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Décisions

CA Douai, 1re ch. sect. 1, 24 septembre 2020, n° 19/00875

DOUAI

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Défendeur :

EDHEC Business School (association)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Masseron

Conseillers :

Mme Boutié, Mme Aldigé

TI Roubaix, du 20 août 2018

20 août 2018

Le 24 août 2014, M. Charles H. s'est inscrit à l'EDHEC Business School, école de commerce privée, pour suivre une formation de bachelor of business administration.

Par acte d'huissier de justice en date du 14 mai 2018, l'EDHEC Business School a fait assigner M. Charles H. devant le tribunal d'instance de Roubaix aux fins de le voir condamner au paiement d'un impayé de frais de scolarité.

Par jugement réputé contradictoire en date du 20 août 2018, le tribunal d'instance de Roubaix a :

- condamné M. H. à payer à l'association EDHEC Business School la somme de 5 127,35 euros avec intérêts au taux légal à compter du 14 mai 2018,

- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire du présent jugement,

- condamné M. H. à verser à l'association EDHEC Business School une indemnité de 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. H. aux dépens.

M. H. a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 27 mars 2019, il demande à la cour, au visa des articles L. 111-1 et L. 132-1 du code de la consommation, d'infirmer la décision déférée en l'ensemble de ses dispositions et statuant à nouveau, de :

- déclarer abusive la stipulation contractuelle qui fait du prix total de la scolarité un forfait intégralement acquis à l'école dès la signature du contrat ;

- en écarter l'application ;

- en conséquence, infirmer le jugement déféré en l'ensemble de ses dispositions.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 18 juin 2019, l'association EDHEC business school demande à la cour, au visa des articles 1103 et 1104 du code civil, de confirmer la décision déférée sauf en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire du jugement et en conséquence, d'ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

Pour l'exposé des moyens des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Selon l'article L. 132-1 du code de la consommation, sont abusives les clauses qui « ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ». Les clauses abusives sont réputées non écrites.

Est abusive en ce qu'elle crée, au détriment de l'élève, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, la stipulation contractuelle qui fait du prix total de la scolarité un forfait intégralement acquis à l'école dès la signature du contrat et qui, sans réserver le cas d'une résiliation pour un motif légitime et impérieux, ne permet pas une dispense partielle du règlement de la formation.

Sur ce

En l'espèce, les conditions générales d'inscription au sein du groupe EDHEC prévoient que pendant sa première année, l'étudiant peut librement quitter au cours de l'année scolaire la formation à laquelle il s'est inscrit, et qu'il devra dans cette hypothèse s'acquitter au prorata du temps passé à l'école de ses frais de scolarité. Elles stipulent ensuite : « À partir de la deuxième année, toute année de formation commencée sera due. L'étudiant pourra donc quitter, libre de son choix, en cours d'année scolaire, la formation à laquelle il s'est inscrit mais il reste redevable de l'intégralité des frais de scolarité correspondant à l'année scolaire en cours. »

Cette stipulation contractuelle qui fait du prix total annuel de la scolarité un forfait intégralement acquis à l'école dès le début de la deuxième année sans réserver aucun cas de résiliation pour un cas de force majeure ou pour un motif légitime et impérieux permettant une dispense partielle du règlement de la formation crée au détriment de l'élève un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation. En conséquence, elle sera réputée non-écrite par la cour.

Or, il est établi par les courriels produits par M. Charles H. qu'il a informé l'école de commerce le 1er décembre 2016 qu'il devait arrêter sa scolarité dans les plus brefs délais pour des raisons familiales. L'appelant a cessé sa formation à compter de cette date. Par ailleurs, il ressort de la mise en demeure de payer adressée le 15 mai 2017 par l'EDHEC Business School à M. Charles H. que ce dernier a payé ses frais de scolarité jusqu'au mois de décembre 2016 inclus et que la demande en paiement concerne les frais de scolarité relatifs au mois de janvier à mai 2017, soit après que l'élève ait arrêté sa formation.

Dès lors que la clause contractuelle sur laquelle l'EDHEC Business School fonde sa demande en paiement est réputée non écrite, M. Charles H. n'a aucune obligation contractuelle de payer ses frais de scolarité pour une période où il avait arrêté sa formation.

En conséquence, il y a lieu d'infirmer le jugement déféré en l'ensemble de ses dispositions, et, statuant à nouveau, de débouter l'EDHEC Business School de sa demande en paiement.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

En application des articles 696 et 700 du code de procédure civile, la partie perdante est, sauf décision contraire motivée par l'équité ou la situation économique de la partie succombante, condamnée aux dépens, et à payer à l'autre partie la somme que le tribunal détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Il y a lieu d'infirmer la décision déférée du chef des dépens et des frais irrépétibles.

L'EDHEC Business School, partie perdante, sera condamnée au paiement des entiers dépens du premier degré et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement déféré en l'ensemble de ses dispositions ;

Statuant à nouveau :

Réputée non écrite comme étant abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation la clause des conditions générales d'inscription au sein du groupe EDHEC suivante : « À partir de la deuxième année, toute année de formation commencée sera due. L'étudiant pourra donc quitter, libre de son choix, en cours d'année scolaire, la formation à laquelle il s'est inscrit mais il reste redevable de l'intégralité des frais de scolarité correspondant à l'année scolaire en cours. » ;

Déboute l'association EDHEC Business School de sa demande en paiement formée à l'encontre de M. Charles H. ;

Condamne l'association EDHEC Business School au paiement des entiers dépens du premier degré et d'appel.