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Décisions

Cass. com., 11 décembre 2019, n° 18-15.098

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Etablissements Christian Fabre (SA), Fabre

Défendeur :

Hyundai Motor France (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Barbot

Avocats :

SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois

T. com. Paris, du 26 janv. 2015

26 janvier 2015

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 février 2018), que le 15 octobre 2003, la société Etablissements Christian Fabre (la société Fabre), présidée par M. Fabre, a conclu avec la société Hyundai Motor France (la société Hyundai) des contrats de distribution ayant pour objet la vente de véhicules neufs de la marque Hyundai, un contrat de réparateur agréé et un contrat de vente d'accessoires concernant deux sites distincts, l'un localisé à Pau, l'autre à Tarbes ; que le 24 août 2009, la société Fabre a informé la société Hyundai de la construction d'un nouveau site à Tarbes et, dans l'attente de la fin des travaux, de la mise en place de la distribution des véhicules sous chapiteaux ; que le 11 septembre 2009, la société Hyundai a résilié les contrats relatifs à la concession de Tarbes, avec effet immédiat, en imputant au concessionnaire plusieurs manquements contractuels, dont le changement du lieu d'implantation des locaux d'exploitation sans autorisation préalable ; que le 28 juin 2010, la société Fabre a informé la société Hyundai de l'ouverture de son nouveau site de Tarbes, à partir du 1er juillet 2010, en tant qu'établissement secondaire de son site de Pau ; que le 27 juin 2012, dans la perspective de l'entrée en vigueur du règlement UE n° 330/2010, la société Hyundai a résilié les derniers contrats afférents au site de Pau ; que le 5 novembre 2012, la société Fabre a fait l'objet d'une procédure de sauvegarde, avant de bénéficier d'un plan de sauvegarde le 19 mai 2014 ; que le 9 juillet 2014, M. Fabre, la société Fabre et le commissaire à l'exécution de son plan ont assigné la société Hyundai en réparation de leurs préjudices, en se prévalant notamment de la résiliation abusive et injustifiée du contrat relatif à la concession de Tarbes et de fautes dans l'exécution du contrat ;

Sur le deuxième moyen : - Attendu que la société Fabre fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'indemnisation fondée sur le refus d'agrément, par la société Hyundai, du site secondaire de Tarbes alors, selon le moyen : 1°) que l'article 18.2.2 du contrat de distribution prévoyait que le distributeur pouvait créer des points de vente ou de livraison supplémentaires sans avoir à demander l'autorisation préalable du fournisseur si le distributeur lui notifiait " son intention d'établir un point de vente ou de livraison secondaire trois mois avant le démarrage de son activité " ; qu'en affirmant que le distributeur devait informer le fournisseur de la date de démarrage effectif de l'activité du site, trois mois avant cette dernière, de sorte la notification par le distributeur de son projet d'établir un point de vente n'était pas suffisante au regard des clauses contractuelles, quand le contrat ne prévoyait que l'obligation, pour le distributeur, de notifier son intention d'établir un point de vente, trois mois avant cette date, et ne l'obligeait pas à notifier la date de démarrage effectif de l'activité, la cour d'appel a ajouté au contrat une condition qu'il ne prévoyait pas, et l'a dénaturé, violant ainsi l'article 1134 du Code civil, dans sa rédaction applicable au litige ; 2°) que le contrat est la loi des parties et ne peut être modifié unilatéralement par l'une d'elles ; qu'en affirmant, pour juger que la notification par le distributeur de son intention d'établir un point de vente secondaire était tardive, que la société Hyundai avait rappelé au distributeur, par son courrier du 5 octobre 2009, qu'il devait l'informer de la date du démarrage effectif de l'activité, quand le contrat ne prévoyait pas cette obligation et que cette modification du contrat ne pouvait résulter de la seule volonté de la société Hyundai, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil, dans sa rédaction applicable au litige ; 3°) que l'arrêt qui se borne au titre de sa motivation à reproduire sur tous les points en litige les prétentions de la partie à laquelle il a été fait droit ne statue que par une apparence de motivation faisant peser un doute légitime sur l'impartialité de la juridiction ; qu'en se bornant, pour juger que le défaut d'agrément de l'établissement de Tarbes n'avait eu aucune conséquence sur la situation de la société Fabre, à reproduire les conclusions de la société Hyundai, la cour d'appel a statué par une apparence de motivation et violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble les articles 455 et 458 du Code de procédure civile ; 4°) qu'en jugeant que le distributeur avait continué à présenter l'établissement de Tarbes comme un site représentant la marque de 2010 à 2013, sans rechercher, comme il lui était demandé, si en affirmant à ses clients, par son service clientèle que l'établissement situé à Tarbes ne faisait plus partie du réseau Hyundai et en l'empêchant ainsi d'exploiter officiellement les nouveaux locaux de Tarbes, le distributeur avait souffert de pertes d'exploitation et de pertes de valeur du fonds de commerce imputables au refus d'agrément, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, devenu 1231-1 du même Code ;

Mais attendu, en premier lieu, que c'est sans dénaturer l'article 18.2.2 du contrat de distribution que la cour d'appel a retenu qu'il résultait de cette clause que la société Hyundai devait être prévenue avec un délai de trois mois au moins avant le démarrage de l'activité ;

Et attendu, en second lieu, que, la décision étant justifiée par les motifs vainement critiqués par la première branche, les griefs des deuxième, troisième et quatrième branches critiquent des motifs surabondants ; d'où il suit que le moyen, pour partie inopérant, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le troisième moyen : - Attendu que la société Fabre fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'indemnisation fondée sur des retards de livraison imputés à la société Hyundai alors, selon le moyen : 1°) que la faute contractuelle est caractérisée dès lors que le contractant manque à l'une de ses obligations ; qu'en affirmant qu'en dépit des retards de livraisons des véhicules non contestés par la société Hyundai, la société Fabre ne démontraient pas que ces retards étaient fautifs, quand les retards de livraison établissaient à eux seuls l'inexécution contractuelle, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1147 du Code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, devenu 1231-1 du même Code ; 2°) que la force majeure suppose la démonstration d'un événement imprévisible lors de la conclusion du contrat et irrésistible lors de son exécution ; qu'en écartant une faute de la société Hyundai en dépit des retards de livraisons des véhicules qu'elle constatait et qui n'étaient pas contestés, au motif que leur caractère anormal ne serait pas démontré, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant et a violé les articles 1147 et 1148 du Code civil, dans leur rédaction applicable à la cause, devenus 1231-1 et 1218 du même Code ; 3°) que la société Fabre soutenait, pièces à l'appui, que " Hyundai avait volontairement paralysé les activités des Ets Fabre pour les contraindre à y mettre fin en retardant indûment la livraison des véhicules commandés pour leurs clients, ce qui a[vait] provoqué de très nombreuses annulations de commandes et un discrédit total auprès de leur clientèle tant sur Pau que sur Tarbes " ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni de ses conclusions que la société Fabre ait soutenu, devant la cour d'appel, que les retards de livraison des véhicules suffisaient, à eux seuls, à engager la responsabilité contractuelle de la société Hyundai et que seule la force majeure pouvait exonérer cette dernière de sa responsabilité encourue à ce titre ; que le moyen, pris en ses première et deuxième branches, est donc nouveau et mélangé de fait et de droit ;

Et attendu, en second lieu, qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que les retards de livraison n'étaient pas fautifs, la cour d'appel a répondu, en l'écartant, à la partie des conclusions relative à la faute tenant à ces retards ; qu'ayant écarté cette faute, la cour d'appel n'avait pas à répondre à l'autre partie des conclusions, inopérante, relative aux préjudices pouvant en résulter ; d'où il suit que le moyen, irrecevable en ses première et deuxième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;

Et sur les premier et quatrième moyens : - Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.