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ADLC, 21 novembre 2019, n° 19-DCC-210

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

Relative à la prise de contrôle conjoint du fonds de commerce du magasin sous enseigne Géant Casino situé à La Chapelle-sur-Erdre par M. Claret et par la société Coopérative U Enseigne

ADLC n° 19-DCC-210

21 novembre 2019

L'Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 17octobre 2019, relatif à la prise de contrôle conjoint du fonds de commerce de détail sous enseigne Géant Casino exploité à La Chapelle-sur-Erdre par M. Pascal Claret et par la société Coopérative U Enseigne, formalisée par une promesse unilatérale d'achat en date du 24 septembre 2019 et une lettre d'intention en date du 15 octobre 2019 ; Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Vu les éléments transmis par les parties notifiantes au cours de l'instruction ; Adopte la décision suivante :

I. Les entreprises concernées et l'opération

1. Coopérative U Enseigne est une société anonyme coopérative détenue par les sociétés coopératives centrales régionales du groupe Système U et leurs administrateurs, personnes physiques. Elle a notamment pour objet d'acheter des marchandises auprès de fournisseurs et de les revendre à ses associés commerçants indépendants, chacun propriétaire de leur magasin, qui exploitent les magasins à enseignes Hyper U, Super U, Marché U, Express U et Utile.

2. M. Claret détient [...] % du capital de la société Holding PCMB qui, à travers ses différentes filiales, exploite un verger agricole ainsi qu'un magasin sous enseigne Super U situés à Carquefou (44).

3. Le fonds de commerce cible de l'opération est un magasin de commerce de détail à dominante alimentaire exploité sous enseigne Géant Casino, d'une surface de 6 026 m² et comprenant une station-service, situé à La Chapelle-sur-Erdre (44) (ci-après la "cible ").

4. L'opération, formalisée par une promesse d'achat en date du 24 septembre 2019 et une lettre d'intention en date du 15 octobre 2019, consiste en l'acquisition, via la société New Co, un véhicule d'acquisition créé à cet effet et dont le capital et les droits de vote seront détenus par deux actionnaires contrôlants, la société Holding PCMB (à hauteur de [...] %) et la société Expan U Ouest (à hauteur de [...] %) ainsi que par trois personnes physiques actionnaires non- contrôlants (à hauteur de [...] % au total), du fonds de commerce cible. En ce qu'elle se traduit par la prise de contrôle conjointe du magasin cible, l'opération notifiée constitue une concentration au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce.

5. Les entreprises concernées exploitent un ou plusieurs magasins de commerce de détail et ont réalisé ensemble lors du dernier exercice un chiffre d'affaires total sur le plan mondial de plus de 75 millions d'euros (Coopérative U Enseigne : [= 75 millions] d'euros ; PCMB : [=75millions] d'euros ; Cible : [= 75 millions] d'euros). Les entreprises concernées réalisent en France dans le secteur du commerce de détail un chiffre d'affaires supérieur à 15 millions d'euros (Coopérative U Enseigne : [= 15 millions] d'euros pour l'exercice clos ; PCMB : [=15millions] d'euros ; Cible : [= 15 millions] d'euros). Compte tenu de ces chiffres d'affaires, l'opération ne relève pas de la compétence de l'Union européenne. En revanche, les seuils de contrôle relatifs au commerce de détail mentionnés au point II de l'article L. 430-2 du Code de commerce sont franchis. La présente opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du Code de commerce relatifs à la concentration économique.

II. Délimitation des marchés pertinents

6. Selon la pratique constante des autorités nationale (1) et européenne (2) de concurrence, deux catégories de marchés peuvent être délimitées dans le secteur de la distribution à dominante alimentaire : d'une part, les marchés aval, de dimension locale, qui mettent en présence les entreprises de commerce de détail et les consommateurs pour la vente de biens de consommation et, d'autre part, les marchés amont de l'approvisionnement sur lesquels les entreprises en tant qu'acheteurs sont en contact avec les fabricants des produits, de dimension nationale.

A. LES MARCHÉS AMONT DE L'APPROVISIONNEMENT

7. En ce qui concerne les marchés de l'approvisionnement, les autorités de concurrence (3) retiennent l'existence de marchés de dimension nationale par grands groupes de produits.

8. Il n'y a pas lieu de remettre en cause cette délimitation à l'occasion de la présente opération.

B. LES MARCHÉS AVAL DE LA DISTRIBUTION DE DÉTAIL À DOMINANTE ALIMENTAIRE

1. LES MARCHÉS DE PRODUITS

9. En ce qui concerne la vente au détail des biens de consommation courante, la pratique décisionnelle de l'Autorité (4) distingue six catégories de commerce en retenant plusieurs critères, notamment la taille des magasins, leurs techniques de vente, leur accessibilité, la nature du service rendu et l'ampleur des gammes de produits proposés : (i) les hypermarchés (d'une surface de vente supérieure à 2 500 m²), (ii) les supermarchés (magasins à dominante alimentaire d'une surface de vente inférieure à 2 500 m² et supérieure à 400 m²), (iii) le commerce spécialisé, (iv) le petit commerce de détail (moins de 400 m²), (v) les maxi discompteurs, (vi) la vente par correspondance.

10. Les autorités de concurrence (5) considèrent que, si chaque catégorie de magasins conserve sa spécificité, il existe une concurrence asymétrique entre certaines de ces catégories. Elles distinguent ainsi :

- un marché comprenant uniquement les hypermarchés ;

- un marché comprenant les supermarchés et les formes de commerce équivalentes (hypermarchés, hard-discount et magasins populaires) hormis le petit commerce de détail (moins de 400 m²).

11. Il n'y pas lieu de remettre en cause ces définitions dans le cadre de la présente opération.

2. MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES

12. Dans ses décisions relatives à des opérations concernant des hypermarchés ou des supermarchés, l'Autorité de la concurrence a rappelé que deux types de marchés sont usuellement distingués, sur la base des zones de chalandise (6):

- un premier marché où se rencontrent la demande des consommateurs d'une zone et l'offre des hypermarchés auxquels ils ont accès en moins de 30 minutes de déplacement en voiture et qui sont, de leur point de vue, substituables entre eux ;

- un second marché où se rencontrent la demande de consommateurs et l'offre des supermarchés et formes de commerce équivalentes, situés à moins de 15 minutes de temps de déplacement en voiture. Ces dernières formes de commerce peuvent comprendre, outre les supermarchés, les hypermarchés situés à proximité des consommateurs et les magasins discompteurs.

13. D'autres critères peuvent néanmoins être pris en compte pour évaluer l'impact d'une concentration sur la situation de la concurrence sur les marchés de la distribution de détail, ce qui peut conduire à affiner, au cas d'espèce, les délimitations usuelles présentées ci-dessus.

14. Au cas d'espèce, le fonds de commerce cible entrant dans la catégorie des hypermarchés, l'analyse concurrentielle sera menée d'une part, sur le marché incluant les hypermarchés, les supermarchés et formes de commerce équivalentes situés dans un rayon de 15 minutes de temps de trajet en voiture autour du magasin cible et, d'autre part, sur le marché incluant uniquement les hypermarchés dans un rayon de 30 minutes de temps de trajet en voiture autour du magasin cible.

III. Analyse concurrentielle

15. Sur les marchés amont de l'approvisionnement, l'opération, qui concerne le changement de contrôle d'un seul magasin sous une enseigne concurrente, n'est pas susceptible de renforcer la puissance d'achat du groupement Système U, tous produits confondus comme par grand groupe de produits, dans la mesure où le magasin cible représente un poids négligeable au niveau national.

16. Sur le marché aval de la distribution alimentaire comprenant les supermarchés et formes de commerces équivalentes situés dans une zone de 15 minutes en voiture, le groupement Système U détiendra [20-30] %des surfaces de ventes de la zone ([5-10] % pour le magasin cible).

17. Les magasins sous enseigne Système U dans la zone de chalandise feront toutefois face à la concurrence de plusieurs autres points de vente, notamment sous enseignes Leclerc ([20- 30] %), Carrefour ([20-30] %), Auchan ([5-10] %), Intermarché ([5-10] %), Lidl ([0-5] %), Casino ([0-5] %) et Aldi ([0-5] %).

18. Sur le marché aval de la distribution alimentaire comprenant les hypermarchés situés dans une zone de chalandise de 30 minutes en voiture, le groupement Système U détiendra [30-40] % des surfaces de ventes de la zone ([0-5] % pour le magasin cible).

19. La nouvelle entité fera par ailleurs face à la concurrence de plusieurs hypermarchés concurrents, sous enseignes Leclerc (30-40] %), Carrefour (10-20] %), Auchan ([10-20] %), Intermarché ([0-5] %) et Casino ([0-5] %).

20. Compte tenu de ce qui précède, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés aval de la distribution à dominante alimentaire dans les zones de chalandises concernées par l'opération.

DÉCIDE

Article unique : L'opération notifiée sous le numéro 19-263 est autorisée.

NOTES

1 Voir notamment la décision de l'Autorité de la concurrence n° 14-DCC-173 du 21 novembre 2014 relative à l'a prise de contrôle de la société Dia France SAS par la société Carrefour France SAS, la décision n° 17-DCC-231 du 27 décembre 2017 relative à la prise de contrôle conjoint par la famille Zouari aux côtés du groupe Casino de 125 magasins de commerce de détail à dominante alimentaire et la décision n° 19-DCC-73 précitée.

2 Voir notamment les décisions de la Commission européenne M.1221, Rewe/Meinl du 3 février 1999 et M.1684, Carrefour/Promodès du 25 janvier 2000.

3 Voir notamment la décision de la Commission européenne M.1221 précitée et la décision n° 11-DCC-45 du 18 mars 2011 relative à l'acquisition du contrôle exclusif du fonds de commerce de l'hypermarché Cora Desmarais par la société Sodex Desmarais.

4 Voir notamment la décision de l'Autorité de la concurrence n° 13-DCC-90 du 11 juillet 2013 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Monoprix par la société Casino Guichard-Perrachon.

5 Id.

6 Ibid.

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