CA Colmar, 1re ch. civ. A, 12 février 2020, n° 18-03889
COLMAR
Arrêt
PARTIES
Défendeur :
Bureau d'Etudes Marketing (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Roublot
Conseiller :
M. Frey
Avocat :
Me Weygand
Le 22 octobre 2017, M. X et Mme X ont passé commande, à l'occasion du salon " Maison et travaux " de Strasbourg, auprès de la SARL Bureau d'études marketing d'une cuisine au prix de 16 000 euros ; un acompte de 1 000 euros était versé à la commande. Le même jour, un chèque de 5 400 euros correspondant à un second acompte sera établi.
Par courrier du 6 novembre 2017, M. et Mme X ont sollicité la restitution des acomptes versés.
Par acte d'huissier du 19 décembre 2017, ils ont saisi le tribunal de grande instance de Strasbourg d'une action dirigée contre la SARL Bureau d'études marketing tendant à obtenir l'annulation, subsidiairement la résolution du contrat et la condamnation de la SARL défenderesse, outre aux entiers frais et dépens, à leur rembourser les acomptes versés, majorés d'une somme de 3 200 euros et des intérêts au taux légal à compter du 6 novembre 2017, capitalisés par années entières, ainsi qu'une indemnité de 2 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par jugement du 16 août 2018, le tribunal de grande instance de Strasbourg a, déboutant M. et Mme X de l'ensemble de leurs demandes, condamné ces derniers outre aux entiers dépens, à verser à la SARL Bureau d'études marketing une indemnité de 1500 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
M. et Mme X ont interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe en date du 5 septembre 2018.
L'intimée a constitué avocat le 8 octobre 2018.
Dans leurs dernières conclusions en date du 9 octobre 2018, auxquelles il est expressément référé pour l'exposé de l'intégralité de leurs moyens et prétentions, M. et Mme X entendent voir infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et statuant à nouveau voir :
Annuler le contrat signé le 22 octobre 2017 en raison de manœuvres et réticences dolosives ainsi que de pratiques commerciales déloyales et agressives,
Subsidiairement
Prononcer la résolution de ce contrat aux torts exclusifs de la SARL Bureau d'études marketing,
Annuler ledit contrat en raison de la violation de l'obligation précontractuelle d'information par le professionnel,
En tout état de cause
Condamner la SARL Bureau d'études marketing à leur verser la somme de 6 400 euros majorée de celle de 3 200 euros et des intérêts au taux légal à compter de la sommation du 6 novembre 2017,
Condamner la SARL Bureau d'études marketing à leur verser la somme de 3 000 euros en indemnisation de leur préjudice né des pratiques commerciales déloyales et agressives ainsi que des manœuvres et réticences dolosives, majorée des intérêts au taux légal à compter du 6 novembre 2017 et capitalisés par années entières,
Débouter la SARL Bureau d'études marketing de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
Condamner la SARL Bureau d'études marketing outre aux entiers frais et dépens des deux instances à leur verser une indemnité de 4 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Au soutien de leurs prétentions, ils entendent faire valoir qu'outre l'acompte versé à la commande, un représentant de la SARL Bureau d'études marketing s'est présenté à leur domicile le même jour pour obtenir, par chèque, un second acompte de 5 400 euros, lequel n'aurait dû être versé qu'au jour de la livraison, prévue par le bon de commande entre le 3 et le 28 septembre 2018. Ils soulignent que ce chèque sera encaissé immédiatement après leur demande de restitution des acomptes versés.
Ils soutiennent que la SARL Bureau d'études marketing s'est livrée à des pratiques commerciales trompeuses, constitutives d'un dol lors de la conclusion du contrat de vente alors que leur étaient dissimulées ou fournie de manière inintelligible, ambiguë ou à contretemps, une information substantielle. Ainsi en serait-il de la mention des délais de livraison, dans une clause qu'ils affirment abusive, alors que ces délais seraient imprécis et déraisonnables et ce dans le seul but de les laisser le plus longtemps possible dans l'ignorance de l'aboutissement du contrat, tout en ayant obtenu un acompte conséquent. Ils affirment également abusive, la clause qui prévoit leur engagement ferme et définitif alors qu'aucun métré n'avait été pris avant la signature du contrat.
Ils soutiennent, au visa de l'article L. 122-11-1 du Code de la consommation, avoir fait l'objet de pratiques commerciales agressives, que le bon de commande litigieux aurait été établi à la hâte, toujours sans aucun métré et sur simple présentation d'un catalogue qui ne mentionnait nullement le prix des meubles ; ainsi ils affirment n'avoir pas pu analyser sereinement l'offre qui leur était soumise.
Ils soutiennent également que le contrat serait nul pour absence de cause ou de contenu certain alors qu'il mentionne une entreprise qui n'existe pas et qu'aucun métré ni plan technique des installations n'ont été préalablement réalisés au regard des contraintes existantes pour l'implantation des éléments de cuisine.
De même et subsidiairement sur la résolution du contrat, ils entendent faire valoir, au visa de l'article L. 111-1 du Code de la consommation et 1112-1 du Code civil que la SARL Bureau d'études marketing a manqué à son obligation d'information précontractuelle en leur faisant signer un bon de commande mentionnant l'installation de plusieurs éléments mobiliers sans aucun métré et sans s'être rendue sur les lieux, et par suite sans s'assurer qu'ils étaient adaptés à leurs besoins et à la configuration de leur cuisine. Ils expliquent avoir cherché conseil auprès d'un autre cuisiniste, lequel aurait évalué les travaux complémentaires au contrat signé, résultant de l'adaptation des arrivées électriques et canalisations sanitaires et de chauffage, à un surcoût de 7 000 à 8 000 euros par rapport au devis.
Ils reprennent les mêmes demandes s'appuyant sur une erreur de leur part provoquée par les manœuvres et réticences dolosives de leur cocontractant.
Enfin, ils soulignent qu'aucun commencement d'exécution de la cuisine, ni seulement plan ou encore choix d'un modèle définitif n'ont été réalisés et entendent subsidiairement voir retenir une exception d'inexécution, justifiant également la résolution du bon de commande aux torts exclusifs de la SARL Bureau d'études marketing.
Ils réclament en conséquence le remboursement des acomptes versés majorés d'un montant de 50 % en application des dispositions de l'article L. 241-4 du Code de la consommation, outre l'indemnisation de leurs préjudices engendrés par les manœuvres dolosives et pratiques commerciales déloyales.
Dans ses dernières conclusions en date du 23 octobre 2018, auxquelles il est expressément référé pour l'exposé de l'intégralité de ses moyens et prétentions, la SARL Bureau d'études marketing entend :
In limine litis voir constater l'irrecevabilité des conclusions d'appel des époux X,
Au fond, voir confirmer le jugement entrepris et débouter les consorts X de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions,
Voir condamner M. et Mme X outre aux entiers frais et dépens, à lui verser une indemnité de 2 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions, elle entend faire valoir, au visa combiné des articles 542 et 954 du Code de procédure civile, que les appelants n'auraient développé à hauteur d'appel aucune argumentation nouvelle, se bornant à reprendre leurs écritures de première instance et ce, sans critiquer les motifs du premier juge. Elle soutient également n'avoir aucunement été destinataire de leurs pièces.
Au fond, elle souligne que les époux X ont leur pleine capacité juridique et n'allèguent pas n'avoir pas été en mesure de comprendre la portée de leurs engagements. Ainsi le bon de commande qu'ils ont signé n'étant susceptible d'aucune rétractation, tel qu'il le mentionne, en caractère lisible et apparent, en conformité avec les dispositions de l'article L. 121-97 du Code de la consommation, ils ont accepté le contrat en pleine connaissance de cause et en ont signé chaque page. Elle souligne en tout état de cause, que les demandes présentées s'apparentent à la reconnaissance d'un consentement vicié, les pratiques commerciales déloyales ou trompeuses étant constitutives d'un dol.
Elle relève avec le premier juge que tant le bon de commande que le plan de la cuisine ont été approuvés, M. X y mentionnant " bon pour fabrication ". Ainsi elle souligne que les appelants avaient une parfaite connaissance des caractéristiques essentielles du contrat en conformité avec les dispositions de l'article L. 111-1 du Code de la consommation, le bon de commande répondant à toutes les exigences légales.
Elle soutient que la mention du délai de livraison, en l'espèce entre le 3 et le 28 septembre, n'a aucun caractère imprécis constitutif d'une pratique commerciale trompeuse qui les aurait induit en erreur.
Elle ajoute que les époux X sont dans l'impossibilité de démontrer que l'inexécution du contrat lui serait imputable alors qu'il ne l'ont jamais mise en demeure de l'exécuter et ont, a contrario, manifesté leur intention d'en obtenir l'annulation ou la résolution. En tout état de cause, elle relève que les époux X ne justifient pas du préjudice qu'ils allèguent.
L'instruction du dossier a été close par ordonnance du 25 janvier 2019 et l'affaire retenue à l'audience du 4 décembre 2019 à laquelle les parties ont développé leurs argumentations et déposé leurs pièces.
MOTIFS :
Sur les exceptions de procédure :
Aux termes de l'article 954 du Code de procédure civile les conclusions d'appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l'article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé.
Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.
La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. À défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées.
La partie qui conclut à l'infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu'elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance.
La partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.
En l'espèce il convient de rappeler que dans leur déclaration d'appel les époux X ont entendu solliciter l'annulation, l'infirmation voire la réformation du jugement attaqué, s'agissant de l'ensemble de ses dispositions.
Dans leurs conclusions récapitulatives ci-dessus rappelées ils ont développé leurs moyens et prétentions au soutien de leur demandes, la critique des motifs du premier juge n'étant pas un préalable nécessaire à la recevabilité de leur action de même qu'aucun texte ne leur fait obligation de faire valoir de nouveaux moyens. En outre, s'agissant de la communication des pièces versées aux débats, les appelants affirment sans être contredits avoir régularisé leur communication. En tout état de cause le conseiller de la mise en état n'a jamais été saisi d'un quelconque incident, de sorte que les conclusions d'appel des époux X doivent être considérées comme recevables.
Sur la validité du contrat :
M. et Mme X affirment que le bon de commande qu'ils ont signé serait nul pour avoir été accompagné précédé ou suivi de pratiques commerciales trompeuses et agressives
En premier lieu il convient de souligner que les articles L. 121-1 et suivant du Code de la consommation définissant les contours d'une pratique commerciale trompeuse et les articles L. 122-11 du même Code définissant une pratique commerciale agressive ont été abrogés à la date du 1er juillet 2016 et ne peuvent trouver à s'appliquer au contrat en litige comme ayant été conclu le 22 octobre 2017.
Ces définitions sont aujourd'hui reprises dans le livre Ier, titre II et chapitre Ier du Code de la consommation sous la dénomination de pratiques commerciales interdites. En outre la sanction des pratiques trompeuses, de nature délictuelle, est fixée au jour de la conclusion du contrat par les articles L. 132-1 et suivant du même Code, aucun texte ne prévoyant la nullité du contrat.
S'agissant de pratiques commerciales agressives, leur régime est fixé, au jour de la conclusion du contrat, par les articles L. 121-6 et suivant et se définit par le fait de sollicitations répétées et insistantes ou de l'usage d'une contrainte physique ou morale, de nature à altérer ou vicier le choix ou le consentement d'un consommateur ou d'entraver l'exercice de ses droits contractuels.
Les époux X entendent se prévaloir des dispositions de l'article L. 121-1-1 du Code de la consommation, devenu L. 121-7 et affirment qu'ils ont eu l'impression qu'ils ne pourraient quitter les lieux avant qu'un contrat n'ait été conclu. Ils relèvent à ce titre que de telles pratiques émanant d'autres cuisinistes ont déjà été sanctionnées par la nullité du bon de commande signé et entendent faire valoir qu'à l'occasion du salon " Maison et travaux " de Strasbourg la société bureau d'étude marketing aurait " arraché " leur signature sur un bon de commande établi à la hâte, sans aucun métré et sur simple présentation d'un catalogue général de décoration. Ils soutiennent ainsi n'avoir pu analyser sereinement l'offre qui leur était soumise, alors que l'adéquation entre le mobilier vendu et leur cuisine constitue l'élément déterminant de leur achat, laquelle serait loin d'être assurée par les seuls plans et cotation sommaires fournis lors de la conclusion du contrat.
A l'exception d'exemples jurisprudentiels illustrant la sanction précitée, ils n'apportent aucun élément au soutien de leurs allégations ; le bon de commande signé par eux comporte le détail des meubles proposés assortis de leurs prix unitaires de même que les éléments d'électroménager choisis ou autres accessoires de la cuisine. En outre un plan côté " vu de dessus " de la cuisine projetée a été réalisé et M. X y a apposé sa signature en suite de la mention " bon pour fabrication ". Ces éléments, ainsi que l'énonçait le premier juge sont insuffisants pour caractériser une pratique commerciale agressive.
Les époux X s'appuient également sur les dispositions de l'article 1128 du Code civil, dans sa version applicable au jour de la conclusion du contrat, qui énonce que sont nécessaires à la validité d'un contrat notamment un contenu licite et certain.
Ils font valoir notamment à ce titre que le bon de commande mentionne une entreprise qui n'existe pas qu'aucun métré ni plan technique des installations n'ont été effectués au regard des contraintes existantes pour l'implantation des éléments de cuisine.
Il n'est pas contesté que l'adresse de la SARL Bureau d'études marketing à Strasbourg ne constitue en réalité qu'une boîte postale mais le bon de commande rappelle l'adresse du siège de l'entreprise, par ailleurs mentionné sur son timbre humide porté sur le contrat, de sorte qu'aucune nullité ne peut découler de cet état de fait. En outre l'objet du contrat était assurément la fourniture d'une cuisine intégrée ; il comprenait la description des meubles et éléments d'électroménager commandés et un plan côté selon les indications nécessairement fournies par les époux X. Ainsi le contenu du contrat, en l'espèce l'objet de la commande était déterminé entre les parties.
Subsidiairement les époux X entendent faire valoir la nullité du contrat pour manquement par la SARL Bureau d'études marketing à ses obligations d'informations précontractuelles. Ils s'appuient sur les dispositions des articles 1112-1 ensemble 1583 du Code civil et L. 111-1 du Code de la consommation pour faire valoir que la cuisine projetée et objet du devis qu'ils ont accepté n'aurait pas pu être installée telle que présentée.
L'article 1112-1 du Code civil, dans sa version applicable depuis le 1er octobre 2016, dispose que celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.
(...)
Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.
Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d'information peut entraîner l'annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants.
De surcroît l'article L. 111-1 du Code de la consommation, énonce qu'avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel lui communique de manière lisible et compréhensible notamment les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné.
Enfin l'article 1583 du Code civil dispose que la vente est parfaite dès que l'on est convenu de la chose et du prix.
En l'espèce il est constant que M. X a apposé sur le plan qui lui était soumis, la mention " bon pour fabrication " et que les parties ont, ensemble, signé le bon de commande en litige. Cependant les époux X font à nouveau valoir que ce bon de commande ne s'appuie sur aucun relevé de côtes par le vendeur, professionnel en l'espèce, et sans vérifier que les meubles proposés étaient adaptés aux volumes, aux caractéristiques de leur cuisine et aux difficultés techniques résultants de la présence d'éléments existants.
La SARL bureau d'étude marketing a toujours entendu se prévaloir d'une commande stipulée ferme et définitive, ayant pris soin de mentionner en entête de son bon de commande, dans un encadré distinct de la commande elle-même, l'absence de tous droits de rétractation du consommateur, conformément aux dispositions des articles L. 224-59 et suivant du Code de la consommation.
En outre il est constant qu'elle s'est toujours opposée à accepter la résolution amiable du contrat, les époux X ayant effectivement dès le 6 novembre 2017 sollicité par courrier officiel le remboursement de leurs acomptes et faits valoir leurs griefs quant au contrat conclu, ils n'ont, a contrario de ce que développe l'intimée pas évoqué un droit de rétractation.
En tout état de cause, l'examen du bon de commande en litige permet de constater qu'y figure à titre de remarques finales, outre que le prix pouvait varier jusqu'à la date de livraison du matériel, prévue par le contrat près d'un an après la commande mais surtout que la date d'installation de la cuisine ne sera validée définitivement qu'après " passage d'un métreur sur place et finalisation du projet à notre magasin ".
Il est ainsi établi et même reconnu par la SARL Bureau d'études marketing qu'une prise de mesure était indispensable à domicile avant fabrication des meubles, de sorte que la mention " bon pour fabrication " rédigée par M. X se trouve privée de force et d'effets.
Il découle nécessairement des clauses précitées que la faisabilité du projet pouvait se trouver remise en perspective par la prise effective des métrés par un professionnel.
Cet état de fait est par ailleurs confirmé par l'attestation de M. Y, cuisiniste sollicité par les époux X pour étudier la faisabilité du projet présenté par la SARL Bureau d'études marketing. Ce dernier expose qu'il s'est rendu sur les lieux, pour se rendre compte que d'importants travaux de plomberie, sanitaire, électricité et chauffage seraient indispensables pour parvenir à la mise en place de la cuisine projetée par la SARL Bureau d'études marketing. Il en a chiffré le surcoût à une somme de 7 000 à 8 000 euros, relevant notamment la présence d'un radiateur à l'endroit où était prévue la mise en place d'un meuble.
Il est dès lors manifeste que la SARL Bureau d'études marketing, en sa qualité de professionnelle, n'a nullement étudié les besoins réels de ses clients, ni ne s'est attachée à vérifier si les éléments mobiliers qu'elle vendait pouvaient être réellement implantés dans leur cuisine, étant rappelé que la vente a été conclue hors de leur domicile. Elle n'a ainsi tenu aucun compte des contraintes liées aux installations existantes et au surcoût qu'elles engendreraient pour installer les éléments mobiliers. Elle s'est uniquement contentée de formaliser à distance un plan théorique d'implantation de plusieurs meubles pour faire conclure aux époux X un contrat juridiquement irrévocable, ce dont elle ne manquera pas de se prévaloir, en encaissant en outre de manière totalement déloyale un acompte qui n'était contractuellement exigible qu'au jour de la livraison.
Ainsi il y a lieu de constater que la SARL Bureau d'études marketing s'est montrée défaillante en ses obligations. En leur imposant un contrat ferme et définitif portant sur une installation de meubles qui ne correspondait pas aux particularités du lieu choisi par eux et par suite à leurs attentes, elle ne n'a pas mis ses cocontractants en mesure de connaître les caractéristiques essentielles des biens proposés. Les époux X n'ont donc pu valablement donner leur accord à cette vente dont l'objet et le prix étaient plus qu'approximatifs.
En conséquence le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a débouté les époux X de leurs demandes, il y a lieu de prononcer l'annulation du contrat formé suite au bon de commande signé entre les parties le 22 octobre 2017. Par suite la SARL Bureau d'études marketing sera condamnée à restituer aux époux X la somme de 6 400 euros correspondant aux acomptes perçus et majorée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 6 novembre 2017.
Néanmoins le contrat étant annulé, les clauses qu'il contenait ne peuvent plus produire aucun effet juridique, les demandes des époux X fondées sur l'application des conditions générales de vente en cas d'annulation du contrat, notamment à titre de clause pénale contractuelle, seront rejetées.
En outre, ils ne justifient d'aucun préjudice complémentaire qui ne serait pas d'ores et déjà indemnisé par les intérêts moratoires accordés ci-dessus ; leur demande de dommages et intérêts sera rejetée.
Sur les demandes accessoires :
La SARL Bureau d'études marketing, succombant en la présente instance en supportera les entiers frais et dépens en ce compris ceux de première instance.
L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile au profit des époux X, une somme de 2 000 euros leur sera accordée aux fins d'indemnisation de leurs frais irrépétibles. En revanche l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de la SARL Bureau d'études marketing, la décision de première instance sera infirmée sur ce point.
Par ces motifs LA COUR, Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Strasbourg du 16 août 2018 en toutes ses dispositions, Statuant à nouveau, Prononce ce jour l'annulation du contrat conclu par bon de commande signé le 22 octobre 2017 entre Mme X, M. X et la SARL Bureau d'études marketing, Condamne en conséquence la SARL Bureau d'études marketing à rembourser à Mme X et M. X la somme de 6 400 euros (six mille quatre cents euros) majorée des intérêts au taux légal à compter du 6 novembre 2017, Rejette toute autre demande indemnitaire présentée par Mme X et M. X, Condamne la SARL Bureau d'études marketing à verser à Mme X et M. X une indemnité de 2 000 euros (deux mille euros) en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de la SARL Bureau d'études marketing, Condamne la SARL Bureau d'études marketing aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.