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Décisions

CA Orléans, ch. soc., 20 août 2020, n° 18/00078

ORLÉANS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Sanipousse (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Lecaplain-Morel

Conseillers :

M. Augiron, M. Velly

Avocat :

Selarl Envergure Avocats

Cons. prud'h. Tours, sect. encadrement, …

13 décembre 2017

RESUME DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

La SAS Sanipousse, de la Chaussée Saint Victor (Loir et Cher), créée en 1986, développe une activité de commerce de produits et services en relation avec l'hygiène et la sécurité, à destination des professionnels des métiers de bouche.

Par contrat à durée indéterminée du 28 août 1995, elle a recruté Monsieur François D., en qualité d'attaché commercial, niveau 2, échelon C, au coefficient 185 de la convention collective de la plasturgie.

L'avenant du 8 février 1999 lui a confié la fonction de responsable régional au niveau 4, échelon C, puis un second du 1er juillet 2000 l'a promu directeur des ventes sur l'ensemble de la France métropolitaine, avec un salaire mensuel de 5 260,37 € bruts.

Une clause de non-concurrence a été insérée dans le contrat de travail le 5 septembre 2014, effective à compter du 5 janvier 2015, date de la fin des relations contractuelles. Elle lui a été versée par virements mensuels jusqu'en novembre 2016.

Ce même 5 septembre 2014, une rupture conventionnelle a été conclue entre les parties et homologuée par la DIRECCTE du Loir et Cher, le 14 octobre 2014.

La société Sanipousse s'est estimée victime d'une concurrence déloyale par la SAS Aveline, dans laquelle Monsieur D. avait pris des intérêts, et elle a cherché à se faire remettre des documents tendant à prouver cette concurrence déloyale.

C'est dans ces conditions que la SAS Sanipousse a formé une action contre Monsieur D., le 20 février 2017 devant le Conseil de prud'hommes de Tours, en sa section de l'encadrement, pour :

- qu'il lui rembourse l'indemnité forfaitaire de la clause de non-concurrence

qu'elle lui avait versée à hauteur de 42 346 €,

- qu'il lui règle une somme de 10 000 € de dommages et intérêts, au titre de la violation de la clause de non-concurrence,

- et une seconde de 3 000 € pour les frais de l'article 700 du Code de procédure civile.

De son côté, Monsieur D. a sollicité le paiement :

- du rappel de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence

restée impayée pour décembre 2016, soit 1 841,13 € bruts,

- 5 000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- 2 500 €, sur le fondement de l'article 700 précité.

Par jugement du 13 décembre 2017, le Conseil des prud'hommes a :

- dit la contestation de la société Sanipousse mal-fondée,

en conséquence, l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes,

et à titre reconventionnel,

- condamné la société Sanipousse à verser à Monsieur D. une somme de 1 841,13 € bruts à titre de rappel de contrepartie financière à la clause de non-concurrence pour décembre 2016,

- une somme de 1 100 € au titre de l'article 700 précité,

- débouté Monsieur D. du surplus de ses demandes,

- condamné cette société aux dépens.

Le 09 janvier 2018, la SAS Sanipousse a interjeté appel, par voie électronique, au greffe de cette Cour.

DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES

1°/ ceux de la SAS Sanipousse, appelante principale

Elle conclut à l'infirmation du jugement critiqué et à la condamnation de Monsieur D. à lui régler les sommes suivantes :

- 44.187,12 € bruts, au titre de remboursement de la clause de non-concurrence,

- 21.783,36 € au titre des cotisations patronales,

- 10 000 € de dommages et intérêts pour violation de la clause de non-concurrence,

- 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Sur la recevabilité de son action, elle rappelle ne pas remettre en cause la rupture conventionnelle signée entre les parties, en soulignant que le litige porte exclusivement sur l'avenant du 05 septembre 2014, qui comportait un article premier relatif à l'application de la clause de non-concurrence.

Elle plaide la violation caractérisée de cette clause qui stipulait que Monsieur D. ne pouvait exercer de fonctions similaires ou concurrentes à celles accomplies au sein de la SAS Sanipousse et qu'en l'espèce, en qualité de président de la société Aveline, il n'avait qu'une fonction de représentation et non une fonction commerciale, comme en témoigne la lettre à un prospect du 05 novembre 2016.

Les parties étaient convenues qu'il ne pouvait travailler de manière directe ou indirecte dans une société qui commercialisait les mêmes produits que ceux mentionnés dans son catalogue 2014.

Or la société Aveline a commercialisé en 2016 un grand nombre de produits vendus figurant également dans le catalogue 2014 de la société Sanipousse comme planches à découper, conteneur isotherme, etc.

Ainsi est-il clair, à ses yeux, que Monsieur D. n'a pas respecté la clause qui le liait à elle.

Cette clause précisait également l'interdiction faite à Monsieur D. de détenir un intérêt quelconque dans une société « exerçant une activité concurrente au sens de l'alinéa précédent ».

En fait, il est président de la SAS Aveline, dont il détient une partie majoritaire du capital social. La portée de la clause, qui conditionne sa validité, doit s'apprécier par rapport à l'activité réelle de l'entreprise et non par rapport à la définition statutaire de son objet.

Et il est établi que la clientèle des deux sociétés reste quasiment identique, même si celle de la société Sanipousse apparaît plus large.

La société Aveline revendique le travail autour de quatre univers : les épices, les emballages, l'hygiène et le matériel. Un courriel du 05 novembre 2016 de Monsieur D. indique qu'il était fournisseur auprès de l'ensemble des professionnels de la restauration, ce qui démontre qu'il ne limitait pas la distribution de ses produits auprès de la seule filière de la boucherie-charcuterie.

Lorsque le salarié ne respecte pas la clause de non-concurrence, l'employeur est bien fondé à demander le remboursement de la contrepartie financière versée chaque mois, soit une somme globale de 44 187,12 € ainsi qu'une autre somme de 21 783,36 € au titre des cotisations patronales qu'elle a eue à verser à l'URSSAF à ce titre.

Dès lors que la clause litigieuse n'a pas été respectée, la société Sanipousse a subi un préjudice moral qui doit être réparé à hauteur de 10 000 € de dommages et intérêts.

2°/ ceux de Monsieur D., appelant incident

Il sollicite, au vu des éléments de fait et de droit versés au débat :

in limine litis, le constat de l'irrecevabilité de la contestation de la

société Sanipousse,

en tout état de cause, le constat qu'elle est déloyale et mal fondée,

en conséquence, le débouté de l'intégralité des demandes de la société Sanipousse,

l'infirmation partielle du jugement contesté en ce qu'il l'a débouté de sa demande de 5 000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive,

la confirmation de ce jugement, pour le surplus,

à titre reconventionnel,

la condamnation de la société Sanipousse à lui verser 1 841,13 € bruts à titre de rappel de la contrepartie financière à la clause de non-concurrence pour décembre 2016, 5 000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive et 2 500 € pour les frais de l'article 700 du Code de procédure civile.

Sur l'irrecevabilité de la contestation, il rappelle les termes de l'article L. 1237-14 du Code du travail selon lequel le recours juridictionnel doit être formé, à peine d'irrecevabilité, avant l'expiration d'un délai de douze mois à compter de la date d'homologation de la convention.

Or, en agissant le 20 décembre 2016, la société Sanipousse a réagi tardivement par rapport à l'homologation de la DIRECCTE du 14 octobre 2014.

Il développe le caractère déloyal de la contestation eu égard à l'article 8 alinéa 1 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, l'article 9 du Code civil et l'article L. 1221-1 du Code du travail, puisque la filature organisée pour contrôler l'activité d'un salarié s'avère un mode de preuve illicite, en ce qu'elle porte atteinte à la vie privée.

En effet, la contestation de la société Sanipousse repose surtout sur le rapport d'un détective privé du 11 octobre 2016 qu'il convient d'écarter des débats.

En tout état de cause, il développe le caractère mal fondé de la contestation adverse, en raison :

- de la tardiveté de la contestation opérée, puisque la société Sanipousse a attendu décembre 2016, pour se faire justice à elle-même, en supprimant la contrepartie financière de la clause pour ce mois-là, violant ainsi le principe de bonne foi énoncé par l'article L. 1221-1 du Code du travail,

- de l'absence de toute démonstration d'activité concurrente de la société Aveline, comprenant 8 salariés, concessionnaire de la marque Les Produits Français du groupe Vanhees pour les bouchers et charcutiers.

La société Aveline est spécialisée dans la distribution de produits à destination des professionnels des métiers de bouche, artisans bouchers, charcutiers, traiteurs.

Elle compte 20 000 références de produits en stock concernant les marinades, emballages kraft, trancheurs, hachoirs, verrines et décorations de table, tandis que la société Sanipousse fabrique des produits en relation avec l'hygiène et la sécurité à destination de la restauration collective et commerciale et plus précisément, pour un tiers, à destination de la restauration collective publique et, pour les deux-tiers, à destination de la restauration collective privée.

Pour lui, l'activité de la société Aveline n'a rien à voir avec celle de Sanipousse, puisqu'elles interviennent sur des marchés distincts, en sorte que Sanipousse ne peut qu'échouer dans sa démonstration de concurrence déloyale.

Elle a cru utile, le 23 novembre 2016, de diligenter, par surprise, un huissier de justice, mandaté par le président du Tribunal de commerce de Tours auprès du siège social de la société Aveline, le 1er décembre suivant, pour faire saisir les listings de clientèle, les numéros de téléphone appelés, les états de frais professionnels, les rendez-vous pris par Monsieur D., les devis, les commandes.

Par arrêt du 24 mai 2018, la chambre commerciale de cette cour a rétracté l'ordonnance du 23 novembre 2016.

Le site internet d'Aveline n'a été mis en ligne que le 10 février 2017, date postérieure à la fin de l'obligation de non-concurrence, en sorte que toute analogie avec le catalogue 2014 de Sanipousse ne peut prospérer.

Par ailleurs, lui-même n'exerce pas les mêmes fonctions que celles occupées auparavant chez Sanipousse : président de la société à l'heure actuelle alors qu'il était directeur des ventes dans son précédent emploi.

Il critique, comme fallacieux, les derniers éléments produits par la société Sanipousse, puisqu'ils sont datés de juin et décembre 2018, ou encore janvier 2019, dates bien postérieures à l'extinction de la clause de non-concurrence.

Dans la mesure où aucune violation de cette clause n'a pu être commise, la demande de remboursement ne peut qu'être écartée.

Quant aux cotisations patronales, elles ont été versées à l'URSSAF directement alors que lui-même n'en a jamais été bénéficiaire. Au besoin, elle pouvait en solliciter le remboursement auprès de l'URSSAF, selon les modalités et conditions prévues à l'article L. 243-6 du Code de la sécurité sociale. Ce litige ne ressort à l'évidence pas d'un litige prud'homal, mais relève du droit de la sécurité sociale.

La réparation du préjudice moral doit également être repoussée, faute de la moindre preuve d'un préjudice rapportée par la société Sanipousse.

En revanche, elle continue à lui devoir le mois de décembre 2016 de la contrepartie financière et Monsieur D. estime que la procédure introduite par son adversaire relève de l'abus de droit, ce qui justifie une allocation de dommages et intérêts à hauteur de 5 000 €.

MOTIFS DE LA DÉCISION.

La notification du jugement est intervenue le 14 décembre 2017, en sorte que l'appel principal de la SAS Sanipousse, régularisé par voie électronique, le 9 janvier 2018, au greffe de cette cour, dans le délai légal d'un mois, s'avère recevable en la forme, comme l'appel incident de Monsieur D., sur le fondement des dispositions de l'article 550 du Code de procédure civile.

Les dernières conclusions récapitulatives des parties ont été remises au greffe par voie électronique :

le 13 janvier 2020, par la SAS Sanipousse,

et le 9 avril 2020, par Monsieur D..

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 avril 2020.

1°Sur la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur D.

L'article L. 1237-14 du Code du travail rappelle que le recours juridictionnel concernant la convention d'homologation doit être formé, à peine d'irrecevabilité, avant l'expiration d'un délai de douze mois à compter de la date d'homologation de la convention.

Celle-ci a été signée par la DIRECCTE du Loir et Cher, le 14 octobre 2014, alors que la SAS Sanipousse a introduit son action, devant le Conseil de prud'hommes de Blois seulement le 20 décembre 2016, postérieurement au délai impératif d'un an.

Cependant, la société Sanipousse ne critique aucune des dispositions de cette convention, mais invoque la violation de la clause de non-concurrence convenue entre elle et Monsieur D. aux termes de l'avenant n° 5 du 5 septembre 2014.

La convention de rupture conventionnelle, en son article 3, précise que « Les parties décident de rompre le contrat à durée indéterminée qui les lie, et conviennent d'un commun accord des conditions de la rupture de ce contrat :

-droits afférents à la rupture de contrat, versement d'une indemnité de rupture d'un montant de 145 000 €,

- date envisagée de la rupture : 05 janvier 2015. »

Les deux parties ont ponctuellement exécuté leurs engagements réciproques à cet égard et aucune clause de cette convention n'a, par la suite, été contestée.

Le délai de prescription de 12 mois prévu par l'article L. 1237-14 du Code du travail, exclusivement applicable aux recours formés contre les conventions d'homologation ne trouvant pas à s'appliquer au présent litige qui porte uniquement sur la violation alléguée de la clause de non-concurrence, la fin de non-recevoir soulevée ne peut qu'être écartée.

2° Sur le caractère déloyal de la contestation, allégué par Monsieur D.

Monsieur D. s'insurge contre la filature d'un détective privé, mandaté par la SAS Sanipousse, qui a établi un rapport d'enquête, le 11 octobre 2016, produit en première instance.

Cet acte bafoue, à ses yeux, les règles élémentaires de l'article 8 alinéa 1er de la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article 9 du Code civil et de l'article L. 1221-1 du Code du travail, en sorte qu'il s'agit d'un moyen de preuve illicite, dès lors qu'il implique nécessairement une atteinte à la vie privée, insusceptible d'être justifiée, eu égard à son caractère disproportionné, par les intérêts légitimes de l'employeur.

Cependant, la SAS Sanipousse a cessé de produire cette pièce en cause d'appel, en sorte que la cour ne peut plus avoir aucun égard envers elle, ce qui ôte tout caractère déloyal à la contestation de la société, sur le fond de laquelle la cour peut désormais statuer, après avoir écarté l'irrecevabilité soulevée.

3°Sur l'allégation de non-respect de la clause de non -concurrence.

Cette clause a été insérée par les parties dans l'avenant n°5 au contrat de travail, le 05 septembre 2014. Elle stipule que :

« Compte tenu de la nature des fonctions exercées par Monsieur D. au sein de la société Sanipousse, celui-ci s'engage, postérieurement à la rupture de son contrat de travail et quelle qu'en soit la cause, à ne pas exercer directement ou indirectement ou par personnes interposées, de fonctions similaires ou concurrentes de celles exercées en dernier lieu, au sein de la société SANIOPOUSSE ».

Ainsi, Monsieur D. s'interdisait de :

- s'intéresser directement ou indirectement, et de quelque manière que ce soit, à toute société, entreprise ou organe juridique pouvant concurrencer l'activité de la société Sanipousse, à savoir la commercialisation de tous les produits et services actuellement vendus par la société Sanipousse et présents dans le catalogue 2014 ;

- détenir directement ou indirectement un intérêt quelconque dans une société, une entreprise exerçant une activité concurrente, au sens de l'alinéa précédent ;

- céder ou concéder à des tiers directement ou indirectement tous brevets, marques, dessins, noms de domaines ou autres droits susceptibles d'être protégés et s'inscrivant dans le champ d'activité de la société Sanipousse, tels que découlant des produits et services actuellement vendus et présents dans son catalogue 2014.

Il était encore convenu que :

- compte tenu de l'activité de la société, cette interdiction de concurrence était applicable pendant une durée de deux ans et s'appliquait à tout le territoire français ;

- en contrepartie de l'obligation de non-concurrence et pendant toute la durée de l'interdiction, Monsieur D. percevrait une indemnité spéciale forfaitaire, versée mensuellement de 35% de sa rémunération brute mensuelle de ses douze derniers mois de présence dans la société Sanipousse ;

- en cas de violation de la clause, quelle qu'en soit la gravité, la société Sanipousse serait libérée du versement de cette indemnité et Monsieur D. serait redevable du remboursement des sommes qu'il aurait perçues à ce titre ;

- le paiement de cette indemnité ne portait pas atteinte au droit, que la société Sanipousse se réservait expressément, de poursuivre Monsieur D. en remboursement du préjudice effectivement subi et faire ordonner, sous astreinte, la cessation de l'activité concurrentielle ;

- de son côté, en cas de non- respect par la société Sanipousse des termes de la présente clause (notamment au niveau du règlement de la contrepartie financière), Monsieur D. serait automatiquement libéré de ses obligations et la société Sanipousse serait redevable à son égard des sommes non réglées jusqu'au terme de l'interdiction.

- la société Sanipousse se réservait toutefois la faculté de réduire la durée d'application de la clause de non-concurrence ou de renoncer à son application, et ainsi, de libérer Monsieur D. de l'interdiction de concurrence, sans que celui-ci ne puisse prétendre au paiement d'une quelconque indemnité.

- la renonciation ou la réduction serait formulée par l'employeur par lettre recommandée avec accusé de réception dans le délai de 15 jours suivant la rupture du contrat de travail, quelle que soit la partie à l'initiative de celle-ci.

La clause de non- concurrence doit s'interpréter, de manière stricte et s'apprécier par rapport à l'activité réelle de l'entreprise et non par rapport à la définition statutaire de son objet.

En l'espèce, les faits doivent être authentifiés entre le 06 janvier 2015, premier jour de l'entrée en application de la clause, et le 05 janvier 2017, dernier jour de la validité de la clause, ce qui conduira la cour à repousser toute pièce postérieure à cette dernière date, à moins qu'elle ne rapporte des faits de non- concurrence antérieurs au 05 janvier 2017.

sur la définition des deux sociétés respectives.

L'extrait K bis de la SAS Aveline, de St Pierre des Corps (Indre et Loire), démontre que ses activités principales concernent les produits de laboratoires pour boucheries, charcuteries, boulangeries, pâtisseries, alimentation, produits d'entretien, vins et spiritueux (vente en gros), vente de tout matériel de production.

Le président en est la SAS Basix Invest, dont le président est Monsieur François D., apporteur de parts à hauteur de 300 000 € sur un total de 440 000 €, qui héberge, à son domicile de Saint- Cloud (Hauts de Seine), cette société, qu'il a reprise en novembre 2015.

La publicité concernant cette entreprise précise que le cœur de son activité concerne la distribution de produits : papiers alimentaires, sacs et barquettes d'emballage, matériels et décorations de tables, avec 2 000 références de produits en stock.

Mais l'hygiène est aussi un de ses quatre secteurs, selon une autre publicité d'Aveline de 2016 (pièce 23 de Sanipousse) comprenant :

Les abrasifs et accessoires de nettoyage,

Les bobines d'essuyage,

La brosserie,

Le contrôle des huiles et températures,

Le matériel de lavage,

Les produits de lessive,

Les protections des aliments et des personnes,

Les systèmes de dilution,

Les tapis de désinfection,

La traçabilité des aliments,

L'usage unique.

De son côté, la SAS Sanipousse, de la Chaussée St Victor (Loir et Cher) développe une activité de commerce de produits et services en relation avec l'hygiène et la sécurité, à destination des professionnels des métiers de bouche, en restauration collective et commerciale. 65% de son chiffre d'affaires est réalisé avec des sociétés des métiers de bouche privées (pièce 21 de Sanipousse). Elle commercialise des systèmes d'autocontrôle, de traçabilité et d'hygiène, des systèmes de protection des aliments et des matériels en contact avec les aliments, ou encore des éléments relatifs à la sécurité ou à l'hygiène des personnes.

En d'autres termes, elle est le spécialiste de l'hygiène et de la traçabilité en restauration collective et commerciale. Cette première approche permet donc de mesurer que l'activité de ces deux sociétés comprend une plage commune, afférente à l'hygiène des professionnels des métiers de bouche, alors que, selon la clause de non-concurrence, Monsieur D. s'interdisait de s'intéresser, directement ou indirectement, de quelque manière que ce soit, à toute société pouvant concurrencer l'activité de la société Sanipousse. Il s'ensuit qu’à l'égard de cette première constatation, la violation de la clause est caractérisée.

La comparaison des catalogues : il n'est pas contesté par Monsieur D. que la société Aveline a commercialisé, en 2016, et donc pendant la période valable de la clause de non-concurrence, un grand nombre de produits, vendus, et qui figuraient également dans le catalogue 2014 de Sanipousse (pièces 14, 15, et 20). Il s'agit :

-de la planche à découper blanche : 600 x 400, p.86 du catalogue Sanipousse (pièce 15 et p.2 de la pièce 20),

-de la bobine à dévidage, p.24 du catalogue Sanipousse (p.2, pièce 20),

-des thermomètres de contrôle de température p.16 du catalogue Sanipousse (p.6 de la pièce 20),

-de désinsectiseurs : p.91 du catalogue Sanipousse (p.6 de la pièce 20),

- de collecteurs : p.92 du catalogue Sanipousse (p.6 de la pièce 20),

- de films étirables : p.35 du catalogue Sanipousse (p.6 de la pièce 20),

- de containers isothermes : p. 41 du catalogue Sanipousse (p.8 de la pièce 20).

La comparaison des deux catalogues, de Sanipousse de 2014, et d'Aveline de 2016, démontre ainsi un grand nombre de références et de produits identiques vendus par la société de Monsieur D. qui les a directement tirés du catalogue Sanipousse. Cette dernière société a inclus, dans ses pièces précitées, le catalogue et les publicités Aveline pour opérer, au mieux, sa démonstration.

Il reste indifférent au sort du litige que ces produits aient été commercialisés par d'autres sociétés du secteur.

Le premier alinéa de la clause de non-concurrence spécifiait bien que « Monsieur D. s'interdisait de commercialiser tous les produits et services actuellement vendus par la société Sanipousse et présents dans le catalogue 2014 ».

Il en ressort, de façon claire, que Monsieur D. a violé, à cet égard également, les prescriptions impératives de la clause de non-concurrence.

sur la demande de remboursement de la contrepartie financière à l'obligation de non-concurrence.

Lorsque le salarié ne respecte pas la clause de non-concurrence, l'employeur est bien fondé à lui demander le remboursement de la contrepartie financière.

La société Sanipousse a réglé à Monsieur D. 1841,13 € mensuellement de janvier 2015 à novembre 2016.

Cependant, il convient d'établir, à compter de quelle date exacte, la violation est intervenue, pour faire jouer la clause du remboursement rédigée ainsi : « En cas de violation de la présente clause, quelle qu'en soit la gravité, la société Sanipousse sera libérée du versement de cette indemnité, et Monsieur François D. sera redevable du remboursement des sommes qu'il aurait perçues à ce titre. »

La pièce 8 de la société Sanipousse reproduit une actualité de la publication « Cédants et repreneurs d'affaires » qui annonce, le 02 février 2016, la reprise par Monsieur D. de la société Aveline, commerce de gros pour métiers de bouche, à la date de novembre 2015.

La pièce 10 reproduit les statuts de la société BASIX INVEST, déposés le 20 novembre 2015.

La pièce 14 s'analyse en un devis d'Aveline de 2016, mais dont les autres dates et prix ont été biffés. Cependant, des adhésifs, une planche à découper et des bobines de cheminées, énoncés dans ce devis sont des produits identiques à ceux commercialisés par Sanipousse, dans son catalogue 2014 pages 18, 24, et 86.

Ainsi est-il établi que l'activité réelle de la SAS Aveline a commencé, tout bien considéré, au tout début de l'année 2016, pour tenir compte des délais nécessaires à sa mise en place. C'est également alors qu'a débuté la violation de la clause de non- concurrence.

Il en ressort que la contrepartie financière à l'obligation de non-concurrence ne peut plus être due à compter du 05 janvier 2016 et que Monsieur D. doit rembourser à la société Sanipousse les sommes qu'il a perçues à compter de cette date jusqu'au 5 décembre 2016 inclus, soit 1 841,13 € x 12 = 22 093,56 €, puisque la société Sanipousse a versé la contrepartie à l'obligation de non-concurrence jusqu'au 5 novembre 2016 inclus et justifie (bulletin de paie de janvier 2018) avoir payé l'échéance du mois de décembre 2016 en exécution du jugement entrepris.

sur la demande de remboursement des cotisations patronales.

C'est à juste titre que Monsieur D. oppose que ce n'est pas à lui que la société Sanipousse a versé les cotisations patronales mais à l'URSSAF auprès de laquelle seule il peut en solliciter le remboursement.

Cette demande sera en conséquence rejetée.

3° Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral.

La société Sanipousse qui sollicite, une somme de 10 000 € en réparation de son préjudice moral a incontestablement subi un tel préjudice dans la mesure où Monsieur D., son collaborateur pendant plus de vingt ans, a délibérément violé une clause de non-concurrence qu'il avait souscrite, pour laquelle il s'était engagé, et qui était compensée par une somme mensuelle appréciable. Elle a, ainsi, été dupée, en s'étant contrainte à verser la contrepartie financière pendant 11 mois, durant lesquels Monsieur D. ne respectait plus, lui-même, ses engagements.

En l'état des éléments soumis à l'appréciation de la cour, le préjudice moral qui en est résulté pour la société Sanipousse sera justement réparé par l'allocation d'une somme de 3 000 € que Monsieur D. sera condamné à lui payer.

4° Sur les demandes reconventionnelles formées par Monsieur D.

Monsieur D. ayant violé son obligation de non-concurrence, il ne peut pas prétendre au paiement de la contrepartie à l'obligation de non-concurrence afférente au mois de décembre 2016.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné la société Sanipousse à lui payer la somme de 1 841,13 € de ce chef et Monsieur D. sera débouté de cette prétention.

La société Sanipousse prospérant en son action, Monsieur D. est mal fondé à soutenir que celle-ci procéderait d'un comportement abusif. Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive.

5° Sur les demandes au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Pour les frais non compris dans les dépens que la SAS Sanipousse a exposés en première instance et en appel, Monsieur D. devra lui régler une somme de 4 000 €, alors qu'il succombe pour l'essentiel de sa thèse. Et sa réclamation à ce titre, à hauteur de 2 500 €, ne pourra qu'être rejetée.

Par ces motifs : LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe et en dernier ressort, Reçoit, en la forme, l'appel principal de la SAS Sanipousse et l'appel incident de Monsieur François D. ; Rejette la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur D. ; Au fond, Confirme le jugement entrepris, rendu entre les parties, par le Conseil de prud'hommes de Tours, en sa section de l'encadrement, le 13 décembre 2017, seulement en ce qu'il a débouté Monsieur François D. de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive ; L'infirme en toutes ses autres ses dispositions ; Statuant à nouveau des chefs infirmés et ajoutant, Dit qu'à compter du 1er janvier 2016, Monsieur François D. a violé la clause de non-concurrence, convenue entre les parties le 5 septembre 2014, et valable du 6 janvier 2015 au 5 janvier 2017 ; En conséquence, Le condamne à rembourser à la SAS Sanipousse la somme de 22 093,56 €, représentant les versements effectués du 5 janvier 2016 au 5 décembre 2016 inclus au titre de la contrepartie financière à la clause de non-concurrence ; Le condamne à payer à la SAS Sanipousse la somme de 3 000 € de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral lié à la violation de cette clause et celle de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais exposés à ce titre en première instance et en appel ; Rejette la demande en paiement formée par la société Sanipousse à l'encontre de M. François D. au titre des cotisations patronales qu'elle a versées à l'URSSAF ; Déboute Monsieur François D. de sa demande en paiement de la somme de 1 841,13 € bruts à titre de rappel de contrepartie financière à l'obligation de non-concurrence pour le mois de décembre 2016 et de ses demandes fondées sur l'article 700 du Code de procédure civile tant en première instance qu'en appel ; Condamne Monsieur François D. aux dépens de première instance et d'appel.