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Décisions

CA Rennes, 1re ch., 15 septembre 2020, n° 18/00760

RENNES

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Izimmo (SAS)

Défendeur :

Allianz (SA), Lagrange Patrimoine Conseil (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Cocchiello

Conseillers :

Mme André, Mme Gros

CA Rennes n° 18/00760

15 septembre 2020

EXPOSÉ DU LITIGE :

La société par actions simplifié Izimmo, venant aux droits de la société Le Comptoir Immobilier, exerce l'activité d'agence immobilière spécialisée dans l'immobilier de placement et est assurée pour l'ensemble de ses activités auprès de la société Allianz IARD.

Suivant contrat cadre du 5 janvier 2005 et deux avenants des 18 octobre 2006 et 20 juin 2007, elle a été mandatée par la société Lagrange Patrimoine Conseil pour présenter à la vente en l'état futur d'achèvement certains lots du programme immobilier [...].

La commercialisation de ces lots se faisait dans le cadre du dispositif « Demessine », permettant aux acquéreurs des lots de bénéficier d'une réduction d'impôt au titre de l'acquisition entre le 1er janvier 1999 et le 31 décembre 2010 d'un logement en l'état futur d'achèvement faisant partie d'une résidence de tourisme classée, à condition de s'engager à louer le bien pendant au moins 9 années à l'exploitant de la résidence de tourisme dans le cadre d'un bail commercial.

Par acte sous seing privé en date du 13 juillet 2006, Mme Sylvie T. épouse C., comptable et M. Pascal C., enseignant (« les époux C. ») ont signé par l'intermédiaire de la société Izimmo un contrat de réservation portant sur l'acquisition d'un appartement et d'une place de parking dans la [...], Bagnères de Luchon.

Afin de financer cette acquisition, les époux C. ont souscrit un prêt d'un montant de 207300 euros auprès de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Charente- Maritime Deux-Sèvres.

Par acte du 16 février 2007, les époux C. avaient donné les locaux à bail à la société Soderev Tour, filiale du Groupe Lagrange, à compter de l'ouverture de la résidence et pour une durée ferme et irrévocable de 9 années. Le contrat prévoyait le versement d'un loyer de 8142 euros HT payable trimestriellement les 31 mars, 30 juin, 30 septembre et 31 décembre de chaque année.

L'acte de vente a été régularisé le 7 août 2007 pour un montant global de 195000 Euros HT soit 233220 Euros TTC.

Les loyers ont été régulièrement réglés aux acquéreurs jusqu'au loyer du 3ème trimestre 2012, la société Soderev Tour ayant été placée sous procédure de sauvegarde par jugement du tribunal de commerce de Paris du 28 septembre 2012.

Lorsqu'elle a eu connaissance des difficultés rencontrées par la société Soderev Tour, la société Izimmo a, par courriel en date du 17 octobre 2012, informé chacun de ses clients des dispositions à prendre et leur a transmis la garantie souscrite le 20 mai 2008 par la société mère de la société Soderev Tour, à savoir la société Lagrange Gestion, dans les termes suivants :

« Garantie

Nous soussignée, Lagrange Gestion, pris en la personne de son représentant légal, confirmons nous porter garant et répondre solidairement de nos filiales, notamment les société Resitel, SMAS Tourisme, Soderev Tour et Vacantel, pour le bon paiement des loyers tels que prévus dans les baux commerciaux signés par ces dernières.

Fait ce jour pour valoir ce que de droit.

Pierre-Olivier Toumieux

Administrateur Délégué ».

Les époux C. ont déclaré leur créance entre les mains du mandataire judiciaire, lequel a, dans le cadre du plan de sauvegarde mis en 'œuvre, proposé à l'ensemble des investisseurs de contracter un avenant au contrat de bail avec un loyer minoré ainsi que de les dédommager au titre du loyer du 3ème trimestre 2012 à hauteur de 25 % de la somme due.

Selon avenant en date du 5 mai 2013, les époux C. ont consenti une baisse du montant annuel des loyers à effet du 1er avril 2013, désormais fixé à la somme de 4248 Euros HT avec une révision annuelle du prix en fonction de la variation de l'indice des loyers commerciaux publié par l'INSEE et plafonné à 1,50 % l'an.

Considérant avoir été victimes d'un défaut d'information et de conseil de la part de la société Izimmo quant aux différents aléas de l'investissement immobilier ainsi réalisé et plus généralement d'une tromperie commerciale au sens des dispositions de droit de l'Union européenne, les époux C. ont, par acte du 23 décembre 2014, assigné la société Izimmo, venant aux droits de la société Le Comptoir Immobilier, devant le tribunal de grande instance de Brest aux fins d'obtenir l'indemnisation des préjudices financiers et moral qu'ils estiment avoir subis.

Par assignation du 18 août 2015, la société Izimmo a assigné en intervention forcée et garantie la société Lagrange Patrimoine Conseil afin d'obtenir la condamnation de cette dernière à la garantir de l'ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre dans la procédure l'opposant aux époux C..

La jonction de cette dernière procédure avec l'instance principale a été prononcée le 10 novembre 2015 par le juge de la mise en état.

Par conclusions du 2 septembre 2016, la société Allianz IARD, en sa qualité d'assureur de la société Izimmo, est intervenue volontairement à l'instance.

Par jugement du 15 novembre 2017, le tribunal de grande instance de Brest a :

- rejeté l'exception de nullité de l'assignation délivrée par les époux C. à la société Izimmo ;

- rejeté l'exception tirée de la prescription de l'action en responsabilité ;

- dit que la société Izimmo a violé les dispositions de l'article L. 121-1 du code de la consommation interprétées à la lumière des articles 5 et 7 de la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 et a manqué à son devoir d'information et de conseil à l'égard des époux C. ;

- condamné en conséquence la société Izimmo à verser aux époux C. en indemnisation de leurs préjudices :

- la somme de 1667,11 Euros au titre de la part non réglée du 3ème trimestre 2012,

- la somme de 12144 euros HT au titre de la part de loyers non perçus entre le 1er avril 2013 et le 31 mars 2016 ;

- la somme de 1000 euros au titre de leur préjudice moral ;

- débouté la société Izimmo de son action en garantie à l'encontre de la société Lagrange Patrimoine Conseil ;

- débouté la société Izimmo de sa demande de garantie à l'encontre de la société Allianz IARD ;

- débouté la société Izimmo et la société Lagrange Patrimoine Conseil de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- condamné la société Izimmo à verser, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile :

- la somme de 1500 euros aux demandeurs ;

- la somme de 1000 euros à la société Allianz IARD ;

- ordonné l'exécution provisoire ;

- condamné la société Izimmo aux dépens.

La société Izimmo a interjeté appel du jugement du tribunal de grande instance de Brest en date du 15 novembre 2017.

Par ordonnance en date du 9 septembre 2019, le conseiller de la mise en état, après avoir constaté que les époux C. remettaient à l'audience l'intégralité de la plaquette LCI en original, et partie de la plaquette Lagrange Patrimoine Conseil sous forme d'impressions/copies recto, a :

- donné acte aux époux C. de ce qu'ils ne disposent pas d'autres pièces cotées en B1 que celles présentées à l'audience de mise en état du 17 juin 2019 ;

- dit en conséquence n'y avoir lieu à astreinte ;

- condamné les époux C. à payer à la société Izimmo la somme de 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit qu'il appartiendra aux époux C. de verser dans le dossier qui sera soumis à la cour, en original, les documents publicitaires cotées en B1 qu'ils détiennent effectivement ;

- rejeté toute autre demande ;

- condamné les époux C. aux dépens de l'incident.

Par conclusions du 24 février 2020, la société Izimmo demande à la cour de :

Par déboutement de toutes argumentations et prétentions contraires,

Par application des dispositions de l'article 2224 du Code civil,

Par application des dispositions des articles L. 120-1 et L. 121-1 du Code de la consommation,

Par application des dispositions des articles 1240 et suivants (anciens articles 1382 et suivants) du Code civil,

Par application des dispositions des articles 1134 et 1147 anciens du Code civil dans leur rédaction applicable,

Par application des dispositions de l'article 1165 ancien, actuel article 1199, du Code civil,

Par application des dispositions des articles 2000 et suivants du Code civil,

Par application des dispositions des articles L. 112-4, L. 113-1 du Code des assurances,

Par application des dispositions combinées du contrat et des articles 3, 3° de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 et 49 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972, ensemble l'article 2 de l'arrêté du 1er septembre 1972 pris pour l'application du second et l'article 8 de l'annexe I dudit arrêté,

Réformant le jugement entrepris en toutes ses dispositions déférées, Le confirmant pour le surplus,

Rejetant les appels incidents en leurs conclusions contraires aux présentes,

au principal,

- à titre liminaire, par application des dispositions des articles 16 et 132 du code de procédure civile, écarter des débats la pièce intitulée « Plaquettes publicitaires » produite en copie par les intimés sous le n° B1 et toute pièce qui n'aurait pas été régulièrement communiquée à la société Izimmo ;

- constater la prescription de l'action en responsabilité engagée à l'encontre de la société Izimmo ;

subsidiairement,

- déclarer les demandeurs irrecevables et mal fondés en leurs demandes formées au visa des articles 5 et 7 de la directive 2005/29/CE en date du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et à celui de l'article L. 121-1 du code de la consommation ;

- constater que le bail commercial comporte une stipulation prévoyant expressément la possibilité de remise en question du loyer par le preneur ;

- juger que la société Izimmo n'a pas manqué à son obligation d'information précontractuelle et, plus généralement, que la preuve n'est pas rapportée de manquements fautifs engageant sa responsabilité à l'égard des demandeurs ;

plus subsidiairement,

- juger que le préjudice procède d'une perte de chance très faible voire nulle de ne pas contracter';

- en conséquence, débouter les époux C. de l'intégralité de leurs demandes à l'encontre de la société Izimmo ;

à titre plus subsidiaire encore,

- condamner la société Lagrange Patrimoine Conseil à garantir la société Izimmo de l'intégralité des condamnations en principal, intérêts, frais et dépens qui seraient prononcées à son encontre ;

- condamner la société Allianz à garantir la société Izimmo de l'intégralité des condamnations en principal, intérêts, frais et dépens qui seraient prononcées à son encontre ;

- juger, par application des dispositions de l'article L. 124-1-1 du code des assurances, que les réclamations ayant pour objet ou pour fondement la prétendue baisse de loyers de la [...] et, à ce titre, les 35 instances identiques dont se trouve saisie la cour, constituent un fait dommageable unique justifiant l'application d'une seule franchise limitée à 10 % du dommage dans la limite d'un montant maximum de 15 520 euros ;

en tout état de cause,

- débouter l'ensemble des parties des demandes dirigées contre la société Izimmo au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la partie perdante à payer à la société Izimmo la somme de 5 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de la SCP B. conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions du 28 février 2020, les époux C. demandent à la cour de :

au visa des articles 12, 16, 132 et suivants et 954 du code de procédure civile, des articles 1240 (ancien article1382), 1131 dans sa version applicable au moment des faits, 1147, 1353 (ancien article 1315) et 2224 du Code civil, de l'article L. 121-1 du Code de la consommation notamment dans sa rédaction interprétée à la lumière de la directive 2005/29//CE du 11 mai 2005, de la loi de finances du 30 décembre 1998 pour 1998 et ses modifications successives, des articles 199 decies E, 199 decies EA et 199 decies G du Code générale des impôts, de l'article 261-D du code général des impôts, de l'article 311-8 du Code de la consommation,

à titre liminaire,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité de l'assignation délivrée par les époux C. à la société Izimmo ;

- juger que leur action et leurs demandes sont valables et recevables ;

à titre principal,

- dire l'appel principal formé par la société Izimmo mal fondé et le rejeter ;

- dire les appels incidents formés par les sociétés Lagrange Patrimoine Conseil et Allianz mal fondés et les rejeter ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé les demandes des époux C. recevables et non prescrites ;

en conséquence,

- débouter les sociétés Lagrange Patrimoine Conseil, Allianz IARD et Izimmo de leurs demandes tendant à voir déclarer leur action prescrite ;

en conséquence,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que la société Izimmo a violé les dispositions de l'article L. 121-1 du code de la consommation interprété à la lumière des articles 5 et 7 de la directive 2005/29/CE en date du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que la société Izimmo a violé son obligation d'information et de conseil à l'égard des époux C. ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande d'indemnisation correspondant à la période allant du 1er avril 2016 à la fin du bail commercial (31 décembre 2017), au montant des honoraires versés à Izimmo (2900 Euros) et en ce qu'il a limité la demande d'indemnisation du préjudice moral ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les sociétés Izimmo, Allianz IARD et Lagrange Patrimoine Conseil de leurs demandes dirigées à l'encontre des époux C. ;

en conséquence,

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Izimmo à payer aux époux C. la somme de 12144 euros représentant la différence HT entre le montant du bail initial et celui de l'avenant tenant compte des indices de révision sur la période allant du 1er avril 2013 à fin mars 2016, et la somme de 1667,11 Euros HT correspondant à ce qui n'a pas été versé par Soderev au titre du 3ème trimestre 2012 ;

- condamner la société Izimmo à payer aux époux C. tous les trimestres la somme HT représentant la différence HT entre le montant du bail initial et celui de l'avenant tenant compte des indices de révision sur la période allant du 1er avril 2016 à la fin du bail commercial, soit la somme de 6845 euros ;

- condamner la société Izimmo à payer aux époux C. la somme de 2900 euros correspondant au remboursement des honoraires qu'ils lui ont versés pour l'acquisition du produit « Belvédère » ;

- condamner la société Izimmo à payer respectivement à Mme et M. C. la somme de 5000 euros en réparation de leur préjudice moral ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Izimmo à payer la somme de 1500 euros aux époux C. au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

à titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour infirmait le jugement entrepris et jugeait que les préjudices subis par les époux C. étaient causés également ou exclusivement par la faute de la société Lagrange Patrimoine Conseil et non par celle de la société Izimmo :

- mettre, selon le cas, l'ensemble des condamnations judiciaires sollicitées par les époux C., soit à la charge de la société Lagrange Patrimoine Conseil et de la société Izimmo pris solidairement soit exclusivement à la charge de la société Lagrange Patrimoine Conseil, en ce compris le paiement des frais irrépétibles au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des entiers dépens ;

en tout état de cause,

- juger que la pièce n° B1 a été régulièrement versée aux débats ;

- juger que la demande de la société Izimmo visant à écarter des débats la pièce n° B1 « et toute pièce qui n'aurait pas été communiquée à la Société Izimmo » est irrecevable et mal fondée ;

- rejeter la demande de la société Izimmo visant à écarter des débats la pièce n° B1 « et toute pièce qui n'aurait pas été communiquée à la société Izimmo » ;

- débouter les sociétés Izimmo, Allianz IARD et Lagrange Patrimoine Conseil de l'intégralité de leurs demandes ;

- condamner la société Izimmo à payer aux époux C. la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Izimmo aux entiers dépens de l'instance d'appel, recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions du 4 janvier 2019, la société Lagrange Patrimoine Conseil demande à la cour de :

- constater la prescription de l'action de la société Izimmo à l'encontre de la société Lagrange Patrimoine Conseil mais aussi l'absence de fondement de sa demande en garantie et la débouter de ses demandes ;

- constater la prescription de l'action des demandeurs initiaux et les débouter de leurs demandes ;

- constater l'inapplicabilité de l'article L. 120-1 du code de la consommation, confirmer le jugement entrepris, de ce chef en déboutant les demandeurs initiaux de leurs demandes ;

- constater l'inapplicabilité des articles 5 et 7 de la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 et l'article L. 121-1 du code de la consommation, infirmer le jugement entrepris, de ce chef, et débouter les demandeurs initiaux de leurs demandes ;

- condamner la société Izimmo à verser à la société Lagrange Patrimoine Conseil la somme de 5000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Izimmo aux entiers dépens dont distraction au profit de Me René G., avocat au barreau de Rennes, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions du 12 mars 2020, la société Allianz demande à la cour de :

- la recevoir en ses explications et de l'y dire bien fondée ;

à titre principal,

- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté l'exception tirée de la prescription de l'action en responsabilité ;

en conséquence et statuant à nouveau :

- juger que l'action des époux C. à l'encontre de la société Izimmo est prescrite ;

- débouter les époux C. de toutes demandes, fins et conclusions ;

à titre subsidiaire,

- infirmer le jugement en ce qu'il a dit que la société Izimmo avait commis une faute et l'a condamnée à indemniser les époux C. ;

en conséquence et statuant à nouveau :

- juger que la société Izimmo n'a pas commis de faute ;

- débouter les époux C. de toutes demandes ;

à titre plus subsidiaire,

- infirmer le jugement en ce qu'il a retenu l'existence d'un préjudice ;

en conséquence et statuant à nouveau :

- juger que les époux C. ne justifient pas de leur préjudice ;

- débouter les époux C. de toutes demandes à l'encontre d'Allianz ;

à titre encore plus subsidiaire,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Izimmo de sa demande de garantie à l'encontre de la société Allianz, (i) la faute dolosive, (ii) « les conséquences pécuniaires des réclamations relatives à une publicité mensongère » et (iii) « les dommages provenant de l'insuffisance ou de la non-obtention des résultats ou performances promises en matière de rendement, d'équilibre financier ou économique » étant exclus de la Police n° 45117021';

à titre infiniment subsidiaire,

- appliquer le plafond de 600000 euros et la franchise de 10 % du montant des dommages avec montant maximal de 15 250 euros stipulés par la Police Allianz n° 45117021 ;

en tout état de cause,

- débouter toutes parties de leurs demandes, fins et conclusions à l'encontre d'Allianz ;

- condamner toute partie succombant à verser à Allianz la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

A l'issue de l'audience de plaidoiries, les époux C. ont remis la plaquette cartonnée établie par LCI comportant les fiches sur les produits de défiscalisation notamment la fiche ZRR, ainsi que la photocopie de quelques pages de la plaquette établie par Lagrange Patrimoine Conseil concernant les informations relatives au gestionnaire (pages 1, 2, 3) et les « info pratiques » (pages 4, 5 et 6), outre une page « plan de situation », pièces qui avaient été présentées à l'audience du conseiller de la mise en état.

MOTIFS :

Sur les moyens de procédure :

Sur la nullité de l'assignation :

L'irrégularité de l'assignation au motif que les éléments de droit, fondement juridique de la demande, n'étaient pas renseignés dans l'acte introductif, avait été invoquée en première instance. Devant la cour, ce moyen est repris par la société Lagrange Patrimoine Conseil en page 12 de ses écritures mais ne se trouve pas dans le dispositif de ses écritures.

La cour, saisie en application de l'article 954 alinéa 3 des seules prétentions énoncées dans le dispositif, ne statuera pas sur ce moyen.

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action des investisseurs contre Izimmo :

La société Izimmo soutient que l'action des époux C. est prescrite. Le point de départ du délai de prescription de cinq ans prévu par l'article 2224 du code civil, c'est-à-dire le jour où les époux C. ont été en mesure de connaître les faits leur permettant d'exercer leur action, correspond au jour de la souscription du contrat auprès de la société Le Comptoir Immobilier, dans la mesure où l'action est fondée sur une violation alléguée du devoir d'information et de conseil et où les époux C. auraient été en mesure de comprendre l'existence d'un risque de non-versement des loyers dès cette phase de souscription du contrat, puis de la prise de connaissance des termes du contrat de bail ensuite signé avec la société Soderev Tour, toujours au cours de l'année 2007. En tout état de cause, la société Izimmo soutient que, par l'effet de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi du 17 juin 2008, l'action s'est éteinte le 19 juin 2013, soit avant l'assignation délivrée le 23 décembre 2014.

La société Lagrange Patrimoine Conseil soutient que l'action des époux C. est prescrite en raison de la réforme de l'article 2224 du code civil opérée par la loi du 17 juin 2008, depuis le 19 juin 2013. En tout état de cause, elle estime que le point de départ du délai de prescription de l'action des époux C. correspond au terme de la prestation accomplie par Izimmo auprès des époux C. soit le 13 juillet 2006, date de signature du contrat de réservation ; retenir l'analyse des époux C., quant au point de départ du délai de prescription, reviendrait selon la société Lagrange à consacrer l'imprescriptibilité de l'action.

La société Allianz soutient que l'action des investisseurs qui n'a pas été formée avant le 19 juin 2013 est prescrite. Elle considère que le point de départ du délai de prescription ne correspond pas, contrairement à ce que soutiennent les époux C., au moment où ces derniers ont eu connaissance des difficultés financières prétendument causées par le défaut d'information qu'ils reprochent à la société Izimmo mais à la date de la signature du contrat de réservation.

Les époux C. soutiennent que leur action n'était pas prescrite ; en effet, le point de départ du délai de prescription s'appréhende de manière subjective, c'est-à-dire en fonction du moment à partir duquel les auteurs de l'action en responsabilité ont effectivement pu avoir connaissance des faits leur permettant d'exercer cette action, c'est-à-dire du dommage invoqué. En l'espèce, ce moment ne correspond pas à la commission de l'éventuelle violation du devoir d'information pesant sur l'appelante, mais bien à la période où les difficultés dans la perception des loyers auprès de la société Soderev Tour se sont matérialisées, c'est-à-dire à compter de septembre 2012.

Cela étant exposé :

Selon les termes de l'article 2224 du Code civil, la prescription d'une action en responsabilité court à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Les époux C. ont signé un contrat de réservation avec la société Alti Immo dans lequel ils reconnaissaient (page 11 du contrat) avoir reçu communication du projet de bail commercial à consentir à la société gestionnaire. Le projet de bail comportait (article 5-3) des « stipulations particulières » selon lesquelles les loyers pourraient être remis en question en cas de « force majeure interrompant l'activité touristique » ou encore en cas d'« évènements amenant un dysfonctionnement dans l'activité du preneur notamment une modification de la destination ou accès des parties communes ou encore leur mauvais entretien ou fonctionnement ». Ils n'ignoraient pas que le non-paiement du loyer était possible.

Toutefois, la communication du projet de contrat pour la signature du contrat de réservation est ici sans incidence sur la prescription. En effet, le contrat de bail a été exécuté à partir du mois de décembre 2008 et jusqu'au début du mois de septembre 2012, les époux C. ont obtenu régulièrement le versement des loyers au prix convenu dans le contrat, de sorte qu'ils n'avaient aucune raison d'agir en responsabilité contre lzimmo. C'est par conséquent lorsque la difficulté est intervenue dans la perception du loyer en septembre 2012, au cours de l'exécution du contrat de bail de neuf ans, que le dommage a été révélé aux époux C. et que le délai pour agir a alors couru. En assignant la société Izimmo le 23 décembre 2014,

les époux C. étaient recevables en leur action.

Les époux C. sollicitent à titre subsidiaire « si la cour jugeait que les préjudices subis par M. et Mme C. étaient causés également ou exclusivement par la faute de la société Lagrange Patrimoine et non par celle de la société Izimmo », que l'ensemble des condamnations judiciaires soit à sa charge, soit solidairement avec Izimmo soit exclusivement. La société Lagrange Patrimoine Conseil ne justifie pas que la demande formée à titre subsidiaire à son égard par les époux C. est prescrite, ne versant aux débats aucun document permettant de constater que la demande formée contre elle est hors délai. Les motifs précédemment retenus pour justifier la recevabilité de la demande des époux C. à l'égard d'Izimmo s'opposent à toute imprescriptibilité de l'action en responsabilité comme le soutient Lagrange Patrimoine Conseil.

Sur le fond :

Sur la publicité trompeuse :

Les époux C. affirment que la directive 2005/29/CE peut être prise en considération pour interpréter l'interdiction posée à l'article L. 121-1 du code de la consommation et conforte la possibilité de condamner un professionnel qui a, par une tromperie ou par l'omission de donner une information substantielle, a pu amener le consommateur à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement.

Ils considèrent que la société Izimmo professionnel spécialisé dans l'investissement locatif défiscalisé doit informer les investisseurs non professionnels sur l'ensemble des caractéristiques et risques notamment financiers liés à l'opération projetée, cet ensemble de risques incluant le non-paiement des loyers, lesquels constituent un élément indispensable à la viabilité du projet d'investissement. Le fait, pour la société Izimmo, d'avoir remis aux investisseurs des éléments d'information faisant mention de loyers prétendument garantis est trompeur et revient à s'abstenir de les informer sur le risque de loyers impayés ou réduits en cas de déconfiture du preneur à bail commercial ; une telle omission est contraire aux exigences formalisées dans les articles L. 120-1 et L. 121-1 du code de la consommation et altère de manière substantielle le comportement économique des investisseurs. Les conditions de caractérisation d'une pratique commerciale trompeuse sont réunies.

Par ailleurs, les époux C. s'opposent à la demande de l'appelante portant sur l'exclusion des éléments constituant la pièce n° B1, considérant que cette demande est irrecevable et mal fondée. Selon eux, il n'existe pas de dénaturation dommageable du contenu des éléments de publicité initialement adressés par la société Izimmo aux investisseurs. Ils soutiennent que les articles 16, 132 et 954 du code de procédure civile n'imposent pas la communication de la version originale des documents constituant une pièce et, en tout état de cause, que les éléments constituant la pièce n° B1 ont été soumis à l'appréciation du conseil de la société Izimmo sous le contrôle du conseiller de la mise en état. Dès lors, la pièce n° B1 peut être prise en considération pour établir l'insuffisance des informations adressées aux investisseurs par la Société Izimmo. Enfin, ils rappellent que c'est à la société Izimmo qu'il incombe de prouver qu'elle leur a transmis des informations complètes, faisant notamment état du risque de non-perception des loyers, ce qu'elle n'a pas fait.

La société Izimmo conclut à l'absence de violation des dispositions de l'article L. 121-1 du code de la consommation. Elle soutient que la directive 2005/29/CE n'est pas applicable aux faits, celle-ci ayant été transposée en droit français en 2008, postérieurement à la réalisation de la vente des époux C.. Par ailleurs, à supposer que ladite directive puisse guider l'interprétation des dispositions françaises du code de la consommation, pareille prise en considération ne saurait avoir pour effet de dénaturer les dispositions nationales et permettre sa condamnation en application de l'article L. 121-1 du code de la consommation. Elle soutient en effet que les éléments de documentation transmis aux investisseurs, notamment aux époux C., ne permettent pas de conclure en l'existence d'une violation de l'article L. 121-1 du code de la consommation, qu'il s'agisse de documents publicitaires portant sur les mécanismes de défiscalisation ou qu'il s'agisse d'un document élaboré par la société Le Comptoir Immobilier relatif au placement « Le Belvédère ».

La société Izimmo soutient que la pièce n° B1, produite par les époux C. est un montage en photocopie de deux plaquettes distinctes créant une confusion (une plaquette publicitaire de Lagrange Patrimoine et une plaquette publicitaire de la société Le Comptoir Immobilier), que ce document n'est pas conforme aux pièces communiquées à l'audience du conseiller de la mise en état. Elle ajoute que les plaquettes publicitaires produites en photocopies en B1 ne sont pas détenues en original par les époux C. et doivent être écartées des débats.

La société Izimmo considère que la brochure de présentation générale de l'investissement dans le cadre du dispositif Demessine (éditée par Le comptoir Immobilier en fiche ZRR) ne permet pas d'établir une violation des obligations découlant de l'article L. 121-1 du code de la consommation : la mention d'un loyer garanti pendant une période ferme et irrévocable de neuf années n'était ni injustifiée ni exagérée au regard des dispositions légales applicables au moment des faits ; la brochure en cause ne faisait mention que de la garantie relative à l'existence même du bail pendant une période donnée, et aucunement sur le montant des loyers. La brochure ne fait nullement état de la résidence « Le Belvédère », n'en fait aucune publicité et ne contient aucune allégation, indication ou présentation fausse ou de nature à induire en erreur.

La société Izimmo soutient que la plaquette de présentation de la résidence « Le Belvédère » élaborée par Le Comptoir Immobilier communiquée en A3 par les investisseurs offre une présentation avantageuse de la résidence vendue mais ses termes n'excèdent pas ceux que permet la publicité. Elle ne mentionne nulle part que les loyers seraient « garantis », de sorte que la violation de l'article L. 121-1 du code de la consommation n'est pas établie. Ainsi, même interprété à la lumière des articles pertinents de la directive 2005/29/CE, la tromperie précisée par l'article L. 121-1 du Code de la consommation est exclue.

La société Lagrange Patrimoine Conseil considère que l'article L. 120-1 du Code de la consommation n'est pas applicable en l'espèce. Elle affirme que l'article L. 121-1 du Code de la consommation ne peut être « lu » à la lumière de la directive 2005/29/CE dans la mesure où celle-ci n'avait pas été transposée en droit français au moment des faits en cause. Par ailleurs, les conditions d'application de l'article L. 121-1 du code de la consommation et, plus généralement, de caractérisation d'une pratique commerciale déloyale, à savoir la contrariété aux exigences de la diligence professionnelle et l'altération substantielle du comportement du consommateur, ne sont pas réunies. Elle affirme qu'aucune information erronée n'a été communiquée aux investisseurs notamment au regard de l'exigence d'information essentielle sur les avantages fiscaux de l'opération, dans la mesure où cette condition requiert l'absence de possibilité pour le consommateur de décider d'acheter sur le marché auprès d'un autre opérateur, ce qui n'est pas été le cas en l'espèce. Elle ajoute que la condition tenant à l'altération du comportement du consommateur, requise pour caractériser une pratique commerciale déloyale, n'est pas remplie : les époux C. n'ont pas apporté la preuve de ce que, en présence d'une information sur un risque de non-perception des loyers, ils n'auraient pas investi. Les conditions nécessaires à l'identification d'une pratique commerciale trompeuse ne sont ainsi pas remplies.

Cela étant exposé :

Sur les pièces :

Dans l'ordonnance du 9 septembre 2019, le conseiller de la mise en état a précisé que le conseil des époux C. avait présenté, sous son contrôle, la plaquette LCI en original ainsi qu'une partie de la plaquette à entête société Lagrange Patrimoine Conseil sous forme d'impressions/copies recto et que les pièces présentées ne correspondaient pas à celles communiquées en B1. Le conseiller donnait acte aux époux C. de ce qu'ils ne disposaient pas d'autres pièces cotées en B1 que celles présentées à l'audience et indiquait qu'il appartiendrait à ceux-ci de soumettre en original à la cour les documents publicitaires cotés en B1 qu'ils détiennent effectivement.

Devant la cour, selon le bordereau de communication, les époux C. produisent :

-la pièce A3 correspondant à une photocopie de la plaquette établie par LCI de présentation de la résidence « Le Belvédère Bagnères de Luchon » (fiscalité Demessine) - situation, résidence, bail et fiche synthétique-

-la pièce B1 « plaquettes publicitaires », l'une émanant de LPC, l'autre de LCI,

- en pièce B1 bis, la photocopie de la plaquette cartonnée en original établie par LCI comportant les fiches sur les produits de défiscalisation notamment la fiche ZRR et produite devant le conseiller de la mise en état et devant la cour, ainsi que les photocopies en noir et blanc de quelques pages de la plaquette établie par Lagrange Patrimoine Conseil concernant les informations relatives au gestionnaire (pages 1, 2, 3) et les « info pratiques » (pages 4, 5 et 6), outre une page « plan de situation », pièces présentées à l'audience du conseiller de la mise en état et remises à l'audience de la cour,

-la pièce B9, « étude personnalisée »,

-la pièce B2, « fiche synthétique Izimmo ».

S'il n'y a pas obligation pour une partie de soumettre à la juridiction les pièces qu'elle verse au soutien de ses prétentions en original, il en va différemment lorsque les pièces produites en photocopies ont été contestées, lorsque le conseiller de la mise en état, saisi d'un incident sur ces pièces, a pu constater que les photocopies, en l'espèce, partie des pièces de la plaquette à l'entête Lagrange Patrimoine Conseil, ne correspondaient pas à ce que détenaient effectivement les époux C.. Or, ces derniers n'ont déféré que partiellement à l'invitation du conseiller de produire les originaux en leur possession, de sorte que rien ne permet de dire que la plaquette éditée par Lagrange Patrimoine Conseil leur a été remise et a pu les déterminer dans leur choix d'investir dans le programme « Le Belvédère ».

La cour examinera les prétentions des époux C. au regard des seules pièces A3, B2, B9 dont la teneur n'est pas contestée par la société Izimmo et de la fiche ZRR. La cour écartera une partie de la pièce B1 ne correspondant pas aux documents présentés devant le conseiller de la mise en état (partie de la plaquette éditée par LPC sur le gestionnaire et les info pratiques).

Sur les pratiques trompeuses :

L'article L. 120-1 du Code de la consommation n'était pas en vigueur lors de la conclusion du contrat de réservation le 13 juillet 2006.

L'article L. 121-1 du Code de la consommation, dans sa version applicable au moment de la signature du contrat de réservation, précisait : « Est interdite toute publicité comportant, sous quelque forme que ce soit, des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur, lorsque celles-ci portent sur un ou plusieurs des éléments ci-après : existence, nature, composition, qualités substantielles, teneur en principes utiles, espèce, origine, quantité, mode et date de fabrication, propriétés, prix et conditions de vente de biens ou services qui font l'objet de la publicité, conditions de leur utilisation, résultats qui peuvent être attendus de leur utilisation, motifs ou procédés de la vente ou de la prestation de services, portée des engagements pris par l'annonceur, identité, qualités ou aptitudes du fabricant, des revendeurs, des promoteurs ou des prestataires ».

La directive 2005/29/CE est entrée en vigueur le 12 juin 2005 et sa date limite de transposition était fixée au 12 juin 2007. Elle a été effectivement transposée le 3 janvier 2008. Le contrat de réservation a été signé le 13 juillet 2006. Aussi, l'article L. 121-1 dont l'application est demandée aux faits de l'espèce doit être interprétée dans un sens qui ne compromet pas les objectifs que la directive entend voir respecter.

Les objectifs sont les suivants : « contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur et assurer un niveau élevé de protection des consommateurs en rapprochant les dispositions législatives... des état membres relatives aux pratiques commerciales déloyales qui portent atteinte aux intérêts économiques des consommateurs », et dans le considérant 14 : « Il est souhaitable que les pratiques commerciales trompeuses couvrent les pratiques, y compris la publicité trompeuse, qui en induisant le consommateur en erreur, I'empêchent de faire un choix en connaissance de cause et donc de façon efficace ».

Par ailleurs, la directive détermine, en son article 7, les pratiques commerciales réputées trompeuses :

«1.Une pratique commerciale est réputée trompeuse si, dans son contexte factuel, compte tenu de toutes ses caractéristiques et des circonstances ainsi que des limites propres au moyen de communication utilisé, elle omet une information substantielle dont le consommateur moyen a besoin, compte tenu du contexte, pour prendre une décision commerciale en connaissance de cause et, par conséquent, l'amène ou est susceptible de l'amener à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement.

«2. Une pratique commerciale est également considérée comme une omission trompeuse lorsqu'un professionnel, compte tenu des aspects mentionnés au paragraphe 1, dissimule une information substantielle visée audit paragraphe ou la fournit de façon peu claire, inintelligible, ambiguë ou à contretemps, ou lorsqu'il n'indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte et lorsque, dans l'un ou l'autre cas, le consommateur moyen est ainsi amené ou est susceptible d'être amené à prendre une décision qu'il n'aurait pas prise autrement.».

L'article L. 121-1 du Code de la consommation doit être interprété non seulement au regard des présentations « positives » d'informations mais également au regard des omissions d'informations, dans l'objectif d'un niveau élevé de protection du consommateur.

La teneur des pièces produites doit être examinée en considération de cet objectif :

La plaquette éditée par Le Comptoir Immobilier sur « Le Belvédère » (pièce A3) décrit la résidence, sa situation, le bail et propose une fiche synthétique ; il est précisé que le bail est d'une durée de 9 années entières et consécutives, que le paiement des loyers est trimestriel à terme échu ; le gestionnaire « Lagrange Prestige- Soderev » est décrit comme « leader européen de la gestion de résidences de tourisme... ». Enfin, sont mentionnées les résidences « Lagrange ».

La plaquette de LCI (B1) insiste en page de couverture sur les valeurs de Sécurité, Rentabilité, Revente et Garantie, présentées en caractère gras. La fiche cartonnée ZRR éditée par Le Comptoir Immobilier sur l'investissement Loi Demessine précise que « Dès réception de votre bien, votre loyer est garanti par un bail minimum de neuf ans quel que soit le taux d'occupation de la résidence. ».

La « fiche synthétique Izimmo » (pièce B2) fait état notamment d'une rentabilité de 4,11 à 4,47 % brut HT.

La pièce B9 est l'étude personnalisée de l'investissement des époux C..

Le terme « Garantie » n'est pas utilisé dans la plaquette A3. En revanche, il est invoqué dans les pièces cotées en B1 mais LCI a garanti l'existence d'un loyer « dans le cadre » d'un bail de neuf ans (durée qui, au regard de la législation en vigueur au moment de l'investissement conférait un avantage certain sur un bail devant être renouvelé à l'expiration de chaque période triennale) et nullement le montant du loyer, contrairement à ce que les investisseurs invoquent. De même, le terme « Garantie » n'a pas été utilisé dans la présentation de la rentabilité en pièce B2 dont l'annonce est certes avantageuse mais n'excède pas ce que permet la publicité.

La « sécurité » dont il est fait état sur la couverture de la plaquette LCI ne vise pas directement le produit « résidence Le Belvédère '' et il s'est avéré que l'investissement a permis le bénéfice des avantages fiscaux escomptés, ce qui exclut toute tromperie.

Enfin la pièce B9 propose une simulation favorable, qui, se révélant adaptée pendant plusieurs années à la situation des époux C., est exclusive de toute pratique trompeuse.

Dans ces documents, le risque de non-perception du loyer n'est pas précisé, mais il ne s'agit pas d'une information substantielle, comme se trouvent l'être celles relatives à la résidence, aux avantages fiscaux liés à l'investissement. Le consommateur français moyen c'est-à-dire normalement informé et raisonnablement attentif et avisé considération prise des facteurs sociaux, culturels qui le déterminent, a à sa disposition les éléments d'information, connus de tous, relatifs aux risques encourus en matière de baux, notamment la perte ou la baisse du loyer ; ces éléments lui permettent de prendre une décision d'investissement locatif défiscalisé en toute connaissance de cause. L'omission reprochée n'est pas trompeuse.

En outre, rien ne permet de dire, ainsi que le soutiennent les époux C. sans le démontrer, que leur comportement économique a été altéré par les éléments qu'ils qualifient de trompeurs et par l'omission d'une information qu'ils estiment substantielle. D'ailleurs, il est constaté que les époux C. n'ont jamais remis en cause leur opération d'investissement, n'en ont pas demandé l'annulation, qu'ils ont accepté la proposition de l'administrateur judiciaire de la société Soderev Tour, démontrant ainsi que le projet d'investissement était viable.

Enfin, la faute de la société Lagrange Patrimoine Conseil invoquée à titre subsidiaire n'est pas démontrée.

Dès lors, aucune protection ne peut leur être accordée en application de l'article L122-1 du Code de la consommation éclairé par les objectifs de la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005.

La mise en jeu pour pratiques trompeuses à titre principal, de la responsabilité de la société Izimmo et à titre subsidiaire, de la société Lagrange Patrimoine Conseil n'est pas justifiée.

Sur la responsabilité du conseil en investissement immobilier :

Les époux C. invoquent la violation par Izimmo de son obligation d'information et de conseil à leur égard, et ce sur le fondement de l'article 1240 du code civil. Ils précisent que la société Izimmo est intervenue en tant qu'entreprise professionnelle de l'intermédiation en matière immobilière notamment dans le cadre de la préparation de l'investissement soumis à un régime fiscal avantageux, qu'elle était rémunérée à ce titre et qu'elle leur a proposé une étude personnalisée. Elle avait l'obligation de les informer du risque de non-perception de loyers en cas de déconfiture du preneur à bail commercial, ce qu'elle n'a pas fait.

Ils ajoutent que la signature d'un acte authentique devant notaire ne serait pas de nature à fonder une exclusion de responsabilité de la société Izimmo.

De même, ils indiquent que la mention d'une possible remise en cause du montant du loyer insérée dans le contrat de bail avec Soderev Tour, invoquée par la société Izimmo pour soutenir qu'une information relative au risque de non-perception des loyers a été fournie, conforte au contraire la thèse de l'insuffisance des informations initialement communiquées par Izimmo, précisant que le contrat de bail a été transmis tardivement, postérieurement à l'envoi des documents assurant la publicité et la commercialisation du projet «Le Belvédère».

La société Izimmo conteste toute violation du devoir d'information pesant sur elle. Elle estime ne pouvoir être tenue responsable de la dégradation relative, à compter de l'automne 2012, de la rentabilité financière de l'investissement des époux C., en raison de la baisse du niveau des loyers versés, éléments sur lesquels elle n'avait aucune emprise. Elle rappelle que le risque de diminution du montant des loyers à percevoir par les époux C. a été expressément envisagé dans le contrat de bail signé avec la société Soderev qui contenait une stipulation relative à l'adaptation du montant du loyer en cas de dysfonctionnement de l'activité de Soderev Tour et ajoute qu'il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir insisté sur le risque de loyers minorés ou non versés dans la mesure où un tel risque était nécessairement connu des investisseurs. Elle souligne que les époux C. ont bénéficié de différents avantages ' à savoir la réalisation d'un investissement portant sur un bien immobilier neuf, la récupération de la TVA, une réduction du montant de leurs impôts et, enfin, la perception continue sur une période de 9 ans d'un loyer, bien qu'amoindri.

La société Lagrange Patrimoine Conseil soutient que la responsabilité de la société Izimmo ne peut être engagée : la déconfiture de Soderev Tour n'était pas prévisible au moment où la société Izimmo accomplissait ses diligences à l'égard des investisseurs ; en revanche, l'ensemble des avantages fiscaux initialement envisagés, motivation déterminante des époux C. dans leur choix d'investir, ont été acquis et conservés par ceux-ci. Par ailleurs, l'incertitude relative à la perception d'un montant déterminé des loyers était envisagée dans le contrat de bail, en son article 5.3, intitulé « Stipulations particulières », lequel obligeait les investisseurs / bailleurs à accepter une réduction du montant des loyers en certaines circonstances qui auraient été réunies en l'espèce.

La société Allianz affirme que la société Izimmo n'a pas manqué à son devoir de conseil. Elle souligne d'abord que la façon dont la pièce n° B1 communiquée par les investisseurs serait révélatrice de la volonté des investisseurs d'induire en erreur la cour en dénaturant les éléments d'information qui avaient été soumis par Izimmo aux différents investisseurs. De plus, elle soutient que la conclusion du tribunal, selon laquelle Izimmo aurait indûment manqué de communiquer des informations sur des risques liés à l'investissement Belvédère et de nature à remettre en cause l'équilibre financier de l'opération en cause, est erronée, et ce dans la mesure où le contrat de bail commercial comportait la mention du risque de remise en cause du loyer, ce qui est suffisant. En tout état de cause, le risque de diminution de la rentabilité d'un investissement en raison d'une non-perception de loyers est connu de tout investisseur. Enfin, la prestation d'Izimmo vis-à-vis des investisseurs s'étant achevée lors de la signature du contrat de réservation, celle-ci ne saurait être tenue responsable d'une déconfiture intervenue plusieurs années après le terme de cette prestation.

Cela étant exposé :

L'obligation d'information consiste à porter à la connaissance du client des informations objectives sur les caractéristiques de l'investissement qu'il se propose de réaliser de sorte qu'il ait une idée suffisamment précise du bien et qu'il s'engage en toute connaissance de cause.

L'obligation de conseil a pour objet d'informer le client sur l'opportunité de réaliser l'opération.

En l'espèce, l'investissement réalisé par les époux C. consistait en l'acquisition en l'état futur d'achèvement d'un appartement dans une résidence de tourisme située à Bagnères de Luchon, destiné à la location au moyen d'un bail commercial consenti pendant neuf années à une société gestionnaire, ceci permettant ainsi l'obtention des avantages fiscaux proposés par la loi Demessine.

Si les époux C. invoquent « l'obligation d'information et de conseil », force est de constater qu'ils développent peu la violation de l'obligation de conseil, concentrant leurs critiques sur la mauvaise exécution de l'obligation d'information qu'avait la société Izimmo à leur égard.

Pour l'obligation de conseil : il apparaît que lors de la signature du contrat de réservation, rien ne permettait de douter de la solidité financière de la société Soderev Tour, laquelle exécutera ses obligations contractuelles sans difficulté pendant presque quatre années. Il ne peut être reproché à la société Izimmo d'avoir conseillé le placement en cause.

Pour l'obligation d'information : il est souligné que l'investissement des époux C. comporte un volet locatif qui permet de bénéficier des avantages fiscaux ; or, tout investissement comporte une part d'aléa, particulièrement lorsqu'il est réalisé dans le secteur immobilier locatif et la possibilité d'une défaillance du « preneur » du bail commercial dans le paiement des loyers est, quelle qu'en soit la cause, connue de tout investisseur. Les époux C. qui font partie d'une catégorie socio-professionnelle les mettant en mesure de comprendre le mécanisme basique de cet investissement comportant nécessairement une part de risque, pouvaient s'en convaincre par eux-mêmes. Au surplus, ce risque était envisagé dans le contrat de gestion dont le projet avait été soumis aux époux C. pour la signature du contrat de réservation. Aussi, la société Izimmo n'avait pas d'obligation d'information consistant, si l'on suit le raisonnement des époux C., à faire part de l'hypothèse d'une déconfiture du preneur interrompant partiellement ou totalement le paiement du loyer.

Superfétatoirement, il est remarqué que la défaillance modérée de la société Soderev Tour dans l'exécution de ses obligations n'a pas remis en cause la sécurité du placement : les époux C. ont bénéficié des avantages fiscaux attendus dans la réalisation de l'opération, le non-paiement de la TVA sur l'acquisition et les réductions annuelles d'impôts ; le bien immobilier est resté leur propriété.

Les époux C. ne rapportent pas la preuve d'une violation par Izimmo d'une obligation d'information et de conseil à leur égard.

Par ailleurs, les époux C. ne justifient pas que la société Lagrange Patrimoine Conseil était débitrice, envers eux, d'une obligation d'information et de conseil.

Les époux C. seront déboutés de leurs demandes principales et subsidiaires.

Il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes de garantie, sans objet.

PAR CES MOTIFS

Rejette des débats la partie de la pièce B1, photocopie d'une partie de la plaquette réalisée par Lagrange Patrimoine Conseil (partie sur le gestionnaire et les info pratiques), communiquée par les époux C.,

Confirme le jugement ayant rejeté l'exception de nullité de l'assignation délivrée par les époux Sylvie T. et Pascal C. à la société Izimmo et la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action des époux C. à l'égard de la société Izimmo,

Pour le surplus l'infirme,

Déboute les époux Sylvie T. et Pascal C. de toutes leurs demandes,

Dit n'y avoir lieu à indemnité pour frais irrépétibles,

Condamne les époux Sylvie T. et Pascal C. aux entiers dépens,

Accorde aux conseils des sociétés Izimmo et Lagrange Patrimoine Conseil le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

La société par actions simplifié Izimmo, venant aux droits de la société Le Comptoir Immobilier, exerce l'activité d'agence immobilière spécialisée dans l'immobilier de placement et est assurée pour l'ensemble de ses activités auprès de la société Allianz IARD.

Suivant contrat cadre du 5 janvier 2005 et deux avenants des 18 octobre 2006 et 20 juin 2007, elle a été mandatée par la société Lagrange Patrimoine Conseil pour présenter à la vente en l'état futur d'achèvement certains lots du programme immobilier [...].

La commercialisation de ces lots se faisait dans le cadre du dispositif « Demessine », permettant aux acquéreurs des lots de bénéficier d'une réduction d'impôt au titre de l'acquisition entre le 1er janvier 1999 et le 31 décembre 2010 d'un logement en l'état futur d'achèvement faisant partie d'une résidence de tourisme classée, à condition de s'engager à louer le bien pendant au moins 9 années à l'exploitant de la résidence de tourisme dans le cadre d'un bail commercial.

Par acte sous seing privé en date du 13 juillet 2006, Mme Sylvie T. épouse C., comptable et M. Pascal C., enseignant (« les époux C. ») ont signé par l'intermédiaire de la société Izimmo un contrat de réservation portant sur l'acquisition d'un appartement et d'une place de parking dans la [...], Bagnères de Luchon.

Afin de financer cette acquisition, les époux C. ont souscrit un prêt d'un montant de 207300 euros auprès de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Charente- Maritime Deux-Sèvres.

Par acte du 16 février 2007, les époux C. avaient donné les locaux à bail à la société Soderev Tour, filiale du Groupe Lagrange, à compter de l'ouverture de la résidence et pour une durée ferme et irrévocable de 9 années. Le contrat prévoyait le versement d'un loyer de 8142 euros HT payable trimestriellement les 31 mars, 30 juin, 30 septembre et 31 décembre de chaque année.

L'acte de vente a été régularisé le 7 août 2007 pour un montant global de 195000 Euros HT soit 233220 Euros TTC.

Les loyers ont été régulièrement réglés aux acquéreurs jusqu'au loyer du 3ème trimestre 2012, la société Soderev Tour ayant été placée sous procédure de sauvegarde par jugement du tribunal de commerce de Paris du 28 septembre 2012.

Lorsqu'elle a eu connaissance des difficultés rencontrées par la société Soderev Tour, la société Izimmo a, par courriel en date du 17 octobre 2012, informé chacun de ses clients des dispositions à prendre et leur a transmis la garantie souscrite le 20 mai 2008 par la société mère de la société Soderev Tour, à savoir la société Lagrange Gestion, dans les termes suivants :

« Garantie

Nous soussignée, Lagrange Gestion, pris en la personne de son représentant légal, confirmons nous porter garant et répondre solidairement de nos filiales, notamment les société Resitel, SMAS Tourisme, Soderev Tour et Vacantel, pour le bon paiement des loyers tels que prévus dans les baux commerciaux signés par ces dernières.

Fait ce jour pour valoir ce que de droit.

Pierre-Olivier Toumieux

Administrateur Délégué ».

Les époux C. ont déclaré leur créance entre les mains du mandataire judiciaire, lequel a, dans le cadre du plan de sauvegarde mis en 'œuvre, proposé à l'ensemble des investisseurs de contracter un avenant au contrat de bail avec un loyer minoré ainsi que de les dédommager au titre du loyer du 3ème trimestre 2012 à hauteur de 25 % de la somme due.

Selon avenant en date du 5 mai 2013, les époux C. ont consenti une baisse du montant annuel des loyers à effet du 1er avril 2013, désormais fixé à la somme de 4248 Euros HT avec une révision annuelle du prix en fonction de la variation de l'indice des loyers commerciaux publié par l'INSEE et plafonné à 1,50 % l'an.

Considérant avoir été victimes d'un défaut d'information et de conseil de la part de la société Izimmo quant aux différents aléas de l'investissement immobilier ainsi réalisé et plus généralement d'une tromperie commerciale au sens des dispositions de droit de l'Union européenne, les époux C. ont, par acte du 23 décembre 2014, assigné la société Izimmo, venant aux droits de la société Le Comptoir Immobilier, devant le tribunal de grande instance de Brest aux fins d'obtenir l'indemnisation des préjudices financiers et moral qu'ils estiment avoir subis.

Par assignation du 18 août 2015, la société Izimmo a assigné en intervention forcée et garantie la société Lagrange Patrimoine Conseil afin d'obtenir la condamnation de cette dernière à la garantir de l'ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre dans la procédure l'opposant aux époux C..

La jonction de cette dernière procédure avec l'instance principale a été prononcée le 10 novembre 2015 par le juge de la mise en état.

Par conclusions du 2 septembre 2016, la société Allianz IARD, en sa qualité d'assureur de la société Izimmo, est intervenue volontairement à l'instance.

Par jugement du 15 novembre 2017, le tribunal de grande instance de Brest a :

- rejeté l'exception de nullité de l'assignation délivrée par les époux C. à la société Izimmo ;

- rejeté l'exception tirée de la prescription de l'action en responsabilité ;

- dit que la société Izimmo a violé les dispositions de l'article L. 121-1 du code de la consommation interprétées à la lumière des articles 5 et 7 de la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 et a manqué à son devoir d'information et de conseil à l'égard des époux C. ;

- condamné en conséquence la société Izimmo à verser aux époux C. en indemnisation de leurs préjudices :

- la somme de 1667,11 Euros au titre de la part non réglée du 3ème trimestre 2012,

- la somme de 12144 euros HT au titre de la part de loyers non perçus entre le 1er avril 2013 et le 31 mars 2016 ;

- la somme de 1000 euros au titre de leur préjudice moral ;

- débouté la société Izimmo de son action en garantie à l'encontre de la société Lagrange Patrimoine Conseil ;

- débouté la société Izimmo de sa demande de garantie à l'encontre de la société Allianz IARD ;

- débouté la société Izimmo et la société Lagrange Patrimoine Conseil de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- condamné la société Izimmo à verser, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile :

- la somme de 1500 euros aux demandeurs ;

- la somme de 1000 euros à la société Allianz IARD ;

- ordonné l'exécution provisoire ;

- condamné la société Izimmo aux dépens.

La société Izimmo a interjeté appel du jugement du tribunal de grande instance de Brest en date du 15 novembre 2017.

Par ordonnance en date du 9 septembre 2019, le conseiller de la mise en état, après avoir constaté que les époux C. remettaient à l'audience l'intégralité de la plaquette LCI en original, et partie de la plaquette Lagrange Patrimoine Conseil sous forme d'impressions/copies recto, a :

- donné acte aux époux C. de ce qu'ils ne disposent pas d'autres pièces cotées en B1 que celles présentées à l'audience de mise en état du 17 juin 2019 ;

- dit en conséquence n'y avoir lieu à astreinte ;

- condamné les époux C. à payer à la société Izimmo la somme de 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit qu'il appartiendra aux époux C. de verser dans le dossier qui sera soumis à la cour, en original, les documents publicitaires cotées en B1 qu'ils détiennent effectivement ;

- rejeté toute autre demande ;

- condamné les époux C. aux dépens de l'incident.

Par conclusions du 24 février 2020, la société Izimmo demande à la cour de :

Par déboutement de toutes argumentations et prétentions contraires,

Par application des dispositions de l'article 2224 du Code civil,

Par application des dispositions des articles L. 120-1 et L. 121-1 du Code de la consommation,

Par application des dispositions des articles 1240 et suivants (anciens articles 1382 et suivants) du Code civil,

Par application des dispositions des articles 1134 et 1147 anciens du Code civil dans leur rédaction applicable,

Par application des dispositions de l'article 1165 ancien, actuel article 1199, du Code civil,

Par application des dispositions des articles 2000 et suivants du Code civil,

Par application des dispositions des articles L. 112-4, L. 113-1 du Code des assurances,

Par application des dispositions combinées du contrat et des articles 3, 3° de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 et 49 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972, ensemble l'article 2 de l'arrêté du 1er septembre 1972 pris pour l'application du second et l'article 8 de l'annexe I dudit arrêté,

Réformant le jugement entrepris en toutes ses dispositions déférées, Le confirmant pour le surplus,

Rejetant les appels incidents en leurs conclusions contraires aux présentes,

au principal,

- à titre liminaire, par application des dispositions des articles 16 et 132 du code de procédure civile, écarter des débats la pièce intitulée « Plaquettes publicitaires » produite en copie par les intimés sous le n° B1 et toute pièce qui n'aurait pas été régulièrement communiquée à la société Izimmo ;

- constater la prescription de l'action en responsabilité engagée à l'encontre de la société Izimmo ;

subsidiairement,

- déclarer les demandeurs irrecevables et mal fondés en leurs demandes formées au visa des articles 5 et 7 de la directive 2005/29/CE en date du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et à celui de l'article L. 121-1 du code de la consommation ;

- constater que le bail commercial comporte une stipulation prévoyant expressément la possibilité de remise en question du loyer par le preneur ;

- juger que la société Izimmo n'a pas manqué à son obligation d'information précontractuelle et, plus généralement, que la preuve n'est pas rapportée de manquements fautifs engageant sa responsabilité à l'égard des demandeurs ;

plus subsidiairement,

- juger que le préjudice procède d'une perte de chance très faible voire nulle de ne pas contracter';

- en conséquence, débouter les époux C. de l'intégralité de leurs demandes à l'encontre de la société Izimmo ;

à titre plus subsidiaire encore,

- condamner la société Lagrange Patrimoine Conseil à garantir la société Izimmo de l'intégralité des condamnations en principal, intérêts, frais et dépens qui seraient prononcées à son encontre ;

- condamner la société Allianz à garantir la société Izimmo de l'intégralité des condamnations en principal, intérêts, frais et dépens qui seraient prononcées à son encontre ;

- juger, par application des dispositions de l'article L. 124-1-1 du code des assurances, que les réclamations ayant pour objet ou pour fondement la prétendue baisse de loyers de la [...] et, à ce titre, les 35 instances identiques dont se trouve saisie la cour, constituent un fait dommageable unique justifiant l'application d'une seule franchise limitée à 10 % du dommage dans la limite d'un montant maximum de 15 520 euros ;

en tout état de cause,

- débouter l'ensemble des parties des demandes dirigées contre la société Izimmo au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la partie perdante à payer à la société Izimmo la somme de 5 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de la SCP B. conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions du 28 février 2020, les époux C. demandent à la cour de :

au visa des articles 12, 16, 132 et suivants et 954 du code de procédure civile, des articles 1240 (ancien article1382), 1131 dans sa version applicable au moment des faits, 1147, 1353 (ancien article 1315) et 2224 du Code civil, de l'article L. 121-1 du Code de la consommation notamment dans sa rédaction interprétée à la lumière de la directive 2005/29//CE du 11 mai 2005, de la loi de finances du 30 décembre 1998 pour 1998 et ses modifications successives, des articles 199 decies E, 199 decies EA et 199 decies G du Code générale des impôts, de l'article 261-D du code général des impôts, de l'article 311-8 du Code de la consommation,

à titre liminaire,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité de l'assignation délivrée par les époux C. à la société Izimmo ;

- juger que leur action et leurs demandes sont valables et recevables ;

à titre principal,

- dire l'appel principal formé par la société Izimmo mal fondé et le rejeter ;

- dire les appels incidents formés par les sociétés Lagrange Patrimoine Conseil et Allianz mal fondés et les rejeter ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé les demandes des époux C. recevables et non prescrites ;

en conséquence,

- débouter les sociétés Lagrange Patrimoine Conseil, Allianz IARD et Izimmo de leurs demandes tendant à voir déclarer leur action prescrite ;

en conséquence,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que la société Izimmo a violé les dispositions de l'article L. 121-1 du code de la consommation interprété à la lumière des articles 5 et 7 de la directive 2005/29/CE en date du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que la société Izimmo a violé son obligation d'information et de conseil à l'égard des époux C. ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande d'indemnisation correspondant à la période allant du 1er avril 2016 à la fin du bail commercial (31 décembre 2017), au montant des honoraires versés à Izimmo (2900 Euros) et en ce qu'il a limité la demande d'indemnisation du préjudice moral ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les sociétés Izimmo, Allianz IARD et Lagrange Patrimoine Conseil de leurs demandes dirigées à l'encontre des époux C. ;

en conséquence,

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Izimmo à payer aux époux C. la somme de 12144 euros représentant la différence HT entre le montant du bail initial et celui de l'avenant tenant compte des indices de révision sur la période allant du 1er avril 2013 à fin mars 2016, et la somme de 1667,11 Euros HT correspondant à ce qui n'a pas été versé par Soderev au titre du 3ème trimestre 2012 ;

- condamner la société Izimmo à payer aux époux C. tous les trimestres la somme HT représentant la différence HT entre le montant du bail initial et celui de l'avenant tenant compte des indices de révision sur la période allant du 1er avril 2016 à la fin du bail commercial, soit la somme de 6845 euros ;

- condamner la société Izimmo à payer aux époux C. la somme de 2900 euros correspondant au remboursement des honoraires qu'ils lui ont versés pour l'acquisition du produit « Belvédère » ;

- condamner la société Izimmo à payer respectivement à Mme et M. C. la somme de 5000 euros en réparation de leur préjudice moral ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Izimmo à payer la somme de 1500 euros aux époux C. au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

à titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour infirmait le jugement entrepris et jugeait que les préjudices subis par les époux C. étaient causés également ou exclusivement par la faute de la société Lagrange Patrimoine Conseil et non par celle de la société Izimmo :

- mettre, selon le cas, l'ensemble des condamnations judiciaires sollicitées par les époux C., soit à la charge de la société Lagrange Patrimoine Conseil et de la société Izimmo pris solidairement soit exclusivement à la charge de la société Lagrange Patrimoine Conseil, en ce compris le paiement des frais irrépétibles au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des entiers dépens ;

en tout état de cause,

- juger que la pièce n° B1 a été régulièrement versée aux débats ;

- juger que la demande de la société Izimmo visant à écarter des débats la pièce n° B1 « et toute pièce qui n'aurait pas été communiquée à la Société Izimmo » est irrecevable et mal fondée ;

- rejeter la demande de la société Izimmo visant à écarter des débats la pièce n° B1 « et toute pièce qui n'aurait pas été communiquée à la société Izimmo » ;

- débouter les sociétés Izimmo, Allianz IARD et Lagrange Patrimoine Conseil de l'intégralité de leurs demandes ;

- condamner la société Izimmo à payer aux époux C. la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Izimmo aux entiers dépens de l'instance d'appel, recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions du 4 janvier 2019, la société Lagrange Patrimoine Conseil demande à la cour de :

- constater la prescription de l'action de la société Izimmo à l'encontre de la société Lagrange Patrimoine Conseil mais aussi l'absence de fondement de sa demande en garantie et la débouter de ses demandes ;

- constater la prescription de l'action des demandeurs initiaux et les débouter de leurs demandes ;

- constater l'inapplicabilité de l'article L. 120-1 du code de la consommation, confirmer le jugement entrepris, de ce chef en déboutant les demandeurs initiaux de leurs demandes ;

- constater l'inapplicabilité des articles 5 et 7 de la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 et l'article L. 121-1 du code de la consommation, infirmer le jugement entrepris, de ce chef, et débouter les demandeurs initiaux de leurs demandes ;

- condamner la société Izimmo à verser à la société Lagrange Patrimoine Conseil la somme de 5000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Izimmo aux entiers dépens dont distraction au profit de Me René G., avocat au barreau de Rennes, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions du 12 mars 2020, la société Allianz demande à la cour de :

- la recevoir en ses explications et de l'y dire bien fondée ;

à titre principal,

- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté l'exception tirée de la prescription de l'action en responsabilité ;

en conséquence et statuant à nouveau :

- juger que l'action des époux C. à l'encontre de la société Izimmo est prescrite ;

- débouter les époux C. de toutes demandes, fins et conclusions ;

à titre subsidiaire,

- infirmer le jugement en ce qu'il a dit que la société Izimmo avait commis une faute et l'a condamnée à indemniser les époux C. ;

en conséquence et statuant à nouveau :

- juger que la société Izimmo n'a pas commis de faute ;

- débouter les époux C. de toutes demandes ;

à titre plus subsidiaire,

- infirmer le jugement en ce qu'il a retenu l'existence d'un préjudice ;

en conséquence et statuant à nouveau :

- juger que les époux C. ne justifient pas de leur préjudice ;

- débouter les époux C. de toutes demandes à l'encontre d'Allianz ;

à titre encore plus subsidiaire,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Izimmo de sa demande de garantie à l'encontre de la société Allianz, (i) la faute dolosive, (ii) « les conséquences pécuniaires des réclamations relatives à une publicité mensongère » et (iii) « les dommages provenant de l'insuffisance ou de la non-obtention des résultats ou performances promises en matière de rendement, d'équilibre financier ou économique » étant exclus de la Police n° 45117021';

à titre infiniment subsidiaire,

- appliquer le plafond de 600000 euros et la franchise de 10 % du montant des dommages avec montant maximal de 15 250 euros stipulés par la Police Allianz n° 45117021 ;

en tout état de cause,

- débouter toutes parties de leurs demandes, fins et conclusions à l'encontre d'Allianz ;

- condamner toute partie succombant à verser à Allianz la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

A l'issue de l'audience de plaidoiries, les époux C. ont remis la plaquette cartonnée établie par LCI comportant les fiches sur les produits de défiscalisation notamment la fiche ZRR, ainsi que la photocopie de quelques pages de la plaquette établie par Lagrange Patrimoine Conseil concernant les informations relatives au gestionnaire (pages 1, 2, 3) et les « info pratiques » (pages 4, 5 et 6), outre une page « plan de situation », pièces qui avaient été présentées à l'audience du conseiller de la mise en état.

MOTIFS :

Sur les moyens de procédure :

Sur la nullité de l'assignation :

L'irrégularité de l'assignation au motif que les éléments de droit, fondement juridique de la demande, n'étaient pas renseignés dans l'acte introductif, avait été invoquée en première instance. Devant la cour, ce moyen est repris par la société Lagrange Patrimoine Conseil en page 12 de ses écritures mais ne se trouve pas dans le dispositif de ses écritures.

La cour, saisie en application de l'article 954 alinéa 3 des seules prétentions énoncées dans le dispositif, ne statuera pas sur ce moyen.

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action des investisseurs contre Izimmo :

La société Izimmo soutient que l'action des époux C. est prescrite. Le point de départ du délai de prescription de cinq ans prévu par l'article 2224 du code civil, c'est-à-dire le jour où les époux C. ont été en mesure de connaître les faits leur permettant d'exercer leur action, correspond au jour de la souscription du contrat auprès de la société Le Comptoir Immobilier, dans la mesure où l'action est fondée sur une violation alléguée du devoir d'information et de conseil et où les époux C. auraient été en mesure de comprendre l'existence d'un risque de non-versement des loyers dès cette phase de souscription du contrat, puis de la prise de connaissance des termes du contrat de bail ensuite signé avec la société Soderev Tour, toujours au cours de l'année 2007. En tout état de cause, la société Izimmo soutient que, par l'effet de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi du 17 juin 2008, l'action s'est éteinte le 19 juin 2013, soit avant l'assignation délivrée le 23 décembre 2014.

La société Lagrange Patrimoine Conseil soutient que l'action des époux C. est prescrite en raison de la réforme de l'article 2224 du code civil opérée par la loi du 17 juin 2008, depuis le 19 juin 2013. En tout état de cause, elle estime que le point de départ du délai de prescription de l'action des époux C. correspond au terme de la prestation accomplie par Izimmo auprès des époux C. soit le 13 juillet 2006, date de signature du contrat de réservation ; retenir l'analyse des époux C., quant au point de départ du délai de prescription, reviendrait selon la société Lagrange à consacrer l'imprescriptibilité de l'action.

La société Allianz soutient que l'action des investisseurs qui n'a pas été formée avant le 19 juin 2013 est prescrite. Elle considère que le point de départ du délai de prescription ne correspond pas, contrairement à ce que soutiennent les époux C., au moment où ces derniers ont eu connaissance des difficultés financières prétendument causées par le défaut d'information qu'ils reprochent à la société Izimmo mais à la date de la signature du contrat de réservation.

Les époux C. soutiennent que leur action n'était pas prescrite ; en effet, le point de départ du délai de prescription s'appréhende de manière subjective, c'est-à-dire en fonction du moment à partir duquel les auteurs de l'action en responsabilité ont effectivement pu avoir connaissance des faits leur permettant d'exercer cette action, c'est-à-dire du dommage invoqué. En l'espèce, ce moment ne correspond pas à la commission de l'éventuelle violation du devoir d'information pesant sur l'appelante, mais bien à la période où les difficultés dans la perception des loyers auprès de la société Soderev Tour se sont matérialisées, c'est-à-dire à compter de septembre 2012.

Cela étant exposé :

Selon les termes de l'article 2224 du Code civil, la prescription d'une action en responsabilité court à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Les époux C. ont signé un contrat de réservation avec la société Alti Immo dans lequel ils reconnaissaient (page 11 du contrat) avoir reçu communication du projet de bail commercial à consentir à la société gestionnaire. Le projet de bail comportait (article 5-3) des « stipulations particulières » selon lesquelles les loyers pourraient être remis en question en cas de « force majeure interrompant l'activité touristique » ou encore en cas d'« évènements amenant un dysfonctionnement dans l'activité du preneur notamment une modification de la destination ou accès des parties communes ou encore leur mauvais entretien ou fonctionnement ». Ils n'ignoraient pas que le non-paiement du loyer était possible.

Toutefois, la communication du projet de contrat pour la signature du contrat de réservation est ici sans incidence sur la prescription. En effet, le contrat de bail a été exécuté à partir du mois de décembre 2008 et jusqu'au début du mois de septembre 2012, les époux C. ont obtenu régulièrement le versement des loyers au prix convenu dans le contrat, de sorte qu'ils n'avaient aucune raison d'agir en responsabilité contre lzimmo. C'est par conséquent lorsque la difficulté est intervenue dans la perception du loyer en septembre 2012, au cours de l'exécution du contrat de bail de neuf ans, que le dommage a été révélé aux époux C. et que le délai pour agir a alors couru. En assignant la société Izimmo le 23 décembre 2014,

les époux C. étaient recevables en leur action.

Les époux C. sollicitent à titre subsidiaire « si la cour jugeait que les préjudices subis par M. et Mme C. étaient causés également ou exclusivement par la faute de la société Lagrange Patrimoine et non par celle de la société Izimmo », que l'ensemble des condamnations judiciaires soit à sa charge, soit solidairement avec Izimmo soit exclusivement. La société Lagrange Patrimoine Conseil ne justifie pas que la demande formée à titre subsidiaire à son égard par les époux C. est prescrite, ne versant aux débats aucun document permettant de constater que la demande formée contre elle est hors délai. Les motifs précédemment retenus pour justifier la recevabilité de la demande des époux C. à l'égard d'Izimmo s'opposent à toute imprescriptibilité de l'action en responsabilité comme le soutient Lagrange Patrimoine Conseil.

Sur le fond :

Sur la publicité trompeuse :

Les époux C. affirment que la directive 2005/29/CE peut être prise en considération pour interpréter l'interdiction posée à l'article L. 121-1 du code de la consommation et conforte la possibilité de condamner un professionnel qui a, par une tromperie ou par l'omission de donner une information substantielle, a pu amener le consommateur à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement.

Ils considèrent que la société Izimmo professionnel spécialisé dans l'investissement locatif défiscalisé doit informer les investisseurs non professionnels sur l'ensemble des caractéristiques et risques notamment financiers liés à l'opération projetée, cet ensemble de risques incluant le non-paiement des loyers, lesquels constituent un élément indispensable à la viabilité du projet d'investissement. Le fait, pour la société Izimmo, d'avoir remis aux investisseurs des éléments d'information faisant mention de loyers prétendument garantis est trompeur et revient à s'abstenir de les informer sur le risque de loyers impayés ou réduits en cas de déconfiture du preneur à bail commercial ; une telle omission est contraire aux exigences formalisées dans les articles L. 120-1 et L. 121-1 du code de la consommation et altère de manière substantielle le comportement économique des investisseurs. Les conditions de caractérisation d'une pratique commerciale trompeuse sont réunies.

Par ailleurs, les époux C. s'opposent à la demande de l'appelante portant sur l'exclusion des éléments constituant la pièce n° B1, considérant que cette demande est irrecevable et mal fondée. Selon eux, il n'existe pas de dénaturation dommageable du contenu des éléments de publicité initialement adressés par la société Izimmo aux investisseurs. Ils soutiennent que les articles 16, 132 et 954 du code de procédure civile n'imposent pas la communication de la version originale des documents constituant une pièce et, en tout état de cause, que les éléments constituant la pièce n° B1 ont été soumis à l'appréciation du conseil de la société Izimmo sous le contrôle du conseiller de la mise en état. Dès lors, la pièce n° B1 peut être prise en considération pour établir l'insuffisance des informations adressées aux investisseurs par la Société Izimmo. Enfin, ils rappellent que c'est à la société Izimmo qu'il incombe de prouver qu'elle leur a transmis des informations complètes, faisant notamment état du risque de non-perception des loyers, ce qu'elle n'a pas fait.

La société Izimmo conclut à l'absence de violation des dispositions de l'article L. 121-1 du code de la consommation. Elle soutient que la directive 2005/29/CE n'est pas applicable aux faits, celle-ci ayant été transposée en droit français en 2008, postérieurement à la réalisation de la vente des époux C.. Par ailleurs, à supposer que ladite directive puisse guider l'interprétation des dispositions françaises du code de la consommation, pareille prise en considération ne saurait avoir pour effet de dénaturer les dispositions nationales et permettre sa condamnation en application de l'article L. 121-1 du code de la consommation. Elle soutient en effet que les éléments de documentation transmis aux investisseurs, notamment aux époux C., ne permettent pas de conclure en l'existence d'une violation de l'article L. 121-1 du code de la consommation, qu'il s'agisse de documents publicitaires portant sur les mécanismes de défiscalisation ou qu'il s'agisse d'un document élaboré par la société Le Comptoir Immobilier relatif au placement « Le Belvédère ».

La société Izimmo soutient que la pièce n° B1, produite par les époux C. est un montage en photocopie de deux plaquettes distinctes créant une confusion (une plaquette publicitaire de Lagrange Patrimoine et une plaquette publicitaire de la société Le Comptoir Immobilier), que ce document n'est pas conforme aux pièces communiquées à l'audience du conseiller de la mise en état. Elle ajoute que les plaquettes publicitaires produites en photocopies en B1 ne sont pas détenues en original par les époux C. et doivent être écartées des débats.

La société Izimmo considère que la brochure de présentation générale de l'investissement dans le cadre du dispositif Demessine (éditée par Le comptoir Immobilier en fiche ZRR) ne permet pas d'établir une violation des obligations découlant de l'article L. 121-1 du code de la consommation : la mention d'un loyer garanti pendant une période ferme et irrévocable de neuf années n'était ni injustifiée ni exagérée au regard des dispositions légales applicables au moment des faits ; la brochure en cause ne faisait mention que de la garantie relative à l'existence même du bail pendant une période donnée, et aucunement sur le montant des loyers. La brochure ne fait nullement état de la résidence « Le Belvédère », n'en fait aucune publicité et ne contient aucune allégation, indication ou présentation fausse ou de nature à induire en erreur.

La société Izimmo soutient que la plaquette de présentation de la résidence « Le Belvédère » élaborée par Le Comptoir Immobilier communiquée en A3 par les investisseurs offre une présentation avantageuse de la résidence vendue mais ses termes n'excèdent pas ceux que permet la publicité. Elle ne mentionne nulle part que les loyers seraient « garantis », de sorte que la violation de l'article L. 121-1 du code de la consommation n'est pas établie. Ainsi, même interprété à la lumière des articles pertinents de la directive 2005/29/CE, la tromperie précisée par l'article L. 121-1 du Code de la consommation est exclue.

La société Lagrange Patrimoine Conseil considère que l'article L. 120-1 du Code de la consommation n'est pas applicable en l'espèce. Elle affirme que l'article L. 121-1 du Code de la consommation ne peut être « lu » à la lumière de la directive 2005/29/CE dans la mesure où celle-ci n'avait pas été transposée en droit français au moment des faits en cause. Par ailleurs, les conditions d'application de l'article L. 121-1 du code de la consommation et, plus généralement, de caractérisation d'une pratique commerciale déloyale, à savoir la contrariété aux exigences de la diligence professionnelle et l'altération substantielle du comportement du consommateur, ne sont pas réunies. Elle affirme qu'aucune information erronée n'a été communiquée aux investisseurs notamment au regard de l'exigence d'information essentielle sur les avantages fiscaux de l'opération, dans la mesure où cette condition requiert l'absence de possibilité pour le consommateur de décider d'acheter sur le marché auprès d'un autre opérateur, ce qui n'est pas été le cas en l'espèce. Elle ajoute que la condition tenant à l'altération du comportement du consommateur, requise pour caractériser une pratique commerciale déloyale, n'est pas remplie : les époux C. n'ont pas apporté la preuve de ce que, en présence d'une information sur un risque de non-perception des loyers, ils n'auraient pas investi. Les conditions nécessaires à l'identification d'une pratique commerciale trompeuse ne sont ainsi pas remplies.

Cela étant exposé :

Sur les pièces :

Dans l'ordonnance du 9 septembre 2019, le conseiller de la mise en état a précisé que le conseil des époux C. avait présenté, sous son contrôle, la plaquette LCI en original ainsi qu'une partie de la plaquette à entête société Lagrange Patrimoine Conseil sous forme d'impressions/copies recto et que les pièces présentées ne correspondaient pas à celles communiquées en B1. Le conseiller donnait acte aux époux C. de ce qu'ils ne disposaient pas d'autres pièces cotées en B1 que celles présentées à l'audience et indiquait qu'il appartiendrait à ceux-ci de soumettre en original à la cour les documents publicitaires cotés en B1 qu'ils détiennent effectivement.

Devant la cour, selon le bordereau de communication, les époux C. produisent :

-la pièce A3 correspondant à une photocopie de la plaquette établie par LCI de présentation de la résidence « Le Belvédère Bagnères de Luchon » (fiscalité Demessine) - situation, résidence, bail et fiche synthétique-

-la pièce B1 « plaquettes publicitaires », l'une émanant de LPC, l'autre de LCI,

- en pièce B1 bis, la photocopie de la plaquette cartonnée en original établie par LCI comportant les fiches sur les produits de défiscalisation notamment la fiche ZRR et produite devant le conseiller de la mise en état et devant la cour, ainsi que les photocopies en noir et blanc de quelques pages de la plaquette établie par Lagrange Patrimoine Conseil concernant les informations relatives au gestionnaire (pages 1, 2, 3) et les « info pratiques » (pages 4, 5 et 6), outre une page « plan de situation », pièces présentées à l'audience du conseiller de la mise en état et remises à l'audience de la cour,

-la pièce B9, « étude personnalisée »,

-la pièce B2, « fiche synthétique Izimmo ».

S'il n'y a pas obligation pour une partie de soumettre à la juridiction les pièces qu'elle verse au soutien de ses prétentions en original, il en va différemment lorsque les pièces produites en photocopies ont été contestées, lorsque le conseiller de la mise en état, saisi d'un incident sur ces pièces, a pu constater que les photocopies, en l'espèce, partie des pièces de la plaquette à l'entête Lagrange Patrimoine Conseil, ne correspondaient pas à ce que détenaient effectivement les époux C.. Or, ces derniers n'ont déféré que partiellement à l'invitation du conseiller de produire les originaux en leur possession, de sorte que rien ne permet de dire que la plaquette éditée par Lagrange Patrimoine Conseil leur a été remise et a pu les déterminer dans leur choix d'investir dans le programme « Le Belvédère ».

La cour examinera les prétentions des époux C. au regard des seules pièces A3, B2, B9 dont la teneur n'est pas contestée par la société Izimmo et de la fiche ZRR. La cour écartera une partie de la pièce B1 ne correspondant pas aux documents présentés devant le conseiller de la mise en état (partie de la plaquette éditée par LPC sur le gestionnaire et les info pratiques).

Sur les pratiques trompeuses :

L'article L. 120-1 du Code de la consommation n'était pas en vigueur lors de la conclusion du contrat de réservation le 13 juillet 2006.

L'article L. 121-1 du Code de la consommation, dans sa version applicable au moment de la signature du contrat de réservation, précisait : « Est interdite toute publicité comportant, sous quelque forme que ce soit, des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur, lorsque celles-ci portent sur un ou plusieurs des éléments ci-après : existence, nature, composition, qualités substantielles, teneur en principes utiles, espèce, origine, quantité, mode et date de fabrication, propriétés, prix et conditions de vente de biens ou services qui font l'objet de la publicité, conditions de leur utilisation, résultats qui peuvent être attendus de leur utilisation, motifs ou procédés de la vente ou de la prestation de services, portée des engagements pris par l'annonceur, identité, qualités ou aptitudes du fabricant, des revendeurs, des promoteurs ou des prestataires ».

La directive 2005/29/CE est entrée en vigueur le 12 juin 2005 et sa date limite de transposition était fixée au 12 juin 2007. Elle a été effectivement transposée le 3 janvier 2008. Le contrat de réservation a été signé le 13 juillet 2006. Aussi, l'article L. 121-1 dont l'application est demandée aux faits de l'espèce doit être interprétée dans un sens qui ne compromet pas les objectifs que la directive entend voir respecter.

Les objectifs sont les suivants : « contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur et assurer un niveau élevé de protection des consommateurs en rapprochant les dispositions législatives... des état membres relatives aux pratiques commerciales déloyales qui portent atteinte aux intérêts économiques des consommateurs », et dans le considérant 14 : « Il est souhaitable que les pratiques commerciales trompeuses couvrent les pratiques, y compris la publicité trompeuse, qui en induisant le consommateur en erreur, I'empêchent de faire un choix en connaissance de cause et donc de façon efficace ».

Par ailleurs, la directive détermine, en son article 7, les pratiques commerciales réputées trompeuses :

«1.Une pratique commerciale est réputée trompeuse si, dans son contexte factuel, compte tenu de toutes ses caractéristiques et des circonstances ainsi que des limites propres au moyen de communication utilisé, elle omet une information substantielle dont le consommateur moyen a besoin, compte tenu du contexte, pour prendre une décision commerciale en connaissance de cause et, par conséquent, l'amène ou est susceptible de l'amener à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement.

«2. Une pratique commerciale est également considérée comme une omission trompeuse lorsqu'un professionnel, compte tenu des aspects mentionnés au paragraphe 1, dissimule une information substantielle visée audit paragraphe ou la fournit de façon peu claire, inintelligible, ambiguë ou à contretemps, ou lorsqu'il n'indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte et lorsque, dans l'un ou l'autre cas, le consommateur moyen est ainsi amené ou est susceptible d'être amené à prendre une décision qu'il n'aurait pas prise autrement.».

L'article L. 121-1 du Code de la consommation doit être interprété non seulement au regard des présentations « positives » d'informations mais également au regard des omissions d'informations, dans l'objectif d'un niveau élevé de protection du consommateur.

La teneur des pièces produites doit être examinée en considération de cet objectif :

La plaquette éditée par Le Comptoir Immobilier sur « Le Belvédère » (pièce A3) décrit la résidence, sa situation, le bail et propose une fiche synthétique ; il est précisé que le bail est d'une durée de 9 années entières et consécutives, que le paiement des loyers est trimestriel à terme échu ; le gestionnaire « Lagrange Prestige- Soderev » est décrit comme « leader européen de la gestion de résidences de tourisme... ». Enfin, sont mentionnées les résidences « Lagrange ».

La plaquette de LCI (B1) insiste en page de couverture sur les valeurs de Sécurité, Rentabilité, Revente et Garantie, présentées en caractère gras. La fiche cartonnée ZRR éditée par Le Comptoir Immobilier sur l'investissement Loi Demessine précise que « Dès réception de votre bien, votre loyer est garanti par un bail minimum de neuf ans quel que soit le taux d'occupation de la résidence. ».

La « fiche synthétique Izimmo » (pièce B2) fait état notamment d'une rentabilité de 4,11 à 4,47 % brut HT.

La pièce B9 est l'étude personnalisée de l'investissement des époux C..

Le terme « Garantie » n'est pas utilisé dans la plaquette A3. En revanche, il est invoqué dans les pièces cotées en B1 mais LCI a garanti l'existence d'un loyer « dans le cadre » d'un bail de neuf ans (durée qui, au regard de la législation en vigueur au moment de l'investissement conférait un avantage certain sur un bail devant être renouvelé à l'expiration de chaque période triennale) et nullement le montant du loyer, contrairement à ce que les investisseurs invoquent. De même, le terme « Garantie » n'a pas été utilisé dans la présentation de la rentabilité en pièce B2 dont l'annonce est certes avantageuse mais n'excède pas ce que permet la publicité.

La « sécurité » dont il est fait état sur la couverture de la plaquette LCI ne vise pas directement le produit « résidence Le Belvédère '' et il s'est avéré que l'investissement a permis le bénéfice des avantages fiscaux escomptés, ce qui exclut toute tromperie.

Enfin la pièce B9 propose une simulation favorable, qui, se révélant adaptée pendant plusieurs années à la situation des époux C., est exclusive de toute pratique trompeuse.

Dans ces documents, le risque de non-perception du loyer n'est pas précisé, mais il ne s'agit pas d'une information substantielle, comme se trouvent l'être celles relatives à la résidence, aux avantages fiscaux liés à l'investissement. Le consommateur français moyen c'est-à-dire normalement informé et raisonnablement attentif et avisé considération prise des facteurs sociaux, culturels qui le déterminent, a à sa disposition les éléments d'information, connus de tous, relatifs aux risques encourus en matière de baux, notamment la perte ou la baisse du loyer ; ces éléments lui permettent de prendre une décision d'investissement locatif défiscalisé en toute connaissance de cause. L'omission reprochée n'est pas trompeuse.

En outre, rien ne permet de dire, ainsi que le soutiennent les époux C. sans le démontrer, que leur comportement économique a été altéré par les éléments qu'ils qualifient de trompeurs et par l'omission d'une information qu'ils estiment substantielle. D'ailleurs, il est constaté que les époux C. n'ont jamais remis en cause leur opération d'investissement, n'en ont pas demandé l'annulation, qu'ils ont accepté la proposition de l'administrateur judiciaire de la société Soderev Tour, démontrant ainsi que le projet d'investissement était viable.

Enfin, la faute de la société Lagrange Patrimoine Conseil invoquée à titre subsidiaire n'est pas démontrée.

Dès lors, aucune protection ne peut leur être accordée en application de l'article L122-1 du Code de la consommation éclairé par les objectifs de la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005.

La mise en jeu pour pratiques trompeuses à titre principal, de la responsabilité de la société Izimmo et à titre subsidiaire, de la société Lagrange Patrimoine Conseil n'est pas justifiée.

Sur la responsabilité du conseil en investissement immobilier :

Les époux C. invoquent la violation par Izimmo de son obligation d'information et de conseil à leur égard, et ce sur le fondement de l'article 1240 du code civil. Ils précisent que la société Izimmo est intervenue en tant qu'entreprise professionnelle de l'intermédiation en matière immobilière notamment dans le cadre de la préparation de l'investissement soumis à un régime fiscal avantageux, qu'elle était rémunérée à ce titre et qu'elle leur a proposé une étude personnalisée. Elle avait l'obligation de les informer du risque de non-perception de loyers en cas de déconfiture du preneur à bail commercial, ce qu'elle n'a pas fait.

Ils ajoutent que la signature d'un acte authentique devant notaire ne serait pas de nature à fonder une exclusion de responsabilité de la société Izimmo.

De même, ils indiquent que la mention d'une possible remise en cause du montant du loyer insérée dans le contrat de bail avec Soderev Tour, invoquée par la société Izimmo pour soutenir qu'une information relative au risque de non-perception des loyers a été fournie, conforte au contraire la thèse de l'insuffisance des informations initialement communiquées par Izimmo, précisant que le contrat de bail a été transmis tardivement, postérieurement à l'envoi des documents assurant la publicité et la commercialisation du projet «Le Belvédère».

La société Izimmo conteste toute violation du devoir d'information pesant sur elle. Elle estime ne pouvoir être tenue responsable de la dégradation relative, à compter de l'automne 2012, de la rentabilité financière de l'investissement des époux C., en raison de la baisse du niveau des loyers versés, éléments sur lesquels elle n'avait aucune emprise. Elle rappelle que le risque de diminution du montant des loyers à percevoir par les époux C. a été expressément envisagé dans le contrat de bail signé avec la société Soderev qui contenait une stipulation relative à l'adaptation du montant du loyer en cas de dysfonctionnement de l'activité de Soderev Tour et ajoute qu'il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir insisté sur le risque de loyers minorés ou non versés dans la mesure où un tel risque était nécessairement connu des investisseurs. Elle souligne que les époux C. ont bénéficié de différents avantages ' à savoir la réalisation d'un investissement portant sur un bien immobilier neuf, la récupération de la TVA, une réduction du montant de leurs impôts et, enfin, la perception continue sur une période de 9 ans d'un loyer, bien qu'amoindri.

La société Lagrange Patrimoine Conseil soutient que la responsabilité de la société Izimmo ne peut être engagée : la déconfiture de Soderev Tour n'était pas prévisible au moment où la société Izimmo accomplissait ses diligences à l'égard des investisseurs ; en revanche, l'ensemble des avantages fiscaux initialement envisagés, motivation déterminante des époux C. dans leur choix d'investir, ont été acquis et conservés par ceux-ci. Par ailleurs, l'incertitude relative à la perception d'un montant déterminé des loyers était envisagée dans le contrat de bail, en son article 5.3, intitulé « Stipulations particulières », lequel obligeait les investisseurs / bailleurs à accepter une réduction du montant des loyers en certaines circonstances qui auraient été réunies en l'espèce.

La société Allianz affirme que la société Izimmo n'a pas manqué à son devoir de conseil. Elle souligne d'abord que la façon dont la pièce n° B1 communiquée par les investisseurs serait révélatrice de la volonté des investisseurs d'induire en erreur la cour en dénaturant les éléments d'information qui avaient été soumis par Izimmo aux différents investisseurs. De plus, elle soutient que la conclusion du tribunal, selon laquelle Izimmo aurait indûment manqué de communiquer des informations sur des risques liés à l'investissement Belvédère et de nature à remettre en cause l'équilibre financier de l'opération en cause, est erronée, et ce dans la mesure où le contrat de bail commercial comportait la mention du risque de remise en cause du loyer, ce qui est suffisant. En tout état de cause, le risque de diminution de la rentabilité d'un investissement en raison d'une non-perception de loyers est connu de tout investisseur. Enfin, la prestation d'Izimmo vis-à-vis des investisseurs s'étant achevée lors de la signature du contrat de réservation, celle-ci ne saurait être tenue responsable d'une déconfiture intervenue plusieurs années après le terme de cette prestation.

Cela étant exposé :

L'obligation d'information consiste à porter à la connaissance du client des informations objectives sur les caractéristiques de l'investissement qu'il se propose de réaliser de sorte qu'il ait une idée suffisamment précise du bien et qu'il s'engage en toute connaissance de cause.

L'obligation de conseil a pour objet d'informer le client sur l'opportunité de réaliser l'opération.

En l'espèce, l'investissement réalisé par les époux C. consistait en l'acquisition en l'état futur d'achèvement d'un appartement dans une résidence de tourisme située à Bagnères de Luchon, destiné à la location au moyen d'un bail commercial consenti pendant neuf années à une société gestionnaire, ceci permettant ainsi l'obtention des avantages fiscaux proposés par la loi Demessine.

Si les époux C. invoquent « l'obligation d'information et de conseil », force est de constater qu'ils développent peu la violation de l'obligation de conseil, concentrant leurs critiques sur la mauvaise exécution de l'obligation d'information qu'avait la société Izimmo à leur égard.

Pour l'obligation de conseil : il apparaît que lors de la signature du contrat de réservation, rien ne permettait de douter de la solidité financière de la société Soderev Tour, laquelle exécutera ses obligations contractuelles sans difficulté pendant presque quatre années. Il ne peut être reproché à la société Izimmo d'avoir conseillé le placement en cause.

Pour l'obligation d'information : il est souligné que l'investissement des époux C. comporte un volet locatif qui permet de bénéficier des avantages fiscaux ; or, tout investissement comporte une part d'aléa, particulièrement lorsqu'il est réalisé dans le secteur immobilier locatif et la possibilité d'une défaillance du « preneur » du bail commercial dans le paiement des loyers est, quelle qu'en soit la cause, connue de tout investisseur. Les époux C. qui font partie d'une catégorie socio-professionnelle les mettant en mesure de comprendre le mécanisme basique de cet investissement comportant nécessairement une part de risque, pouvaient s'en convaincre par eux-mêmes. Au surplus, ce risque était envisagé dans le contrat de gestion dont le projet avait été soumis aux époux C. pour la signature du contrat de réservation. Aussi, la société Izimmo n'avait pas d'obligation d'information consistant, si l'on suit le raisonnement des époux C., à faire part de l'hypothèse d'une déconfiture du preneur interrompant partiellement ou totalement le paiement du loyer.

Superfétatoirement, il est remarqué que la défaillance modérée de la société Soderev Tour dans l'exécution de ses obligations n'a pas remis en cause la sécurité du placement : les époux C. ont bénéficié des avantages fiscaux attendus dans la réalisation de l'opération, le non-paiement de la TVA sur l'acquisition et les réductions annuelles d'impôts ; le bien immobilier est resté leur propriété.

Les époux C. ne rapportent pas la preuve d'une violation par Izimmo d'une obligation d'information et de conseil à leur égard.

Par ailleurs, les époux C. ne justifient pas que la société Lagrange Patrimoine Conseil était débitrice, envers eux, d'une obligation d'information et de conseil.

Les époux C. seront déboutés de leurs demandes principales et subsidiaires.

Il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes de garantie, sans objet.

PAR CES MOTIFS

Rejette des débats la partie de la pièce B1, photocopie d'une partie de la plaquette réalisée par Lagrange Patrimoine Conseil (partie sur le gestionnaire et les info pratiques), communiquée par les époux C.,

Confirme le jugement ayant rejeté l'exception de nullité de l'assignation délivrée par les époux Sylvie T. et Pascal C. à la société Izimmo et la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action des époux C. à l'égard de la société Izimmo,

Pour le surplus l'infirme,

Déboute les époux Sylvie T. et Pascal C. de toutes leurs demandes,

Dit n'y avoir lieu à indemnité pour frais irrépétibles,

Condamne les époux Sylvie T. et Pascal C. aux entiers dépens,

Accorde aux conseils des sociétés Izimmo et Lagrange Patrimoine Conseil le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.