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Décisions

CA Versailles, 3e ch., 23 janvier 2020, n° 18-07717

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

SLC (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Boisselet

Conseillers :

Mmes Bazet, Derniaux

TGI Chartres, 1re ch., du 24 oct. 2018

24 octobre 2018

FAITS ET PROCEDURE

Le 13 avril 2012, M. et Mme S. ont acquis auprès de la société Garage SLC une caravane neuve de marque Burstner modèle Averso Plus 440 TK pour la somme de

22 512,50 euros.

Les acquéreurs ont constaté une usure anormale des pneumatiques puis de l'essieu.

Par décision du 7 octobre 2016, une expertise a été ordonnée par le juge des référés et l'expert a déposé son rapport le 6 mars 2017.

Par acte du 19 avril 2017, M. et Mme S. ont assigné la société Garage SLC devant le tribunal de grande instance de Chartres en résolution de la vente.

Par jugement du 24 octobre 2018, le tribunal a :

- débouté M. et Mme S. de leurs prétentions,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné in solidum M. et Mme S. aux dépens

Par acte du 13 novembre 2018, Mme S. a interjeté appel et demande à la cour, par dernières écritures du 28 janvier 2019, de :

A titre principal :

- constater que la caravane de marque Burstner modèle Averso plus 440 TK vendue par le garage SLC est affectée d'un vice caché.

A titre subsidiaire :

- constater le manquement du garage SLC à son obligation d'information et de conseil,

En tout état de cause,

- prononcer la résolution de la vente conclue le 13 avril 2012,

- condamner le garage SLC à payer à M.et Mme Mme S. la somme de 22 512,50 euros en restitution du prix de vente, avec intérêt au taux légal à compter de la date de la vente,

- dire que le garage SLC reprendra possession de la caravane en l'état et à ses frais,

- condamner le garage SLC à leur payer la somme de 1 072,06 euros au titre des frais exposés pour la vente,

- condamner le garage SLC à leur payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner le garage SLC aux entiers dépens,

- " ordonner de ces chefs l'exécution provisoire "

Par dernières écritures du 1er mars 2019, la société Garage SLC demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris

- rejeter les demandes de M. et Mme S.,

- condamner in solidum M. et Mme S. à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner in solidum M. et Mme S. aux entiers dépens et ce conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 octobre 2019.

SUR QUOI LA COUR

Le tribunal a retenu que le poids de la caravane était très proche du poids total autorisé en charge, si bien que cette caravane n'était quasiment pas utilisable sans être en surcharge, le poids de 1 360 kg étant dépassé même dans le cadre d'un usage normal et que la charge utile prévue - soit 210 kg) - était insuffisante.

Le tribunal a jugé que cette situation ne saurait caractériser un vice caché, la caravane n'étant pas en elle-même atteinte d'un vice, mais un défaut de conformité. Il a rappelé que, par application des dispositions de l'article L. 211-12 devenu article L. 217-12 du Code de la consommation, l'action résultant du défaut de conformité se prescrivait par deux ans à compter de la délivrance du bien. Il a observé que le bien avait été livré le 14 avril 2012, que la première des actions en justice avait été nécessairement engagée postérieurement au 15 avril 2014, même si l'assignation n'avait pas été versée aux débats, puisque l'ordonnance de référé avait été rendue le 7 octobre 2016, de sorte que la prescription était acquise.

S'agissant de la demande en résolution de la vente fondée sur le manquement du vendeur à son obligation d'information et de conseil, le tribunal a jugé que l'une des

clauses du contrat précisait que le poids de tout accessoire monté en option diminuait d'autant la charge utile, observant que même si les caractères utilisés n'étaient pas de grande taille, ils étaient bien visibles en bas de page et qu'il y était renvoyé à côté de la mention relative aux suppléments demandés, de sorte qu'il était aisé aux acquéreurs de constater que les divers équipements qu'ils commandaient étaient à prendre en compte car diminuant le poids utile de la caravane, le premier juge ajoutant que les acquéreurs n'étaient pas novices car ils avaient déjà possédé une caravane.

Mme S. affirme que lorsque, par l'ajout d'équipements, le vendeur a tellement diminué la charge utile du véhicule qu'il l'a rendu impropre à son usage, il s'agit d'un vice caché et non d'un défaut de conformité. Elle rappelle que l'expert judiciaire a relevé qu'avec les équipements et options choisis, la charge utile restante n'était plus que de 80 kg, ce qui était insuffisant pour une utilisation normale de cette caravane, prévue pour 6 couchages.

L'appelante affirme que le vice était caché en ce que son vendeur n'a, à aucun moment, averti les acquéreurs du poids des équipements et accessoires et des désordres qui en résulteraient. Elle soutient que la caravane était affectée au jour de la vente de défauts cachés diminuant tellement son usage qu'elle et son époux ne l'auraient pas acheté s'ils en avaient eu connaissance.

Subsidiairement, l'appelante soutient que son vendeur supporte une obligation de conseil qui lui impose de se renseigner sur les besoins de l'acheteur et de l'informer de l'adéquation du matériel proposé à l'utilisation qui en est prévue. Elle affirme que la société Garage SLC aurait dû les avertir de l'incompatibilité de l'installation de ces options et accessoires, compte-tenu de l'usage envisagé de la caravane.

La société Garage SLC réplique que l'insuffisance alléguée ne peut que constituer une non-conformité du véhicule aux spécifications convenues entre les parties et non un vice caché, et que l'action est prescrite.

S'agissant du manquement à l'obligation de conseil, l'intimée souligne que cette obligation a été respectée par l'apposition d'une mention figurant sur le bon de commande et que l'usage de la caravane n'est nullement compromis.

Il sera tout d'abord observé que seule Mme S. a interjeté appel du jugement entrepris, de sorte que ses demandes tendant à ce que la société Garage SLC soit condamnée à " leur " payer diverses sommes ne peuvent s'entendre que comme le fruit d'une erreur matérielle et que les demandes formées par la société Garage SLC à l'encontre de M. S. ne sont pas recevables.

Il est de principe que constitue un vice caché le vice non apparent qui rend la chose impropre à l'usage auquel on la destine et que constitue un défaut de conformité le bien ne répondant pas aux spécifications contractuelles convenues entre les parties.

Le poids à vide de la caravane tel que mentionné au certificat de conformité est de

1 150 kg et le poids total autorisé en charge est de 1 360 kg, soit une charge utile de 210 kilos. Lors de la pesée du véhicule, effectuée contradictoirement, celui-ci a affiché un poids de 1 240 kilos et de 1 280 kilos si on ajoute l'auvent, soit une charge utile restante de 80 kilos. Les acquéreurs n'ont pas contesté la conformité de la caravane par rapport à son poids à vide. La différence entre ce poids à vide et le poids affiché résulte de l'ajout d'accessoires et d'options demandé par les acquéreurs, représentant un poids de 90 kilos, laissant ainsi une charge utile complémentaire de 80 kilos.

L'insuffisance de charge utile alléguée par M.et Mme S. constituerait donc un éventuel défaut de conformité aux spécifications contractuelles et non pas un vice caché, étant observé qu'il n'est fait nulle démonstration d'une impropriété à destination.

Aux termes de l'article L. 211-12 du Code de la consommation dans sa rédaction applicable lors de l'acquisition, l'action résultant du défaut de conformité se prescrit par deux ans à compter de la délivrance du bien (délai qui n'a pas été modifié par l'article nouveau L. 217-12).

Le tribunal a à bon droit jugé que même si l'assignation devant le juge des référés n'était pas versée aux débats - et ne l'est pas davantage devant la cour - l'ordonnance de référé a été rendue le 7 octobre 2016, de sorte qu'à l'évidence aucun acte interruptif de prescription n'avait été fait avant le 15 avril 2014, date de l'expiration du délai de deux ans.

Le bon de commande du 3 décembre 2011 détaille les suppléments demandés et renvoie en bas de page à la mention suivante : " le poids de tout accessoire monté en option diminue d'autant la charge utile ", clause suffisamment lisible et explicite.

Le vendeur a donc suffisamment informé les acquéreurs que la charge utile serait diminuée du fait de la mise en place des accessoires ajoutés. Ainsi que le souligne l'intimée, la caravane n'est pas un véhicule destiné à transporter des personnes, sa charge utile peut être diminuée au profit de l'installation d'options, les acquéreurs faisant alors le choix de transporter des équipements et des effets personnels dans ou sur le véhicule tractant la caravane.

Le jugement sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions.

Mme S., qui succombe, sera condamnée aux dépens d'appel avec recouvrement direct et versera à la société Garage SLC une indemnité de procédure de 2 000 euros en remboursement de ses frais irrépétibles d'appel.

Par ces motifs LA COUR Statuant par arrêt contradictoire, Déclare irrecevables les demandes formées par la société Garage SLC à l'encontre de M. S. Confirme le jugement en toutes ses dispositions. Y ajoutant Condamne Mme S. à payer à la société Garage SLC la somme de 2 000 euros en remboursement de ses frais irrépétibles d'appel. Condamne Mme S. aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.