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Décisions

Cass. soc., 29 janvier 2020, n° 18-17.651

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Eismann (SAS)

Défendeur :

Roussignol

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Schamber

Rapporteur :

Mme Thomas-Davost

Avocats :

SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel

Rouen, ch. sociale, du 29 mars 2018

29 mars 2018

LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 29 mars 2018), que M. Roussignol a été engagé par la société Eismann, le 2 juin 2009, en qualité de voyageur représentant placier (VRP) ; que licencié le 7 novembre 2014, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le salarié n'a pas le statut de VRP et de le condamner à lui verser certaines sommes au titre d'heures supplémentaires et de congés payés afférents ainsi que des dommages-intérêts pour repos compensateur, alors, selon le moyen : 1°) que l'application du statut de VRP dépend uniquement de l'activité réellement exercée par le salarié ; que si l'existence d'un secteur fixe de prospection est un des éléments essentiels du contrat de VRP, la stipulation d'une clause du contrat de travail permettant à l'employeur de modifier ledit secteur n'est pas de nature, à elle seule, à exclure l'application du statut de VRP s'il apparaît, dans les faits, que ce secteur n'a fait l'objet d'aucune modification au cours de l'exécution du contrat de travail ; que, dès lors, en se bornant à énoncer, en l'espèce, qu'il résulte du contrat de travail conclu par les parties que si un secteur était contractuellement défini, l'employeur se réservait la possibilité de le modifier, pour en déduire que M. Roussignol n'exerçait pas des fonctions de VRP, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par les conclusions d'appel de l'employeur, développées oralement à l'audience, si, au cas particulier, le secteur géographique mentionné au contrat de travail n'était pas demeuré inchangé durant toute la durée d'exécution dudit contrat, la cour d'appel, qui se détermine par un motif inopérant, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 7311-3 du Code du travail ; 2°) que l'application du statut de VRP dépend uniquement de l'activité réellement exercée, et relève de ce statut le salarié qui prend des ordres et a la faculté de prospecter, créer et développer une clientèle, sans se borner à prendre les commandes des seuls clients indiqués par l'employeur ; qu'en l'espèce, pour décider que M. Roussignol n'exerçait pas des fonctions de VRP, la cour d'appel s'est bornée à relever que selon le contrat de travail, le salarié ne disposait d'aucune indépendance dans l'organisation et l'exercice de son travail, lequel était contingenté à la prise d'ordre, dans le cadre de tournées organisées par l'employeur, et que ce travail se limitait à la remise de la marchandise aux clients contre encaissement du prix et restitution quotidienne de la recette à l'entreprise ; qu'en statuant ainsi, sans examiner ni même viser le document produit par l'employeur, et mentionné dans ses conclusions d'appel développées oralement à l'audience démontrant qu'au cours de l'exécution de son contrat de travail, le salarié avait été à l'initiative du développement de la clientèle, en prenant les ordres de 79 nouveaux clients en 2009, 92 nouveaux clients en 2010, 55 nouveaux clients en 2011 et 33 nouveaux clients de janvier à juillet 2012, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ; 3°) que l'application du statut de VRP dépend uniquement de l'activité réellement exercée et que relève de ce statut le salarié qui prend des ordres et a la faculté de prospecter, créer et développer une clientèle, sans se borner à prendre les commandes des seuls clients indiqués par l'employeur ; qu'en l'espèce, pour décider que M. Roussignol n'exerçait pas des fonctions de VRP, la cour d'appel s'est bornée à relever que selon le contrat de travail, le salarié ne disposait d'aucune indépendance dans l'organisation et l'exercice de son travail, lequel était contingenté à la prise d'ordre, dans le cadre de tournées organisées par l'employeur, et que ce travail se limitait à la remise de la marchandise aux clients contre encaissement du prix et restitution quotidienne de la recette à l'entreprise ; qu'en statuant ainsi, sans répondre au chef péremptoire des conclusions d'appel de l'employeur, développé oralement à l'audience, faisant valoir non seulement que l'annexe 7 du contrat de travail prévoyait le versement au salarié d'une prime " nouveaux clients ", mais encore que dans les faits l'intéressé avait pris les ordres de nouveaux clients pendant toute la durée d'exécution de son contrat de travail, ainsi qu'en atteste un document interne de l'entreprise, régulièrement produit au débat, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant relevé que le salarié ne disposait d'aucune indépendance dans l'organisation et l'exercice de son travail, que son rôle était limité à la prise d'ordres, dans le cadre de tournées organisées par l'employeur, avec remise de la marchandise aux clients, contre encaissement du prix et restitution de la recette chaque jour à l'entreprise, que la tâche de livraison n'était pas accessoire, la remise de marchandises étant concomitante à la commande, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, ni de s'expliquer sur les éléments de fait et de preuve qu'elle écartait, a pu, abstraction faite du motif surabondant critiqué à la première branche, en déduire que le salarié, qui exerçait à titre principal des fonctions de vendeur-chauffeur-livreur, ne relevait pas du statut de VRP ; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs, LA COUR : Rejette le pourvoi.