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Décisions

ADLC, 26 décembre 2019, n° 19-DCC-265

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

Relative à la prise de contrôle exclusif de la société Steam Power Delta par la société Snef

ADLC n° 19-DCC-265

26 décembre 2019

L'Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 21 novembre 2019, relatif à la prise de contrôle exclusif de la société Steam Power Delta par la Société Snef, formalisée par un protocole d'accord en date du 30 juillet 2019 ; Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Vu les autres pièces du dossier ; Adopte la décision suivante :

I. Les entreprises concernées et l'opération

1. La société SNEF SA (ci-après "Snef ") est la société tête du groupe Snef. [Confidentiel]. Le groupe Snef est organisé autour de plusieurs activités telles que les métiers de l'installation électrique, des procédés industriels, du numérique et du maintien en condition opérationnelle des installations, les métiers du nucléaire, des télécommunications, de la robotique, de la maintenance mécanique, de l'ingénierie, de la sécurité et les savoir-faire spécifiques des nouvelles technologies.

2. Steam Power Delta est une société par actions simplifiée constituée par Alstom Power Service (ci-après "APS ") pour les besoins de l'opération, dont l'actif est composé du fonds de commerce "Balance of Plant " (ci-après "BoP") de la société APS et de l'intégralité du capital de la société Protea. Cette activité BoP comprend notamment les métiers d'installations électriques générales (ci-après " IEG"), l'instrumentation, le traitement de l'eau et de la sûreté nucléaires, ainsi qu'un métier de protection physique de sites nucléaires. La société Protea est un constructeur et un concepteur français de tableaux et armoires électriques notamment pour les infrastructures nucléaires. Elle était détenue auparavant par le groupe General Electric.

3. APS est détenue intégralement par la société Alstom Power Systems, elle-même filiale à 100 % de la société Geast, à la tête du groupe General Electric en France.

4. L'opération, formalisée par un protocole d'accord signé par les parties en date du 30 juillet 2019, consiste en l'acquisition par Snef de l'intégralité du capital social de la société Steam Power Delta. En ce qu'elle se traduit par la prise de contrôle exclusif de Steam Power Delta par Snef, l'opération notifiée constitue une concentration au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce.

5. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d'affaires hors taxes total sur le plan mondial de plus de 150 millions d'euros (Snef : [= 150 millions] d'euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2018 ; Steam Power Delta : [= 150 millions] d'euros pour le même exercice). Chacune de ces entreprises a réalisé en France un chiffre d'affaires supérieur à 50millions d'euros (Snef : [= 50 millions] d'euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2018 ; Steam Power Delta : [= 50 millions] d'euros pour le même exercice). Compte tenu de ces chiffres d'affaires, l'opération ne relève pas de la compétence de l'Union européenne. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l'article L. 430-2 du Code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du Code de commerce relatifs à la concentration économique.

II. Délimitation des marchés pertinents

6. Les parties sont concomitamment actives sur les marchés des fournitures industrielles (A) et de la sécurité (B). Par ailleurs, elles sont également actives sur le marché du génie électrique dans le secteur nucléaire (C), via des prestations de travaux d'installation et de maintenance. Enfin, Steam Power Delta est présente sur le marché de la commercialisation de fournitures industrielles dans le secteur nucléaire (D).

A. LE MARCHÉ DES FOURNITURES INDUSTRIELLES

7. L'Autorité a considéré que le secteur des fournitures industrielles pouvait être segmenté en autant de marchés qu'il existe de familles de produits, dans la mesure où chaque famille de produits répond à une fonction particulière et où ces familles ne sont pas substituables entre elles aux yeux des professionnels (2). Les marchés suivants ont ainsi été identifiés : (i) l'outillage, (ii) l'usinage, (iii) la transmission, (iv) l'automatisme, (v) l'assemblage, (vi) l'équipement et (vii) la protection, l'hygiène et la sécurité. Selon la pratique décisionnelle, certaines de ces catégories de produits pourraient être segmentées plus finement.

8. S'agissant de la délimitation géographique des marchés des fournitures industrielles, l'Autorité (3) a analysé les effets d'opérations de concentration aux niveaux national et régional.

9. En l'espèce, les parties sont actives sur le segment de l'automatisme.

10. La question de la délimitation exacte des marchés pertinents peut toutefois être laissée ouverte, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurant inchangées quelle que soit la segmentation retenue.

B. LE MARCHÉ DE LA SÉCURITÉ

11. Au sein du secteur de la sécurité privée, l'Autorité a identifié quatre marchés distincts : (i) le marché du gardiennage (ou surveillance par agent), (ii) le marché des équipements électroniques de surveillance, (iii) le marché de la télésurveillance, et (iv) le marché des services de sécurité pour le transport aérien (4).

12. Au sein du marché des services de gardiennage, deux grandes activités ont été identifiées : les prestations de gardiennage traditionnel (gardiennage sur point fixe ou gardiennage mobile par le biais de rondes de jour ou de nuit) et les prestations de gardiennage spécialisé (accueil et filtrage aux accès, surveillance sur stations de travail, contrôle des bagages et contrôle des personnes) (5).

13. La Commission a envisagé l'existence d'un marché distinct des services de gardiennage, regroupant les prestations de conciergerie et d'intervention en cas d'alarme (6).

14. L'Autorité considère que le marché du gardiennage est de dimension nationale, notamment en raison de règlementations nationales spécifiques et du fait que la commercialisation de services de surveillance par agent n'implique pas nécessairement de disposer d'un réseau d'agences implanté à proximité des clients (7).

15. En l'espèce, les parties sont actives sur le marché français des équipements électroniques de surveillance.

C. LE MARCHÉ DU GÉNIE ÉLECTRIQUE DANS LE SECTEUR NUCLÉAIRE

16. La filière du nucléaire en France rassemble les métiers liés au cycle du combustible, à la construction et à la maintenance des centrales et à leur démantèlement. Cinq grandes familles de métiers ont ainsi été identifiés dans cette filière (8) : (i) les activités en lien avec le cycle du combustible, (ii) la construction de centrales nucléaires, (iii) la production d'électricité à partir de l'énergie nucléaire, (iv) la maintenance et le maintien en condition opérationnelle des centrales nucléaires, et (v) le démantèlement d'installations nucléaires.

17. Le secteur nucléaire est structuré principalement autour d'appels d'offres, auxquels les opérateurs répondent seuls ou en groupement. Ces appels d'offres sont à l'initiative de plusieurs grands donneurs d'ordre parmi lesquels figurent EDF, Orano, CEA et Iter. Selon les éléments recueillis dans le cadre de l'instruction, un même appel d'offres relatif à des prestations de génie électrique dans le secteur nucléaire peut se composer d'une seule ou de plusieurs activités dans le domaine électrique (incluant les activités suivantes : études d'exécution, travaux d'installations de fournitures industrielles sur site, réglages d'instruments, essais et mises en service).

18. En l'espèce, les parties sont actives dans les secteurs du génie électrique dans le secteur nucléaire, notamment à travers des prestations de travaux d'installation et de maintenance.

1. EXISTENCE D'UN MARCHÉ SPÉCIFIQUE DES ACTIVITÉS DE GÉNIE ÉLECTRIQUE DANS LE SECTEUR NUCLÉAIRE

19. Selon la partie notifiante, la pertinence d'une distinction entre le marché du génie électrique, tel que défini par l'Autorité (9), et le marché du génie électrique dans le secteur nucléaire se justifie notamment par la présence de barrières à l'entrée sur ce dernier secteur liées au fort niveau d'expertise requis et à l'exigence de certifications pour le personnel intervenant sur site (10). Par exemple, les entreprises dont le personnel intervient dans les centrales doivent être habilitées CEFRI (Comité Français de Certification en Radioprotection) pour le suivi dosimétrique du personnel intervenant.

20. La majorité des répondants interrogés dans le cadre du test de marché confirme qu'il convient de distinguer un marché du génie électrique spécifique à la filière du nucléaire. Ceux-ci indiquent que ce marché regroupe notamment les activités de travaux sur sites nucléaires (installation, construction, modification), de maintenance, de courants fort, de courants faible, de haute tension, d'installations électriques générales (ci-après, " IEG"), d'installations électriques diverses (ci-après " IED"), d'installations électriques de sécurité (ci-après " IES "), d'installations électriques de chantier (ci-après " IEC"), d'automatisme, d'instrumentation et de commande-contrôle.

21. À l'instar de la partie notifiante, les répondants aux tests de marché ont fait état de la nécessité de posséder des qualifications et des habilitations spécifiques dans la filière du nucléaire. EDF indique ainsi que pour ses fournisseurs de prestations, la qualification (11) permettant de travailler sur ses sites fait l'objet d'un examen annuel de retour d'expérience afin de décider de son maintien, de sa suspension ou de son retrait.

22. En conséquence, il y a lieu d'identifier un marché du génie électrique dans le secteur nucléaire, distinct du marché identifié jusqu'à présent par la pratique décisionnelle.

2. MARCHÉ DE SERVICE

Segmentation entre prestations de travaux d'installation et de maintenance

23. Selon la partie notifiante, il conviendrait de retenir un marché global relatif aux prestations de génie électrique dans le nucléaire, notamment en raison de la diversité des activités des intervenants et les besoins des donneurs d'ordre.

24. Il ressort toutefois des tests de marché réalisés dans le cadre de l'instruction que dans le marché du génie électrique dans le secteur nucléaire, les activités de prestations de travaux d'installation se distinguent de celles relatives à la maintenance.

25. Tout d'abord, si les mêmes opérateurs peuvent postuler à des appels d'offres relatifs aux travaux d'installation et à la maintenance, les compétences attendues diffèrent. Ainsi selon EDF, les prestations de travaux d'installation " font notamment appel à des compétences d'étude et de travaux qui ne sont que partiellement ou pas du tout nécessaires lors des opérations de maintenance ".

26. Ensuite, les concurrents des parties indiquent que les marchés de l'installation se dissocient des marchés de maintenance par des organes d'achat distincts. Ainsi, chez EDF, les travaux d'installation sont essentiellement prescrits par le CNEPE (Centre National d'Équipements de Production Électrique) ou la DIPDE (Division Ingénierie Parc de la Déconstruction et de l'Environnement), ce qui n'est pas le cas des travaux de maintenance, dont les appels d'offres peuvent être prescrits par des agences régionales d'achat plaque (ci-après "ARAP ") ou directement par les centrales. Par ailleurs, un concurrent des parties indique que les clients sont organisés avec des équipes travaux et des équipes maintenance, chacune de ces équipes lançant ses propres procédures d'appels d'offres.

27. Enfin, EDF indique également que les prestations de travaux d'installation font l'objet de contrats spécifiques distincts de ceux relatifs aux prestations de maintenance.

Segmentation du marché relatif aux prestations de maintenance

28. Selon la partie notifiante, la maintenance génie-électrique dans le secteur nucléaire recouvre plusieurs activités. Ainsi, elle comprend des prestations liées au maintien en condition opérationnelle du parc nucléaire (remplacement d'anciens équipements par des équipements plus récents) et des prestations liées à la maintenance courante (dépannage).

29. Selon les répondants aux tests de marché, les appels d'offres relatifs à la maintenance courante sont distincts de ceux relatifs aux travaux de remplacements d'anciens équipements par des équipements plus récents. Ainsi, au sein d'EDF, les appels d'offre relatifs au maintien en condition opérationnelle du parc sont proposés par l'Unité Technique Opérationnelle

30. En outre, les opérateurs qui candidatent aux appels d'offres relatifs à des prestations de maintien en condition opérationnelle du parc nucléaire sont généralement les mêmes que ceux qui candidatent aux appels d'offres concernant des travaux d'installation : ils ont ainsi une dimension nationale (Vinci Énergies Nucléaire, Spie Nucléaire, Bouygues Énergies & Services, Snef). En revanche, selon la partie notifiante, les opérateurs qui candidatent sur de la maintenance courante au niveau local ne sont pas présents sur les autres appels d'offres, notamment pour des raisons de certification.

31. Compte tenu des éléments qui viennent d'être exposés, dans le secteur nucléaire, le marché de la maintenance de génie électrique pourrait être segmenté entre les prestations de maintien en condition opérationnelle du parc nucléaire et la maintenance courante.

32. En tout état de cause, la délimitation exacte du marché du génie électrique dans le secteur nucléaire peut être laissée ouverte, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurant inchangées quelle que soit la segmentation retenue.

3. MARCHÉ GÉOGRAPHIQUE

Délimitation géographique du marché des prestations de travaux d'installation

33. Selon la partie notifiante, les prestations de travaux d'installation constituent un marché de dimension nationale, notamment en raison de la dimension nationale des opérateurs. La dimension nationale des intervenants sur ce segment est confirmée par les répondants aux tests de marché.

34. En outre, les contrats conclus à l'issue des appels d'offres sont de dimension nationale et, les travaux étant majoritairement réalisés sur plusieurs sites, ceux-ci nécessitent une implantation nationale.

35. Enfin, l'exécution de ces contrats nécessite une forte capacité à mobiliser des moyens d'études et des équipes de management mobiles s'appuyant sur de la main d'œuvre locale ou de la sous-traitance.

36. En tout état de cause, en l'espèce, la question de la délimitation géographique exacte du marché des prestations de travaux d'installation peut être laissée ouverte, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurant inchangées quelle que soit la segmentation retenue. Les effets de l'opération sur ce marché seront analysés au niveau national.

Délimitation géographique des marchés des prestations de maintenance

37. Selon la partie notifiante, il convient de distinguer au sein de la maintenance les marchés du maintien en condition opérationnelle du parc, de dimension nationale, des marchés de maintenance courante, de dimension locale.

38. S'agissant des marchés du maintien en condition opérationnelle du parc, la dimension nationale proposée par la partie notifiante est confirmée par l'instruction. Il ressort en effet des tests de marché que les opérateurs répondants aux appels d'offres sont de dimension nationale. Il s'agit notamment de Spie Nucléaire, Vinci Énergies Nucléaire, APS ou Snef, qui répondent par ailleurs aux marchés de travaux d'installation de génie électrique.

39. Par ailleurs, l'entité en charge du maintien en condition opérationnelle du parc nucléaire d'EDF, qui représente, selon les parties notifiantes, plus de la moitié du marché concerné, est de dimension nationale.

40. S'agissant des marchés de la maintenance courante, la dimension régionale proposée par la partie notifiante est également confirmée par les tests de marché. La majorité des répondants indique en effet que les marchés de la maintenance courante ont une dimension locale. Plusieurs concurrents ont ainsi déclaré que, pour EDF, ce type de travaux est prescrit dans le cadre d'appels d'offres sur des marchés locaux qui sont, soit négociés par site nucléaire, soit passés par des ARAP, conduisant ainsi au regroupement de plusieurs sites (12). Bouygues Énergies & Services confirme cette analyse et précise que la dimension régionale ou multirégionale de ces travaux de maintenance s'explique par la nécessité de disposer de compétences locales appelables rapidement garantissant des interventions dans des délais courts, de la souplesse, des coûts de revient plus faibles et une connaissance des installations.

41. Concernant les répondants aux appels d'offres relatifs à des prestations de maintenance courante, ceux-ci sont le plus souvent de dimension nationale, sans que cette dimension nationale ne soit une condition indispensable pour les remporter. Ainsi, EDF indique que les sites nucléaires s'appuient sur un ancrage territorial permettant l'accès à des entreprises de taille intermédiaire, régionales voire purement locales.

42. En l'espèce, l'analyse a été envisagée sur un marché du maintien en condition opérationnelle du parc de dimension nationale et un marché de la maintenance courante de dimension régionale.

43. La question de la délimitation géographique exacte de ces marchés peut toutefois être laissée ouverte, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurant inchangées quelle que soit la segmentation retenue.

D. LE MARCHÉ DES FOURNITURES INDUSTRIELLES DANS LE SECTEUR NUCLÉAIRE

1. FONCTIONNEMENT DU SECTEUR DES FOURNITURES INDUSTRIELLES DANS LE SECTEUR NUCLÉAIRE

44. Il ressort des tests de marché que les fournitures industrielles dans le secteur nucléaire regroupent, entre autres, les produits suivants : les câbles, les tableaux HTA et BT (13), les transformateurs HTA/BT, les traversées enceinte, les convertisseurs, les turbines à vapeur, les générateurs de secours, les équipements de distribution électrique, de contrôle commande, de protection, les batteries, les transformateurs, les tableaux électriques et les onduleurs.

45. Par ailleurs, cette activité est considérée comme distincte, voire complémentaire du génie électrique dans le secteur nucléaire par les répondants aux tests de marché.

2. MARCHÉ DE SERVICE

46. Les répondants aux tests de marché confirment l'existence d'un marché des fournitures industrielles dans le secteur nucléaire distinct du marché des fournitures industrielles tel que défini par l'Autorité. Il convient toutefois de préciser que lorsque l'activité d'achat de fournitures industrielles intervient dans le cadre de prestations d'installation de fournitures

47. L'existence d'un marché propre au secteur nucléaire se justifie par le fait que les fournitures industrielles font l'objet d'agréments ou de qualifications spécifiques (qualification sismique, audits de contrôle et de suivi sur les matériels construits selon le standard RCC-E (14)).

48. Les clients des parties ont également été interrogés sur d'éventuelles sous-segmentations relatives aux fournitures industrielles dans le secteur nucléaire.

49. La majorité d'entre eux estime pertinent de segmenter plus finement ce marché en raison des compétences distinctes des sociétés. En effet, les métiers et les acteurs diffèrent. Selon le test de marché, s'il n'apparaît pas pertinent de retenir l'outillage et l'usinage, les autres segments relatifs à la (i) la transmission, (ii) l'automatisme, (iii) l'assemblage, (vi) l'équipement, ainsi que (v) la protection, l'hygiène et la sécurité peuvent en revanche être envisagés.

50. La question de la délimitation exacte du marché des fournitures industrielles dans le secteur nucléaire peut en tout état de cause être laissée ouverte, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurant inchangées quelle que soit la segmentation retenue.

51. En l'espèce, seule la cible est présente sur ce marché, sur le segment de l'automatisme, via l'activité de constructeur et concepteur de tableaux et armoires électriques de Protea qui possède une qualification dans le domaine nucléaire.

3. MARCHÉ GÉOGRAPHIQUE

52. Selon les parties, les marchés des fournitures industrielles dans le secteur nucléaire sont de dimension nationale.

53. La majorité des répondants aux tests de marché estime également que les marchés des fournitures industrielles dans le secteur nucléaire sont de dimension nationale. Seul Vinci Énergies Nucléaire a indiqué qu'une partie des équipements les plus sensibles (turbines, postes de transformation, générateurs de vapeur, instrumentation) sont souvent spécifiques et peuvent ainsi relever d'un marché international.

54. La question de la délimitation géographique exacte du marché des fournitures industrielles dans le secteur nucléaire peut toutefois être laissée ouverte, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurant inchangées quelle que soit la segmentation retenue.

55. En l'espèce, les effets de l'opération sur ce marché seront analysés au niveau national.

III. Analyse concurrentielle

56. L'analyse concurrentielle portera sur (A) les effets horizontaux puis sur (B) les effets verticaux de l'opération.

A. ANALYSE DES EFFETS HORIZONTAUX

1. SUR LES MARCHÉS DES FOURNITURES INDUSTRIELLES

57. Au niveau national, d'après les estimations fournies par la partie notifiante, la part de marché de la nouvelle entité sur le marché des fournitures industrielles restera inférieure à 15 %, quelle que soit la segmentation envisagée.

58. Par conséquent, l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le marché des fournitures industrielles.

2. SUR LES MARCHÉS DE LA SÉCURITÉ

59. Au niveau national, d'après les estimations fournies par la partie notifiante sur les marchés de la sécurité, la part de marché de la nouvelle entité restera inférieure à 10 %, quelle que soit la segmentation retenue.

60. Par conséquent, l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le marché de la sécurité.

3. SUR LES MARCHÉS DU GÉNIE ÉLECTRIQUE DANS LE SECTEUR NUCLÉAIRE

61. Au niveau national, d'après les estimations fournies par la partie notifiante, la part de marché de la nouvelle entité restera inférieure à [10-20] % sur le marché du génie électrique dans le secteur nucléaire. Sur le marché national des prestations de travaux d'installation, cette part de marché s'élèvera à [10-20] % avec une addition de part de marché de [0-5] % pour Steam Power Delta. Sur le marché des prestations de maintien du parc en opération en condition opérationnelle, la part de marché de la nouvelle entité restera inférieure à [20-30] %.

62. D'après les estimations fournies par la partie notifiante, la part de marché de la nouvelle entité restera inférieure à 15 % sur les différents marchés régionaux des prestations de maintenance courante.

63. À l'issue de l'opération, la nouvelle entité continuera à faire face à la concurrence de plusieurs acteurs importants (Vinci Énergies Nucléaire, Clemessy, Spie Nucléaire, Bouygues Énergies & Services).

64. En outre, son offre s'adressera à un nombre restreint de clients, le plus important étant EDF, dans le cadre d'appels d'offres. Compte tenu de cette situation, la nouvelle entité sera confrontée à des clients dotés d'un pouvoir de négociation significatif.

65. À cet égard, les tests de marché réalisés auprès des clients des parties ont permis d'apprécier les effets attendus de l'opération. Orano estime ainsi que son pouvoir de négociation est plutôt fort, en raison du nombre restreint de donneurs d'ordre. La majorité des donneurs d'ordre interrogés estime également que l'intensité concurrentielle sera intacte dans le secteur nucléaire après la réalisation de l'opération, sans que la nouvelle entité soit en mesure d'augmenter ses tarifs. Ils indiquent également disposer d'alternatives sur ces marchés.

66. Par conséquent, l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le marché du génie électrique dans le secteur nucléaire.

B. ANALYSE DES EFFETS VERTICAUX

67. Une concentration verticale peut restreindre la concurrence en rendant difficile l'accès aux marchés sur lesquels la nouvelle entité sera active, voire en évinçant potentiellement les concurrents ou en les pénalisant par une augmentation de leurs coûts. Ce verrouillage peut viser les marchés aval, lorsque l'entreprise intégrée refuse de vendre un intrant à ses concurrents en aval, ou les marchés amont, lorsque la branche aval de l'entreprise intégrée refuse d'acheter les produits ou les services des fournisseurs actifs en amont et réduit ainsi leurs débouchés commerciaux. Cependant, les risques de verrouillage peuvent être en principe écartés lorsque la part de marché de la nouvelle entité ne dépasse pas 30 % sur les marchés concernés.

68. En l'espèce, la cible, via l'activité de Protea, est présente sur les marchés des fournitures industrielles dans le secteur nucléaire et les parties sont toutes les deux actives sur le marché du génie électrique dans le secteur nucléaire.

69. La part de marché de la nouvelle entité sera inférieure à 15 % à l'issue de l'opération sur le marché des fournitures industrielles dans le nucléaire et à [20-30] % sur les marchés du génie électrique dans le nucléaire, quelle que soit la segmentation retenue.

70. Par conséquent, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets verticaux sur les marchés concernés.

DÉCIDE

Article unique : L'opération notifiée sous le numéro 19-235 est autorisée.

NOTES

2 Lettre du ministre de l'économie, des finances et de l'emploi C2007-108 du 18 octobre 2007 aux conseils du groupe Orexad, relative à une concentration dans le secteur de la distribution de fournitures industrielles et la décision de l'Autorité de la concurrence n° 10-DCC-155 du 2 novembre 2010 relative à la prise de contrôle exclusif du groupe RBDH par la Fonds de Consolidation et de Développement des Entreprises.

3 Lettre du ministre de l'économie C2007-108et décision n° 10-DCC-155 précitées. Voir également la décision n° 17-DCC-70 du 31 mai 2017 relative à la prise de contrôle exclusif du groupe Ekium par le groupe Snef.

4 Décisions de l'Autorité de la concurrence n° 10-DCC-20 du 24 février 2010 relative à l'acquisition de ADT France par le groupe Stanley Works, n° 11-DCC-22 du 17 février 2011 relative à la prise de contrôle exclusif des sociétés Eryma Security Systems et Eryma Télésurveillance par la Société Financière de Participation Industrielle, n° 14-DCC-32 du 11 mars 2014 relative à la prise de contrôle exclusif des sociétés Vinci Facilities Opérations Services France, Energie Sécurité, Faceo Sécurité Prévention et FMTS par la société Fiducial Security Services et n° 17-DCC-77 du 2 juin 2017 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Facilcom Services Group France par la société La Financière Atalian, ainsi que les décisions de la Commission européenne COMP/M.5993 - Security As/Reliance Security Services/Reliance Security Services Scotland du 9 novembre 2010, et COMP/M. 6292 - Securitas/Niscayah Group du 2 août 2011.

5 Décisions n° 17-DCC-77 précitée, point 14, n° 14-DCC-32 précitée, point 9 et COMP/M.5993 précitée, point 13.

6 Décision COMP/M.5993 précitée, points 15 et 16.

7 Décisions n° 17-DCC-77, points 17 et 18 et n° 14-DCC-32, point 12 précitées.

8 Étude Xerfi, " La filière nucléaire française ", avril 2019, page 22.

9 Voir notamment les décisions de la Commission européenne COMP/M.5701 du 26 mars 2010, Vinci/Cegelec et COMP/M.6623 du 31 août 2012, Vinci/EVTBusiness ; les lettres du ministre de l'économie, des finances et de l'emploi C2007-115 du 5 octobre 2007, au conseil de la société Forclom, relative à une concentration dans le secteur de la maintenance d'installations industrielles et C2008-117 du 4 décembre 2008, aux conseils de la société Eiffage, relative à une concentration dans les secteurs de l'installation et de la maintenance multi technique et des travaux de génie climatique; et la décision de l'Autorité de la concurrence n° 09-DCC-30 du 29 juillet 2009 relative à l'acquisition des sociétés ETCM et GER2I Ensemblier par la société Eiffel Participations.

10 Selon la partie notifiante, il existe plusieurs habilitations de niveaux différents telles que HN1, HN2, HN3 ainsi que des CSQ (habilitation qualité et connaissance du milieu de la centrale).

11 Les critères retenus pour la qualification par EDF sont l'assurance qualité, les capacités techniques, la sécurité, la radioprotection, l'environnement et les critères de responsabilité sociétale. ("UTO"), tandis que ceux relatifs à la maintenance courante sont essentiellement proposés par des ARAP, les plaques correspondant à un ensemble de centrales nucléaires.

12 Ainsi pour EDF, la Coordination inter-sites de la vallée du Rhône, " CIVAR ", est la plaque correspondant au quart Sud-Est de la France -Vallée du Rhône. Elle regroupe les cinq centrales de la vallée du Rhône : Saint-Alban, Bugey, Creys-Malville, Cruas, Tricastin.

13 Respectivement " haute tension A " (ou moyenne tension) et " basse tension ". Un poste HTA/BT permet d'assurer la liaison entre un réseau haute tension et un réseau basse tension industrielles, elle fait partie intégrante du marché du génie électrique dans le secteur nucléaire, dans la mesure où ces prestations sont souvent intégrées au sein d'un unique appel d'offres.

14 Règles de conception et de construction des matériels électriques des îlots nucléaires.