CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 8 janvier 2020, n° 18-07852
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Lépine Biomédical (SARL)
Défendeur :
Philips France Commercial (Sasu)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Avocats :
Mes Fromantin, Boccon-Gibod, Bretzner
FAITS ET PROCÉDURE
La société Lépine Biomédical est spécialisée dans la distribution de matériel biomédical depuis plus de trente ans.
La société Philips France Commercial, venant aux droits de la société Philips France, dans sa branche Healthcare, fabrique et commercialise des équipements et systèmes médicaux.
Depuis 2001, la distribution de certaines gammes de produits de la société Philips était assurée par la société Lépine Biomédical.
En décembre 2011, les sociétés Lépine Biomédical et Philips France Commercial ont signé un contrat prenant fin le 31 décembre 2012, prolongé par avenant jusqu'au 28 février 2014.
Le 19 décembre 2013, Philips France Commercial a résilié ce contrat avec effet au 30 juin 2015.
Le 1er octobre 2014, Philips France Commercial a annoncé sa décision d'internaliser dans son organisation la distribution de la gamme de produits " maternité " pour laquelle Lépine Biomédical avait fait des propositions ; Philips France Commercial a alors confirmé la fin du préavis au 30 juin 2015, ce que Lépine Biomédical a contesté.
Sur assignation de la société Lépine Biomédical, par acte du 22 septembre 2015, le tribunal de commerce de Paris, par jugement du 19 mars 2018 a :
- pris acte de l'intervention volontaire de Me X ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Lépine Biomédical ;
- dit que la relation entre les parties présente bien le caractère d'une relation commerciale établie et ce, pendant 30 ans ;
- dit que le préavis accordé de 18,5 mois est suffisant et que la rupture des relations n'est pas brutale ;
- débouté Me X ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Lépine Biomédical de sa demande de dommages et intérêts à ce titre ;
- débouté Me X ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Lépine Biomédical de sa demande de dommages et intérêts au titre de la déloyauté dans la rupture ;
- condamné Me X ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Lépine Biomédical à payer à la société Philips France Commercial la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du CPC ;
- débouté les parties de leurs autres demandes, fins et prétentions ;
- condamné Me X ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Lépine Biomédical aux dépens, lesquels seront employés en frais de liquidation judiciaire, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 82,44 euros dont 13,52 euros de TVA.
Le 13 avril 2018, Maître X, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Lépine Biomedical, a interjeté appel de ce jugement.
La société Philips France Commercial en a interjeté appel incident.
Vu les dernières conclusions de Me X, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Lépine Biomedical, déposées et notifiées le 20 septembre 2019, par lesquelles il est demandé à la cour de :
Vu les articles L. 110-3 et L. 442-6 I 5° (ancien) du Code de commerce,
Vu l'article 1134 (ancien) du Code civil,
Vu les pièces versées aux débats,
Vu le jugement dont appel,
Statuant sur l'appel incident de la société Philips France :
- débouter la société Philips France Commercial de ses demandes incidentes, à savoir :
* dire et juger que la " rupture " de la relation commerciale litigieuse résulte d'un accord intervenu entre les parties, de sorte qu'elle ne saurait donner prise à l'article L. 442-6 I 5° (ancien) du Code de commerce ;
* infirmer sur ce point le jugement entrepris en ce qu'il a admis l'existence d'une rupture unilatérale de la relation litigieuse imputable à Philips France Commercial ;
Subsidiairement,
- dire et juger que Le pine Biomédical ne démontre pas l'existence d'une relation commerciale " établie " depuis 1984, de sorte que le préavis de 18,5 mois qui lui a été accordé de façon effective par Philips France Commercial constitue un préavis suffisant au regard du droit positif ;
- infirmer sur ce point le jugement entrepris en ce qu'il a admis que la relation litigieuse constituait une relation commerciale " établie " depuis 30 ans ;
Plus subsidiairement encore,
- dire et juger qu'aucune rupture " brutale " n'est intervenue en l'espèce de la part de Philips France Commercial puisque Lépine Biomédical est parvenue, avant la fin du préavis litigieux, à substituer au flux d'affaires qui existait avec Philips d'autres sources de chiffre d'affaires ;
- confirmer en conséquence le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que le préavis accordé de 18,5 mois était suffisant et que la rupture litigieuse n'était pas brutale, étant observé que Lépine Biomédical n'a quant à elle pas honoré ses obligations les plus élémentaires puisqu'elle s'est abstenue de régler les factures de Philips France Commercial à hauteur de 884 308,41 euros en principal ;
- dire et juger que Lépine Biomédical n'administre pas la preuve d'un préjudice indemnisable à l'encontre de Philips France Commercial ;
- la débouter en conséquence de ses demandes d'indemnisation ;
- condamner Lépine Biomédical, représentée par son Liquidateur Judiciaire, à s'acquitter d'une somme de 30 000 euros entre les mains de Philips France Commercial au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- la condamner aux entiers dépens.
Statuant sur l'appel principal de Maître X ès qualités :
- déclarer recevable et bien fondé l'appel principal de Maître X en qualité de liquidateur judiciaire de la société Lépine Biomédical des chefs de jugement suivants :
En ce que le tribunal a :
* dit que le préavis accordé de 18,5 mois est suffisant et que la rupture des relations n'est pas brutale ;
* déboute Me X ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Lépine Biomédical de sa demande de dommages et intérêts à ce titre ;
* condamne Me X ès qualités à payer à la société Philips France la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du CPC, ainsi que les entiers dépens ;
* déboute Me X ès qualités de ses demandes, fins et prétentions [rappelées dans la déclaration d'appel] ;
En conséquence,
- réformer le jugement pour chacun des chefs mentionnés ci-avant ;
Et statuant à nouveau,
- dire et juger que le préavis notifié par la société Philips France Commercial à la société Lépine Biomédical pour rompre le contrat est insuffisant ;
- dire et juger que cette insuffisance de préavis caractérise une rupture brutale de relations commerciales établies ;
- dire et juger que le préavis suffisant aurait dû être de 30 mois ;
En conséquence,
- condamner la société Philips France Commercial à payer à Me X, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Lépine Biomédical, la somme de 1 399 391,87 euros en principal, assortie des intérêts au taux légal à compter du jour de la demande ;
- subsidiairement sur ce point, condamner la société Philips France à payer à Me X, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Lépine Biomédical, la somme de 1 205 521,87 euros en principal, assortie des intérêts au taux légal à compter du jour de la demande ;
- donner acte à la société Lépine Biomédical qu'elle s'en rapporte à Justice sur la demande de compensation formulée par la société Philips France Commercial ;
- débouter la société Philips France Commercial de toutes demandes, fins et prétentions contraires ;
- condamner la société Philips France Commercial à payer à Me X, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Lépine Biomédical, la somme de 50 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile au titre de la première instance et de 10 000 euros au titre de la présente instance ;
- condamner la société Philips France Commercial aux entiers dépens de l'instance.
Vu les dernières conclusions de la société Philips France Commercial, intimée, déposées et notifiées le 18 septembre 2019, par lesquelles il est demandé à la cour de :
Vu l'article L. 442-6 I 5° (ancien) du Code de commerce ;
Vu l'article L. 622-7 I du Code de commerce ;
- dire et juger irrecevable et mal fondé l'appel formé par Lépine Biomédical à l'encontre de Philips France Commercial ;
- l'en débouter ;
- dire et juger recevable et fondé l'appel incident interjeté par Philips France Commercial ;
Y faisant droit,
Sur l'impossibilité pour Lépine Biomédical d'invoquer une faute résultant d'une " rupture brutale de relation commerciale établie "
- dire et juger que la " rupture " de la relation commerciale litigieuse résulte d'un accord intervenu entre les parties, de sorte qu'elle ne saurait donner prise à l'article L. 442-6 I 5° (ancien) du Code de commerce ;
- infirmer sur ce point le jugement entrepris en ce qu'il a admis l'existence d'une rupture unilatérale de la relation litigieuse imputable à Philips France Commercial.
Subsidiairement,
- dire et juger que Lépine Biomédical ne de montre pas l'existence d'une relation commerciale " établie " depuis 1984, de sorte que le préavis de 18,5 mois qui lui a été accordé de façon effective par Philips France Commercial constitue un préavis suffisant au regard du droit positif ;
- infirmer sur ce point le jugement entrepris en ce qu'il a admis que la relation litigieuse constituait une relation commerciale " établie " depuis 30 ans ;
Plus subsidiairement encore,
- dire et juger qu'aucune rupture " brutale " n'est intervenue en l'espèce de la part de Philips France Commercial puisque Lépine Biomédical est parvenue, avant la fin du préavis litigieux, à substituer au flux d'affaires qui existait avec Philips France Commercial d'autres sources de chiffre d'affaires ;
- confirmer en conséquence le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que le préavis accordé de 18,5 mois e tait suffisant et que la rupture litigieuse n'était pas brutale, étant observé que Lépine Biomédical n'a quant à elle pas honoré ses obligations les plus élémentaires puisqu'elle s'est abstenue de régler les factures de Philips France Commercial à hauteur de 884 308,41 euros en principal ;
Sur l'absence de préjudice indemnisable susceptible d'être allégué par Lépine Biomédical :
- dire et juger que Lépine Biomédical n'administre pas la preuve d'un préjudice indemnisable à l'encontre de Philips France Commercial ;
- la débouter en conséquence de ses demandes d'indemnisation ;
Très subsidiairement,
- dire et juger qu'il existe un lien de connexité entre la créance détenue par Philips France Commercial à l'encontre de Lépine Biomédical, laquelle résulte d'un jugement définitif du tribunal de commerce de Nanterre du 21 juillet 2017 et l'éventuelle créance indemnitaire susceptible d'être reconnue au profit de Lépine Biomédical ;
- ordonner la compensation entre la créance de 884 308,41 euros en principal (au titre des factures impayées), celle de 47 569,94 euros (au titre des intérêts capitalisés), celle de 355,07 euros (au titre des intérêts calculés), celle de 695,88 euros (au titre des frais de procédure), celle de 338,24 euros (au titre des émolument A444-31 du Code de commerce), celle de 6 482,44 euros (au titre des dépens et frais avancés), et celle de 8 000 euros (au titre de l'article 700 du Code de procédure civile).
- débouter Lépine Biomédical de toutes demandes, fins et prétentions contraires ;
En tout état de cause,
- fixer la créance d'un montant de 30 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile au passif de Lépine Biomédical, représentée par son Liquidateur Judiciaire ;
- fixer les entiers dépens au passif de Lépine Biomédical, représentée par son Liquidateur Judiciaire
SUR CE LA COUR
Sur la rupture brutale des relations commerciales établies entre les parties
Sur les relations commerciales établies
L'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce dispose dans sa version applicable à l'espèce, qu'engage sa responsabilité et s'oblige à réparer le préjudice causé, celui qui rompt brutalement une relation commerciale établie, sans préavis tenant compte de la durée de la relation commerciale.
Une relation commerciale " établie " présente un caractère " suivi, stable et habituel " et permet raisonnablement d'anticiper pour l'avenir une certaine continuité du flux d'affaires entre les partenaires commerciaux, ce qui implique, notamment qu'elle ne soit pas entachée par des incidents susceptibles de remettre en cause sa stabilité, voire sa régularité.
Philips soutient que Lépine ne démontre pas l'existence d'une relation commerciale " établie " depuis 1984.
Elle soutient ainsi que l'existence de flux stables, réguliers et significatifs avec ses 3 cocontractants successifs n'est pas justifiée puisque notamment il n'existe pas de données chiffrées entre 1984 et 1993 et que l'attestation du commissaire aux comptes (pièce 30-1 de Lépine) n'est pas pertinente en ce que ce dernier n'a procédé à aucune vérification exhaustive et fait état de chiffres différents.
Cependant, Maître X és qualités, qui fait valoir que la relation entre Lépine et Philips a pris racine en 1984, la société Lépine assurant la distribution exclusive de produits médicaux commercialisés successivement par les sociétés Hewlett Packard à partir de 1984, Agilent à partir de 1999, puis Philips à partir de 2001, démontre l'existence, la stabilité, la continuité de ces relations ainsi que leur caractère significatif par :
- le message adressé le 12 juin 2003 aux clients par Philips elle-même, d'où il résultait que la société Lépine Biomédical exerçait la commercialisation de ses produits médicaux sur la région Centre-Est et Sud-Est de la France depuis 1984 (pièce 57 de Lépine),
- le préambule du dernier contrat de distribution signé au mois de janvier 2012 entre les parties faisant mention de ce partenariat commercial, indiquant à cet égard que Lépine " distribue et assure la promotion, depuis plus de 25 ans de diverses gammes de dispositifs médicaux commercialisés successivement par les sociétés Hewlett-Packard, Agilent et, à ce jour, Philips " (pièce 1 de Lépine),
- par la production des attestations de salariés (pièces 34,35, 36 et 56), des éléments comptables (récapitulatif des achats entre 1993 et 2002 pièce 31, tableau récapitulatif des ventes pièce 30) et des listes de produits et matériels de la marque Hewlett Packard vendus et installés dans les hôpitaux à compter de 1984 (pièces 33,32), établissant notamment un développement de l'activité avec l'attribution de la région PACA en plus de la région Rhône-Alpes et la mise en place d'une équipe dédiée, des ventes par Lépine en progression passant de 1 282 000 euros en 1993 à 3 743 000 euros en 2002,
- le chiffre d'affaires de Lépine avec Philips de 2010 et 2014 oscillant entre 3 599 243 euros et 4 408 655 euros, représentant entre 54 % et 62 % du chiffre d'affaires total de la société (attestation du commissaire aux comptes de la société établie à partir du document " Données commerciales Lépine Biomédical 2010-2014 " pièce 28), la circonstance que le chiffrage retenu par le commissaire aux comptes présente un écart de 2 % du total des ventes ainsi que le relève justement le tribunal, étant sans incidence sur la pertinence de l'interprétation du tableau produit par Lépine,
Il s'ensuit que l'existence de relations commerciales établies entre les parties depuis l'année 1984 est retenue.
Sur l'existence d'une rupture unilatérale
Philips France Commercial (Philips) oppose l'impossibilité pour Lépine Biomédical (Lépine) d'invoquer une faute résultant d'une " rupture brutale de relation commerciale établie " en ce que ladite " rupture " résulte d'un accord intervenu entre les parties ne pouvant donner lieu à application de l'article L. 442-6, I, 5° (ancien) du Code de commerce.
Elle soutient que ce n'est qu'à l'issue d'un accord intervenu entre elles, après la notification faite à Lépine en décembre 2013, que les relations se sont rompues. Elle fait état à cet égard de l'avenant au contrat de distribution conclu le 21 février 2014 prorogeant la durée du contrat jusqu'à la fin de la période de préavis.
Cependant, ainsi que le fait valoir Maître X és qualités, il résulte de la lettre recommandée du 19 décembre 2013 adressée à Lépine reçue le lendemain que la rupture a été décidée unilatéralement par Philips, laquelle faisant état de sa décision de réorganiser son réseau de distribution, indiquait :
" Par conséquent, par la présente, comme nous vous l'avons indiqué au cours de cette réunion, nous mettons un terme à nos relations commerciales. Nos deux sociétés étant liées par un contrat de distribution jusqu'au 28 février 2014, la rupture de nos relations commerciales prendra effet au 30 juin 2015 soit un préavis de 18 mois.
Nous vous ferons parvenir courant janvier un projet d'avenant au contrat dans lequel les conditions commerciales pour la durée du préavis seront applicables ".
La seule signature par Lépine d'un tel avenant prévoyant notamment que :
" Le contrat est renouvelé [sic] la durée du préavis et prendra fin le 1er juillet 2015, terme extinctif de droit " n'est pas de nature à établir la preuve de l'accord de Lépine sur la décision de rompre.
A cet égard, Philips n'est pas fondée à limiter ses relations commerciales avec Lépine au contrat de distribution signé entre les parties le 28 décembre 2011 qui aurait pris fin au terme contractuel du 1er juillet 2015 alors qu'elle entretenait des relations commerciales établies avec cette société depuis 1984.
Dès lors l'existence d'une rupture unilatérale de Philips est établie.
Sur la brutalité de la rupture
Lépine invoque un préavis insuffisant au regard de l'ancienneté de la relation, du caractère prépondérant des produits Philips dans son chiffre d'affaires et de sa marge, l'absence de solution alternative de reconversion, l'importance économique des produits Philips sur le marché en cause et la notoriété de sa marque, l'obligation d'exclusivité maintenue par Philips durant toute la durée du préavis, l'impossibilité de déployer des moyens humains et financiers au profit d'une quelconque reconversion. Elle estime qu'un préavis de 30 mois aurait dû lui être accordé et soutient que le préavis n'a commencé à courir que le 1er octobre 2014, date à laquelle Philips lui a annoncé sa décision d'internaliser la distribution de la gamme de produits maternité.
Mais si Philips ne peut se prévaloir du caractère prévisible de la rupture en invoquant le caractère déterminé du contrat ainsi qu'il a été dit, cette société objecte pertinemment que le préavis a débuté le 16 voire le 19 décembre 2013, en réalité le 20 décembre 2013, date de la réception de la résiliation adressée à la société Lépine, et qu'il a bien duré un peu plus de 18 mois, en réalité 18 mois et 11 jours (et non 18 mois et demi), que Lépine ne démontre pas en quoi elle aurait mérité un préavis plus long pour se réorganiser, alors qu'elle ne se trouvait pas en situation de dépendance économique, puisque si une part significative de son chiffre d'affaires (54 % en 2013) était réalisé avec Philips, elle n'établit l'absence de solution alternative pour maintenir l'activité de l'entreprise.
En effet, Lépine ne justifie pas de démarches entreprises au cours de délai pour rechercher d'autres fournisseurs alors qu'il existait des concurrents directs de Philips et ainsi d'autres partenaires commerciaux. En outre, le maintien de l'exclusivité au cours du délai de préavis est indifférent, puisqu'elle avait la possibilité de commercialiser d'autres produits que ceux de Philips.
De même, la circonstance qu'elle ait consacré du temps à élaborer un dossier en vue d'assurer la distribution de la gamme maternité pour Philips sur toute la France n'est pas de nature à reporter le point de départ du délai de préavis au 1er octobre 2014, date à laquelle Philips lui a fait connaître sa décision d'internaliser la production de la gamme de produits maternité alors que le courriel du 7 mai 2014 produit (sa pièce 6) disant que " notre entreprise correspondait parfaitement à la société devant assurer une parfaite gestion de Philips sur la France " émane de Lépine elle-même. Sa décision de candidater pour prendre en charge une distribution nationale des " Gammes dédiées " de Philips alors qu'elle n'avait aucune assurance d'être retenue, ne l'empêchait pas de rechercher d'autres partenaires.
Le jugement entrepris est confirmé en ce qu'il a dit que Lépine ne s'était pas rendu coupable d'une rupture brutale, étant observé que le tribunal a justement relevé que la durée d'un préavis ne saurait se confondre avec une indemnité de fin de contrat, calculée mécaniquement en nombre de mois par rapport à la durée de la relation.
Sur la déloyauté de la rupture
Aucune critique du jugement n'étant formulée à cet égard bien que l'appel interjeté par Lépine vise cette disposition, le jugement sera également confirmé de ce chef.
Sur l'article 700 du Code de procédure civile
L'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de Philips en cause d'appel laquelle succombe en son appel incident et au profit de Maître X és qualités qui succombe en son appel.
Par ces motifs LA COUR, Confirme le jugement, sauf à préciser que le préavis suffisant qui a été accordé a été de 18 mois et 11 jours. Y ajoutant, Déboute la société Philips France Commercial de sa demande tendant à voir " dire et juger que la " rupture " de la relation commerciale litigieuse résulte d'un accord intervenu entre les parties, de sorte qu'elle ne saurait donner prise à l'article L. 442-6. I. 5° (ancien) du Code de commerce " ; Condamne Maître X, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Lépine Biomedical aux dépens d'appel ; Rejette les demandes présentées en cause d'appel au titre de l'article 700 du Code de procédure civile