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Décisions

CA Chambéry, ch. civ. sect. 1, 30 juin 2020, n° 18/01858

CHAMBÉRY

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Courcheneige (SNC)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ficagna

Conseiller :

Mme Fouchard

Avocat :

Mme Real Del Sarte

T. com. Chambéry, du 12 sept. 2018

12 septembre 2018

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Courcheneige exploite à Courchevel 1850 un fonds de commerce d'hôtel-bar-restaurant à l'enseigne Etoile des Neiges.

Selon courrier du 15 septembre 2016, la société Cafés F. a adressé à la société Courcheneige, à l'attention de M. S., une offre tarifaire comprenant la mise à disposition de machines à café et de divers matériels (frigos, machines à jus de fruits), ainsi que la fourniture de consommables (café, thé et autres boissons) pour une durée de 60 mois.

Cette offre a été acceptée le 21 septembre 2016 par M. S. « dûment habilité » et sept conventions d'approvisionnement assorties d'une mise à disposition de matériel ont été signées au nom de la société Courcheneige avec la société Cafés F. les 14 novembre et 26 décembre 2016.

Ces conventions prévoient, en contrepartie de la mise à disposition du matériel et de son entretien par la société Cafés F., la commande par la société Courcheneige d'un volume annuel minimum de consommables à un tarif fixé au contrat, et ce pendant une durée ferme et irrévocable de 60 mois.

L'établissement ayant fait l'objet de travaux, la société Cafés F. a procédé à la reprise partielle du matériel pour gardiennage en avril 2017.

En vue de l'ouverture de la saison 2017/2018, la société Cafés F. a répondu à un appel d'offres lancé par la société Courcheneige en établissant une nouvelle offre tarifaire le 18 octobre 2017. Le 9 novembre 2017, il a été fait part par M. T., pour le compte de la société Courcheneige, de la décision de l'établissement de « ne pas reconduire avec les Cafés F. pour la saison à venir », et invitant la société Cafés F. à venir récupérer les matériels restants.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 16 novembre 2017, la société Cafés F. s'est étonnée de cette décision et a rappelé à la société Courcheneige les conventions signées le 14 novembre 2016 contenant une clause prévoyant, outre la restitution du matériel, le paiement d'une indemnité de résiliation égale à la partie non amortie sur les marchandises, soit la somme de 25.235 euros. La société Cafés F. a ainsi mis en demeure la société Courcheneige de reprendre les relations commerciales dans un délai de huit jours, sous peine de se prévaloir de la clause de résiliation.

La société Courcheneige, par l'intermédiaire de son conseil, a alors contesté avoir signé les conventions du 14 novembre 2016 et soutenu ne devoir aucune somme à la société Cafés F..

C'est dans ces conditions que, par acte délivré le 27 décembre 2017, la société Cafés F. a fait assigner la société Courcheneige devant le tribunal de commerce de Chambéry pour :

- voir constater la résiliation des différents contrats aux torts de la société Courcheneige,

- condamner celle-ci au paiement de la somme de 36.679 euros au titre de l'indemnité de résiliation,

- la condamner à restituer sous astreinte les trois machines restées en sa possession,

- condamner la société Courcheneige au paiement d'une indemnité procédurale.

La société Courcheneige s'est opposée aux demandes en contestant être engagée par les contrats du 14 novembre 2016, M. S. n'ayant pas le pouvoir de la représenter. Elle a également soulevé la nullité de la clause de résiliation.

Par jugement contradictoire rendu le 12 septembre 2018, le tribunal de commerce de Chambéry a :

* déclaré régulières, recevables et en partie fondées les demandes de la société Cafés F. à l'égard de la société Courcheneige qui s'appuient sur les sept conventions d'approvisionnement 171419, 171420, 171421, 171422, 171423, 171425 et 171441, assorties de mises à disposition de matériels, signées entre ces sociétés les 14 novembre et 26 décembre 2016,

* dit qu'il appartient à la société Cafés F. de récupérer à ses frais les matériels visés à ces sept conventions que la société Courcheneige tient à sa disposition dans ses locaux,

* condamné la société Courcheneige à payer, en deniers ou quittances valables, à la société Cafés F. :

- la somme de 15.000 euros, montant principal de la cause sus-énoncée,

- la somme de 2.500 euros à titre d'indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- les dépens dont frais de greffe,

* ordonné l'exécution provisoire de la décision,

* débouté les parties de toute autre demande.

Par déclaration du 28 septembre 2018, la société Courcheneige a interjeté appel de ce jugement.

L'affaire a été clôturée à la date du 4 mai 2020 et renvoyée initialement à l'audience du 18 mai 2020. En raison de la crise sanitaire, elle a fait l'objet d'un avis de procédure sans audience le 23 avril 2020, en application de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304. Les parties ayant donné leur accord, l'affaire a été mise en délibéré à la date du 30 juin 2020.

Par conclusions notifiées le 19 décembre 2018, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, la société Courcheneige demande en dernier lieu à la cour de :

Vu les dispositions des articles 31, 32-1 et 122 du code de procédure civile,

Vu les articles 1119, 1156, 1158, 1171, 1231-5 et 1240 du code civil,

Vu les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce,

* confirmer le jugement déféré en ce qu'il a jugé qu'il appartient à la société Cafés F. de récupérer à ses frais les matériels visés à ces sept conventions que la société Courcheneige tient à sa disposition dans ses locaux,

* infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

- déclaré régulières et recevables et en partie fondées les demandes de la société Cafés F.,

- condamné la société Courcheneige à payer à la société Cafés F. les sommes de 15.000 euros, montant principal, 2.500 euros à titre d'indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile, et les dépens,

Statuant à nouveau,

* prendre acte de ce que la société Courcheneige tient à sa disposition de la société Cafés F., dans ses locaux, la machine à café Necta Colibri, le moulin à café Santos et la chocolatière,

A titre principal, sur l'irrecevabilité de la demande de condamnation au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation anticipée :

* dire et juger que les contrats d'approvisionnement invoqués par la société Cafés F. sont parfaitement inopposables à la société Courcheneige,

* en conséquence, dire et juger que, faute d'engagement contractuel régularisé entre les parties et opposable à la société Courcheneige, la société Cafés F. est irrecevable en sa demande d'indemnité contractuelle de résiliation anticipée,

* rejeter purement et simplement, sans examen au fond, la demande de la société Cafés F.,

A titre subsidiaire, sur l'inopposabilité du contrat et la nullité des conditions générales de la société Cafés F. :

* dire et juger que les contrats d'approvisionnement invoqués par la société Cafés F. sont parfaitement inopposables à la société Courcheneige,

* dire et juger que les conditions générales de la société Cafés F. sont inopposables à la société Courcheneige,

* en conséquence, débouter la société Cafés F. de sa demande d'indemnité contractuelle de résiliation anticipée,

* à défaut, dire et juger que les conditions générales de vente invoquées par la société Cafés F., et à tout le moins l'article 8, sont abusives en ce qu'elles créent un déséquilibre significatif entre les parties et doivent être réputées non écrites,

* en conséquence, débouter la société Cafés F. de sa demande de condamnation de la société Courcheneige au règlement d'une indemnité contractuelle de résiliation anciticipée fondée sur l'article 8 des conditions générales,

A titre infiniment subsidiaire, sur la modération du montant de l'indemnité contractuelle de résiliation :

* dire et juger que l'indemnité réclamée doit être qualifiée de clause pénale au sens de l'article 1231-5 du code civil,

* constater que la société Cafés F. ne justifie pas de l'existence d'un quelconque préjudice résultant de la résiliation anticipée du contrat d'approvisionnement et qu'elle est manifestement excessive,

* en conséquence, dire et juger qu'il y a lieu de ramener les prétentions de la société Cafés F. à de plus justes proportions et fixer la créance à hauteur de l'euro symbolique,

En toute hypothèse,

* débouter la société Cafés F. de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

* condamner la société Cafés F. à payer à la société Courcheneige la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

* condamner la société Cafés F. au paiement de 7.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamner la même aux entiers dépens de l'instance.

Par conclusions notifiées le 14 mars 2019, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, la société Cafés F. demande en dernier lieu à la cour de :

Vu les articles 1103, 1193 et 1104 du code civil (ancien article 1134),

* confirmer le jugement déféré en ce qu'il est entré en voie de condamnation à l'encontre de la société Courcheneige,

* le réformer sur le montant de la somme principale allouée,

* et statuant à nouveau,

* constater la résiliation des contrats d'approvisionnement en date du 14 novembre 2016 n° 171419, 171420, 171421, 171422, 171423, 171425 et 171441 aux torts de la société Courcheneige,

* condamner la société Courcheneige à payer à la société Cafés F. les sommes de :

- 36.679 euros au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation anticipée des différents contrats,

- 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* débouter la société Courcheneige de l'intégralité de ses prétentions financières,

* la condamner aux dépens.

MOTIFS ET DÉCISION

1°) Sur la recevabilité de l'action

En application de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

L'article 31 du code de procédure civile dispose que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

En l'espèce, la société Courcheneige soutient que la société Cafés F. n'aurait pas intérêt à agir puisque le contrat n'a pas été signé par elle.

Toutefois, il est constant que la société Cafés F. a fourni du matériel et des consommables à la société Courcheneige pour la saison 2016/2017, dont le paiement par cette dernière n'est pas contesté, de sorte que les parties ont nécessairement été liées par un contrat.

De ce seul fait la société Cafés F. a intérêt à agir.

La contestation élevée par la société Courcheneige quant à la validité de son engagement au titre des conventions des 14 novembre et 26 décembre 2016, signées par M. S., relève du fond du droit et non d'une fin de non-recevoir.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a jugé l'action recevable.

2°) Sur l'opposabilité à la société Courcheneige des conventions litigieuses

L'appelante soutient que les conventions dont la société Cafés F. se prévaut ne lui sont pas opposables dès lors que leur signataire, M. S., n'avait pas le pouvoir de la représenter puisqu'il n'est ni salarié, ni dirigeant social, ni même associé de la société Courcheneige.

En application de l'article 1156 du code civil, l'acte accompli par un représentant sans pouvoir ou au-delà de ses pouvoirs est inopposable au représenté, sauf si le tiers contractant a légitimement cru en la réalité des pouvoirs du représentant, notamment en raison du comportement ou des déclarations du représenté.

L'article 1998 du même code dispose que le mandant est tenu d'exécuter les engagements contractés par le mandataire, conformément au pouvoir qui lui a été donné. Il n'est tenu de ce qui a pu être fait au-delà, qu'autant qu'il l'a ratifié expressément ou tacitement.

La preuve de l'existence d'un mandat apparent peut être rapportée par tout moyen par le tiers contractant qui l'invoque.

En l'espèce, il résulte des pièces produites aux débats que M. S., en signant les conventions litigieuses, s'est expressément présenté comme « dûment habilité » à représenter la société Courcheneige (pièce n°2 de l'intimée).

La société Courcheneige ne conteste pas avoir reçu livraison, ensuite de la signature des conventions litigieuses, des machines visées par celles-ci, ni avoir régulièrement commandé et payé des consommables aux prix indiqués, ce qui ressort de la pièce n° 8 produite par la société Cafés F. (statistique client au 30/11/2017). L'appelante ne conteste pas non plus avoir bénéficié, pendant cette période, de la mise à disposition et de la maintenance gratuites des matériels.

Par ailleurs, dans sa réponse négative à la nouvelle proposition tarifaire émise par la société Cafés F. le 18 octobre 2017, la société Courcheneige, représentée par M. T., indique: «suite à l'étude de votre proposition pour la saison 2017-18, la direction de l'établissement a pris la décision de ne pas reconduire avec les Cafés F. pour la saison à venir» (pièce n° 5 de l'intimée), ce qui confirme l'existence d'un contrat antérieur dont la poursuite n'est pas souhaitée par la société Courcheneige.

La société Cafés F. souligne à juste titre que M. T., dont le mandat n'est pourtant pas contesté, n'est également ni salarié, ni dirigeant social, ni associé de la société Courcheneige, mais directeur d'une société Appro'Solutions, prestataire de services. Il est par ailleurs établi que M. S., pour sa part, est intervenu dans les travaux de restauration de l'hôtel en 2016, particulièrement ceux du restaurant (pièces n° 13 à 16 de l'intimée), de sorte que la société Courcheneige ne peut pas sérieusement prétendre ne pas le connaître ni avoir été en relation avec lui.

Il résulte de ces éléments que la société Cafés F. a légitimement pu croire que la signature de M. S. engageait la société Courcheneige, qui de surcroît a ratifié au moins tacitement cet engagement en exécutant une partie des contrats, et, si M. S. a outrepassé les pouvoirs qui lui avaient été donnés, il appartient à la société mandante de lui en demander compte.

Aussi, c'est à bon droit et par des motifs que la cour adopte que le tribunal a retenu que les conventions des 14 novembre et 26 décembre 2016 sont opposables à la société Courcheneige qui doit les exécuter.

3°) Sur la validité des conditions générales de vente

La société Courcheneige soutient que les conditions générales de vente dont la société Cafés F. se prévaut n'ont pas été paraphées ni signées, de sorte qu'elle n'en a pas eu connaissance et lui seraient inopposables.

Toutefois, c'est à juste titre et par des motifs pertinents que la cour adopte que le tribunal a retenu que les conventions litigieuses indiquent en caractères parfaitement lisibles, en exergue des conditions particulières, que (pièce n° 3 de l'intimée) :

« Il est établi une convention d'approvisionnement assortie d'une mise à disposition de matériel dont les conditions générales figurent au verso et les conditions particulières ci-après. Le client déclare en avoir pris connaissance. »

Ces conditions particulières sont dûment signées par le dépositaire-client, de sorte que celui-ci est réputé avoir pris connaissance des conditions générales figurant au verso.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a jugé que ces conditions générales sont opposables à la société Courcheneige.

La société Courcheneige soutient encore que tant les conditions générales dans leur ensemble que l'article 8 de celles-ci, intitulé « résiliation du contrat », seraient nuls en ce qu'ils créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.

Elle invoque à cet effet les dispositions de l'article L. 446-2, I-2°du code de commerce selon lequel engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

Toutefois, c'est en vain que la société Courcheneige invoque ces dispositions, l'action fondée sur cet article relevant des seuls pouvoirs des juridictions désignées par les articles D. 442-3 et D. 442-4 du code de commerce au nombre desquelles ne figurent ni le tribunal de commerce ni la cour d'appel de Chambéry. Ce moyen est donc irrecevable et inopérant.

L'article 1171 du code civil, dans sa rédaction applicable à la date des conventions litigieuses, dispose que dans un contrat d'adhésion, toute clause qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non-écrite.

L'appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix à la prestation.

Le déséquilibre significatif s'apprécie au regard des obligations respectives des parties et suppose que le contrat souscrit ne présente aucun caractère négociable pour la partie qui prétend en être victime.

Or il résulte des éléments produits que la signature des contrats litigieux fait suite à une proposition tarifaire émise par la société Cafés F. que la société Courcheneige était donc parfaitement en mesure de négocier ou de refuser, ce qu'elle a d'ailleurs fait pour la seconde offre émise en octobre 2017.

Par ailleurs, si les conditions générales de vente n'apparaissent pas négociables, le client devant y adhérer, les conventions sont conclues pour une durée ferme et irrévocable durant laquelle la société Cafés F. s'engage à mettre à disposition et à entretenir gratuitement du matériel coûteux (ici pour les sept conventions, valeur du matériel: 24.096 euros HT), en contrepartie de l'engagement du client de s'approvisionner auprès d'elle pour un volume déterminé de consommables pour la durée du contrat, en rapport avec la valeur du matériel. Cette durée correspond à l'amortissement du matériel mis à disposition et il n'y a ainsi aucun déséquilibre entre les obligations respectives des parties.

Particulièrement, les articles 5 « clause compensatoire annuelle » et 6 « clause de révision », qui prévoient les modalités de sanction et de rééquilibrage du contrat en cas de non-respect de la clause d'approvisionnement par le client, sont justifiés par les propres obligations de la société Cafés F. rappelées ci-dessus, lesquelles ne peuvent s'entendre qu'à la condition qu'un chiffre d'affaires minimum lui soit garanti en contrepartie.

En ce qui concerne spécialement l'article 8 des conditions générales de vente intitulé « résiliation du contrat », la société Courcheneige soutient que la résiliation n'étant prévue qu'au bénéfice de la société Cafés F., alors que la durée du contrat serait ferme et irrévocable, cet article serait nul.

Toutefois, l'article 8 prévoit que le contrat pourra être résilié, exclusivement par la société Cafés F., après mise en demeure préalable, uniquement :

- en cas de non-respect de la clause d'approvisionnement,

- en cas de non-paiement d'une facture de consommables,

- en cas d'absence de déclaration de sinistre.

Aussi, la résiliation à l'initiative de la société Cafés F. est-elle limitée aux cas de non-respect par le client de ses propres engagements, ce qui n'est en rien abusif.

La résiliation par le client avant le terme du contrat n'est pas expressément prévue, puisque le contrat est conclu pour durée ferme et irrévocable : une résiliation par le client avant le terme du contrat est alors nécessairement fautive, et a pour conséquence d'ouvrir droit, pour la société Cafés F., aux indemnités prévues par l'article 8-2.

Aussi c'est en vain que la société Courcheneige soutient que cette clause serait nulle et c'est à bon droit que le tribunal a rejeté ce moyen.

Il convient en conséquence de dire que la résiliation des sept conventions en date des 14 novembre et 26 décembre 2016 est intervenue aux torts exclusifs de la société Courcheneige.

4°) Sur le montant de l'indemnité de résiliation

La société Courcheneige soutient que le montant de l'indemnité de résiliation telle que prévue par l'article 8-2 des conditions générales serait manifestement excessif et devrait être ramené à la somme d'un euro symbolique faute de préjudice subi par la société Cafés F..

La société Cafés F. fait elle-même grief au jugement d'avoir réduit cette indemnité à la somme de 15.000 euros, la clause pénale n'étant pas manifestement excessive.

En application de l'article 1231-5 du code civil, lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre.

Néanmoins le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

Lorsque l'engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d'office, à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l'application de l'alinéa précédent.

L'article 8-2-2 des conditions générales stipule que, en cas de résiliation du contrat, « outre la restitution du matériel, le client sera redevable d'une indemnité de résiliation calculée sur la partie non amortie de l'approvisionnement en consommables, au jour de la résiliation, et ce jusqu'au terme initial du contrat. En effet, dans le cas où les quantités livrées seraient inférieures au minimum fixé à l'article 2 des conditions particulières, la SA Cafés F. sera en droit de réclamer une indemnité de résiliation calculée de la façon suivante : volume prévisionnel déduction d'une décote de 20% - volume réalisé x tarif fixé aux conditions particulières. »

Selon le calcul effectué par la société Cafés F. dans sa pièce n° 9 l'indemnité réclamée de 36.679 euros. Après vérification, ce calcul est conforme à la clause précitée.

L'indemnité de résiliation correspond à la perte subie par la société Cafés F., à la fois en consommables non commandés, mais également quant à l'amortissement des machines mises à disposition.

Toutefois, c'est à juste titre et par des motifs que la cour adopte que le tribunal a retenu que la société Cafés F. n'établit pas que ces machines, qui n'ont été utilisées que durant une saison d'hiver, soit environ 5 mois, ne pourraient être remises en service dans un autre établissement.

Pour tenir compte tout à la fois de la perte relative de valeur de ces machines, de la perte de chiffre d'affaires nécessairement subie par la société Cafés F., mais aussi de l'application de la clause pénale telle qu'elle est prévue par les contrats, il y a lieu de ramener l'indemnité due par la société Courcheneige à la somme globale de 20.000 euros.

Le jugement déféré sera réformé en ce sens.

5°) Sur les autres demandes

La procédure engagée par la société Cafés F. ne peut être jugée fautive dès lors qu'elle triomphe en ses prétentions, même partiellement. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par la société Courcheneige.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société Cafés F. la totalité des frais exposés, et non compris dans les dépens. Il convient en conséquence de lui allouer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel.

La société Courcheneige, qui succombe en son appel, supportera les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Chambéry le 12 septembre 2018, sauf en ce qu'il a condamné la société Courcheneige à payer à la société Cafés F. la somme de 15.000 euros à titre principal,

Statuant à nouveau sur ce point, et y ajoutant,

Dit que la résiliation des conventions d'approvisionnement en date des 14 novembre et 26 décembre 2016 n° 171419, 171420, 171421, 171422, 171423, 171425 et 171441 est intervenue aux torts exclusifs de la société Courcheneige,

Condamne la société Courcheneige à payer à la société Cafés F. la somme de 20.000 euros au titre de l'indemnité de résiliation anticipée de ces sept contrats,

Déboute la société Cafés F. du surplus de sa demande principale,

Déboute la société Courcheneige de l'intégralité de ses demandes,

Condamne la société Courcheneige à payer à la société Cafés F. la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel,

Condamne la société Courcheneige aux entiers dépens.