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Décisions

CA Nîmes, 1re ch. civ., 10 septembre 2020, n° 18/03016

NÎMES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

First Car (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bruyere

Conseillers :

Mme Toulouse, Mme Leger

Avocat :

SELARL Lexavoue Nimes

TGI Avignon, du 25 juin 2018

25 juin 2018

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 20 juin 2015, M. Kevyn F. a acquis auprès de M. Rabi H., exerçant son activité de garagiste sous le nom commercial H Auto 84, devenue First Car, un véhicule Rover 25 au prix de 1 400 euros.

Soutenant que le véhicule était tombé en panne dès le 6 août 2015, M. F. a assigné M. H. devant le tribunal de grande instance d'Avignon sur le fondement des vices cachés par acte du 9 novembre 2017.

Par jugement contradictoire du 25 juin 2018, le tribunal de grande instance d'Avignon, après avoir relevé que M. F. avait eu connaissance du vice dès le 11 août 2015, a déclaré irrecevable comme prescrite la demande de M. F., l'a condamné aux dépens et a dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ni à exécution provisoire.

M. F. a interjeté appel de cette décision par déclaration du 7 août 2018.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 6 novembre 2018, il demande à la cour de :

- constater que le tribunal de grande instance d'Avignon n'a pas statué sur les demandes dont il a été saisi,

Par conséquent,

- réformer le jugement du 25 juin 2018

- déclarer M. F. recevable en ses demandes

- dire le rapport d'expertise en date du 6 décembre 2016 recevable et opposable au défendeur

- dire que l'action intentée n'est nullement prescrite

- dire que le responsable du garage H Auto 84 aujourd'hui dénommé First Car a reconnu les vices cachés débattus en date du 11 octobre 2016

- dire que cette reconnaissance interrompt les délais de prescription

A titre principal,

- constater les vices du véhicule Rover 25 acquis par M. F. au garage H Auto 84 aujourd'hui dénommé First Car est engagé

- constater que la responsabilité professionnelle du garage H Auto 84, aujourd'hui dénommé First Car est engagé

- condamner au remboursement intégral des sommes avancées par M. F. et ses mandants et des sommes à venir, ces sommes étant à parfaire au jour du jugement :

Facture correspondant aux réparations à effectuer : 1 271, 03 €

Frais de gardiennage (somme à parfaire au jour du jugement) : 15 € par jour. Arrivée le 07 août 2015-05 novembre 2018 = 1186 jours. 1186 x 15 = 17 792 €

Frais d'expertise : 535,20 €

Dommages et intérêts : 5 000 €

 

A titre subsidiaire,

- dire que la délivrance du véhicule n'est pas conforme,

- en tirer les conséquences de droit

- prononcer la résolution de la vente

- condamner le vendeur à supporter les frais liés au gardiennage, à l'expertise ainsi qu'aux dommages et intérêts, ces sommes étant à parfaire au jour du jugement :

- Frais de gardiennage (somme à parfaire au jour du jugement) : 15 € par jour. Arrivée le 07 août 2015-18 octobre 2017 = 803 jours. 803 x 15 = 12 075 €

- Frais d'expertise : 535,20€

- Dommages et intérêts : 5 000€

A titre infiniment subsidiaire,

- constater l'erreur sur les qualités substantielles du véhicule acquis par M. F.

- en tirer les conséquences de droit

- prononcer la nullité de la vente

- condamner le vendeur à supporter les frais liés au gardiennage, à l'expertise ainsi qu'aux dommages et intérêts, ces sommes étant à parfaire au jour du jugement :

- Frais de gardiennage (somme à parfaire au jour du jugement) : 15 € par jour. Arrivée le 07 août 2015-18 octobre 2017 = 803 jours. 803 x 15 = 12 075 €

- Frais d'expertise : 535.20€

- Dommages et intérêts : 5 000€

En tout état de cause,

- constater que la responsabilité professionnelle du garage H Auto 84, aujourd'hui dénommé First Car est engagée

- condamner M. H. H Auto 84 aujourd'hui First Car au paiement de la somme de 2.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens

- débouter M. H. H Auto 84 aujourd'hui First Car de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires, outre appel incident.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 4 décembre 2018, M. H. exerçant sous l'enseigne First Car anciennement H Auto 84 demande à la cour de :

A titre principal,

Vu l'article 1648 du Code Civil,

- dire l'action prescrite.

A titre subsidiaire,

Vu l'article 1641 du Code Civil,

- dire M. F. mal fondé en toutes ses demandes, et l'en débouter.

A titre infiniment subsidiaire, sur les demandes indemnitaires adverses,

- dire non fondées les demandes de condamnations exposées.

En toute hypothèse,

- rejeter encore les prétentions basées sur l'obligation de délivrance conforme, et l'erreur.

En conséquence,

- condamner M. F. à payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamner M. F. aux entiers dépens ;

Et dire que, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, Maître Philippe C. pourra recouvrer directement les frais dont il a fait l'avance sans en avoir reçu provision.

Il soutient principalement que l'acquéreur a obtenu dès le 11 août 2015 un devis de garagiste tenant à la réparation du joint de culasse, qu'il indique à ce jour être la cause technique de son action en garantie et qu'ainsi comme l'a retenu le premier juge, le point de départ de son action est à cette date.

En raison de l'épidémie du Covid-19, et par application des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020, l'affaire a été fixée à l'audience du 18 juin 2020 et a été traitée suivant la procédure sans audience.

L'affaire a été mise en délibéré au 10 septembre 2020.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'action en garantie des vices cachés

L'article 1648 du code civil dispose que l'action en vice rédhibitoire doit être intentée dans un délai de 2 ans à compter de la découverte du vice.

M. H. sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré prescrite l'action intentée par M. F..

L'appelant s'oppose à cette analyse et revendique comme seul point de départ de la prescription la date du dépôt du rapport d'expertise.

Il apparaît en l'espèce que le véhicule litigieux est tombé en panne le 6 août 2015 soit moins de deux mois après la vente.

Il résulte des pièces versées aux débats que M. F. a d'ailleurs adressé à M. H. un courrier recommandé avec accusé de réception dès le 6 août 2015 mentionnant l'intégralité des défauts affectant le véhicule.

Le courrier établi le 7 août 2015 par le garage Le Clauvier fait état d'une panne moteur en raison d'une défectuosité des joints de culasse et le devis afférent, daté du 11 août suivant, chiffre le montant des réparations à la somme de 1 271,03 euros.

Une expertise amiable contradictoire a été diligentée par l'assureur protection juridique de M. F. le 2 septembre 2015. L'expert a réalisé sa mission le 30 septembre 2015 et a établi son rapport le 4 décembre 2016 (un dimanche) soit près de 14 mois après les opérations expertales, ce qui peut permettre de douter de sa fiabilité.

L'ensemble de ces éléments démontre que le vice affectant le véhicule, à le supposer réel et antérieur à la vente, était connu de l'acquéreur dès le 11 août 2015, date du diagnostic et du devis établis par le garage Le Clauvier ; que M. F. n'a donc pas découvert les désordres à la lecture du rapport d'expertise judiciaire comme il le prétend.

C'est donc la date du 11 août 2015 qui a fait courir le délai de prescription.

Selon l'article 2240 du code civil, la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription.

Par ailleurs, ni une expertise diligentée à la requête de l'assureur ni les pourparlers en cours entre les parties n'ont d'effet interruptif de prescription.

En l'occurrence, M. F. soutient que M. H. a expressément reconnu l'existence du vice portant sur le véhicule et que cette reconnaissance, résultant de la proposition faite à l'assureur protection juridique de reprendre la voiture et de faire les réparations à ses frais, a interrompu le délai de prescription.

M. H. réfute cet argument et soutient que proposer à titre commercial une réparation de véhicule ne constitue pas une reconnaissance explicite d'un vice caché.

Par courrier du 11 octobre 2016 adressé à l'assureur protection juridique de M. F. et intitulé « Contestation », M. H. indique avoir été surpris de la procédure diligentée à son encontre. Il rappelle que contacté par M. F. deux mois après la vente en raison d'un problème mécanique, il lui avait proposé de ramener le véhicule pour pouvoir le contrôler et le réparer, proposition demeurée sans suite. Il indique être prêt à récupérer la voiture et faire les réparations nécessaires à ses frais mais certifie qu'elle n'a jamais rencontré de problème concernant le joint de culasse.

Cette proposition de M. H. de prendre en charge la réparation du véhicule ne saurait dans ces conditions valoir reconnaissance expresse ou implicite d'un vice caché susceptible d'interrompre le cours de la prescription.

Par conséquent, l'action engagée par assignation du 9 novembre 2017 est prescrite et le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

L'appel de M. F. étant mal fondé, il supportera les dépens d'appel.

Nonobstant l'issue de l'appel, l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en la cause.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt rendu par mise à disposition au greffe contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. F. aux dépens de première instance et d'appel.