestation commandée le 15 décembre 2015, compte tenu de la complexité de l'opération et des démarchages administratives nécessaires à sa finalisation, et alors au surplus que l'attestation pré-imprimée selon laquelle " les travaux ont été réalisés ... dans les règles de l'art " n'atteste pas que les démarches administratives et le raccordement au réseau auraient été effectivement réalisés quand, selon le bon de commande, ces prestations incombaient à la société RTS.
Par conséquent, en libérant les fonds, sans s'assurer de l'exécution complète de la prestation convenue, la banque a commis une nouvelle faute préjudiciable aux époux X qui la prive de son droit à restitution du capital prêté.
Il conviendra donc nécessairement d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté les époux X de leur demande tendant à voir dire que la société BNP PPF doit être privée de son droit à restitution du capital prêté et de le confirmer pour le surplus de ses dispositions déférées, notamment en ce que la société BNP PPF a été condamnée à restituer le montant des échéances réglées au titre des deux prêts.
Le jugement sera confirmé en ces dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles mis à la charge de la société BNP PPF, laquelle sera condamnée aux dépens d'appel et à payer aux époux X une indemnité complémentaire de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par ces motifs, LA COUR, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, Vu l'appel limité à certaines dispositions du jugement entrepris, Dit que la société BNP PPF, prêteur, a qualité à contester la nullité du contrat principal signé par le 26 mars 2012 par les époux X avec la société NRJEF, Confirme les dispositions déférées ayant : - annulé le contrat de fourniture et de prestation de service signé le 26 mars 2012 par les époux X avec la société NRJEF - annulé par voie de conséquence le contrat de prêt affecté souscrit le 26 mars 2012 par les époux X auprès de la société Sygma banque - condamné la société BNP PPF à restituer aux époux X le montant des mensualités réglées au titre du prêt souscrit le 26 mars 2012 et au titre du prêt souscrit le 13 janvier 2016 - condamné la société BNP PPF aux dépens et au paiement d'une indemnité de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; Infirme le jugement en ce qu'il a débouté les époux X de leur demande tendant à voir dire que la société BNP PPF sera privée de son droit à restitution des fonds remis aux deux prestataires, et statuant à nouveau, Déboute la société BNP PPF de sa demande de restitution du capital prêté aux époux X en vertu des deux contrats de prêt affecté annulés, Condamne la société BNP PPF aux dépens d'appel, Condamne la société BNP PPF à payer aux époux X une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Autorise Me Duffau, avocat au barreau de Pau, à procéder au recouvrement direct des dépens d'appel, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.