Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 20 décembre 2019, n° 18-02807

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Strucom (SARL), Eurl Strucom (ès qual.)

Défendeur :

Fédération Nationale des Syndicats d'Agents Généraux d'Assurance, Agea Promotion (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Bel

Conseillers :

Mmes Cochet-Marcade, Moreau

TGI Paris, du 21 déc. 2017

21 décembre 2017

Faits et procédure

La Fédération Nationale des syndicats d'agents généraux d'assurance (ci-après dénommée Agea) représente la profession des agents généraux d'assurance au niveau national et européen.

La société Agea promotion est une société commerciale ayant notamment pour objet la fourniture de prestations de services aux agents généraux d'assurances et autres intermédiaires dans le domaine de l'assurance.

La société Strucom est une société ayant pour activité la conception, l'organisation, la commercialisation et l'animation d'événements de toute nature.

En 2013, la fédération Agea et la société Agea promotion ont décidé de lancer le premier salon de l'Assuré à Paris (le Salon).

Pour la réalisation de ce projet, la société Agea Promotion a confié à la société Strucom par contrat de prestation en date du 15 janvier 2014, la gestion opérationnelle du salon moyennant une rémunération forfaitaire de 100 000 € HT, outre une participation de 70 % au résultat budgétaire.

Les conditions budgétaires de la première édition ont été formalisées par avenant en date du 20 mai 20l4.

En sa qualité de gestionnaire financier du Salon, la société Strucom a versé en 2014 à la société Agea promotion la somme de 10 371,08 € HT correspondant à 30 % du résultat budgétaire du Salon.

En l'absence de dénonciation par l'une ou l'autre des parties, le contrat, renouvelable par tacite reconduction, a été reconduit pour l'année 2015.

Aux termes d'un second avenant au contrat de prestation de service en date du 7 juillet 2015, les parties ont ainsi décidé d'organiser la seconde édition du Salon le 14 novembre 2015, et fixé un budget prévisionnel.

Par courrier recommandé avec avis de réception en date du 25 août 2015, la société Agea promotion a notifié à la société Strucom sa décision de ne pas renouveler pour l'année 2016 le contrat de prestations de services signé le 15 janvier 2014.

Dans ce contexte, la société Strucom a par acte du 18 novembre 2015 assigné la fédération Agea et la société Agea promotion devant le tribunal de grande instance de Paris en responsabilité et en indemnisation, leur reprochant notamment d'être responsables de l'échec commercial de la seconde édition du Salon.

Par jugement assorti de l'exécution provisoire en date du 21 décembre 2017, le tribunal de grande instance de Paris a débouté la société Strucom de l'intégralité de ses demandes, condamné la société Strucom à payer à la société Agea promotion la somme de 57 994 € en exécution du contrat de prestation de services conclu entre les parties, avec intérêts au taux légal à compter du 15 mars 2016, condamné la société Strucom à payer à la fédération Agea et à la société Agea promotion la somme de 5 000 €, à chacune, à titre de dommages et intérêts, ordonné la publication du dispositif du jugement à intervenir dans deux journaux ou revues au choix de la fédération Agea et de la société Agea promotion aux frais de la société Strucom dans la limite de 4 000 € HT par insertion, condamné la société Strucom à payer à la fédération Agea et à la société Agea promotion la somme de 6 000 € chacune en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, débouté la fédération Agea et la société Agea promotion du surplus de leurs demandes.

Le tribunal a débouté la société Strucom de ses demandes indemnitaires considérant, d'une part, qu'il ne ressortait pas du contrat des obligations de promotion auprès du public mises à la charge de la société Agea promotion. Il relève que ces obligations incombaient à la seule société Strucom qui ne pouvait pas reprocher à la société Agea promotion une inexécution contractuelle sur des actions de promotion, ni une faute délictuelle de la part de la fédération Agea à son encontre.

D'autre part, le tribunal a également débouté la société Strucom de ses demandes indemnitaires en ce qu'elle ne caractérisait pas de faute commise par la fédération Agea et la société Agea promotion à son encontre et résultant de l'organisation par ces dernières d'un événement " les samedis de l'assuré ".

Le tribunal a relevé qu'il ne résultait pas du contrat et notamment de son article 1er, une obligation d'exclusivité à la charge de ces dernières leur faisant interdiction de souscrire à des engagements pour des salons concurrents. De surcroît, le tribunal a considéré que l'événement en question ne pouvait être caractérisé de concurrent au salon de l'assuré dès lors que ce deuxième événement s'adressait à des publics différents, avait lieu dans des villes différentes et constituait en réalité une communication complémentaire pour le salon de l'assuré.

Le tribunal a débouté la société Strucom de sa demande au titre de l'indemnité forfaitaire sur le fondement de l'article 1134 du Code civil en ce que cette indemnité constituait une dépense du budget qui a été conservée sur le compte bancaire de la société Strucom, qu'elle a été intégrée au résultat final d'exploitation des salons, qu'elle a servi de base de calcul pour la participation reversée à la société Agea promotion et s'est donc imputée sur les recettes perçues, de sorte que la société Strucom a bénéficié de son paiement.

Le tribunal a également rejeté la demande de la société Strucom d'indemnité de fin de contrat considérant que cette indemnité due en raison de la décision de la société Agea promotion de ne pas renouveler le contrat pour l'année 2016, devait se calculer sur la moyenne de la participation aux résultats générés par les salons en 2014 et 2015 qui était négative.

Le tribunal a en revanche condamné la société Strucom à payer à la société Agea promotion la somme de 57 994 € correspondant à la différence entre les 22 509 € dont cette dernière était redevable au titre de sa participation aux pertes de l'édition 2015 du salon de l'assuré et les 80 557 € dus par la société Strucom au titre de l'avance de trésorerie qui lui a été accordée.

Il a également jugé bien fondées la fédération Agea et la société Agea promotion en leurs demandes indemnitaires au titre du dénigrement sur le fondement de l'article 1382 ancien du Code civil en ce que la dénonciation à la clientèle d'une action en justice qui n'a pas donné lieu à une décision de justice est fautive et a causé une atteinte à leur réputation professionnelle et à leur image.

Le tribunal les a en revanche déboutées de leur demande en responsabilité contractuelle au titre de l'annonce et de l'organisation du " Salon de l'Assurance 2016 " par l'appelante, aux motifs que le salon organisé par la société Strucom se distinguait de par son organisation et ses objectifs du " Salon de l'assuré " précédemment organisé avec les intimées.

Il a également débouté la société Agea promotion au titre de sa demande de réparation pour concurrence déloyale et parasitaire aux motifs que s'il existait bien des actes de parasitisme en raison des fortes similitudes d'objet des deux salons organisés au même endroit engendrant un risque de confusion dans l'esprit du public, et donc une faute commise par la société Strucom ouvrant droit à réparation pour la société Agea promotion, cette dernière ne démontrait pas l'existence d'un préjudice en lien avec cet acte. Le tribunal a en effet précisé que les investissements pour la mise en œuvre des éditions 2014 et 2015 ne pouvaient s'analyser comme un préjudice réparable en lien avec l'acte fautif.

Par jugement du 15 mars 2018 du tribunal de commerce de Paris, la société Strucom a été placée en liquidation judiciaire, le tribunal désignant la SCP Btsg en la personne de Me G. en qualité de liquidateur.

Par déclaration au greffe en date du 31 janvier 2018, la société Strucom représentée par la SCP Btsg, ès qualités de liquidateur, a fait appel du jugement du tribunal de grande instance.

Moyens et prétentions des parties :

Par dernières conclusions notifiées et déposées le 24 avril 2018, Me G. ès qualités de liquidateur de la société Strucom, demande à la cour au visa des articles 1134, 1147, 1382 et suivants (anciens) du Code civil d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

- condamner solidairement la Fédération nationale des syndicats d'agents généraux d'assurance (Agea) et la société Agea promotion à régler à Me G., ès qualités, les sommes suivantes :

- 240 000 € TTC au titre de la rémunération forfaitaire de commercialisation pour les éditions 2014 et 2015 du Salon ;

- 78 766,80 € (35 000 € + 43 766,80 €) en réparation du préjudice économique, avec intérêt légal décompté depuis l'acte introductif d'instance ;

- 150 409,24 € à titre principal ou 73 998,75 € à titre subsidiaire ou 60 497,97 € à titre infiniment subsidiaire en paiement de l'indemnité de fin de contrat avec intérêt légal décompté depuis l'acte introductif d'instance ;

- 100 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation des manquements circonstanciés au contrat, des actes contraires à la probité professionnelle, du préjudice d'image et de la perte d'une chance de négociations abouties pour le rachat des parts sociales de la société Strucom, avec intérêt légal décompté depuis l'acte introductif d'instance ;

- 12 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance dont distraction conformément à l'article 699 du Code de procédure civile ;

- débouter la Fédération nationale des syndicats d'agents généraux d'assurance et la société Agea promotion de toutes leurs demandes, fins ou conclusions.

L'appelante soutient que la société Agea promotion a manqué à ses obligations contractuelles en n'engageant pas suffisamment d'actions de promotion et de communication du salon et plus particulièrement sur l'édition de 2015 alors qu'il ressortait du contrat et de la clause B.1 1.6 que les propres actions de la société Strucom devaient venir en complément de celles de la société Agea Promotion.

Elle fait également valoir que les inexécutions contractuelles de la société Agea promotion sont imputables à la fédération Agea, tiers au contrat. Elle considère que celle-ci avait la mainmise totale sur la 2e édition du salon professionnel qui n'était viable que s'il était porté par une fédération professionnelle. Elle lui reproche de ne pas avoir suffisamment incité les entreprises présentes dans son réseau professionnel et les syndicats verticaux pour que leurs compagnies mandantes participent au salon et d'avoir abandonné toute promotion du salon.

Elle soutient par ailleurs que la société Agea promotion et la fédération Agea ont agi de mauvaise foi et ont donc manqué à leur devoir de loyauté et de coopération dans l'exécution du contrat de prestation en organisant sans l'informer, une nouvelle opération directement concurrente du salon de l'assuré, " les samedis de l'assuré ", le même jour, s'adressant au même public et concernant les mêmes professionnels, les agents généraux qui étaient mobilisés pour cette manifestation, la fédération privilégiant ses intérêts à son détriment.

L'appelante fait valoir que la société Agea promotion et la fédération Agea doivent être condamnées au paiement de la rémunération forfaitaire et à l'indemnisation des préjudices qu'elle estime avoir subis.

Concernant la rémunération forfaitaire, elle fait valoir qu'elle a droit au titre du contrat et plus particulièrement de l'avenant 1 et 2 et de l'article C3 à une somme forfaitaire de 100 000 € en sus d'une participation de 70 % au résultat budgétaire. Elle conteste avoir bénéficié de cette somme, indiquant qu'elle ne s'est pas rémunérée sur les recettes du salon puisque, d'une part, un prélèvement à la source était exclu par le contrat, d'autre part, il a été impossible pour elle de se rémunérer, l'excédent des recettes sur les dépenses étant inférieur à 100 000 €, et qu'enfin n'étant qu'une charge calculée et ajoutée dans le résultat du salon, aucune rémunération forfaitaire ne lui a été versée.

L'appelante estime avoir subi un préjudice économique sur l'édition de 2015 en ce que le salon n'a pas été bénéficiaire en raison des manquements de la société Agea promotion et de la fédération Agea. Elle fait valoir que le résultat espéré sur l'édition de 2015 était de 50 000 € et demande donc à être indemnisée sur la base de ce montant.

L'appelante fait valoir qu'elle a droit à une indemnité de fin de contrat selon les termes de l'article D.3.1 du contrat, calculée par une moyenne sur les dernières participations aux résultats versées au prestataire majorée d'un coefficient multiplicateur de deux et demi. Elle demande que pour le calcul de cette indemnité, la somme forfaitaire de 100 000 € soit ajoutée au résultat positif de l'édition de 2014 et que pour l'édition 2015, soit pris en compte le bénéfice " hors forfait commercial " et réclame donc à titre principal la somme de 150 409,24 €. A titre subsidiaire l'appelante présente d'autres modes de calcul, d'une part, en tenant compte du résultat espéré pour l'édition de 2015 et, d'autre part, en écartant le résultat de l'édition de 2015.

Enfin, l'appelante fait valoir que le comportement déloyal de la société Agea promotion a affecté les négociations qu'elle entretenait avec la société Seroni interactive en vue d'une prise de participation, ce qui lui a causé une perte de chance de voir ces négociations aboutir et en sollicite l'indemnisation.

Elle explique avoir également subi un préjudice d'image en raison de l'échec du salon lors de la deuxième édition dont il convient de l'indemniser.

Par dernières conclusions notifiées et déposées le 30 août 2019, la fédération Agea et la société Agea promotion demandent à la cour de :

Confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 21 décembre 2017 en ce qu'il a :

- débouté la SARL Strucom désormais représentée par la SCP Btsg en la personne de Me Stéphane G., ès qualités de liquidateur judiciaire, de l'intégralité de ses demandes ;

- condamné la SARL Strucom désormais représentée par la SCP Btsg en la personne de Me Stéphane G., ès qualités de liquidateur judiciaire, à payer à la SA Agea Promotion la somme de 57 994 € en exécution du contrat de prestation de services conclu entre les parties, avec intérêts au taux légal à compter du 15 mars 2016 ;

- condamné la SARL Strucom désormais représentée par la SCP Btsg en la personne de Me Stéphane G., ès qualités de liquidateur judiciaire à payer à la fédération Agea la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts ;

- ordonné la publication du dispositif du jugement à intervenir dans deux journaux ou revues de leur choix et aux frais de la SARL Strucom désormais représentée par la SCP Btsg en la personne de Me Stéphane G., ès qualités de liquidateur judiciaire dans la limite de 4 000 € HT par insertion ;

- condamné la SARL Strucom désormais représentée par la SCP Btsg en la personne de Me Stéphane G., ès qualités de liquidateur judiciaire à leur payer la somme de 6 000 € chacune en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamné la SARL Strucom désormais représentée par la SCP Btsg en la personne de Me Stéphane G., ès qualités de liquidateur judiciaire aux dépens ;

- ordonné l'exécution provisoire de la décision.

Infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 21 décembre 2017 en ce qu'il a débouté la société Agea Promotion de :

- sa demande de paiement de la somme de 10 000 € à titre d'indemnité forfaitaire en réparation de la violation contractuelle commise par la société Strucom du fait de la reprise du Salon de l'Assuré par le Salon de l'Assurance ;

- sa demande indemnitaire à hauteur de 92 037,50 €, correspondant aux investissements engagés pour l'organisation des deux éditions du Salon de l'Assuré en réparation des faits de concurrence déloyale et parasitaire.

Infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 21 décembre 2017 en ce qu'il n'a pas statué sur les demandes de paiement formées par la société Strucom représentée par la SCP Btsg en la personne de Me Stéphane G., ès qualités de liquidateur judiciaire au titre du préjudice d'image prétendument subi du fait de l'insuccès du Salon de l'Assuré 2015, de l'échec des négociations avec la société Seroni dans le rachat de ses parts sociales et du remboursement des honoraires de l'agence Spokojny ;

Statuant à nouveau :

- débouter la société Strucom représentée par la SCP Btsg en la personne de Me Stéphane G., ès qualités de liquidateur judiciaire, de sa demande tendant à faire supporter par la société Agea Promotion la totalité des honoraires de l'agence Spokojny ;

- débouter la société Strucom représentée par la SCP Btsg en la personne de Me Stéphane G., ès qualités de liquidateur judiciaire de sa demande en réparation du préjudice d'image résultant de l'échec du Salon de l'Assuré 2015 ;

- débouter la société Strucom représentée par la SCP Btsg en la personne de Me Stéphane G., ès qualités de liquidateur judiciaire, de sa demande de réparation d'une prétendue perte de chance de négociations abouties avec la société Seroni interactive quant au rachat de ses parts sociales ;

- condamner la société Strucom représentée par la SCP Btsg en la personne de Me Stéphane G., ès qualités de liquidateur judiciaire, à verser à la société Agea Promotion la somme de 10 000 € en réparation de la violation du contrat réalisée par le lancement du Salon de l'Assurance ;

- condamner la société Strucom représentée par la SCP Btsg en la personne de Me Stéphane G., ès qualités de liquidateur judiciaire à verser à la société Agea Promotion la somme de 92 037,50 € en réparation des faits de concurrence déloyale et parasitaire ;

- condamner la société Strucom représentée par la SCP Btsg en la personne de Me Stéphane G., ès qualités de liquidateur judiciaire à la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamner la société Strucom représentée par la SCP Btsg en la personne de Me Stéphane G., ès qualités de liquidateur judiciaire aux entiers dépens dont distraction conformément à l'article 699 du Code de procédure civile ;

- fixer l'intégralité des condamnations qui seront prononcées au passif de la société Strucom représentée par la SCP Btsg en la personne de Me Stéphane G., es qualités de liquidateur judiciaire.

Les intimées font valoir que seule la société Agea promotion est partie au contrat litigieux, à l'exclusion de la fédération Agea qui est en conséquence tiers à ce dernier et n'a donc pas pu commettre de faute contractuelle au préjudice de la société Strucom.

Elles considèrent que la société Strucom ne démontre pas que la fédération Agea, tiers au contrat, a commis, en connaissance de cause, un acte ou un fait juridique qui contrevient au contrat et engageant sa responsabilité délictuelle.

Elles contestent le fait que la société Agea promotion ait commis un quelconque manquement aux obligations qui étaient les siennes dans le cadre de l'exécution du contrat de prestation de service.

Elles font valoir à ce titre que cette dernière était libre de ne pas renouveler le contrat sans avoir à en préciser le motif, qu'elle n'était pas contractuellement tenue d'une obligation de promotion du salon qui n'incombait qu'à la société Strucom en sa qualité de prestataire tel qu'il ressortait de l'article B1 du contrat, mais qu'elle s'est toutefois investie de manière significative dans la promotion du salon de l'assuré édition de 2015 et qu'elle n'est pas responsable de l'échec commercial de ce salon qui est dû au fait que les compagnies d'assurance n'ont pas été convaincues par leur première expérience du " Salon de l'assuré " et n'ont pas souhaité renouveler leur participation.

Elles font par ailleurs valoir qu'elles étaient libres d'organiser en province une manifestation " les samedis de l'assuré " destinée aux agents généraux d'assurance, différente du Salon de l'assuré, d'autant que l'objet social de la société Agea promotion est de mettre en œuvre des opérations de communication nécessaires à la promotion de la profession d'agent général d'assurance. Elles expliquent par ailleurs que le deuxième événement organisé n'était pas un événement concurrent mais au contraire une action de communication complémentaire.

Les intimées soutiennent par ailleurs que la rémunération forfaitaire de 100 000 € HT qui était due pour les années 2014 et 2015 à la société Strucom lui a déjà été payée. Elles font valoir que l'indemnité forfaitaire constituait une dépense du salon figurant dans le budget du salon (avenant n° 1 du 20 mai 2014). Elles soutiennent que cette rémunération n'avait pas à être versée à la société Strucom par la société Agea promotion mais que c'est à partir des recettes dégagées par le salon, encaissées par la société Strucom en qualité de gestionnaire financier du salon, que le paiement des dépenses était assuré en ce compris les factures des prestataires dont faisait partie la société Strucom qui se rémunérait directement sur les recettes du salon.

Les intimées contestent devoir indemniser la société Strucom des préjudices qu'elle estime avoir subis et résultant d'une violation contractuelle. D'une part, elles indiquent que le préjudice économique allégué n'est pas indemnisable en ce que le paiement d'un résultat hypothétique sur l'édition de 2015 ne constitue pas un préjudice réparable et, d'autre part, qu'il n'existe pas de lien de causalité entre le déficit commercial non justifié du salon de 2015 et une faute qu'elles auraient commise ; de sorte qu'en l'absence de ce lien toute réparation est exclue.

Elles contestent également qu'une somme soit due à la société Strucom au titre de l'indemnité de fin de contrat en ce que le montant de l'indemnité tel qu'il ressort du calcul prévu à l'article D.3 du contrat est nul, la moyenne des participations aux résultats étant négative. Elles objectent que le calcul de cette indemnité s'opère à partir du résultat net du salon et non du résultat de la société Strucom elle-même. Elles concluent également que le calcul de l'indemnité ne saurait reposer sur une donnée chiffrée déterminée unilatéralement par cette dernière et soutiennent que l'application de l'article D.3. du contrat ne saurait être écartée afin de prendre en compte le seul résultat final du Salon 2014.

Elles contestent également devoir réparer le préjudice invoqué par la société Strucom au titre d'un comportement déloyal, de la fin des pourparlers avec la société Seroni et enfin d'image, en ce que ce préjudice est dépourvu de tout fondement puisqu'elles n'ont commis aucun faute contractuelle ou délictuelle et qu'elles ne sont pas responsables de l'échec des négociations entre la société Strucom et la société Seroni.

A titre reconventionnel, elles vont valoir que la société Strucom leur est redevable de la somme de 57 994 € au titre de la compensation entre la somme de 18 757,20 € correspondant à la quote-part des pertes du salon à la charge de la société Agea promotion et la somme de 80 557,02 € due par la société Strucom au titre du remboursement de l'avance de trésorerie qui lui a été faite par la société Agea promotion.

Elles font également valoir qu'en dénonçant publiquement l'existence de la présente procédure judiciaire et en dénigrant ouvertement la société et la fédération Agea tant auprès des lecteurs de la Lettre de l'assurance que des exposants professionnels de l'assurance, la société Strucom a engagé sa responsabilité en portant atteinte à leur réputation professionnelle et à leur image ce dont il a résulté pour elles un préjudice dont elles sont bien fondées à solliciter la réparation. Elles estiment également que ce comportement constitue une violation de l'obligation de confidentialité à laquelle la société Strucom était tenue en application des dispositions du contrat.

Elles ajoutent que l'appelante en organisant un " salon de l'assurance ", identique au " salon de l'assuré ", profitant ainsi indûment des investissements réalisés par la société Agea promotion lors du lancement du premier salon public dédié à l'assurance, a violé l'obligation de non concurrence stipulée au contrat du 15 janvier 2014 et commis des actes de concurrence parasitaire lui causant un préjudice qui nécessite réparation.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux dernières conclusions signifiées conformément à l'article 455 du Code de procédure civile.

SUR CE,

1°) Sur les demandes de la société Strucom

- Sur les manquements reprochés à la société Agea promotion et à la fédération Agea au titre de la promotion du salon 2015

Le 15 janvier 2014, les sociétés Strucom et Agea promotion ont conclu un contrat de prestations de service dont il ressort du préambule que les parties sont convenues de " créer un salon à l'initiative des agents généraux d'assurance, ouvert au grand public, afin de lui apporter informations et conseils en matière d'assurance et, à cette occasion, mettre en avant la spécificité des agents généraux d'assurance ", que " c'est dans ce cadre que la société Agea promotion a décidé de créer le " Salon de l'Assuré ", manifestation renouvelable annuellement, la date du premier salon étant convenue pour le 15 novembre 2014, et d'en confier la gestion opérationnelle à la société Strucom ".

La société Strucom se fondant sur les dispositions de l'article B 1.1.6 du contrat, reproche à la société Agea promotion d'avoir abandonné toute promotion du salon de l'assuré édition 2015, notamment en ne faisant pas précéder ce salon comme en 2014 de la journée des agents généraux sur France Bleu, et en n'incitant pas les syndicats verticaux à ce que leur compagnie mandante participe au salon, manquements imputables à la Fédération Agea qui a unilatéralement décalé la journée des agents généraux d'assurance sur France Bleu deux jours avant le salon et s'est abstenue de faire la promotion du salon dans la lettre " Agea et vous " et d'adresser un kit de communication aux agents généraux.

Néanmoins, ainsi que l'a relevé pertinemment le tribunal, l'objet du contrat tel que défini à l'article B.1 est de fixer les modalités et conditions dans lesquelles le prestataire, c'est à dire la société Strucom, effectuera les prestations qui lui sont confiées par la société Agea promotion pour la réalisation du " Salon de l'assuré " qui consistent notamment à prendre en charge " la promotion du salon, notamment toutes publicités, conférences et communications à destination des exposants et visiteurs du salon sous quelque forme que ce soit (écrit ou oral, support papier ou internet) ; sont également inclues dans cette rubrique les éventuelles indemnisations des conférenciers " (article B 1.1.4) ainsi que " les relations avec la presse et le réseau professionnel de l'assurance et ce en complément de toutes actions engagées à ces titres par Agea promotion " (article B 1.1.6) et qu'il ne peut être déduit de ces dernières dispositions une obligation à la charge de la société Agea promotion de promouvoir le salon en cause, cette prestation incombant en vertu du contrat à la société Strucom, étant à cet égard relevé que la société Agea promotion établit par les éléments qu'elle fournit aux débats et notamment des comptes-rendus des comités de pilotage ad hoc mis en place en exécution de l'article B.4 du contrat pour prendre les décisions nécessaires à l'avancée du projet, qu'elle a investi dans la préparation du Salon édition 2015.

La société Strucom reproche également à la société Agea promotion, au titre du manquement à l'exécution de bonne foi du contrat, l'organisation d'une nouvelle opération " les samedis de l'assuré " le 14 novembre 2015, date arrêtée pour la tenue du " salon de l'assuré " 2015, qui s'adresse au même public, l'assuré, et au mêmes professionnels, les agents généraux d'assurance, manifestation qui aurait gravement compromis la deuxième édition du salon de l'assuré.

Selon les éléments fournis aux débats, la société Agea promotion a organisé le 14 novembre 2015 une manifestation intitulée " les samedis de l'assuré " dans 50 villes de province qui sont des matinées organisées dans des lieux publics (cafés, restaurants, boulangeries) où les agents généraux d'assurance sont à la rencontre du public pour le renseigner ou le conseiller.

Toutefois, outre que l'objet social de la société Agea promotion est notamment " la réalisation de toutes actions de promotion individuelle ou collective " concernant les agents généraux d'assurance, il ne ressort pas des dispositions du contrat en cause une interdiction pour celle-ci d'organiser un tel événement, la clause d'exclusivité prévue au I dudit contrat faisant interdiction à la seule société Strucom de souscrire un " engagement similaire pour des salons concurrents avec une autre société organisatrice tant en France qu'à l'étranger ".

En outre, il n'est nullement démontré par la société Strucom que l'organisation des " samedis de l'assuré' s'est faite au détriment du " salon de l'assuré ", la présentation de cette journée dans les articles de presse tels que fournis aux débats par l'appelante montrant que cette manifestation, loin d'être présentée comme concurrente au " salon de l'assuré " organisé à Paris, est considérée comme un complément de celui-ci, étant relevé avec les intimées que le préambule du contrat mentionne expressément que " Le salon de l'assuré sera précédé d'une " journée d'action et portes ouvertes " dans toute la France. Il est convenu que l'organisation de cette journée d'action n'entre pas dans le cadre de ce contrat ", ce qui contredit l'affirmation de l'appelante selon laquelle les " samedis de l'assuré " ont été organisés à son insu par la société Agea promotion en contravention de son obligation d'exécution loyale du contrat.

En conséquence, la société Strucom échoue à démontrer un manquement de la société Agea promotion à ses obligations nées du contrat du 15 janvier 2014.

La société Strucom fait également valoir que le comportement de la fédération Agea est à l'origine de l'échec du " Salon de l'assuré " 2015 et qu'elle a engagé sa responsabilité à ce titre.

Toutefois, il résulte de ce qui précède que la société Strucom n'établit aucun manquement de la société Agea promotion au titre du contrat qui les lie et ne prouve pas plus de faute de la fédération Agea qui aurait privilégié ses intérêts à son détriment. La circonstance que la fédération Agea a recouru à la société Spokojny consulting pour l'organisation des relations presse des " samedis de l'assuré ", société également retenue pour le " salon de l'assuré ", ne démontre nullement les allégations de l'appelante selon lesquelles la fédération a demandé à cette société " d'amalgamer " les deux événements auprès de la presse.

Aucun manquement contractuel de la société Agea promotion n'étant caractérisé, la société Strucom n'est victime d'aucun dommage né de l'inexécution du contrat et n'est pas fondée à rechercher la responsabilité délictuelle de la fédération Agea, tiers au contrat en cause, à qui elle impute l'origine de ce préjudice.

Aucune faute de la société Agea promotion comme de la fédération Agea n'étant caractérisée, la réparation des préjudices économiques et d'image sollicitée par la société Strucom en raison de l'échec du salon de l'assuré 2015 doit être rejetée.

De même, la société Strucom ne peut utilement revendiquer l'indemnisation d'un préjudice lié à l'échec des négociations entreprises avec la société Seroni pour le rachat de 100 de ses parts.

Les demandes de la société Strucom à ces titres sont rejetées.

- Sur les demandes en paiement

- Sur la rémunération forfaitaire de la société Strucom

La société Strucom fait valoir que selon les dispositions du contrat (article C1) elle a droit au titre de sa rémunération, outre les 70 % sur le résultat budgétaire, au paiement d'une somme forfaitaire de 100 000 € par an qu'elle n'a pas perçue. Elle soutient que n'étant qu'une charge calculée et ajoutée dans le résultat du salon, sa rémunération forfaitaire n'a pas été payée.

Selon les dispositions de l'article C1 du contrat du 15 janvier 2014, les parties conviennent d'un budget prévisionnel afin de s'accorder sur le prix de vente des stands et sur le niveau de dépenses qui devront être engagées pour la réalisation du présent contrat. Ce budget comporte les recettes et les dépenses prévisionnelles parmi lesquelles figure la rémunération forfaitaire du prestataire, l'article C3 précisant que le prestataire perçoit à titre de rémunération la somme forfaitaire de 100 000 € qui est incluse dans le budget au titre des dépenses et une participation de 70 % au résultat budgétaire.

Un avenant n° 1 a été conclu entre les parties dès le 20 mai 2014 qui annule et remplace la totalité du titre C et porte dans l'annexe 1 " budget prévisionnel pour 2014 " les recettes et dépenses retenues lors du comité de pilotage du 2 avril 2014. Cet avenant prévoit toujours une rémunération forfaitaire de 100 000 € pour la société Strucom et une répartition du résultat dans les proportions de 70 % pour la société Strucom et 30 % pour la société Agea promotion qui fera l'objet d'un règlement à la société Agea promotion par la société Strucom dans un délai d'un mois, précisant que la société Strucom assure le suivi financier du salon et dresse la récapitulatif des recettes encaissées et des dépenses réglées une fois par trimestre et que, si nécessaire, la société Agea promotion pourra procéder à une avance de trésorerie au bénéfice du prestataire dans la limite de 30 % des dépenses validées par le comité de pilotage, cette avance de trésorerie faisant l'objet d'une régularisation lors de l'établissement du bilan définitif. Le budget prévisionnel 2014 joint en annexe 1 de cet avenant prévoit des recettes à hauteur de 910 000 € et des dépenses d'un montant de 703 000 € en ce compris la rémunération forfaitaire de 100 000 € de la société Strucom.

Il s'infère de ce qui précède que la société Strucom a bien droit à une rémunération forfaitaire de 100 000 € par an en sa qualité de prestataire, que cette rémunération est d'ores et déjà imputée dans les charges du budget prévisionnel, le résultat du salon calculé rémunération forfaitaire du prestataire déjà déduite, étant réparti à 70 % pour la société Strucom et 30 % pour la société Agea promotion qu'il soit positif ou négatif.

Il résulte également qu'en plus de sa qualité de prestataire, la société Strucom assure en application de l'article B.1.7 du contrat, le suivi financier du salon et assure les dépenses du Salon comme elle en perçoit les recettes.

Aussi, comme le fait valoir la société Agea promotion, les dispositions qui précèdent ne mettent nullement à sa charge le versement du forfait de 100 000 € qui est budgétisé dans les dépenses et imputé sur les recettes du Salon dans le bilan.

A cet égard, le bilan du salon de l'assuré 2014 établi par la société Strucom prévoit que la somme de 699 589,73 € de dépenses, en ce compris le forfait de 100 000 €, est imputée sur les recettes du salon de 734 010 € pour obtenir un résultat de 34 420,27 € réparti à 70 % pour la société Strucom et 30 % pour la société Agea promotion.

De même, le bilan du salon de l'assuré 2015 fait état de recettes d'un montant de 411 170 € pour des dépenses de 476 576,89 €, incluant la rémunération forfaitaire du prestataire pour 100 000 €, soit un résultat déficitaire de -65 406,89 €.

La facture n° 14006 du 21 mai 2014 émise par la société Strucom à destination de la société Agea promotion pour un montant de 80 187,14 € de même que le versement en 2015 de la somme de 80 557,02 € TTC par la société Agea promotion à la société Strucom, concernent l'avance de trésorerie que peut faire la société Agea promotion en application du contrat, la société Strucom ayant restitué le 31 décembre 2014 l'avance de 2014 mais pas celle de 2015, ces paiements ne signifient donc pas que la société Agea promotion doit acquitter la rémunération forfaitaire de la société Strucom.

En effet, celle-ci en qualité de gestionnaire du bilan, assure le paiement des dépenses du salon en ce compris la rémunération forfaitaire qu'elle doit percevoir en qualité de prestataire, la circonstance qu'il n'y ait pas de flux financier à hauteur de 100 000 € en sa faveur étant indifférente, celle-ci ne contestant pas utiliser son compte bancaire pour percevoir les recettes du Salon qui servent à payer les dépenses y afférent en ce compris sa rémunération forfaitaire.

La société Strucom doit donc être déboutée de ses demandes au titre de la rémunération forfaitaire 2014 et 2015 qu'elle a déjà perçue.

- Sur l'indemnité de fin de contrat

Selon les dispositions de l'article D.3 du contrat en cause, la cessation d'exploitation du salon par la société Agea promotion, pour quelle que cause que ce soit sauf manquement grave du prestataire, ouvre droit pour ce dernier au versement d'une " indemnité hors taxe égale à la moyenne des trois dernières participations aux résultats versées au prestataire (ou des deux dernières ou de la dernière session dès lors que seules deux sessions ou une session du Salon se seraient déroulées à cette date) majorée d'un coefficient multiplicateur de deux et demi (2,5). "

La société Agea promotion a, conformément aux dispositions de l'article D1 du contrat, notifié par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 25 août 2015, soit quatre mois avant l'expiration de la période de renouvellement du contrat reconduit pour une durée d'un an jusqu'au 31 décembre 2015, son intention de ne pas prolonger le contrat.

Cette résiliation ouvre droit pour la société Strucom à une indemnité de fin de contrat qui est égale à la moyenne des deux participations aux résultats 2014 et 2015 de la société Strucom majorée d'un coefficient de 2,5. Il n'est pas discuté que la participation aux résultats du prestataire pour le salon 2014 est de 24 094 € (34 420 x 70 %) et celui de 2015, de -45 784,82 € (- 65 406,89 x 70 %). La moyenne de ces participations aux résultats étant négative (-10 845,41 €), aucune indemnité de fin de contrat n'est donc due par la société Agea promotion.

A cet égard, il n'est nullement établi par la société Strucom que son partenaire a œuvré pour que l'édition 2015 du Salon soit déficitaire notamment en faisant appel aux services de la société Spokojny consulting. La mauvaise foi alléguée mais non démontrée de la société Agea promotion dans l'exécution du contrat ne permet pas de prendre en compte les différents calculs proposés par l'appelante qui ne sont pas conformes aux stipulations claires et sans ambiguïté du contrat concernant le calcul de l'indemnité de fin de contrat.

La société Strucom sera également déboutée de sa demande à ce titre.

Le jugement entrepris est en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté la société Strucom de l'ensemble de ses demandes en ce compris ses demandes de dommages et intérêts.

2°) Sur les demandes de la société Agea promotion et de la fédération Agea

- Sur la demande en remboursement de l'avance de trésorerie

La société Agea promotion sollicite le remboursement de l'avance de trésorerie de 80 557,02 € TTC qu'elle a consenti à la société Strucom en application du contrat pour l'organisation de l'édition 2015 du salon de l'assuré.

La société Strucom ne conteste pas devoir cette somme mais fait valoir la compensation avec les sommes dont elle réclame le paiement.

La société Agea promotion reconnaît quant à elle devoir à la société Strucom la somme de 22 509 € TTC au titre de sa participation au résultat négatif du salon 2015.

Au vu de ce qui précède, il est fait droit à la demande en paiement de la société Agea promotion de la somme de 57 994 € TTC avec intérêt au taux légal à compter du 15 mars 2016, date de la mise en demeure.

- Sur les actes de dénigrement

Selon les dispositions de l'article 1382 du Code civil, dans sa version applicable à la présente espèce, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.

Le dénigrement est constitué par la divulgation d'une information de nature à jeter le discrédit sur un concurrent.

La société Agea promotion et la fédération Agea reprochent à la société Strucom des actes de dénigrement en ce que cette dernière a dénoncé la présente procédure auprès des professionnels de l'assurance.

Selon les éléments fournis au débat, il ressort que la société Strucom par la voie de son dirigeant M. Jacques de B. a, à l'occasion d'un article paru dans " La lettre de l'assurance " du 23 novembre 2015, évoqué outre ses relations personnelles tendues avec M. de V., président de la fédération Agea, la lettre de la société Agea du 25 août 2015 de résiliation du contrat qui la liait à la société Strucom, et dénoncé " de la part d'Agea un comportement que je qualifie de déloyal et que j'entends par conséquent faire apprécier par les tribunaux compétents " précisant " Attaquer en justice, demander réparation d'un préjudice que l'on estime avoir subi, c'est une décision grave qu'en plus de 40 ans de vie professionnelle je n'ai, heureusement, que très peu souvent prise ".

De même, dans un courriel adressé le 16 novembre 2015 à plusieurs exposants du salon de l'assuré 2015 tels le Gan ou Groupama, M. Jacques de B. gérant de la société Strucom revenant sur l'annulation du Salon à la suite des attentats du 13 novembre, évoque la détérioration de la relation avec son partenaire Agea, la résiliation par ce dernier du contrat de prestation de service par lettre du 25 août et la décision de la société Strucom de poursuivre la fédération des agents généraux devant la justice.

En dénonçant auprès des professionnels de l'assurance par voie de publication dans la presse ou par l'envoi d'un courriel type, un comportement déloyal de la société Agea promotion et de la fédération Agea et une action judiciaire qui n'a pas encore donné lieu à une décision de justice, la société Strucom a commis une faute engageant sa responsabilité, l'intimée ne pouvant utilement opposer la liberté d'expression s'agissant de l'article publié dans la lettre de l'assurance du 23 novembre 2015, cet article n'étant pas rédigé dans un esprit critique ou polémique mais uniquement pour mettre en avant le différend opposant la fédération Agea et la société Agea promotion à la société Strucom et la procédure judiciaire que cette dernière a décidé d'initier. Il en va de même du courriel circulaire qui n'a pas été adressé aux exposants pour la défense d'un intérêt légitime de la société Strucom, ne s'agissant pas d'une mise en garde en des termes mesurés mais de la dénonciation d'agissements supposés déloyaux et de l'action judiciaire qui en découle.

De même, il convient de considérer qu'en révélant les conditions dans lesquelles a été organisé le salon de l'assuré en 2015 et en révélant la lettre de résiliation du contrat du 15 janvier 2014 adressée par la société Agea promotion, la société Strucom n'a pas respecté l'obligation née de l'article J du contrat de prestation de service du 15 janvier 2014 selon lesquelles elle " s'engage à garder confidentielles toutes les informations, quels qu'en soient les supports, relatives au contrat et à l'exécution des prestations...tant pendant la durée du contrat qu'après sa résiliation pour quelque cause que ce soit ".

Au vu des éléments dont dispose la cour, de la diffusion de ces informations auprès d'un nombre significatif de professionnels via la lettre de l'assurance et le mail circulaire de la société Strucom, la réparation du préjudice des intimées inhérent aux actes de dénigrement par l'allocation, à chacune, de la somme de 5 000 € de dommages et intérêts outre la publication judiciaire ordonnée par les premiers juges, apparaît justifiée.

La décision déférée est en conséquence confirmée de ces chefs.

- Sur la violation du contrat et les actes de concurrence déloyale et de parasitisme en raison de l'organisation du " salon de l'assurance "

La société Agea promotion et la fédération Agea considèrent que la société Strucom en organisant le " salon de l'assurance ", a violé les dispositions du contrat et commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire.

Les intimées ne peuvent être suivies lorsqu'elles affirment que " en annonçant et en organisant un salon de l'assurance présentant les caractéristiques essentielles originales du salon de l'assuré, sans autorisation d'Agea promotion, la société Strucom a engagé sa responsabilité contractuelle en violant l'article H du contrat ".

En effet, si l'article H du contrat stipule que " le prestataire n'a aucun droit sur le salon ", la société Agea promotion n'en définit pas pour autant les droits dont elle dispose sur cette manifestation se contentant d'alléguer que la société Strucom ayant cherché, à la suite du non renouvellement du contrat, à obtenir gracieusement les droits d'Agea promotion sur le salon de l'assuré a reconnu " ainsi la propriété d'Agea promotion sur le salon de l'assuré ". Il convient de relever que le contrat prévoit seulement que " le prestataire s'engage à n'utiliser les marques, titres et noms commerciaux qu'Agea promotion met à sa disposition que dans le cadre du présent contrat. Le prestataire s'engage à interrompre l'utilisation qu'il aura faite de ces marques titres et noms commerciaux dès la fin du contrat, sans qu'aucune autre formalité soit nécessaire ", et qu'aucun manquement à ce titre n'est établi par les intimées, la fourniture aux débats de copies d'écran du site internet " lesalondelassurance.com " ne démontrant pas comme l'allèguent les intimées que ce site est accessible en saisissant les mots clés " salons de l'assuré " dans les moteurs de recherche.

Il convient de débouter la société Agea promotion de sa demande de dommages et intérêts fondée sur la violation du contrat.

En revanche, si l'organisation d'un salon consacré à l'assurance et ouvert au grand public est libre, il convient de relever que le " salon de l'assurance " organisé par la société Strucom s'est tenu en novembre 2016, soit à une période identique à celle du " salon de l'assuré " pour 2015, dans le même lieu " le Palais des congrès " dans le 17e arrondissement de Paris, sous un format très proche autour d'un espace d'échanges convivial, dynamique et ludique entre assureurs et assurés, de la gratuité des conseils, avec la proposition d'espaces thématiques et de packs pour les exposants leur offrant plus de visibilité. Les points de ressemblance entre les deux salons sont susceptibles de laisser penser au public qu'ils sont tous deux organisés par la même entité ou en accord avec cette dernière, créant ainsi un risque de confusion entre les deux manifestations, ce d'autant que le " salon de l'assurance " est présenté dans la brochure qui lui est dédiée comme la continuité du salon de l'assuré organisé par la société Strucom en partenariat avec Agea en 2014 puis 2015.

Le comportement déloyal de la société Strucom est caractérisé, celle-ci ayant cherché à créer un risque de confusion entre les deux salons et à s'approprier sans bourse délier les investissements commerciaux consacrés par la société Agea promotion pour l'organisation du " salon de l'assuré ", celle-ci ayant accordé des avances de trésorerie de plus de 80 000€ à la société Strucom pour l'organisation des éditions 2014 et 2015 du " salon de l'assuré " et prenant en charge le coût salarial de M. P. pour coordonner le comité de pilotage sur le plan de la communication.

Il s'infère nécessairement des actes de concurrence déloyale et parasitaire commis par la société Strucom un trouble commercial générant un préjudice économique pour la société Agea promotion qui selon les éléments dont dispose la cour, sera entièrement réparé par l'allocation de la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts, somme qui sera fixée au passif de la procédure collective de la société Strucom.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la société Agea promotion de dommages et intérêts à ce titre.

- Sur les autres demandes

Partie perdante, la société Strucom est condamnée aux entiers dépens d'appel et à payer à en application de l'article 700 du Code de procédure civile, une indemnité qui sera, en équité, fixée à la somme de 10 000 €.

Par ces motifs LA COUR, Confirme le jugement entrepris, sauf en sa disposition ayant débouté la société Agea promotion de sa demande de dommages et intérêts en réparation des actes de concurrence déloyale et parasitaire commis par la société Strucom à son préjudice ; Et statuant à nouveau sur ce chef, Fixe à la somme de 5 000 € la créance de la société Agea promotion au passif de la procédure collective de la société Strucom, au titre des dommages et intérêts dus en réparation des actes de concurrence déloyale et parasitaire commis par cette dernière, Y ajoutant, Déboute la SCP Btsg représentée par Me G., ès qualités de liquidateur de la société Strucom de l'ensemble de ses demandes de dommages et intérêts, Fixe les condamnations prononcées à l'encontre de la société Strucom au passif de la procédure collective, Vu l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la SCP Btsg représentée par Me G., ès qualités de liquidateur de la société Strucom, à la somme de 10 000 €, Rejette toute autre demande plus ample ou contraire, Condamne la SCP Btsg représentée par Me G., ès qualités de liquidateur de la société Strucom aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.