CA Pau, 1re ch., 18 février 2020, n° 17-02620
PAU
Arrêt
Confirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Duchac
Conseillers :
M. Castagne, Mme Rosa Schall
Par acte d'huissier du 3 octobre 2016 Mme Stéphanie L. et M. Yannick M. ont fait assigner M. Frédéric V., négociant automobile, devant le tribunal d'instance de Tarbes afin de voir prononcer la résolution de la vente d'un véhicule Renault Scénic acquis le 27 septembre 2014.
Par jugement du 27 avril 2017, le tribunal d'instance de Tarbes a :
- prononcé la résolution judiciaire du contrat de vente en date du 27 septembre 2014, du véhicule Renault Scenic immatriculé DK 433 RQ
- condamné M. V. à restituer à Mme L. et à M. M. la somme de 4 400 correspondant à la soulte payée par les demandeurs après reprise par M. V. de leur ancien véhicule
- condamné M. V. à payer à Mme L. et à M. M. la somme de 940 au titre du préjudice consécutif aux frais de gardiennage
- débouté Mme L. et M. M. de leurs demandes tendant à ne restituer le véhicule qu'après complète restitution du prix de vente par M. V., de réparation du préjudice consécutif au paiement des frais d'assurance, de remboursement des frais de location d'un véhicule de remplacement et de leur demande pour résistance abusive de M. V.
- condamné M. V. à payer à Mme L. et à M. M. la somme de 600 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens à l'exclusion des frais d'expertise diligentée dans le cadre de la garantie d'assurances de Mme L. et de M. M..
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
M. Frédéric V. a interjeté appel de ce jugement le 18 juillet 2017.
Par conclusions du 15 décembre 2017 M. Yannick M. et Mme Stéphanie L. demandent à titre principal, au visa des articles L. 217-1 et suivants du Code de la consommation, de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de vente et condamné M. V. à leur verser la somme de 4 400 à charge pour eux de restituer le véhicule après complète restitution du prix de vente par M. Frédéric V..
Formant appel incident ils demandent, réformant pour partie le jugement, de condamner M. Frédéric V. à leur payer la somme de 1 800 au titre du préjudice consécutif aux frais de gardiennage, au paiement de la somme de 518,02 au titre des primes d'assurance et celle de 250 pour le remboursement des frais de location d'un véhicule de remplacement.
À titre subsidiaire, ils demandent de faire droit à ces mêmes demandes sur le fondement des articles 1641 et suivant du Code civil.
En tout état de cause, ils demandent de condamner M. V. à leur payer la somme de 500 pour résistance abusive et celle de 1500 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure, ainsi qu'aux entiers dépens, y compris les frais d'expertise contradictoire.
Vu la révocation en date du 14 janvier 2019 de Me A., avocat de M. M. et Mme L., et la constitution de Me Angélique B. D. en ses lieu et place.
Par conclusions n° 2 du 18 juillet 2019 M. Frédéric V. demande d'infirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résolution judiciaire du contrat de vente du véhicule Renault Scenic immatriculé DK 433 RQ et l'a condamné à restituer à M. M. et à Mme L. la somme de 4 400 , à leur payer la somme de 940 au titre du préjudice consécutif aux frais de gardiennage, celle de 600 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et l'a condamné aux entiers dépens.
Il demande de dire n'y avoir lieu à prononcer la résolution judiciaire du contrat de vente.
Pour le surplus, il sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté M. M. et Mme L. de leur demande de réparation des préjudices consécutifs au paiement des primes d'assurance, de remboursement des frais de location d'un véhicule de remplacement, et au titre d'une résistance abusive.
Il demande de condamner M. M. et Mme L. à lui payer la somme de 1 000 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.
Il fait notamment valoir, que le problème de lubrification à l'origine de la rupture du turbo doit être imputé à M. Yannick M. et Mme Stéphanie L. qui n'ont pas entretenu leur véhicule ni respecté les préconisations du constructeur après avoir parcouru 25 000 km. Il ajoute, que la rupture du turbocompresseur correspond à une usure normale pour ce type de véhicule d'occasion.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 6 novembre 2019.
Au-delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion la cour, en application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, se réfère pour l'exposé plus ample des moyens et des prétentions des parties, à leurs dernières écritures visées ci-dessus.
SUR CE :
Sur la garantie légale de conformité
Aux termes de l'article L. 217-4 du Code de la consommation, le vendeur livre un bien conforme au contrat et répond des défauts de conformité existant lors de la délivrance.
L'article L. 217-7 du même Code précise que " les défauts de conformités qui apparaissent dans un délai de 24 mois à partir de la délivrance du bien sont présumées exister au moment de la délivrance, sauf preuve contraire. Pour les biens vendus d'occasion, ce délai est fixé à 6 mois. Le vendeur peut combattre cette présomption si celle-ci n'est pas compatible avec la nature du bien ou le défaut de conformité invoqué. "
Le 27 septembre 2014, M. Yannick M. et Mme Stéphanie L. ont acquis auprès de M. Frédéric V., négociant automobile, un véhicule Renault Mégane Scénic II 1.9 dCi d'occasion mis en circulation le 13 septembre 2004 et ayant 152 000 km au compteur. Ce véhicule bénéficiait d'une garantie de 3 mois moteur/boîte.
Le 14 septembre 2015, le véhicule a été immobilisé à la suite d'une panne du turbocompresseur. Il avait alors 177 883 km au compteur.
M. Frédéric V. a refusé cette prise en charge aux motifs que la garantie était de 3 mois et qu'ils ont parcouru plus de 30 000 km en un an depuis l'achat.
Il résulte du rapport d'expertise amiable réalisé contradictoirement par M.S., mandaté par la GMF assureur protection juridique de M. Yannick M., que la rupture du turbot est consécutive à un défaut de lubrification bien connu sur ce type de véhicule. Il indique qu'il pense que l'avarie était en germe au moment de la vente.
M. Yannick M. avait indiqué lors de sa démarche auprès de son assureur protection juridique, que compte tenu des problèmes de perte de puissance, et suivant l'avis de leur vendeur, ils ont régulièrement mis du produit dans le moteur dès le 11 février 2015.
Les problèmes demeurants, et compte tenu des affichages électroniques au tableau de bord concernant l'injection, ils sont passés au garage où ils ont laissé le véhicule.
Il précise, avoir acheté auprès de son négociant le 8 juillet 2015 un nouveau produit pour le moteur que celui-ci lui avait proposé et que malgré tout, les problèmes se sont accentués jusqu'à la panne du 14 septembre 2015 consistant en la rupture du turbocompresseur.
M. Frédéric V. est intervenu sur le véhicule litigieux à la suite de problèmes au niveau de la vanne EGR le 2 février 2015 et indique l'avoir nettoyée en avril 2015. Il n'a pas contesté les informations communiquées par M. Yannick M. lors de l'expertise.
Au demeurant, le 1er octobre 2015, il a établi un devis proposant de remplacement du turbocompresseur qui mentionne des travaux à hauteur de 1009,35 euros.
Par courrier recommandé avec de réception du 6 octobre 2015, M. Yannick M. et Mme Stéphanie L. ont demandé à M. Frédéric V., compte tenu des difficultés rencontrées sur le véhicule qui n'étaient pas apparentes au moment de l'achat (turbocompresseur à remplacer, problèmes d'injection signalés sur le tableau de bord, perte de puissance à l'accélération et moteur qui cale régulièrement lors des manœuvres et des démarrages) qu'il procède à la réparation de leur véhicule à ses frais, ce que celui-ci a refusé.
C'est donc à bon droit, que le premier juge a relevé que M. V. ne produisait aucune pièce tendant à démontrer que M. Yannick M. et Mme Stéphanie L. n'avaient pas correctement entretenu leur véhicule tout en rappelant qu'ils l'avaient déjà conduit au garage dès le mois de février 2015.
C'est également à bon droit, qu'il a retenu que M. V. ne démontrait pas que la rupture du turbocompresseur pouvait être exclusivement imputable à l'usure, ce que n'a pas envisagé l'expert, et qui est au demeurant contredit par les propres attestations qu'il produit émanant notamment de mécaniciens, ou de propriétaires de ce même type de véhicule et qui, confrontés à ces mêmes problèmes consécutifs aux difficultés de lubrification, n'ont jamais pour autant connu de rupture du turbocompresseur-ce qui ne résulte pas de l'attestation de Mme C. qui évoque un accident suite à un emballement du moteur-.
Par ailleurs, il résulte des documents produits tirés de la presse automobile, que le moteur 1.9 dCi équipant les Renault Scenic 2 cumule les faiblesses notamment du turbo et de vanne EGR, ce que ne pouvait ignorer M. Frédéric V., professionnel de l'automobile et dont il ne justifie pas avoir informé M. Yannick M. et Mme Stéphanie L. lorsqu'il a procédé à la vente de ce véhicule.
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a prononcé la résolution judiciaire du contrat de vente en date du 27 septembre 2014, du véhicule Renault Scenic immatriculé DK 433 RQ et condamné M. Frédéric V. à restituer à Mme Stéphanie L. et à M. Yannick M. la somme de 4 400 correspondant à la soulte payée après reprise par M. V. de leur ancien véhicule et débouté M. Yannick M. et Mme Stéphanie L. de leur demande tendant à ce que le véhicule ne soit restitué qu'après complète restitution du prix de vente, le premier juge ayant exactement constaté que cette demande n'était fondée ni en droit, ni légitimée par les circonstances.
Il convient de rappeler, qu'il est loisible à Mme Stéphanie L. et à M. Yannick M. de prendre toutes dispositions nécessaires, pour qu'il soit procédé à cette restitution tout en garantissant le paiement de la somme qui leur est due.
Sur les autres préjudices
Frais de gardiennage
M. Yannick M. et Mme Stéphanie L. justifient s'être acquittés d'une facture de 1 800 auprès de Me François le G., mandataire judiciaire désigné dans la procédure collective de la société CO.SO Bigorre.
Il est établi que le véhicule a été immobilisé à partir du mois de septembre 2015 et que M. Frédéric V. a refusé le 14 octobre 2015 la prise en charge des travaux sans qu'aient été évoqués les frais de gardiennage.
C'est donc à bon droit, que le premier juge a condamné M. Frédéric V. au paiement de la somme de 924 , correspondant au paiement des frais de gardiennage sur la période de dépôt du véhicule dans ce garage, jusqu'à la date du rapport d'expertise, le 2 février 2016.
Sur les primes d'assurance
M. Yannick M. et Mme Stéphanie L. ne produisent aux débats que des échéanciers de leurs diverses assurances que leur a transmis la GMF pour la période à partir de janvier 2015, documents qui n'établissent pas la réalité du paiement de la somme de 518,02 qui est sollicitée.
En conséquence, en l'absence de la preuve du paiement de cette somme, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.
< Sur les frais de location d'un véhicule.
M. Yannick M. et Mme Stéphanie L. produisent une attestation de Mme L., qui indique leur avoir prêté gratuitement son véhicule pour la période courant octobre 2015, puis du mois de février 2016 au mois de janvier 2017, afin de remplacer le leur, immobilisé suite à la rupture du turbocompresseur.
En conséquence, dès lors que M. Yannick M. et Mme Stéphanie L. justifient de la facture d'un contrat de location du 6 janvier 2016 au 8 février 2016, pour un montant de 250 , n'étant pas contesté que le véhicule Renault Mégane était toujours immobilisé à cette période, réformant le jugement de ce chef, il convient de condamner M. Frédéric V. à leur payer ces frais de location.
Sur la demande pour résistance abusive
En l'absence de moyens nouveaux ou de preuve nouvelle, c'est par des motifs exacts que la cour adopte, que cette demande a été rejetée en première instance.
Sur les demandes sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens
Le jugement déféré sera confirmé de ces chefs, le premier juge ayant exactement relevé, pour rejeter la demande afférente aux frais d'expertise amiable, que M. Yannick M. et Mme Stéphanie L. ne justifiaient pas en avoir assuré le coût.
M. Frédéric V., succombant en son recours, sera débouté de sa demande sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et condamné à payer à M. Yannick M. et à Mme Stéphanie L. la somme de 1 000 au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.
M. Frédéric V. sera condamné aux dépens de l'instance en appel.
Par ces motifs LA COUR après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement, et en dernier ressort, Confirme le jugement entrepris sauf sur la demande de remboursement des frais de location d'un véhicule de remplacement, Le réformant de ce chef, Condamne M. Frédéric V. à payer à M. Yannick M. et Mme Stéphanie L. la somme de 250 pour le remboursement des frais de location d'un véhicule de remplacement, Y ajoutant, Condamne M. Frédéric V. à payer à M. Yannick M. et Mme Stéphanie L. la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel. Déboute M. Frédéric V. de sa demande sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile Condamne M. Frédéric V. aux dépens de l'appel.