CA Chambéry, ch. civ. sect. 1, 16 juin 2020, n° 18-01353
CHAMBÉRY
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Gymworks (SARL)
Défendeur :
Carre Blanc (SNC), Club 7 (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Ficagna
Conseillers :
Mmes Fouchard, Real del Sarte
EXPOSÉ DU LITIGE
La SNC Carré Blanc a procédé en 2014 à la démolition et à la reconstruction d'un immeuble de logements et de commerces à Saint-Bon Tarentaise, station de Courchevel 1550, lieudit Les Rois.
Le 7 octobre 2016 la société Carré Blanc a consenti à la SARL Club 7 un bail saisonnier pour des locaux situés dans l'immeuble destinés à l'exploitation d'un espace de bien-être, remise en forme et fitness équipé d'appareils de musculation et de «cardio». Il est convenu que le bail prend effet le 15 décembre 2016 pour se terminer le 30 avril 2017.
Pour équiper l'espace fitness, la société Carré Blanc a commandé à la SARL Gymworks divers matériels d'occasion reconditionnés selon facture en date du 6 septembre 2016, pour un prix global de 26 694 euros TTC, à savoir :
- un elliptique de marque Precor AMT,
- deux tapis de course Technogym VisioWeb,
- un vélo allongé Technogym VisioWeb,
- un vélo droit Technogym VisioWeb.
Les équipements ont été livrés le 27 décembre 2016 et la société Carré Blanc a émis les réserves suivantes :
« - Precor : manque console AMT,
- Technogym :
tapis : pas les mêmes, pas la même couleur contrairement commande,
tapis : rythme cardiaque ne fonctionne pas, structure grise rayée,
vélo : pas les mêmes et surtout pas la même couleur de sellerie (1 bleue, 1 ivoire)».
La société Carré Blanc a fait établir un constat d'huissier le 30 décembre 2016 confirmant ces réserves, ainsi que le dysfonctionnement de l'un des tapis de course, une déchirure sur la selle du vélo allongé, et un bruit anormal produit par le vélo droit.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 4 janvier 2017, la société Carré Blanc a mis en demeure la société Gymworks de remédier à ces anomalies en faisant valoir en outre qu'elle avait été livrée avec retard (livraison initialement prévue entre le 8 et le 12 décembre) et qu'elle avait d'ores et déjà subi une perte du fait que le matériel n'avait pas pu être utilisé pendant les vacances de Noël.
Le 11 janvier 2017, un technicien est intervenu dans les locaux de la société Carré Blanc pour procéder à des remplacements et des réparations.
Malgré cette intervention, la société Club 7, locataire, s'est encore plainte du dysfonctionnement des appareils. Une nouvelle mise en demeure a été adressée par la société Carré Blanc à la société Gymworks le 14 avril 2017, indiquant que le remplacement du matériel défectueux dont il avait été convenu en mars précédent n'était toujours pas intervenu.
Enfin, par lettre recommandée avec accusé de réception du 27 avril 2017, le conseil de la société Carré Blanc a fait savoir à la société Gymworks que sa cliente entendait se prévaloir de la résolution du contrat aux torts du vendeur.
C'est dans ces conditions que, par acte délivré le 27 septembre 2017, la société Carré Blanc et la société Club 7 ont fait assigner la société Gymworks devant le tribunal de grande instance d'Albertville pour obtenir :
- pour la société Carré Blanc, la résolution du contrat aux torts de la société Gymworks et la condamnation de celle-ci à lui restituer le prix versé outre intérêts à compter de la mise en demeure du 4 janvier 2017, ainsi qu'au paiement de la somme de 7 200 euros correspondant au préjudice subi du fait de l'absence de délivrance conforme avec intérêts à compter de la même date,
- pour la société Club 7, la condamnation de la société Gymworks, sur le fondement de l'article 1240 du Code civil, à lui payer, en réparation des préjudices subis, les sommes de 26 922 euros au titre du coût du salarié, de 2 373,16 euros au titre de l'assurance multirisque professionnelle, et de 15 000 euros au titre de la perte d'exploitation,
le tout avec exécution provisoire et paiement d'une indemnité procédurale.
La société Gymworks n'a pas comparu devant le tribunal.
Par jugement réputé contradictoire rendu le 25 mai 2018, le tribunal de grande instance d'Albertville a :
prononcé la résolution de la vente convenue entre la société Carré Blanc et la société Gymworks, suivant facture du 6 septembre 2016 d'un montant de 26 694 euros TTC, relativement à du matériel d'occasion reconditionné à neuf composé d'un elliptique, de deux tapis de course, d'un vélo allongé et d'un vélo droit aux fins d'équiper une salle de fitness, en raison de l'absence de délivrance conforme de la société Gymworks,
condamné en conséquence la société Gymworks à restituer à la société Gymworks la somme de 26 694 euros TTC, avec intérêts au taux légal à compter du 27 avril 2017, avec capitalisation des intérêts suivant l'article 1343-2 du Code civil,
dit que la société Carré Blanc devra mettre à disposition de la société Gymworks les 6 équipements fitness visés dans la facture du 6 septembre 2016 susvisée et ce aux fins de restitution,
débouté la société Carré Blanc et la société Club 7 de leurs demandes indemnitaires,
condamné la société Gymworks à payer à la société Carré Blanc et à la société Club 7 la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
débouté les parties de leurs plus amples demandes et contraires,
ordonné l'exécution provisoire de la décision,
condamné la société Gymworks aux entiers dépens avec distraction au profit de Me Didier C., suivant les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Par déclaration du 3 juillet 2018, la société Gymworks a interjeté appel de ce jugement.
La société Carré Blanc a engagé l'exécution forcée de la décision déférée et obtenu le paiement de partie de la condamnation prononcée à l'encontre de la société Gymworks. Les intimées ont sollicité du conseiller de la mise en état la radiation de l'appel sur le fondement de l'article 526 du Code de procédure civile.
Par acte du 15 janvier 2019 la société Gymworks a alors fait assigner la société Carré Blanc et la société Club 7 en référé devant la Première présidente de la cour d'appel de Chambéry pour obtenir l'aménagement de l'exécution provisoire attachée au jugement du 25 mai 2018.
Par ordonnance rendue le 5 février 2019, la Première présidente a :
déclaré recevable le recours de la société Gymworks,
ordonné l'aménagement de l'exécution provisoire de la condamnation,
autorisé la société Gymworks à consigner dans le délai de 8 jours la somme de 14 100 euros sur le compte séquestre du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Chambéry,
dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile,
laissé les dépens à la charge de la société Gymworks,
dit sans objet la demande reconventionnelle.
La demande de radiation de l'affaire est alors devenue sans objet, la société Gymworks ayant consigné la somme de 14 100 euros comme prévu par l'ordonnance précitée.
L'affaire a été clôturée à la date du 23 mars 2020 et renvoyée à l'audience du 6 avril 2020. Cette audience ayant été annulée en raison de la crise sanitaire, l'affaire a fait l'objet d'un avis de procédure sans audience le 23 avril 2020, en application de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304. En l'absence d'opposition manifestée à cette procédure dans les 15 jours de l'avis, l'affaire a été mise en délibéré à la date du 16 juin 2020.
Par conclusions notifiées le 23 mars 2020, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, la société Gymworks demande en dernier lieu à la cour de :
réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- prononcé la résolution de la vente intervenue entre la société Gymworks et la société Carré Blanc pour défaut de délivrance conforme,
- condamné la société Gymworks à la restitution du prix de vente d'un montant de 26 694 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 27 avril 2017 et capitalisation des intérêts,
- condamné la même à régler aux sociétés Carré Blanc et Club 7 une somme de 1 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné cette société à prendre en charges les dépens de première instance,
confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Carré Blanc et la société Club 7 de leurs demandes indemnitaires,
en tant que de besoin condamner la société Carré Blanc à restituer à la société Gymworks la somme qui lui a été réglée dans le cadre de l'exécution provisoire dont le jugement a été assorti,
si par impossible la résolution de la vente était confirmée, ordonner la restitution du matériel livré en état de fonctionnement tel que constaté par M. D. les 11 janvier et 16 mai 2017,
condamner in solidum les sociétés Carré Blanc et Club 7 à payer à la société Gymworks la somme de 4 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
condamner les mêmes aux entiers dépens de l'appel distraits au profit de la SCP Christine V.-P. - Carole O.-D. & Associés, avocat, par application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Par conclusions notifiées le 2 avril 2019, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, la société Carré Blanc et la société Club 7 demandent en dernier lieu à la cour de :
Vu les articles 1147, 1610 et 1611 du Code civil,
Vu les articles 1240 et suivants du Code civil,
Sur les demandes de la société Carré Blanc :
à titre principal, dire et juger que le matériel a été livré avec du retard, qu'il n'est pas conforme aux stipulations contractuelles, et que l'absence de délivrance conforme cause un préjudice à la société Carré Blanc,
confirmer la résolution du contrat aux torts de la société Gymworks,
condamner la société Gymworks à restituer à la société Carré Blanc l'ensemble des sommes perçues au titre du contrat, soit la somme de 26 694 euros avec intérêts au taux légal à compter du courrier de mise en demeure du 4 janvier 2017, et capitalisation des intérêts,
condamner la société Gymworks à payer à la société Carré Blanc la somme de 7 200 euros au titre de sa perte locative,
à titre subsidiaire, condamner la société Gymworks à payer des dommages et intérêts à la société Carré Blanc équivalant au montant des loyers non perçus pour la période soit la somme de 7 200 euros avec intérêt au taux légal à compter du courrier de mise en demeure du 4 janvier 2017, avec capitalisation des intérêts,
Sur les demandes de la société Club 7 :
dire et juger que la société Gymworks a causé des préjudices à la société Club 7, que l'inexécution contractuelle constitue une faute délictuelle tenant en l'inexécution d'une obligation qui, par son objet, intéresse nécessairement la société qui exploite le fonds,
infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté la société Club 7 de ses demandes indemnitaires,
condamner la société Gymworks à payer à la société Club 7 les sommes de :
- 26 922 euros au titre du coût du salarié,
- 2 373,16 euros au titre du remboursement de la prime d'assurance multirisque professionnelle,
- 15 000 euros au titre de la perte d'exploitation,
En tout état de cause :
condamner la société Gymworks au paiement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
MOTIFS ET DÉCISION
1/ Sur la résolution de la vente
En application de l'article 1147 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable en l'espèce, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
L'article 1610 du même Code dispose que si le vendeur manque à faire la délivrance dans le temps convenu entre les parties, l'acquéreur pourra, à son choix, demander la résolution de la vente, ou sa mise en possession, si le retard ne vient que du fait du vendeur.
Selon l'article 1611, dans tous les cas, le vendeur doit être condamné aux dommages et intérêts, s'il résulte un préjudice pour l'acquéreur, du défaut de délivrance au terme convenu.
Enfin, d'une manière générale, le vendeur est tenu de délivrer à l'acquéreur une chose conforme aux stipulations contractuelles et en état de servir à l'usage auquel elle est destinée, et la clause résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfait pas à son engagement ; la résolution du contrat peut alors être demandée en justice (article 1184 ancien du Code civil).
Pour obtenir la résolution du contrat de vente, la société Carré Blanc soutient que la livraison est intervenue avec retard et que les équipements livrés ne sont pas conformes à la commande, et pour partie défectueux, sans que l'intervention de la société Gymworks ait permis de résoudre les différents problèmes signalés, ce qu'a retenu le tribunal.
La société Gymworks pour sa part fait grief au jugement déféré d'avoir prononcé la résolution de la vente, alors que les équipements livrés sont conformes à la commande, que le délai de livraison n'a jamais été fixé, et qu'enfin elle a fait intervenir à deux reprises un technicien qui a réparé ou remplacé les matériels abîmés ou défectueux.
Le contrat de vente est ici formalisé par la facture du 6 septembre 2016 (pièce n° 2 de la société Carré Blanc), mais également par le devis accepté le 15 septembre 2016 (pièce n° 1 de la société Gymworks), étrangement à une date postérieure à celle de la facture, ce qui ne semble choquer ni le vendeur ni l'acquéreur qui invoquent tous deux ces deux pièces.
La lecture de ces documents contractuels établit qu'aucune date de livraison n'avait été fixée à la commande, les conditions générales de vente, au verso du devis et de la facture, indiquant que «les délais sont donnés à titre indicatif (...) En règle générale, le matériel est rendu disponible sous 60 jours».
Il résulte des échanges de mails entre les parties (pièce n° 4 de la société Carré Blanc) que la livraison avait été convenue initialement pour la fin du mois de novembre 2016, puis reportée, à la demande de la société Carré Blanc, au début du mois de décembre, puis enfin entre le 8 et le 12 décembre 2016. La dernière réponse de la société Gymworks, en date du 4 novembre 2016, est sans ambiguïté, puisque M. M. (de la société Gymworks) indique «c'est noté pour la livraison entre le 8 et le 12 décembre».
Or ce n'est que par message du 15 décembre 2016 que la société Gymworks a averti la société Carré Blanc de l'indisponibilité des matériels dans les délais convenus et a annoncé une livraison pour le 27 décembre (pièce n° 2 de l'appelante), qui aurait en définitive eu lieu, d'après la société Carré Blanc, le 28 décembre 2016.
Quelle que soit la date exacte de cette livraison, il est indiscutable qu'elle est intervenue avec retard étant rappelé que la société Gymworks ne pouvait ignorer que les équipements devaient être installés avant le début des congés de Noël, s'agissant d'une salle exploitée dans une station de sport d'hiver. Le motif du retard n'est pas expliqué par la société Gymworks.
Ce nonobstant, la société Carré Blanc n'a pas refusé la livraison, les nécessités de l'exploitation la conduisant évidemment à recevoir le matériel au plus vite. Le retard ne peut donc fonder à lui seul la résolution de la vente.
Dès la livraison, la société Carré Blanc a fait valoir des réserves sur les caractéristiques des équipements vendus et leur état.
Concernant la non-conformité tenant à la couleur, celle-ci n'est à l'évidence pas établie. En effet, ni le devis, ni la facture, ne font mention de coloris particuliers, ni d'une unité de ceux-ci, et la société Carré Blanc ne démontre pas qu'une telle unité aurait été une condition essentielle du contrat.
S'agissant d'appareils d'occasion reconditionnés, la société Carré Blanc ne peut raisonnablement soutenir que ceux-ci auraient dû être neufs, aucun des documents contractuels ne portant, comme elle le prétend, qu'ils seraient «reconditionnés à neuf».
Aussi, l'absence d'unité de couleur entre les appareils et les petits défauts esthétiques ne peuvent pas constituer une non-conformité de nature à justifier la résolution du contrat de vente.
S'il est établi que lors de la livraison il manquait l'écran de l'elliptique et que l'un des deux tapis de course ne fonctionnait pas, la société Carré Blanc a fait intervenir un technicien le 11 janvier 2017, M. D., lequel atteste (pièce n ° 7 de l'appelante) qu'il a installé à cette occasion la console manquante, a changé la console de l'un des deux tapis de course et a remplacé la sellerie du vélo allongé abîmée. Il précise «à mon départ, tout fonctionnait, seul les capteurs cardiaques d'un des deux tapis n'affichaient pas de pulsations mais les fonctions essentielles fonctionnaient».
Il résulte des échanges entre les parties au mois de mars 2017 (pièce n° 5 de l'appelante) et du courrier de mise en demeure du 14 avril 2017 que le remplacement du tapis de course défectueux a été convenu, ce que la société Gymworks reconnaît.
Sur la défectuosité, il ne peut qu'être constaté par la cour que la société Carré Blanc ne précise pas la nature de celle-ci : il n'est en effet pas prouvé qu'après l'intervention du 11 janvier 2017 le tapis n'ait pas du tout fonctionné, tandis que le défaut d'affichage de la fréquence cardiaque est justifié. La société Carré Blanc affirme sans aucunement l'établir que «la plupart des équipements n'a jamais fonctionné», alors que seul un tapis de course aurait été réellement défectueux dès la livraison, dont M. D. déclare qu'il fonctionnait après son intervention du 11 janvier 2017.
Par ailleurs, M. D. déclare que le 16 mai 2017, il a procédé au remplacement du tapis de course de coloris gris par le même modèle en coloris noir, lequel fonctionnait à son départ.
Toutefois, outre qu'à cette date l'établissement était fermé, la saison d'hiver étant terminée, la société Gymworks ne justifie d'aucun bon de livraison de ce matériel de remplacement et il résulte du procès-verbal de constat d'huissier du 31 janvier 2019 (pièce n° 18 de l'intimée) que la société Carré Blanc était toujours en possession d'un tapis noir et d'un tapis gris (page 8 du procès-verbal). Le remplacement du matériel semble donc ne pas avoir eu lieu.
Cependant, l'huissier n'a pas constaté le fonctionnement ou le non-fonctionnement des matériels alors entreposés dans un local de stockage, de sorte que la persistance de la défectuosité du tapis de course n'est pas établie, ni celle du bruit du vélo allongé.
Il résulte de ce qui précède qu'il a été mis fin aux non-conformités essentielles des matériels livrés dès le 11 janvier 2017, leur persistance après cette date n'étant pas établie, le vendeur ayant donc rempli son obligation de délivrance conforme, même avec retard, mais dans le délai de la garantie contractuelle de 6 mois prévue au contrat.
Le fait que le remplacement du tapis de course gris par un noir n'ait pas été réalisée contrairement aux engagements de la société Gymworks, n'est pas de nature à justifier la résolution du contrat de vente. En effet, ce remplacement, qui ne concerne qu'un seul équipement sur cinq, ne semble avoir été accepté que dans un but purement commercial et fondé essentiellement sur la différence de coloris, non essentielle.
A cet égard, les courriers de réclamation de la société Club 7 relatifs à la défectuosité du matériel (pièces n° 5 et 9 des intimées), doivent être pris avec la plus grande circonspection dès lors que ces courriers simples n'ont aucune date certaine, que le bailleur et le preneur ont manifestement des intérêts communs, sont représentés par des membres de la même famille (M. Marc P. pour la société Carré Blanc, et Mme Carole P. pour la société Club 7) et sont tous deux demandeurs à l'action.
Particulièrement, celui du 2 février 2017 ne peut qu'être de pure convenance puisqu'il y est affirmé que «les divers matériels de fitness n'ont pu être mis en service et par conséquent ne fonctionnent toujours pas à ce jour», alors que l'huissier intervenu le 30 décembre précédent n'avait constaté le dysfonctionnement que d'un seul équipement et que le technicien a bien procédé à des réparations le 11 janvier 2017.
En conséquence, les manquements du vendeur à ses obligations ne sont pas suffisamment graves pour justifier la résolution de la vente et le jugement déféré sera infirmé sur ce point.
2/ Sur les dommages et intérêts
La société Carré Blanc sollicite, à titre subsidiaire et sur le fondement des dispositions de l'article 1611 du Code civil précité, l'allocation de dommages et intérêts équivalents aux loyers perdus du fait du retard de livraison.
Toutefois, la société Carré Blanc ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de ce que sa locataire, la société Club 7, ne lui aurait pas payé les loyers dus.
En effet, le courrier du 29 décembre 2016 (pièce n° 5 des intimées) dont il a été dit ci-dessus le crédit qu'il convient de lui donner, indique simplement «nous nous réservons le droit de ne régler aucun loyer tant que cette situation navrante ne sera pas rétablie», tandis que celui du 2 février 2017 (pièce n° 9) ne fait aucune mention du paiement des loyers.
Au demeurant, la société Club 7 exploite un espace de bien-être dans lequel d'autres activités que la salle de fitness sont exercées.
La société Carré Blanc sera donc déboutée de cette demande de dommages et intérêts.
Concernant les demandes indemnitaires formées par la société Club 7, force est de constater, comme l'a justement fait le tribunal, que le préjudice allégué n'est aucunement démontré, l'absence totale d'exploitation de la salle de fitness n'étant pas établie, sans compter les autres activités exercées sans lien avec les manquements de la société Gymworks.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes indemnitaires.
3/ Sur les demandes accessoires
La société Gymworks sollicite la condamnation de la société Carré Blanc à lui restituer les sommes payées en exécution du jugement infirmé. Toutefois, le présent arrêt vaut titre de restitution sans qu'il soit besoin de prononcer une condamnation particulière à ce titre.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société Gymworks la totalité des frais exposés, et non compris dans les dépens. Il convient en conséquence de lui allouer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
La société Carré Blanc et la société Club 7, qui succombent supporteront les entiers dépens de première instance et d'appel, avec, pour ceux d'appel, distraction au profit de la SCP Christine V.-P. - Carole O.-D. & Associés, avocat, en application de l'article 699 du Code de procédure civile.
Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire, Infirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance d'Albertville le 25 mai 2018, sauf en ce qu'il a débouté la SNC Carré Blanc et la SARL Club 7 de leurs demandes indemnitaires, Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées, Déboute la SNC Carré Blanc et la SARL Club 7 de l'intégralité de leurs demandes, Rappelle que le présent arrêt vaut titre de restitution des sommes versées en exécution de la décision infirmée, Condamne in solidum la SNC Carré Blanc et la SARL Club 7 à payer à la SARL Gymworks la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne in solidum la SNC Carré Blanc et la SARL Club 7 aux entiers dépens avec, pour ceux d'appel, distraction au profit de la SCP Christine V.-P. - Carole O.-D. & Associés, avocat, en application de l'article 699 du Code de procédure civile. Ainsi prononcé publiquement le 16 juin 2020 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, et signé par Michel Ficagna, Président et Sylvie Laval, Greffier.
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