Cass. com., 18 décembre 2019, n° 18-17.364
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
CDLR Studio LTD Private Limited Company (Sté), Dauphin de la Rochefoucauld, CDLR studio LTD (Sté)
Défendeur :
Repossi, Repossi diffusion Sam (SA), Or de Vendôme (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Rapporteur :
Mme Le Bras
Avocat général :
Mme Beaudonnet
Avocats :
SCP Ortscheidt, SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer
LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 mars 2018), que la société Repossi diffusion SAM (la société Repossi), de droit monégasque, la société Or de Vendôme et Mme Repossi, qui exercent sous le nom de " Maison Repossi " une activité de bijouterie de luxe, ont assigné en responsabilité pour concurrence déloyale et parasitisme, devant un tribunal de commerce, la société CDLR Studio Ltd, de droit anglais, la société CDLR Studio Ltd, dont le siège est à Paris, (les sociétés CDLR) et Mme Dauphin de la Rochefoucauld, qui exercent une activité similaire ; que ces derniers ayant soulevé l'incompétence du tribunal saisi et demandé que l'affaire soit renvoyée devant le tribunal de grande instance, le premier juge a rejeté l'exception d'incompétence ;
Attendu que les sociétés CDLR et Mme Dauphin de la Rochefoucauld font grief à l'arrêt de confirmer le jugement alors, selon le moyen : 1°) que les tribunaux de commerce connaissent des contestations relatives aux sociétés commerciales et contre leurs dirigeants si les faits allégués se rattachent par un lien direct à la gestion de sociétés commerciales ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motifs pris que si " les faits reprochés à Mme Dauphin de la Rochefoucauld ressortaient ainsi en principe de la compétence du tribunal de grande instance, ils étaient étroitement liés aux agissements des sociétés CDLR ", que " Mme Dauphin de la Rochefoucauld était non seulement la créatrice des bijoux contestés mais assurait également leur commercialisation en sa qualité de seule dirigeante des sociétés CDLR " et " qu'une étroite relation était entretenue entre ses sociétés et elle dans leur communication externe, Mme Dauphin de la Rochefoucauld s'exprimant systématiquement à la première personne au nom de ses sociétés ", cependant que cette activité de création, exercée en amont par Mme de la Rochefoucauld en sa seule qualité d'artiste, en laquelle elle est poursuivie, et hors le cadre de ses fonctions au sein de la société, était distincte de l'activité de distribution et ne pouvait en conséquence présenter un lien direct avec la gestion de la société qui en assure en aval la distribution, la cour d'appel a violé l'article L. 721-3 2° du Code de commerce ; 2°) que les actions civiles et les demandes relatives à la propriété littéraire et artistique ou aux dessins et modèles, y compris lorsqu'elles portent également sur une question connexe de concurrence déloyale, sont exclusivement portées devant des tribunaux de grande instance ; qu'une demande est relative au droit d'auteur ou aux dessins et modèles lorsque la recherche d'une faute implique l'examen des droits respectifs des parties qui bénéficient d'une protection au titre du droit d'auteur ou à celui des dessins et modèles et que cette faute est de nature à affecter au moins indirectement mais de manière substantielle les droits du titulaire ; qu'en retenant que l'examen des prétentions fondées sur la concurrence déloyale n'impliquait aucun examen de l'existence ou de la méconnaissance d'un droit de propriété intellectuelle, après avoir pourtant constaté que les faits poursuivis au titre de la concurrence déloyale s'entendaient de la création et réalisation de bijoux s'inspirant des créations de la Maison Repossi sur lesquelles cette dernière était titulaire de droits privatifs, ce dont il s'inférait que les prétentions de Mme Repossi et des sociétés Repossi diffusion et Or de Vendôme comprenaient une demande relative à la propriété intellectuelle puisque de nature à affecter au moins indirectement mais de manière substantielle l'intégrité des droits d'auteur ou de dessin ou modèle de chacune des parties sur les bijoux, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses constatations et a violé les articles L. 331-1 et L. 521-3-1 du Code de la propriété intellectuelle ;
Mais attendu, d'une part, qu'après avoir relevé, par motifs propres et adoptés, qu'il ressort de l'assignation que sont poursuivis au titre de la concurrence déloyale et imputables à Mme Dauphin de la Rouchefoucauld les faits de création de bijoux s'inspirant des créations de " la Maison Repossi ", l'arrêt constate que Mme Dauphin de la Rochefoucauld assure également la commercialisation de ses créations, en sa qualité de seule dirigeante de la sociétéCDLR Studio Ltd et de son établissement parisien ; qu'il retient que les faits reprochés sont étroitement liés aux agissements de la société CDLR Studio Ltd et de son établissement parisien ; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a déduit, à bon droit, que, même si la responsabilité personnelle de Mme Dauphin de La Rochefoucauld n'était pas recherchée en sa qualité de dirigeante et qu'aucune faute de gestion ne lui était imputée sur ce fondement, les faits qui lui sont reprochés se rattachent par un lien direct à la gestion de la société CDLR Studio Ltd, dont elle est la dirigeante, et de son établissement parisien, seuls distributeurs de ses bijoux ;
Et attendu, d'autre part, qu'ayant constaté que l'assignation introduite au visa de l'article 1240 du Code civil ne formulait aucune demande, qu'elle soit principale ou connexe, au titre de la propriété intellectuelle et énoncé que l'examen des prétentions au titre de la concurrence déloyale n'impliquait aucun examen de l'existence ou de la méconnaissance d'un droit de propriété intellectuelle, pour lequel le tribunal de grande instance a une compétence exclusive, la cour d'appel en a déduit à bon droit que le tribunal de commerce était compétent pour connaître de l'action engagée par Mme Repossi et les sociétés Repossi et Or de Vendôme ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.